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Avenir des scieries résineuses en Région wallonne.

  • Session : 2008-2009
  • Année : 2009
  • N° : 234 (2008-2009) 1

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  • Question écrite du 07/04/2009
    • de STOFFELS Edmund
    • à LUTGEN Benoit, Ministre de l'Agriculture, de la Ruralité, de l'Environnement et du Tourisme

    Cette interpellation a une double origine. D'une part, elle est le fruit de nombreuses lectures sur le sujet et d'autre part, elle résulte d'observations effectuées sur le terrain. En effet, venant d'une région boisée, la valorisation de cette matière première me tient beaucoup à cœur. Je constate d'ailleurs que le développement de la filière bois a tenu une place important dans l'action menée au cours de cette législature.

    A cet égard, Messieurs les Ministres, il y a plusieurs mois, annonçaient la création de l'Office wallon économique du bois. Cet organisme, émanant de l'Agence de Stimulation Economique, devait jouer un rôle important pour les PME et TPE actives dans le secteur.

    Monsieur le Ministre peut-il nous indiquer où en est la mise en oeuvre de cet organisme ? Quand sera-t-il opérationnel ?

    Récemment, la lecture d'un article dans « les infos de Valbois » m'a vraiment marquée. Il s'agissait en fait d'un échange avec M. François Ruchenne, Secrétaire général de la Fédération nationale des scieries.

    En Région wallonne, nous dénombrons environ 80 scieries résineuses en activité. Parmi elles, nous en avons un petit nombre à caractère industriel qui gèrent environ 75 % de la production, destinée par ailleurs à l'exportation.

    Pour la grande majorité d'entre elles, il s'agit de scieries dont la taille est moins importante et qui desservent un marché plutôt régional, voire même local. D'après les chiffres fournis dans cet article, la production serait passée de 305.000 m³ en 1981 à 1.350.000 m³ en 2006 et 2007. Cette croissance paraît énorme. Monsieur le Ministre la confirme-t-il ?

    Selon M. Ruchenne, l'avenir ne serait pas rose. En cause, et il s'agit d'un discours assez récurrent de la part des scieurs, les politiques menées au niveau du Département de la Nature et des Forêts qui gère les forêts régionales et communales, soit environ 50 % de la forêt wallonne.

    En effet, les scieurs critiquent, depuis une dizaine d'années, le DNF. Celui-ci aurait procédé à une politique de reboisement favorisant la technique dite « à large écartement » - ce qui a - et je peux en témoigner pour avoir vécu la discussion dans ma commune - un impact plutôt négatif sur la qualité du bois futur, laissant les branches basses se développer. Cela implique que les troncs sont de moins bonne qualité et donc, se vendent à un prix moindre.

    Lors de l'adoption du Code forestier, en juillet dernier, nous avons garanti un équilibre en les résineux et les feuillus. Il convient maintenant de garantir une production de qualité qui permet au secteur d'avoir une matière première de qualité.

    Le principal reproche émit par les scieurs, c'est l'accent mis sur la préservation de la biodiversité et sur Natura 2000. Selon eux, il y a un déséquilibre flagrant entre les différentes fonctions de la forêt. D'après eux, l'administration wallonne favorise la fonction écologique de la forêt au détriment de la fonction économique.

    Quel est l’avis de Monsieur le Ministre sur ce déséquilibre présumé de la forêt public wallonne ?

    En relisant les travaux parlementaires relatifs au Code forestier, force est de constater que de nombreux Députés avaient plaidé à l'époque pour un équilibre entre les fonctions économique, environnementale et sociale de la forêt. Ce qui, somme toute, n'est autre qu'un principe de gestion durable de la forêt.

    Une question qui vient à l'esprit à la suite de ces prises de position, c'est : va-t-il falloir importer du bois pour faire vivre nos scieries ?

    Le cas échéant, ce serait une hérésie environnementale et économique. En effet, d'une part, cela rendrait nos scieurs dépendant à des fournisseurs étrangers. D'une part, la facture environnementale serait élevée.

    Monsieur le Ministre, dans un premier temps, je voudrais avoir une « photo » précise de la filière bois en Région wallonne. En effet, les scieries ne sont pas les seules à être intéressées par cette matière première et ses dérivés. D'autres industries le sont également : le papier, les emballages, la cogénération, la construction, ...

    Quelle est la quantité en m³ produite par année dans les forêts wallonnes et dans quelle proportion suffit-elle pour couvrir la demande ?

    Dans quelle mesure est-ce que la concurrence des différents modes d'utilisation du bois résineux contribue à faire grimper les prix au bénéfice, faut-il le dire, des producteurs forestiers (dont les caisses communales) ? Disposons-nous de l'évolution du prix du m³ de bois sur pied sur les dix dernières années ? Disposons-nous également de projections pour les années à venir ?

