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Développement territorial dynamique et équilibré

  • Session : 2009-2010
  • Année : 2009
  • N° : 144 (2009-2010) 1

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  • Question écrite du 30/11/2009
    • de EERDEKENS Claude
    • à HENRY Philippe, Ministre de l'Environnement, de l'Aménagement du Territoire et de la Mobilité

    La Déclaration de politique régionale 2009-2014 prévoit de « renforcer la politique de gestion des risques naturels, technologiques et liés aux infrastructures ».

    Quelle fut jusqu'à présent la politique de gestion des risques naturels, technologiques et liés aux infrastructures? Peut-on obtenir des précisions à ce propos? Dès lors qu'il est prévu de renforcer cette politique, qu'entend-on par renforcement?

    Peut-on obtenir la garantie que les pouvoirs locaux, financièrement exsangues, en fonction, d'une part, de la crise économique et financière et, d'autre part, en fonction du transfert incessant de charger des autres niveaux de pouvoir vers des pouvoirs locaux, ne seront pas mis à contribution? S'ils devaient l'être, ils ne pourront participer à cette politique car il n'y a pas de politique sans moyens.

    D’autre part, les polices locales et fédérales, les zones de secours comme la protection civile dépendent essentiellement du Gouvernement fédéral. S'agit-il pour le Gouvernement wallon d'empiéter sur les compétences fédérales?

    Veut-on en la matière anticiper une nouvelle régionalisation en transférant les missions fédérales vers les Régions?
  • Réponse du 25/01/2010
    • de HENRY Philippe

    En Belgique, on croyait pouvoir régler le problème des dégâts causés par les catastrophes naturelles via le Fonds des Calamités. Malheureusement, l'utilisation de ce Fonds a très vite montré ses limites : critères d'intervention (minimum 1.250.000 euros, événement exceptionnel), lourdeur de la constitution des dossiers, délais de remboursement des dommages, coût pour la collectivité, ...

    Chez nous, ce fonds a été activité, le plus souvent, pour pallier les dégâts résultant des inondations (exemple en 1993), mais aussi pour des tempêtes (Léglise) et un glissement de terrain (Mont-de-l'Enclus). Depuis la mise en œuvre de la nouvelle loi (17 novembre 2005) sur les assurances terrestres en matière de calamités naturelles, il appert que ce fonds ne devrait plus être sollicité aussi régulièrement.

    Quand une catastrophe naturelle ou un accident industriel de type Seveso provoque des pertes en vies humaines ou en biens matériels, la population, relayée par les médias, interpelle les pouvoirs publics pour les sommer d'agir rapidement. Mais lorsque la mémoire de la catastrophe s'estompe, d'aucuns se lèvent pour contester les mesures préventives prises au niveau régional (exemple : délimitation de zones à risque, refus de permis d'urbanisme, etc.).

    Qu'il s'agisse de la problématique des inondations, du karst, d'éboulements de parois rocheuses, des glissements de terrain, des activités Seveso... C'est l'éternel manque d'adéquation entre l'intérêt personnel et le principe de précaution qui prévaut : Prévention, Education ... et Communication, tels sont les défis qui nous sont lancés !

    D'une manière générale, la maîtrise de l'urbanisation, permet de lutter efficacement - et à relativement peu de frais - contre la plupart des risques, pour autant que les dispositifs qui président à leur mise en place soient connus, et que la délimitation de zones à risque ait été réalisée sur base de critères scientifiques.

    En ce qui concerne le risque karstique, près de 6400 phénomènes karstiques de surface ont été répertoriés en Wallonie. Mais chaque année de nombreux effondrements se forment, sans qu'ils ne soient recensés, vu que la plupart des effondrements sont assez vite remblayés par les propriétaires ou les locataires des terrains concernés.

    Il faut savoir que près d'un tiers du territoire de la Région wallonne est constitué d'un substratum calcaire. Ce qui veut dire qu'un tiers des 262 communes sont potentiellement karstifiées.

    Cela peut paraître beaucoup, mais en comparaison à la situation existant, par exemple dans l'Etat du Kentucky aux USA, où près de la moitié du territoire est concerné, cela paraît encore raisonnable, d'autant plus que la majorité des terrains à substratum calcaire de Wallonie, ne présentent pas de contraintes karstiques prévisibles. Par ailleurs, il existe une différence majeure entre notre Région et l'Etat du Kentucky : notre territoire est nettement plus urbanisé.

    En ce qui concerne le risque d'éboulement de parois rocheuses, 82 communes sont concernées à des degrés divers et les zones à risque visent 127 km de parois et une superficie de 350 ha.

    En matière d'inondations, plus de 60% des communes wallonnes ont subi au moins 4 inondations entraînant des dégâts aux habitations depuis 1967. La période de retour d'un sinistre peut y être dès lors évaluée à 10 ans. Par ailleurs, près de 15% des communes wallonnes ont été inondées au moins 7 fois durant cette même période, ce qui correspond à 1 sinistre tous les 6 ans.

    Entre 1967 et 2008, la Wallonie a été touchée par 7 événements majeurs, reconnus en tant que calamité publique et couvrant plus du tiers de son territoire. L'un d'entre eux a touché 235 des 262 communes wallonnes.

