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Nécessité de renforcer l'offre locative pour faire face à la précarité sociale des locataires.

  • Session : 2008-2009
  • Année : 2008
  • N° : 203 (2008-2009) 1

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  • Question écrite du 23/12/2008
    • de STOFFELS Edmund
    • à ANTOINE André, Ministre du Logement, des Transports et du Développement territorial

    L'article 23 de la Constitution nous oblige à mener une politique selon l'objectif que le logement est un droit pour tous. La réalité nous enseigne que cet objectif reste encore trop souvent un vœux pieux.

    Et pourtant, l'article 2, § 1er, du Code wallon du logement détermine que « La Région et les autres autorités publiques, chacune dans le cadre de leurs compétences, mettent en oeuvre le droit à un logement décent en tant que lieu de vie, d'émancipation et d'épanouissement des individus et des familles. ».

    Le Code vise à assurer la salubrité des logements ainsi que la mise à disposition des logements destinés en priorité aux ménages à revenus modestes et en état de précarité. Cet article est particulièrement important en ce qu'il acte un lien entre habitat et précarité sociale !

    Par ailleurs, cet article suit à la lettre la Charte sociale européenne qui en son
    article 31 lie le droit au logement à la protection contre la pauvreté et l'exclusion.
    Il précise que le coût du logement doit être accessible aux personnes n'ayant pas
    les ressources suffisantes.

    Le logement, est-il un marché comme les autres ?

    Si d'aucuns pourraient encore le laisser croire, ma position est sans équivoque : je pense que non. La Région a vocation à être un acteur important dans le renforcement de l'offre locative, surtout pour les personnes les plus précarisées.

    Soumis aux règles de l'offre et de la demande, la demande en logement salubre
    étant forte, l'habitat connaît depuis quelques années une augmentation jamais
    connue de sa valeur ajoutée, surtout en matière d'habitat urbain.
    Valeur refuge pour les investisseurs, prêts hypothécaires à taux relativement faibles, ces deux facteurs ont encore renforcé la hausse des coûts des
    logements et l'on considère qu'aujourd'hui il atteint en moyenne 30 % du revenu
    des ménages en Région Wallonne.

    D'après une étude de Philippe Defeyt (de Institut pour un développement durable. 2004) de 1996 à 2001, la hausse moyenne des loyers est de 10,6 %. Mais on note de fortes différences selon les revenus. Ainsi, les loyers ont augmenté de 20,3 % pour les locataires sociaux et de 8,5 % pour les locataires non sociaux. Pour ces derniers, les logements de catégories inférieures ont augmenté significativement plus que les loyers des autres catégories.

    L'étude citée montre que la hausse des loyers subie par les petits revenus ampute leur pouvoir d'achat de 4 % hors loyer : l'explication vient en partie du fait que leur revenu moyen n'augmente que de 9,9 % pendant la période sous revue. « Dans un marché locatif en tension, c'est la plus grande mobilité des ménages à (très) petits revenus et leur plus grande fragilité qui expliquent cette évolution ».

    Pour les ménages à faibles revenus, ce coût peut atteindre 50% et plus des revenus disponibles.

    Pour les ménages disposant de deux revenus, il n'est pas rare qu'un revenu soit
    totalement consacré à l'acquisition/location du logement familial et à son entretien.

    Le constat n'est pas nouveau mais la problématique demeure la même - depuis maintenant presque deux législatures.

    La hausse des loyers touche nettement plus les allocataires sociaux, donc ceux qui disposent d'un revenu modeste ou précaire, qu'elle ne touche les revenus aisés. Le pouvoir d'achat des petits revenus est bien plus amputé que celui des revenus aisés.

    Les constats de 2004 sont encore d'actualité aujourd'hui. Je dirais qu'ils le sont encore davantage en 2008 du fait de la crise énergétique que nous connaissons.

    J'ai bien l'impression que la mise en chantier de 2.000 logements par an ne suffira plus pour répondre au défi que nous impose l'article 23 de la Constitution, à savoir un logement décent pour tous. Il me semble qu'au moment de la Déclaration de politique régionale de 2009, il faudra formuler et mettre en œuvre un objectif bien plus ambitieux.

    Espérant que Monsieur le Ministre sera reconduit dans son mandat de Ministre du Logement, je lui demande de nous esquisser l'objectif qu'il proposera pour la législature prochaine.

    Pourrons-nous continuer à mettre en œuvre 2.000 logements par année entre 2009 et 2014 ou devrons nous être plus ambitieux ?

    D'une manière plus prospective, quel taux de création de logements devrions-nous atteindre en Wallonie sous la prochaine législature afin de rencontrer les besoins locatifs des populations les plus précarisées ?

    Enfin, une fois le PEI accompli, Monsieur le Ministre est-il de ceux qui pense nécessaire de relancer, aussitôt, un autre programme en matière de logements publics ?

    Décider, gouverner, c'est aussi se projeter dans l'avenir. C'est dès maintenant que nous devons déterminer les besoins à rencontrer pour la prochaine législature.
  • Réponse du 02/02/2009
    • de ANTOINE André

    « Pouvons nous continuer à mettre en œuvre 2.000 logements par année entre 2009 et 2014 ou devons nous être plus ambitieux?

    De manière plus prospective, quel taux de logements devrions-nous atteindre en Wallonie sous la prochaine législature afin de rencontrer les besoins locatifs des populations les plus précarisées ? ».

    La CPDT a mené en 2001 une étude sur les besoins futurs en matière de logement.

