/

Soutien aux énergies renouvelables de manière cohérente (3)

  • Session : 2009-2010
  • Année : 2009
  • N° : 58 (2009-2010) 1

2 élément(s) trouvé(s).

  • Question écrite du 29/10/2009
    • de EERDEKENS Claude
    • à NOLLET Jean-Marc, Ministre du Développement durable et de la Fonction publique

    La Déclaration de politique régionale 2009-2014 prévoit d'investir dans la R&D pour les différentes énergies renouvelables, dont la recherche de cellules photovoltaïques plus performantes, la géothermie profonde et de surface, les biocarburants de deuxième et troisième génération et le soutien aux filières émergentes, ainsi que pour le stockage de l'énergie renouvelable.

    Quel est pour l'instant l'impact de la géothermie au niveau de la production de l'énergie en Région wallonne ?

    Qu'entend-on par géothermie profonde par rapport à la géothermie de surface ?

    Dispose-t-on d'éléments de comparaison quant aux coûts entre la géothermie profonde et celle de surface ?

    Quel est l'état de la recherche vis-à-vis d'une perspective qui, sans le moindre doute, ouvre pour l'avenir de réelles perspectives même si la technique n'est pas pour l'heure maîtrisée ou totalement maîtrisable ?

    Une expérience pilote d'alimentation en énergie de bâtiments publics à la fois par la géothermie profonde et celle de surface est-elle envisagée ?
  • Réponse du 25/11/2009
    • de NOLLET Jean-Marc

    La géothermie très basse énergie ou géothermie à basse profondeur comprend deux techniques différentes en fonction de la profondeur de captation de la chaleur:

    1° la géothermie de surface est une géothermie exploitant la chaleur du sous-sol à une profondeur variant entre 80 cm et 1,50 m. La température du sous-sol est comprise entre 10 et 30° C et la chaleur provient du soleil et de la percolation de l'eau de pluie, le sol du terrain jouant un rôle d'inertie thermique, Cette technologie est appliquée à :

    - la climatisation passive avec par exemple le système du puits provençal ;
    - le chauffage et la climatisation avec la pompe à chaleur géothermique. la captation d'énergie est réalisée soit par un évaporateur enfoui horizontalement soit par un échangeur thermique à eau glycolée enfoui horizontalement dans le sol ;

    2° la géothermie verticale à basse profondeur exploite la chaleur du sous-sol à une profondeur variant entre 100 et 150 m. Le sol y est à une température constante d'environ 12°C. La chaleur du sous-sol est exploitée via des pompes à chaleur à sondes géothermiques verticales. Une eau glycolée y circule, absorbant dans le sous-sol environnant entre 20 et 70 watts par mètre de conduite selon le type de sous-sol. L'hétérogénéité du sol en Région wallonne complique la technique de forage et rend les échanges thermiques très variables. Notez qu'il n'y a pas d'autre échange que thermique avec le sous-sol. Suite à des forages, on place plusieurs conduites verticales raisonnablement espacées. Quatre forages à 100 m sont généralement nécessaires pour chauffer une maison unifamiliale. D'autres types de géothermie basse profondeur existent, qui exploitent les nappes phréatiques. Ces types sont plus invasifs concernant l'environnement.

    La géothermie profonde exploite le sous-sol à des profondeurs entre 1.500 et 5.000 m. Elle se décline également en plusieurs types : les réservoirs «naturels» que constituent les aquifères profonds, et les réservoirs « artificiels » qui peuvent être créés dans les roches chaudes sèches en profondeur.

    1. Les réservoirs naturels comportent une source d'énergie contenue dans des aquifères localisés généralement à plus de 1.500 mètres de profondeur et dont la température est supérieure à 60° C. Si la température est suffisamment élevée, il est possible de produire de l'électricité avec ou sans production conjointe de chaleur, grâce à un cycle de Rankine organique. Plus l'on fore profond dans la croûte terrestre, plus la température augmente. En moyenne, l'augmentation de température atteint 20 à 30 degrés par kilomètre.