    Etant donné que depuis deux décennies, les scieries ont augmenté leur capacité de production, ne courons-nous pas le risque d'avoir en Région wallonne des surcapacités par rapport aux m³ que la forêt pourra produire chaque année ? Ne risquons-nous pas d'avoir aidé à se développer, avec des encouragements publics, des entreprises qui risqueront de devoir tourner prochainement au ralenti ?

    Une autre inquiétude émise par la fédération des scieries, c'est l'augmentation, en Allemagne, des capacité de production. En effet, d'après leurs informations, les scieries allemandes auraient augmenté leur production de 8 millions de m³ en un an. Cela paraît énorme.

    On sent vraiment une grande inquiétude de la part du secteur. Monsieur le Ministre peut-il nous livrer son analyse de cette problématique ?

    Quelles sont, selon lui, les perspectives d'avenir du secteur des scieries en Région wallonne ?

    Au-delà du secteur des scieries, on sait que c'est l'ensemble d'une filière intégrée qu'il faut pour la Région wallonne.

    Ne risque-t-on pas, s'il y a une crise au niveau des scieurs de mettre en péril l'ensemble de la filière ? Et notamment la deuxième transformation du résineux (par exemple pour le secteur de la construction), créant la valeur ajoutée souhaitée et générant de nouveaux emplois ?

    Quelle est sa position par rapport aux scieries allemandes et à leur concurrence par rapport au secteur wallon ?
  • Réponse du 20/04/2009
    • de LUTGEN Benoît

    En ce qui concerne la gestion forestière, les scieries critiquent, depuis une dizaine d'années, le Département de la Nature et des Forêts (DNF), notamment à propos des "larges écartements" des plantations.

    Cela fait au moins dix ans que les scieurs remettent en cause ce qui est scientifiquement démontré.

    En effet, en 2002, l'ouvrage "Sylviculture et qualité du bois de l'épicéa en Région wallonne", coédité par la FUSAGx, l'UCL et le Centre de Recherche de la Nature et du Bois, a synthétisé toutes les recherches effectuées sur le sujet.

    De cet ouvrage scientifique, plusieurs lignes de conduites sylvicoles ont été proposées pour garantir la production de bois de qualité :

    - choix d’une provenance génétique adéquate ;
    - densité de plantation de 2000 à 2500 plants par hectare ;
    - élagage des branches lorsque leur diamètre est inférieur à 2 cm pour maintenir les nœuds dans un cylindre de 12 à 15 cm de diamètre ;
    - éclaircies effectuées de manière à obtenir une largeur de cerne de 4 millimètres en moyenne.

    La Fédération des scieurs et plusieurs de leurs représentants ont participé à l'édition de l'ouvrage et ont validé son contenu, en collaboration avec le DNF.

    Comme l'honorable Membre le constate, les écartements de plantation en résineux sont loin d’être aussi extravagants que l'honorable Membre l’annonce. On parle d’écartements entre les plants de 2m x 2m voire 2m x 2,5m.

    J’ai d’ailleurs donné instruction, le 31 octobre 2006, à l’administration de revoir les schémas de sylviculture de l’épicéa.

    Je tiens également à rappeler que, jusqu’ici, c’est par le biais des subventions qu’était imposé le respect des écartements de plantation.

    Je ne dois plus rappeler à l'honorable Membre que, avec le nouveau Code forestier, les subventions aux communes ne seront plus octroyées en contrepartie de l’abandon du paiement des frais de régie et de gardiennat.

    Les propriétaires auront donc l’opportunité de réaliser leurs plantations à leur guise, dans le respect du plan d’aménagement. Mais le DNF conseillera toujours de réaliser les plantations selon les recommandations des scientifiques.

    Dans l’analyse des scientifiques, d’autres considérations sont également prises en compte. En effet, le traitement de la forêt doit avant tout garantir l'existence d'une forêt saine, équilibrée, résistante au changement climatique et, surtout, qui pourra aussi résister aux tempêtes !

    Une sylviculture dynamique basée sur des écartements adéquats et des éclaircies fortes et précoces est également une réponse pour minimiser les risques de chablis.

    Pour Natura 2000 et la préservation des habitats, il ne s'agit pas d'une initiative du DNF, mais bien de Directives européennes auxquelles les Etats membres et les Régions doivent souscrire.

    Je ne peux pas accepter les propos de l'honorable Membre à propos d’une politique favorisant plus l’écologie que l’économie.

    Le Code forestier prouve tout le contraire. Tout d’abord, suite à une longue concertation entre toutes les parties, la répartition entre les surfaces résineuses et feuillues sera maintenue.

    Et la récente décision du Gouvernement activant l’article 85 montre à souhait que le nouveau Code forestier peut apporter une réponse rapide au secteur économique en crise : on reporte gratuitement les délais d’exploitation d’un an.

    La forêt wallonne, privée et publique, a délivré annuellement entre 1998 et 2002, 3,2 millions de m³ et, entre 2003-2007, 3,9 millions de m³ de bois rond. Cette quantité correspond à 94 % de l'accroissement des bois résineux et feuillus. La récolte de bois n'entame donc pas le capital forestier.