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Prix du lait en chute libre.

  • Session : 2008-2009
  • Année : 2009
  • N° : 147 (2008-2009) 1

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  • Question écrite du 07/01/2009
    • de STOFFELS Edmund
    • à LUTGEN Benoit, Ministre de l'Agriculture, de la Ruralité, de l'Environnement et du Tourisme

    Dans le presse allemande, je lis qu’après une brève action de stabilisation du prix du lait, essentiellement portée par le commerce de détail, le prix du lait est en chute libre.

    Tandis qu’au sud de l’Allemagne, on paye toujours 30 centimes par litre (fin décembre 2008), la Bremer Nordmilch ne paye plus que 26 centimes. En Sachsen-Anhalt, on m’informe que les prix ont baissé jusque 24 centimes par litre.

    Il me semble qu’à des conditions pareilles, l’agriculteur ne saura plus produire de façon rentable. Les plus vulnérables parmi eux disparaîtront – à moins que l’autorité publique intervienne pour stabiliser les prix (p.ex. en achetant certaines quantités de produits laitiers).

    Evidemment, les producteurs eux-mêmes ne parlent pas le même langage : les producteurs plus industrialisés défendent la thèse du libre marché et les exploitations familiales optent plutôt pour une régulation de l’offre.

    Certes, il est difficile de savoir ce qui se passe demain chez nous. Mais il m’importe quand même de connaître les analyses de Monsieur le Ministre en ce qui concerne l’avenir du secteur laitier en Wallonie, notamment en ce qui concerne le prix que le producteur recevra demain. Et de connaître le ou les scénarios à mettre en œuvre par la Région wallonne pour stabiliser le prix à un minimum en dessous duquel toute production perd sa rentabilité. Où se situe chez nous le seuil de rentabilité en dessous duquel l’intervention publique s’impose ?



  • Réponse du 05/02/2009
    • de LUTGEN Benoît

    Les deux principaux composants du lait sont la matière grasse et la matière azotée ou protéique.

    Le Règlement (CE) n° 1788/2003 du Conseil du 29 septembre 2003, article 5, définitions, précise qu’on entend par « lait », le produit provenant de la traite d’une ou de plusieurs vaches, par « autres produits laitiers » tout produit laitier autre que le lait, notamment le lait écrémé, la crème de lait, le beurre, le yaourt et les fromages, le lait demi-écrémé fait également partie d’autres produits laitiers. En résumé, tout produit sortant d’une entreprise de transformation laitière est un « produit laitier ».

    Dès la mise en place de l’Organisation commune de marché du Lait (OCM Lait), un prix d’intervention pour le beurre et la poudre de lait écrémé a été mis en place pour permettre d’activer le mécanisme d’intervention et de stockage, le beurre représentant la matière grasse et la poudre de lait écrémé la matière azotée. Pour être complet, ajoutons que le prélèvement à l’importation et la restitution à l’exportation venaient compléter cet OCM lait.

    Enfin, un prix indicatif du lait était calculé sur base des prix d’intervention du beurre et de la poudre de lait écrémé.

    Dans un tel contexte, l’établissement d’un prélèvement dans le secteur du lait et des produits laitiers avait toute sa raison d’être et a prouvé pleinement son efficacité.

    Au cours des différents rounds de l’OMC, les défenseurs du libéralisme économique à outrance ont progressivement obtenu le démantèlement des mesures en application dans l’OCM lait, aidés en cela par certains Etats membres européens, défenseurs de ce libéralisme économique. Il faut souligner que les délégations belges n’ont à aucun moment soutenu cette évolution.

    Aujourd’hui, les prix d’intervention du beurre et de la poudre de lait écrémé sont fixés à un niveau tel que le système d’intervention en est devenu quasi inopérant. Le prix indicatif du lait n’existe plus et le mécanisme du prélèvement et restitution est plus qu’amoindri. Dans ces conditions, le système du prélèvement ou quota a perdu lui aussi une partie de son effet régulateur. Notons aussi que la Belgique, carrefour de l’Europe, n’est pas en mesure, avec un quota qui ne représente que 2,5 % du quota européen, d’influencer significativement l’offre du lait à l’industrie laitière européenne. Le prix de base du lait cru, aujourd’hui comme hier, est bien moins basé sur le produit laitier qu’est le lait de consommation que sur les produits laitiers tels que le beurre, la poudre de lait écrémé et entier, le gouda et le cheddar qui sont cotés sur les marchés européens et internationaux.

    Pour freiner la volatilité des prix, il serait utile et urgent de ne plus considérer :

    - que le marché totalement libéralisé est un dogme, une vérité sans faille ;
    - qu’un marché encadré par des règles qui concernent tant l’accès au marché européen que les exportations vers pays tiers soit à nouveau d’application ;
    - qu’un véritable système de régulation de l’offre par l’achat à l’intervention soit réactivé.

    Dans ce cadre, il conviendrait également de faire preuve d’une grande prudence concernant l’augmentation des quotas. Le prix de base qui sera proposé demain, si la seule loi du marché persiste, sera toujours calculé sur base du marché du beurre et de la poudre de lait écrémé. Je rappelle qu’une intervention publique européenne est incluse dans les droits au paiement unique des agriculteurs, à raison de 36,56 euros par 1.000 litres de quota, référence année 2006.

    La rentabilité d’une production dépend d’un grand nombre d’éléments divers. En production laitière, une très grande variation de rentabilité entre les exploitations est constatée. Par exemple, l’Etude du secteur laitier wallon relève que les coûts de production, en termes de charges directes, exprimés par hectare de cultures fourragères, varient entre 260 euros et 4.136 euros, et une moyenne de 1.002 euros par hectare.

    Une intervention politique est-elle possible si le seuil de rentabilité n’était plus atteint ? La seule intervention publique envisageable dépend du niveau européen, les Régions et Etats étant interdits de toute intervention. A l’échelle européenne, la Commissaire Fischer-Boël a annoncé récemment avoir décidé de réactiver le système d’intervention pour le beurre et la poudre de lait écrémé. Les prix d’intervention sont de 221,75 euros par 100 kg de beurre et de 169,80 euros par 100 kg de poudre de lait écrémé. Ces montants pourront peut-être freiner ou stopper la chute du prix du lait payé aux producteurs, mais leur niveau de prix ne permettra vraisemblablement pas, avec cette seule mesure, un net redressement du prix du lait et donc peut-être du revenu des producteurs.