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Assèchement illégal des terres polluées.

  • Session : 2009-2010
  • Année : 2009
  • N° : 19 (2009-2010) 1

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  • Question écrite du 02/10/2009
    • de BERTOUILLE Chantal
    • à HENRY Philippe, Ministre de l'Environnement, de l'Aménagement du Territoire et de la Mobilité

    Au mois d'août dernier, le « Courrier de l'Escaut» a été étonné de découvrir sur un terrain communal d'importantes quantités de terres polluées qui ruisselaient. Si, au départ, on suspectait un entrepreneur peu scrupuleux d'avoir agi de la sorte, il s'est avéré tout simplement que ces terres avaient été stockées là en urgence dans le cadre d'une opération de curage de fossés communaux.

    Si on peut comprendre qu'en urgence toutes les normes environnementales ne peuvent pas toujours être respectées, je m'étonne cependant du contenu de l'article disant qu'il s'agit là d'une pratique courante.

    Ainsi, en vue de diminuer le poids et donc le coût de traitement de ces boues, celles-ci sont asséchées sur des terrains non prévus à cet effet. Les eaux de ruissellement s'échappent et polluent allègrement les sols à proximité, les nappes phréatiques ou encore les cours d'eau. Les terres déchargées de leur eau sont ensuite seulement évacuées et traitées « à moindre coût ».

    Monsieur le Ministre est-il au courant de telles pratiques? Celles-ci sont-elles fréquentes, tant de la part des autorités publiques que des entrepreneurs privés?

    Monsieur le Ministre entreprendra-t-il prochainement une campagne en vue de sensibiliser les autorités communales sur leurs obligations de respecter les normes en matière d'environnement édictées par la Région wallonne et ce, même si celles-ci peuvent parfois apparaître comme complexes?

    La Région wallonne entreprendra-t-elle de sanctionner la Ville de Tournai pour ses infractions en matière environnementale?
  • Réponse du 03/05/0210
    • de HENRY Philippe

    Il semblerait que, suite à des opérations de curage, la commune de Tournai ait déposé temporairement sur un terrain lui appartenant une importante quantité de boues provenant de fossés communaux. Ce stockage aurait eu pour seul objectif de faire sécher les différentes terres extraites de ces derniers afin d'en assurer le traitement à moindre coût.

    Le régime juridique de ce type de déchets est essentiellement appréhendé par deux textes légaux. D'une part, le décret de la Région wallonne du 27 juin 1996 relatif aux déchets édicte une obligation générale de traitement des déchets dans le but notamment de protéger l'environnement. D'autre part, l'arrêté du Gouvernement wallon du 30 novembre 1995 relatif à la gestion des matières enlevées du lit et des berges des cours et plans d'eau du fait de travaux de dragage ou de curage énonce la manière dont certains types de déchets doivent être gérés ou traités. Les modes de gestion prévus dans cet arrêté seront, selon le type de déchets, obligatoires ou facultatifs.

    En vertu de l'article 5, 3·de l'arrêté du Gouvernement wallon du 30 novembre 1995 [1] « Sont assimilés aux matières enlevées du lit et des berges des cours et plans d'eau du fait de travaux de dragage ou de curage, et peuvent être gérés comme tels, mais non exclusivement », les « déchets résultant du nettoyage des égouts et des fossés le long des voies de communication ».

    Cet article précise encore que « Dans le cas d'une telle gestion, les critères de classification définis à l'article 4, § 1er, du présent arrêté s'appliquent à ces déchets assimilés ».

    Les matières provenant des fossés communaux peuvent donc être gérées par les mêmes mécanismes de gestion que ceux utilisés pour les matières enlevées du lit et des berges des cours et plans d'eau du fait de travaux de dragage et de curage, ce en vertu des critères de classification tels que définis à l'article 4, §1 de cet arrêté.

    En vertu de l'article 4, §1er, « Hormis les déchets exogènes, les matières enlevées du lit et des berges des cours et plans d'eau ou de leurs ouvrages annexes du fait de travaux de dragage ou de curage sont réparties en deux catégories, dénommées catégorie A (non contaminées) et catégorie 8 (contaminées), selon les critères repris à l'annexe 1 ».

    Les matières appartenant à la catégorie A sont :
    - soit utilisées conformément à la procédure d'enregistrement telle que prévue à l'article 3 du décret du 27 juin 1996 relatif aux déchets, pour les établissements ou entreprises assurant eux-mêmes l'élimination de leurs propres déchets, autres que dangereux, sur les lieux de production ou pour les établissements ou entreprises qui valorisent des déchets autres que dangereux;
    - soit orientées vers une installation de regroupement, en vue de leur utilisation, valorisation ou élimination ultérieure;
    - soit éliminées en centre d'enfouissement technique (à l'exclusion des gadoues de fosses septiques) [2].

    Les matières appartenant à la catégorie B sont :
    - soit orientées vers une installation de pré-traitement afin d'y être traitées en vue de répondre aux critères leur permettant d'être classées en catégorie A;
    - soit orientées vers une installation de regroupement en vue de leur valorisation ou élimination ultérieure;
    - soit éliminées en centre d'enfouissement technique (à l'exclusion des gadoues de fosses septiques) [2]

    Par ailleurs, seules les boues de catégorie A enlevées d'un plan d'eau ou d'un cours d'eau non navigable peuvent être déposées le long des berges sur une bande de cinq mètres uniquement.

    Les boues des fossés communaux peuvent donc être gérées en utilisant les mécanismes réglementaires évoqués ci-dessus mais d'autres modes de gestion peuvent être mis en place. En effet, l'arrêté du Gouvernement wallon (AGW) du 30 novembre 1995 établit les contours dans lesquels les communes doivent agir afin de respecter au mieux l'environnement, sans pour autant imposer aux communes un mode de gestion en particulier. Cet aspect relevant en effet de l'autonomie communale.

    Si la valorisation des boues est envisagée, les opérations sont réalisées en conformité avec les dispositions de l'AGW du 14 juin 2001 favorisant la valorisation de certains déchets et notamment en matière de comptabilité. L'entreprise chargée des travaux est titulaire d'un enregistrement en qualité de valorisateur conformément à l'article 2 de ce même arrêté.

    De plus, en tout état de cause, les travaux seront menés dans le respect des dispositions en matière d'urbanisme et d'aménagement du territoire - cfr CWaTUP-.

    Cette flexibilité se révèle en pratique être utilisée à bon escient par les communes. A titre d'exemple, nous citons l'initiative de la commune de Pont-à-Celles qui, pour une problématique similaire, a conclu une convention de traitements des produits de curages avec l'Intercommunale pour la Gestion et la Réalisation d'Etudes Techniques et Economique (« IGRETEC »), selon laquelle la commune bénéficierait, à moindre coût voire gratuitement, de certains services de traitement de déchets et ce en respectant scrupuleusement toutes les normes environnementales. Cette initiative n'est pas isolée.

    Dans le cas contraire, cette situation pourrait conduire à une intervention du département de la Police et des Contrôles et déboucher sur l'injonction d'introduire et de concrétiser un plan de remise en état du site.





    [1] Arrêté du Gouvernement wallon du 30 novembre 1995 relatif à la gestion des matières enlevées du lit et des berges des cours et plans d'eau du fait de travaux de dragage ou de curage, M.B. 13.1.1996.

    [2] Arrêté du Gouvernement wallon du 18 mars 2004 interdisant la mise en centre d'enfouissement technique de certains déchets.