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Permis socio-économiques

  • Session : 2009-2010
  • Année : 2009
  • N° : 31 (2009-2010) 1

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  • Question écrite du 13/10/2009
    • de BORSUS Willy
    • à HENRY Philippe, Ministre de l'Environnement, de l'Aménagement du Territoire et de la Mobilité

    En réponse à une question orale sur l’avenir de la loi sur les implantations commerciales, Monsieur le Ministre répondait notamment les points suivants : « … certains critères portent sur la localisation spatiale de l’implantation commerciale et sont dès lors à rapprocher de la compétence de la Région wallonne en matière d’aménagement du territoire. … ».

    Monsieur le Ministre peut-il préciser ses propos ? En d’autres termes, quels sont ces « critères » ? Monsieur le Ministre est-il favorable à la régionalisation de cette matière ?

    Par ailleurs, comment Monsieur le Ministre analyse-t-il la fin annoncée par la Directive « services » du volet socio-économique des permis relatifs aux implantations commerciales ? Y est-il favorable (simplification administrative, responsabilité accrue des décisions d’aménagement du territoire, …) ou voit-il cette fin annoncée comme un risque de dérégulation nuisible au principe de gestion parcimonieuse du sol ?
  • Réponse du 29/12/2009
    • de HENRY Philippe
    En réponse à la question posée par l'honorable Membre, je lui confirme bien volontiers que je suis favorable à la régionalisation de la législation sur les implantations commerciales, dès lors qu'elle semble faire double emploi avec les procédures à suivre dans le domaine des permis d'urbanisme et des permis uniques.

    En ce qui concerne celle-ci relative à l'autorisation d'implantations commerciales (également appelée la loi Ikea), elle règle les conditions de fond et de procédure pour la délivrance de ce permis. le permis peut être octroyé en prenant en considération les quatre critères suivants :
    - la localisation spatiale de l'implantation commerciale ;
    - les intérêts des consommateurs ;
    - l'influence du projet sur l'emploi ;
    - les répercussions du projet sur le commerce existant.

    Le permis est délivré par le Collège communal sur avis non contraignant du Comité Socio-économique National pour la Distribution. Les membres de ce comité sont désignés par divers ministres (économie, classes moyennes, mobilité, travail), les régions, les organisations de consommateurs, les organisations de travailleurs et des associations des classes moyennes. Le demandeur doit démontrer qu'il existe, dans la région où il souhaite s'implanter, une demande économique suffisante et que les commerces déjà existants ne vont pas ou ne vont presque pas souffrir de la concurrence du nouvel arrivant. Tous les membres qui sont nommés dans ce comité n'assistent pas effectivement aux réunions. Les représentants des syndicats, par exemple, n'ont plus assisté à une réunion depuis des années. Les défenseurs des intérêts des PME et des classes moyennes assistent, par contre, fidèlement à toutes les réunions. Ainsi, le quatrième critère « les répercussions du projet sur le commerce existant » prend le dessus au détriment des autres critères, comme par exemple l'emploi. Un nouveau venu sur le marché doit donc demander à ses futurs concurrents si cela ne dérange pas trop qu'il s'installe dans leur région. Sans trop de surprise, la réponse est dès lors souvent négative, ce qui était d'ailleurs la raison de l'amendement de la loi en 2004 pour que l'avis du Comité Socio-économique Nationale pour la Distribution ne soit plus contraignant.

    Lors de l'autorisation d'une nouvelle implantation commerciale, une série de conditions socio-économiques sont imposées; le genre d'activité commerciale est décrit de manière très détaillée. les shoppingcenters se voient imposés des pourcentages pour les différentes sortes de commerces et d'horeca. Le permis est délivré pour une durée indéterminée, et les conditions socio-économiques restent éternellement attachées à l'implantation commerciale, ce qui peut évidemment constituer un handicap pour s'adapter à des conditions économiques qui évoluent.

