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Aide alimentaire sous la loupe

  • Session : 2009-2010
  • Année : 2009
  • N° : 82 (2009-2010) 1

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  • Question écrite du 17/11/2009
    • de STOFFELS Edmund
    • à LUTGEN Benoît, Ministre des Travaux publics, de l'Agriculture, de la Ruralité, de la Nature, de la Forêt et du Patrimoine

    La Cour des Comptes de l’Union européenne regrette le manque de coordination et de coopération dans l’application du programme européen d’aide alimentaire aux plus démunis. Elle revendique par ailleurs que l’aide alimentaire ne soit plus financée par la politique agricole commune mais plutôt dans le cadre de la politique sociale de l’Union européenne.

    Dans son rapport, la Cour constate :

    - l’objectif social de la mesure est prédominant ;
    - la coordination et la coopération avec d’autres acteurs clés des actions sociales dans les États membres ont été insuffisantes ;
    - cette mesure visait à réduire la pauvreté, non à l’éradiquer ;
    - les dispositions en vigueur limitent la gamme des produits à distribuer

    Si, au moment où les stocks alimentaires sont importants, le financement de l’aide alimentaire par la PAC se justifie encore, il n’en est plus de même depuis que les stocks alimentaires sont pratiquement réduits à zéro – l’objectif étant devenu essentiellement social (et d’ailleurs pris majoritairement en charge par des groupements à caractère caritatif) et moins un objectif d’intervention pour stabiliser des prix. Faut-il donc continuer à financer ces mesures à travers la PAC ? Ou ne vaudrait-il pas mieux que les membres de l’U.E. inscrivent cette aide dans les programmes de politique sociale ?

    Autant qu’on doit saluer l’existence de l’aide alimentaire, autant nous devons être clairs sur le fait qu’elle n’éradique pas la pauvreté mais permet – tout au plus – d’en atténuer un tout petit peu les conséquences fâcheuses. Remarque qui doit être soulignée en attirant l’attention sur le fait que l’aide alimentaire doit se limiter sur les produits éligibles pour le stockage d’intervention – ce qui est de nature à réduire la diversité de la gamme des produits offerts dans ce cadre.

    Le débat est posé ! Il me semble qu’il mérite d’être mis à l’ordre du jour lors de la prochaine présidence belge de l’U.E. La PAC étant à l’épreuve dans les jours que nous courons ; il me semble qu’elle doit se limiter à financer les politiques agricoles (dans le sens restreint du terme) et que les autres objectifs doivent être financés au départ d’autres politiques, notamment les politiques sociales (à cofinancer par l’U.E.). Monsieur le Ministre prendra-t-il l’initiative ?
  • Réponse du 03/12/2009
    • de LUTGEN Benoît

    Depuis sa création en 1987, le programme de distribution alimentaire aux personnes les plus démunies a permis à des millions d’Européens en difficulté de recevoir des produits alimentaires en provenance des stocks d’intervention de la PAC, et cela en parfaite collaboration avec des organisations caritatives et des services sociaux. Depuis le milieu des années 1990, ce régime a évolué et autorise des achats sur le marché dans certaines circonstances.

    En septembre 2008, la Commission européenne a proposé de généraliser les achats sur le marché compte tenu de la diminution des stocks d’intervention, de l’élargissement de l’Union et de la récente crise économique. Elle a également proposé d’élargir la gamme des produits concernés et d’allonger les plans de distribution à trois ans pour permettre une utilisation plus efficace des crédits. Enfin, la Commission proposait l’introduction d’un cofinancement national de 25% pour le premier plan de trois ans qui passerait à 50% pour les plans suivants. Cette proposition n’a pas encore été adoptée. En dehors du volet cofinancement qui correspond à une renationalisation de la PAC à laquelle je m’oppose, cette proposition va dans le bon sens. Elle permet effectivement de remplir les objectifs initiaux de ce programme tout en renforçant son efficacité.

    D’un côté, indépendamment de leur richesse, les Etats membres pourront continuer à bénéficier de budgets communautaires pour venir en aide aux plus démunis. En effet, les opposants à la présence de ce programme au sein de la PAC ne visent pas sa requalification dans une autre rubrique du budget communautaire. Leur objectif est la renationalisation de ce programme et la diminution équivalente du budget européen - de celui de la PAC en particulier. Les Etats membres soutenant la requalification de ce programme visent autant, sinon plus, des objectifs budgétaires que des objectifs sociaux. De plus, il en résulterait que les Etats membres les moins prospères et qui comptent le plus grand nombre de démunis se retrouveraient avec une charge supplémentaire.

    C’est un véritable déni de solidarité européenne auquel je m’oppose complètement.

    D’un autre côté, s’il est exact que l’évolution de la PAC a réduit les stocks d’intervention européenne, cela ne signifie pas que ceux-ci ont disparu, ni qu’il n’y en aura plus jamais. Suite à la crise du lait, les stocks publics, quasiment vides en 2008, sont passés en octobre 2009 à 83.000 tonnes de beurre et 283.000 tonnes de poudre de lait écrémé, auxquels il faut ajouter les aides au stockage privé portant sur 135.000 tonnes. Il y a donc là de sérieuses réserves pour la distribution de lait et produits laitiers aux plus démunis.

    J’ai défendu et continuerai à défendre tous les outils de gestion de marché qui permettent de mieux maîtriser l’offre et de stabiliser les prix aux producteurs et aux consommateurs. L’intervention est un de ces outils car elle permet de retirer des produits du marché et d’ainsi tirer les prix « sortie ferme » à la hausse. Le programme de distribution alimentaire aux personnes les plus démunies en est la contrepartie. Il permet aux Etats membres de valoriser leurs stocks d’intervention à des prix corrects et d’ainsi éviter une concurrence à la baisse des prix tout en apportant une aide alimentaire à ceux qui en ont besoin.

    Gardons en tête que, pour 2010, environ 8 millions d’euros, sur un budget total de 500 millions d’euros, sont attribués à la Belgique sans contrepartie nationale.

    En 2008, ce programme a permis la distribution de 1.853.520 litres de lait et de lait chocolaté. De la farine, des spaghettis (540.594 kg) des raviolis au poulet (851.503 boites de conserve), du riz, de la confiture, du sucre, des boîtes de paella, etc. ont été distribués par 451 organisations caritatives et 322 CPAS à près de 222.750 bénéficiaires.

    Cela montre bien que, déjà dans sa forme actuelle, le programme autorise, via le système de troc de stocks à l’intervention contre des produits transformés, la distribution d’une gamme variée de produits à un grand nombre de bénéficiaires.

    Je suis donc partisan du maintien de ce programme au sein de la PAC, de son évolution afin de le rendre plus flexible et ouvert à un plus grand nombre de produits. Je suis par contre opposé à toute velléité de renationalisation, même partielle, qui irait à l’encontre du principe de solidarité européenne et augmenterait la charge budgétaire régionale.