    Enfin, en matière de risques technologiques, il existe 41 sites Seveso (seuil haut) et 56 (seuil bas) en Région wallonne. Les périmètres de maîtrise de l'urbanisation (article 12 de la Directive 96/82/CE), à savoir les zones dites vulnérables (art. 136bis du cwatup) autour de ces sites, sont finalisés et accessibles pour les communes.

    Comment gère-t-on les risques (naturels et technologiques) en Région wallonne ?

    Comme le sait l'honorable Membre, la mise en œuvre d'une politique en matière d'aménagement du territoire et d'urbanisme, repose sur une base réglementaire dont les différents décrets, arrêtés sont rassemblés dans le Cwatup.

    C'est pourquoi, des prescriptions spécifiques en ce qui concerne les risques naturels et technologiques ont été incluses dans le Cwatup dès 1997 (notamment à l'art 136), ainsi que dans le Schéma de Développement de l'Espace Régional (SDER) en 1999. En matière d'inondations, on peut également citer le plan PLUIES qui a été adopté en 1993; celui-ci devrait bientôt être actualisé en vue de se conformer aux dispositions de la Directive européenne concernant les inondations (2007/60).

    Mais, avant d'appliquer ces dispositions, il était nécessaire de réaliser plusieurs inventaires cartographiques, via des conventions d'études avec des équipes universitaires.
    A titre d'exemple, la cartographie des contraintes karstiques a débuté dès 1995, sur base de l'Atlas du karst réalisé par le CWEPSS.

    Celle-ci a porté successivement sur :
    - les zones urbanisables inscrites aux plans de secteur;
    - puis le long des grandes infrastructures (autoroutes, oléoducs);
    - ensuite sur les terrains inscrits en zones agricoles ;
    - enfin ceux des zones forestières, des zones d'espaces verts et naturelles.


    Quant à la cartographie des zones d'éboulement de parois rocheuses, elle a été réalisée entre 2004 et 2007.

    Il est important de rappeler que l'ensemble de ces cartes ont été envoyées aux communes ainsi qu'une publication de la DGATLP (DG04) intitulée: « Les risques majeurs en Région wallonne - Prévenir en aménageant », 317p. Par ailleurs, les communes ont été conviées à participer à trois colloques internationaux organisés à Namur, à ce sujet.

    Etant donné que la gestion de ces risques concernent des phénomènes dynamiques et évolutifs - dans le temps et dans l'espace, il est essentiel que leur inventaire soit actualisé périodiquement (par exemple tous les 5 ans), notamment dans les zones urbanisables et le long des principales infrastructures.

    A cet égard, les communes concernées doivent jouer un rôle important. En effet, lorsqu'un effondrement karstique se produit sur un terrain, il s'écoule généralement peu de temps avant que celui-ci ne soit remblayé par le propriétaire (pour de bonnes ou mauvaises raisons et parfois à l'aide de déchets), occultant ainsi le risque en cas de construction ultérieure sur le terrain visé par ce phénomène, favorisant parfois la pollution des sols et par conséquent des nappes aquifères.

    C'est pourquoi, j'invite les communes à faire preuve de la plus grande rigueur, voire de la plus grande prudence (principe de précaution), lors de l'instruction des demandes de permis (urbanisme, lotir, environnement/unique), visant des terrains situés dans les zones à risques élevé et modéré.

    En matière de politique communale, il est également important de tenir compte de ces risques dans les schémas de structure, les règlements communaux d'urbanisme et les plans communaux d'aménagement.

    Bien que le patrimoine ne soit pas de ma compétence, il ne faut pas oublier que certains sites (grottes) présentent aussi un très grand intérêt au niveau de la faune (chiroptères), minéralogique (concrétions: stalagmites, stalactites, .... ) et archéologique (sites préhistoriques).

    Dès lors, il faut veiller à leur pérennité, vu que des sites peuvent être menacés par certaines activités, telles que l'extension de carrières ou des tirs de mines liés à l'activité extractive.

    Il s'agit également de surveiller les impacts inhérents à la surexploitation des nappes aquifères du Carbonifère et de l'exhaure des carrières dans le Tournaisis, et réfléchir aux mesures que le Gouvernement wallon pourrait prendre pour y remédier via le Fonds wallon d'avances pour la réparation des dommages provoqués par des prises d'eau et des pompages d'eau souterraines.

    J'entends, pour ma part, que mon administration informe régulièrement les communes, mais aussi un plus grand public possible, concernant les conséquences des risques naturels et technologiques. D'une manière générale, elle recevra mon appui dans les démarches qu'elle entreprendra en cette matière, pour autant qu'elles aillent dans le sens de la prévention.

    En effet, je considère que la prévention doit rester le maître mot en matière de gestion des risques naturels et industriels, car elle est le seul moyen soutenable ou durable, à long terme pour la collectivité, même si cela ne se fait pas toujours sans heurt !

    Enfin, il faut savoir qu'il n'entre pas dans les intentions du Gouvernement d'empiéter sur les compétences fédérales en matière de protection civile. Tout au plus existe-t-il au niveau régional, un centre de crise chargé de gérer les événements en cas de survenance d'un phénomène, qu'il soit d'origine naturelle ou anthropique. La problématique du transport de produits dangereux grâce à des canalisations (oléoduc, gazoduc) est bien évidemment aussi appréhendée depuis l'accident de Ghislenghien du 30 juillet 2004 qui, pour rappel, a fait 24 morts et 132 blessés.