    2. Les réservoirs artificiels: cette technique consiste à créer, par injection d'eau sous pression à grande profondeur, des connexions de haute qualité (faible résistance hydraulique) entre des puits et le réseau préexistant des fractures et fissures naturelles en augmentant fortement la perméabilité de ces dernières. Cette fracture des roches à grande profondeur induit des risques sismiques en surface. L'exploitation se fait ensuite par circulation forcée d'eau d'un puits à l'autre en ajustant les pressions dans les puits d'injection et d'extraction. Deux projets européens utilisent ce concept: les projets de landau en Allemagne et de Soultz en France.

    La production d'énergie géothermique en Région wallonne est actuellement limitée. Concernant la géothermie à grande profondeur, les deux puits actuellement en activité dans le bassin de Mons (à Saint-Ghislain et à Douvrain) produisent environ 20 GWh de chaleur par an. Pour la géothermie basse profondeur, les statistiques actuelles ne permettent pas de chiffrer la production avec précision. la puissance installée en Région wallonne s'élève à environ 2,8 kW par 1000 habitants en 2006.

    La question sur la comparaison des coûts entre les techniques géothermiques de surface et en profondeur mériterait une analyse plus approfondie. En première approximation, selon mon administration, je livre quelques ordres de grandeur:

    1° géothermie basse profondeur: le coût du forage vertical pour mettre en place la sonde géothermique présente une forte variabilité. Il est de l'ordre de 50 euros/m dans les terrains cristallins (granite, ... ) à 90 euros/m dans les terrains sédimentaires qui présentent plus de difficultés ;

    2° géothermie grande profondeur: les coûts de la géothermie profonde sont relativement très élevés par rapport à la géothermie de surface. Il faut compter 1.000.000 d'euros et plus par 1.000 m de profondeur. Un forage classique à 3.000 m de profondeur coûtera donc 3.000.000 euros. Mais ces coûts d'investissement doivent être mis en perspective avec les niveaux de production attendus et la valorisation de la chaleur géothermique.

    Au travers de la Déclaration de politique régionale, le Gouvernement s'est engagé à : « favoriser la production et la distribution de chaleur verte. Un décret sera adopté en vue de faciliter la mise en place et la gestion de réseaux de chaleur et de soutenir la cogénération. Une étude définira des zones prioritaires à équiper en réseaux de chaleur alimentés par des unités de cogénération ou des puits de géothermie. Les ressources géothermiques pourront ainsi être valorisées ». Comme l’honorable Membre peut le constater, la géothermie figure en bonne place pour contribuer à la production de chaleur verte en Wallonie.

    Le potentiel géothermique wallon est encore loin d'être exploité. Il a été estimé à 208 GWh si l'on met en exploitation l'ensemble du gisement géothermique de la région montoise. Mais le potentiel global de la géothermie à grande profondeur en Région wallonne reste encore mal connu, alors que notre sous-sol est susceptible de contenir deux types de réservoirs géothermiques (cf. ci-dessus).

    C'est pourquoi je compte mener une étude sur les cibles géothermiques potentielles sur l'ensemble du territoire wallon, A ce sujet, la DG04 - Direction de la Promotion de l'énergie durable a récemment rencontré la DG03 - Direction des risques industriels, géologiques et miniers - afin de jeter les bases de cette étude de potentiel du sous-sol wallon en matière de géothermie profonde. Le cas échéant, des campagnes de forages ciblées seront menées.

    En matière d'utilisation de la chaleur géothermique, je tiens à porter à votre connaissance que la Conférence permanente pour le développement territorial réalisera une expertise en 2010 sur la définition de zones prioritaires pour les réseaux de chaleur, dont certains pourront être alimentés par la chaleur géothermique.

    Dès que les résultats de ces différentes études et expertises seront disponibles, j'entamerai une démarche afin de lancer un plan d'action pour la valorisation de la géothermie en Région wallonne, en veillant à ce que le rapport coût/efficacité de la chaleur géothermique soit raisonnable notamment au regard d'autres formes de chaleur verte. L'opportunité d'expériences-pilotes d'alimentation en énergie de bâtiments publics, que l’honorable Membre évoque à la fin de sa question, sera dûment examinée dans le cadre de ce plan d'action.