    On peut y lire notamment que " En termes d'accès financier au logement, ( ... ) d'ici 2013, le marché de logements doit augmenter sa part de logements locatifs publics (de 8 % à 13 % ou 15 %) et sa part de logements locatifs aidés (de 0,1 % à 9 ou 10 %) tant par une politique de construction active de logements publics et de « socialisation » d'une partie du parc privé que par une politique fiscale favorisant l'investissement immobilier destiné à la location et par une politique juridique permettant la fluidification du marché de logements. La prospective démographique démontre qu'à l'échelle régionale le nombre de ménages augmentera de 115.000 unités et que l'évolution majeure est au profit des ménages de petite taille " en 2013, 20 % de la population se composera d'isolés ou de ménages monoparentaux. En termes de taille de logements, cela signifie que le nombre de petits logements (moins de 45m2) doit être augmenté, puisque aujourd'hui il ne constitue que 8 % du parc, et que ces petits logements doivent essentiellement être créés dans le secteur locatif à lovers modérés. En termes de nombre total de logements, cela signifie que d'ici 2013 un déficit de 40.000 à 60.000 logements s'annonce ( .. .), déficit qui peut partiellement être résorbé par la remise sur le marché et la rénovation de logements inoccupés. ".

    Je rappelle que la circulaire que le Gouvernement a adoptée sur ma proposition pour l'élaboration des programmes communaux du logement de 2007 à 2012 insiste sur la création de petits logements. Je rappelle aussi que la moitié du parc locatif social est sous occupé.

    Le programme régional 2004-2006 a consisté en la création de 900 logements par an. Les programmes 2007-2008 et 2009-2010 visent la création de 2.000 logements par an.

    La croissance des investissements en vue de créer de nouveaux logements locatifs est donc considérable. II revient aux opérateurs de mettre en œuvre ces programmes, avec détermination.

    Que doit-il en être pour l'avenir ? Faut-il créer d'avantage de logements ?

    La réponse est un choix politique. Comme Ministre du Logement, je souhaite le programme le plus ambitieux possible et le plus efficace pour répondre aux besoins de nos concitoyens.

    L'enjeu est aussi budgétaire, bien entendu.

    Le Gouvernement a respecté les engagements qu'il a pris, en mettant en œuvre au cours des années 2004 à 2008, à travers les programmes qu'il a adoptés, plus de 11.000 logements. Le Gouvernement a également mis en œuvre le PEI. Pour la première fois, des crédits ont été dégagés depuis 2004 pour mobiliser le patrimoine inoccupé et le faire prendre en gestion après y avoir effectué des travaux.

    Le Gouvernement a également apporté une série d'aides aux sociétés de logement, que j'ai déjà détaillées. Par ailleurs, les aides aux particuliers ont été maintenues et amplifiées, et le budget 2009 amplifie l'accès à la propriété.

    L'opposition tente de diminuer cet effort, mais les faits sont là.

    Le financement des programmes au-delà de 2010 devra faire l'objet d'une négociation entre les partenaires de la future coalition régionale et d'un accord de Gouvernement. Il faudra trouver les budgets.

    Mais ne perdons pas de vue que la création de logements publics de qualité constitue l'un des éléments de relance de notre économie, au travers de l'activité du secteur de la construction. Par les temps qui courent, c'est un levier important.

    L'augmentation de l'offre de logements publics doit aussi se diversifier, notamment au travers de la création de différents types de logements (à louer et aussi à acheter, sociaux et aussi moyens, de transit ou d'insertion), au travers de la mise à disposition de terrains à bâtir, de la mobilisation des immeubles inoccupés et au travers d'opérations de partenariat public-privé qui accroissent le nombre de logements disponibles à des coûts abordables.

    Pour soutenir un rythme intensif de création (et de rénovation) de logements, il conviendra aussi de soutenir les opérateurs du logement, au premier rang desquels les sociétés de logements de service public qui intensifient leur professionnalisation et leur efficience technique et managériale.

    « Une fois la PEI accompli, êtes vous de ceux qui pensez nécessaire de relancer aussitôt, un autre programme en matière de logements publics? »

    Il m'apparaît en effet important de poursuivre et de relancer des programmes d'entretien et de rénovation des logements.

    Plus de 70.000 logements du parc locatif social en Région wallonne ne font pas l'objet d'une rénovation dans le cadre du PEI.

    La moitié de ces logements, datant des années '50 et '60, se situe à un niveau de performances énergétique insuffisant, notamment avec un niveau d'étanchéité thermique K globalement estimé entre 150 et 200. La facture énergétique est considérable, tout comme le sont les quantités émises de C02.

    Il faut envisager un programme de travaux et d'investissements de rénovation axés sur l'isolation des parois visant à éradiquer les déperditions (au minimum, réduire le coefficient K de moitié) et sur l'équipement des logements publics en systèmes performants de consommation et de production d'énergie et d'eau chaude sanitaire.

    Au regard des opérations entreprises dans ce sens dans le cadre du PEI, ce type d'investissements génère, pour des coûts maîtrisables, une amélioration substantielle de la performance énergétique des logements.

    La mise en œuvre d'un programme de «Performance énergétique des logements publics» est indispensable. D'autres problématiques doivent également faire l'objet d'investissements particuliers. II s'agit notamment de la rénovation et de la mise en conformité des ascenseurs, selon les directives et les normes européennes ainsi que selon et de la problématique de prévention et d'enlèvement de l'amiante.

    Dans certains cas, des programmes d'isolation acoustique devront être entrepris.

    Pour cibler les travaux, estimer les budgets et déterminer les financements nécessaires à ce type de travaux, le secteur du logement public doit impérativement se doter d'une « gestion immobilière par le cadastre du logement ».

    La réalisation du cadastre du logement est inscrite au contrat de gestion établi entre la Région et la Société wallonne du logement.

    Cet outil devra devenir le point de référence pour l'établissement des programmes de travaux efficacement ciblés et calibrés pour atteindre les objectifs de performance des logements que le Gouvernement fixera lors de la prochaine mandature.