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Poursuites à l'égard de mandataires locaux.

  • Session : 2009-2010
  • Année : 2009
  • N° : 18 (2009-2010) 1

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  • Question écrite du 12/10/2009
    • de EERDEKENS Claude
    • à FURLAN Paul, Ministre des Pouvoirs locaux et de la Ville

    Il peut arriver dans certaines communes que soit le bourgmestre, soit d'autres membres du Collège communal, soit le Président du CPAS fassent l'objet de poursuites judiciaires.

    La présomption d'innocence doit rester une règle fondamentale qui doit être respectée dans un état de droit. La bafouer ne pourrait qu'aboutir à des injustices s'il devait apparaître qu'une personne devait être incriminée à tort ou inculpée erronément et qu'elle soit blanchie ensuite de façon définitive par le pouvoir judiciaire.

    C'est dire que la prudence doit être de mise dans une matière aussi sensible dès lors que l'autorité de tutelle à l'égard des mandataires locaux ne dispose pas en principe, en vertu de la séparation des pouvoirs, d'un accès au dossier comme l'ont les parties au procès pénal, y compris les parties civiles.

    L'actualité du premier week-end d'octobre 2009 a révélé qu'après avoir été inculpé, la Chambre du Conseil de Dinant a décidé que le Bourgmestre de Dinant devait être renvoyé devant le Tribunal Correctionnel compétent territorialement, décision qui a été frappée d'appel devant la Chambre des Mises en Accusation avant tout procès potentiel devant le Tribunal Correctionnel compétent.

    Au-delà de cet épisode, le cas de Monsieur Fournaux pouvant aussi s'appliquer à d'autres mandataires de tous les partis par ailleurs, quelle est la position de la tutelle face à de telles situations?

    Quelle est la doctrine administrative en vigueur et quelle est la jurisprudence administrative actuellement en vigueur pour ce type de situation. Il s'agit en tout état de cause d'une matière sensible additionnant des principes fondamentaux en démocratie, mais qui peuvent s'avérer contradictoires à certains moments. La présomption d'innocence pourrait en effet se heurter à la nécessité d'éviter la répétition, par les mêmes personnes, de nouveaux actes délictueux ... tant qu'une décision pénale n'est pas définitive, c'est-à-dire coulée en force de chose jugée.
  • Réponse du 17/11/2009
    • de FURLAN Paul

    L'article L1123-6 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation prévoit que « le Gouvernement ou son délégué peut, pour inconduite notoire ou négligence grave, suspendre ou révoquer le bourgmestre, qui sera préalablement entendu », la suspension ne pouvant excéder trois mois. Enfin,. il précise que « le bourgmestre révoqué ne peut être réélu au cours de la même législature » et ce afin de préserver le caractère effectif de la sanction(1).

    Son article Ll123-13 prévoit également une procédure identique pour les échevins.

    Un arrêt du Conseil d'Etat du 17 juin 1997, définit la notion d'inconduite notoire: « l'inconduite est notoire lorsqu'elle est manifeste, publique, connue d'un grand nombre de personnes »(2). La notion d'inconduite notoire se rattache donc plutôt aux comportements que le bourgmestre ou l'échevin adopte dans la sphère de sa vie privée. Il est normalement tenu, à l'instar de tout fonctionnaire, « de se comporter de manière à ne pas nuire à la renommée de l'administration ».

    La notion de négligence grave, contrairement à la précédente, se rattache à l'exercice même des fonctions maïorales. Sont constitutifs de négligence graves, les abus avérés et caractérisés que le bourgmestre commet dans l'exercice des missions qui lui sont confiées.

    En matière de CPAS, c'est l'article 20 de la loi organique du 8 juillet 1976 qui précise la procédure à suivre. « Lés membres du conseil de l'action sociale peuvent, en cas de négligence grave ou d'inconduite notoire, être suspendus ou révoqués par le Gouvernement ou son délégué, sur la proposition du conseil de l'action sociale, du conseil communal, du gouverneur, du collège provincial ou même d'office. La suspension ne pourra excéder trois mois.

    Le membre intéressé est préalablement convoqué et, s'il le demande, entendu, assisté du conseil de son choix; l'avis du conseil de l'action sociale est demandé ».

    En matière de jurisprudence administrative, la Région wallonne n'est compétente en matière disciplinaire à l'encontre des mandataires locaux que depuis le 1er janvier 2007(3) ; cette compétence revenait auparavant au Service public fédéral intérieur.

    Toutefois, il n'existait pas de procédure écrite concernant les sanctions disciplinaires à l'égard des mandataires locaux. Tant la jurisprudence que la doctrine administratives « wallonnes » sont donc encore, à ce jour, limitées. A ce jour, seul un dossier a fait l'objet d'une sanction disciplinaire.

    Outre les dispositions légales précitées, l'action disciplinaire à l'égard d'un mandataire est actuellement guidée par les principes généraux de droit.

    Notons cependant que, sans tomber dans des pratiques d'appréciation arbitraires, l'analyse des dossiers doit être effectuée au cas par cas. En effet, c'est souvent l'accumulation de différents éléments qui aboutissent à une sanction disciplinaire.

    Par ailleurs, il me semble important de relever que si une procédure pénale peut être ouverte à l'encontre d'un mandataire local, il s'agit d'une procédure entièrement distincte de la procédure disciplinaire mise en place au sein de la Région wallonne. Ainsi, le législateur n'exige pas que les faits retenus à charge du mandataire local aient été réprimés pénalement, ni même qu'ils soient pénalement répréhensibles. Le cas échéant, c'est donc au Gouvernement wallon qu'il revient de qualifier un fait répréhensibles d'apprécier si les faits reprochés sont avérés et constitutifs d'une négligence grave ou encore une inconduite notoire.


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    (1) Décret du 8 décembre 2005 - article 14
    (2) C.E. arrêt n066. 742 du 11 juin 1997
    (3) cf, loi spéciale du 13 juillet 2001 portant transfert de diverses compétences aux Régions et aux Communautés