    La Directive 2006/123/CE du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur (la directive Bolkestein ou la directive services) interdit que la délivrance d'une autorisation d'une implantation commerciale soit subordonnée à la preuve de l'existence d'un besoin économique ou d'une demande du marché ou la preuve que les intérêts des commerces existants ne sont pas mis en danger. L’intervention directe ou indirecte d'opérateurs concurrents dans la procédure d'octroi de l'autorisation par le biais d'organes consultatifs est également interdite (article 14 de la directive services).

    La loi Ikea est donc clairement contraire à cette disposition d'interdiction. La loi est donc amenée à être abrogée ou modifiée en profondeur. L'implication des représentants des classes moyennes dans la procédure d'octroi du permis via le Comité Socio-économique National pour la Distribution est interdite. Le quatrième critère pour l'autorisation, les répercussions du projet sur le commerce existant, ne pourra plus être pris en considération pour l'examen de la demande de permis.

    La directive services doit être transposée en droit belge au plus tard le 28 décembre 2009. La loi règle - jusqu'à nouvel ordre - une matière fédérale et devra donc être adaptée à ce niveau.

    En ce qui concerne l'aménagement du territoire, celui-ci se définir comme suit :
    1° « Etude et application d'un ensemble de mesures destinées à favoriser une répartition harmonieuse des populations, des activités et des équipements sur l'ensemble du territoire national en sauvegardant les ressources naturelles, afin de promouvoir le développement économique et social et d'améliorer la qualité de l'environnement et le cadre de vie ... » ;

    2° « Politique visant à une meilleure répartition des moyens en fonction des ressources en territoire et en hommes pour une valorisation de ces ressources ... »;

    3° «Art d'aménager des aires déterminées en vue de favoriser une distribution géographique des populations et des activités qui soit en harmonie avec les ressources de tous ordres ».

    En outre, l'article 1er du CWATUP assigne à l'aménagement du territoire les objectifs suivants :
    « rencontrer de manière durable les besoins sociaux, économiques, de mobilité, patrimoniaux et environnementaux de la collectivité par la gestion qualitative du cadre de vie, par l'utilisation parcimonieuse du sol et de ses ressources, par la performance énergétique de l'urbanisation et des bâtiments et par la conservation et le développement du patrimoine culturel, naturel et paysager. »

    Dans ces conditions, il est clair que la décision d'implantation d'une surface commerciale a une incidence non négligeable, tant sur les plans spatial et urbanistique que sur les plans économique et social, en termes de qualité de « l'environnement » et plus globalement en termes de « cadre de vie».

    Par ailleurs, la transposition en droit wallon de la « directive services » n'aura aucun impact quant à une répartition harmonieuse des populations et des activités économiques. Qui plus est, elle ne portera aucunement préjudice à la sauvegarde des ressources et du patrimoine naturels.

    En effet, en cas d'abrogation de la législation sur les implantations commerciales, l'implantation d'une surface commerciale continuera à être soumise soit à la procédure de permis d'urbanisme, soit à la procédure de permis unique, procédure qui, dans le respect du principe de « gestion parcimonieuse du sol », doit déjà, en cours d'instruction, confronter le projet aux aspects multilatéraux de l'aménagement du territoire et, à sa clôture, en tirer les conclusions positives ou négatives qui s'imposent.

    Or, examiner l'incidence de l'implantation d'une surface commerciale eu égard au « cadre de vie » des populations ne peut en aucun cas être assimilé à un « test économique » au sens de la « directive services », l'aspect socio-économique du projet n'étant pas instruit « au cas par cas » mais par référence à la politique du Gouvernement wallon incarnée par la Déclaration et le Schéma de développement de l'Espace régional.

    Enfin, j'attire l'attention de l'honorable Membre sur le fait que les aspects spatial et urbanistique de l'implantation d'une surface commerciale sont déjà strictement encadrés par les plans et règlements d'urbanisme en vigueur, tant au niveau régional qu'au niveau local.