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Répression des incivilités

  • Session : 2009-2010
  • Année : 2009
  • N° : 38 (2009-2010) 1

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  • Question écrite du 29/10/2009
    • de EERDEKENS Claude
    • à FURLAN Paul, Ministre des Pouvoirs locaux et de la Ville

    Contrairement à une idée largement répandue, ce n'est pas la grande criminalité qui est une source d'inquiétudes pour les citoyens au quotidien. C'est au contraire la petite criminalité, la multiplication des contraventions, c'est-à-dire les contraventions les plus mineures que l'on qualifie très souvent d'incivilités qui énervent le plus.

    Auparavant, les tribunaux de police étaient compétents pour sanctionner toutes les contraventions. Les constatations et procès verbaux des polices locales ou de la gendarmerie aboutissaient au parquet de police et le contrevenant identifié était donc invité à comparaître devant le tribunal de police et une amende lui était appliquée et elle était perçue par l'Etat.

    Tout cela fonctionnait bien et probablement trop bien.

    A la suite de l'affaire Dutroux, il a été imaginé à tort de décharger le pouvoir judiciaire de pans entiers de la répression pour permettre à nos policiers et à nos magistrats, assis ou debout, de se consacrer à l'essentiel, c'est-à-dire la criminalité la plus importante.

    Cette réforme fut bien entendu accompagnée de la mise en place des nouvelles polices, la fédérale et les locales, avec un coût que l'on sait être exorbitant pour les pouvoirs locaux, l'Union des Villes et Communes ayant été pendant tant d'années l'avocate efficace des pouvoirs locaux vis-à-vis du Ministère de la Justice et plus précisément du Ministère fédéral de l'Intérieur.

    Toute une série d'infractions ont donc été dépénalisées. Certaines ont ensuite été repénalisées, ajoutant du chaos au chaos.

    Il a été mis au point un système compliqué avec des agents constatateurs et des agents sanctionnateurs.

    En Province de Namur et malgré l'extrême bonne volonté de Mme l'agent sanctionnateur, les recettes tombant dans les caisses communales à la suite de la répression des incivilités sont tout à fait marginales.

    La Région wallonne, sous la précédente législature, et pour les infractions purement environnementales, a prévu des agents constatateurs.

    En réalité, la mise en place de ces systèmes entraîne des coûts considérables pour la Région wallonne, pour les provinces et pouvoirs locaux, sans efficacité réelle.

    Ne serait-il pas temps d'entreprendre une négociation avec le Gouvernement fédéral en vue de repénaliser toutes ces infractions et qu'elles puissent être constatées par les policiers qui n'ont jamais été aussi nombreux sur le terrain et qui dressent des pv qui font foi en justice ?

    Il suffirait pour le Ministère de la Justice de doter les parquets de police d'un certain nombre de magistrats et de greffiers supplémentaires pour que l'on puisse enfin, dans notre pays et en Wallonie, sanctionner les infractions mineures qualifiées à tort d'incivilités.

    Il faut être conscient sur le plan de la politique criminelle que la multiplication de petites infractions non sanctionnées créé un sentiment d'impunité chez les auteurs de ces infractions et que très vite, quand une infraction mineure n'est pas sanctionnée, l'auteur de celle-ci a très vite la tentation de passer aux infractions majeures et cela alimente la criminalité et en fin de course la grande criminalité.

    C'est un peu la théorie du carreau cassé. Selon cette théorie: s'il y a un bâtiment vide, on peut donc casser un carreau. S'il n'est pas remplacé, il y a le lendemain deux carreaux cassés. Une semaine après, le tiers des carreaux sont cassés et un mois après, il n'y a plus de carreau à casser.

    Quelles sont les propositions que Monsieur le Ministre compte faire au Gouvernement fédéral et aux pouvoirs locaux pour sortir de l'impasse législative et décrétale actuelle en matière de répression des contraventions ou infractions mineures ?
  • Réponse du 23/12/2009
    • de FURLAN Paul

    La loi du 07 décembre 1998, organisant un service de police intégré, structuré à deux niveaux, la police locale et la police fédérale, a mis en place la réforme des polices.
    Lors de cette réforme, on a précisément voulu éviter la multiplication de petites infractions non sanctionnées.
    Ainsi, la loi du 13 mai 1999 a inséré un article 119 bis dans la nouvelle loi communale.

    L'insertion de cet article avait pour objectif de permettre aux communes de sanctionner, non plus seulement pénalement, mais aussi administrativement, les manquements constatés à leurs règlements et ordonnances.

    Selon les travaux préparatoires, cette nouvelle compétence se justifiait par la constatation suivante :
    « dans la pratique [ ... ], si de telles infractions font l'objet de procès-verbaux, il est toutefois rare que ces derniers débouchent sur une condamnation de l'intéressé. Le ministère public comme le juge de police ont d'autres priorités, ce qui est d'ailleurs normal. Cette situation a comme conséquence perverse de priver de fait les communes de la possibilité de faire respecter leurs ordonnances de police.
    C'est pourquoi le projet de loi à l'examen permet aux communes de prévoir, outre des sanctions pénales, des sanctions administratives qui feront l'objet d'une procédure administrative particulière. Cette possibilité doit permettre aux administrations locales de réagir plus rapidement et plus énergiquement aux formes mineures de criminalité et aux problèmes de nuisance qui, comme l'a d'ailleurs relevé une enquête sur la sécurité, organisée en 1997 et 1998 par le ministère de l'Intérieur, créent un réel sentiment d'insécurité » (Doc. pari., Chambre, 1998-1999, n° 2031/4, pp. 2 et 3).

    Les sanctions administratives constituent donc une alternative efficace aux sanctions pénales des règlements de police, qui font rarement l'objet de poursuites par les parquets.

    Au niveau du pouvoir local, la commune a actuellement une arme complémentaire pour lutter contre la petite criminalité.

    En ce qui concerne le volet judiciaire, le fait de décider de (re)pénaliser certains comportements, ainsi que celui de modifier la composition des parquets de police relève de la compétence du Ministre fédéral de la Justice.

    Quant à l'évaluation de la réforme, le rapport d'évaluation des 10 ans de la réforme des polices a été rendu public. Il convient maintenant d'analyser en détail en concertation avec les acteurs concernés les causes et les effets des problèmes soulevés par celle-ci et d'y remédier au plus vite.
    Je comprends et partage le sentiment de l'honorable Membre sur les conséquences financières que fait peser la répression des incivilités sur les pouvoirs locaux.

    Convenons que l'objectif du législateur fédéral était louable à savoir dépénaliser des infractions peu graves et surtout non sanctionnées.

    Le revers de la médaille est effectivement que la charge budgétaire est, une fois encore passée du budget fédéral vers celui des communes. Ce transfert n'est nullement compensé par les amendes administratives perçues.

    Je ne manquerai pas, comme je l'ai fait au sujet de la réforme des services de police et de la sécurité civile, de relayer ses suggestions à mes Collègues du Gouvernement fédéral en charge de la justice et de l'Intérieur.