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Analyse de la FEB et de l'institut Mc Kinsey à propos de l'impact de l'énergie sur l'économie

  • Session : 2009-2010
  • Année : 2009
  • N° : 40 (2009-2010) 1

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  • Question écrite du 02/12/2009
    • de STOFFELS Edmund
    • à MARCOURT Jean-Claude, Ministre de l'Economie, des P.M.E., du Commerce extérieur et des Technologies nouvelles

    L'énergie est au centre de bien des débats depuis pas mal de temps. Son prix, son impact sur l'environnement, sa stabilité...

    Mais c'est son aspect purement économique que je voudrais aborder aujourd'hui.

    En matière d'efficacité énergétique, la Belgique accuse un retard sur ses voisins, ce qui entraîne - à politique égale - des risques de perte de compétitivité, notamment dans les secteurs intensifs en consommation énergétique. Notons que la consommation énergétique par m² est chez nous bien plus chère que chez nos voisins directs. Le constat est pratiquement le même pour chaque km parcouru.

    Se pose à mon avis la question suivante : ne devrait-on pas faire de l'efficacité énergétique une réelle priorité en renforçant encore davantage son aspect de facteur de croissance économique ?

    Le potentiel existe : à croire les experts de McKinsey, 29 % de la consommation d'énergie primaire pourrait être économisée d'ici à 2030 pour un coût sociétal quasi nul. Cela représenterait une économie de 5,2 milliards d'euros sur la facture énergétique annuelle, avec une latitude entre 3 et 10 milliards d'euros suivant le prix du baril, et permettrait de créer 40.000 emplois nouveaux. Ce qui intéresse non seulement les patrons mais aussi les organisations des travailleurs à mettre sur pied un pacte national en la matière.

    Reprenons quelques informations diffusées dans « energymag ». « La consommation d'énergie primaire baisserait à peine entre 2005 (368 millions de bep) et 2030 (366 millions de bep) si l'on se contente des seules mesures d'économie d'énergie déjà décidées. A un prix du baril de 62 dollards, la consommation énergétique du pays représentera un coût de 15,1 milliards d'euros en 2030 ou 3% du PIB attendu. Les émissions se monteraient à 185 mégatonnes (Mt) CO2éq, desquelles 47 MtCO2éq proviendrait du bâtiment, 26 MtCO2éq du transport et 77 MtCO2éq de l'industrie, ces trois secteurs comptant pour 90% de la consommation totale d'énergie primaire. Mais, estime McKinsey, en appliquant de façon coordonnée l'ensemble des mesures étudiées, nous pourrions réaliser à un coût quasi nul pour la société 105 millions de bep d'économies d'ici à 2030. Le potentiel le plus important se situant dans les bâtiments (61 millions de bep), vient ensuite l'industrie (29 millions de bep) et le transport (15 millions bep). La mise en œuvre de ces mesures exigerait un investissement annuel supplémentaire. »

    Actuellement, l'essentiel de la consommation énergétique par l'industrie est couvert par des accords volontaires de branche négociés avec la Région wallonne. Par ce biais, l'industrie s'engage à améliorer l'efficacité énergétique jusqu'en 2012 - une partie importante du chemin étant déjà faite. La difficulté est que les objectifs belges - volontaires et négociés, je le rappelle - sont de 20 à 40 % inférieurs à ceux adoptés par nos voisins (- 2,3 % par an pour 2005-2020 du côté des Hollandais, -1,65 %/an pour 2008-2016 pour les Allemands).

    Ne doit-on pas opter pour une politique plus ambitieuse en la matière ? Politique qui encouragera les industries à investir dans l'efficacité énergétique contribuant à renforcer à terme la compétitivité des entreprises.

    On constate que la FEB suggère de rendre obligatoires les certificats de performance énergétique dès 2015 pour les grands bâtiments (publics, immeubles) et dès 2018 pour l'ensemble des habitations privées.

    L'obligation de se soumettre à une certification énergétique constitue non seulement un moyen majeur de conscientisation dans la mesure où les certifications équivalent aux audits (document d'analyse et de propositions), mais aussi un incitant majeur à l'investissement (basé sur la notion du temps de retour sur investissement, nécessitant donc - selon la nature et l'importance de l'investissement l'attention de la Région wallonne).

    La FEB appelle donc les autorités publiques à mettre en place dans chaque région d'ici à 2020 une politique de rénovation ambitieuse pour l'ensemble du parc existant.

    Elle invite également les pouvoirs publics à jouer leur rôle exemplaire. Rappelons que le potentiel en la matière (bâtiment résidentiel, tertiaire ou commercial) est estimé à 61 millions de bep en 2030 pour un coût de 24 milliards d'euros (2010-2030) et un temps de retour sur investissement projeté à 9 ans.

    Je ne pense pas que les patrons aient besoin d'un interprète pour relayer leurs points de vue sur le thème, mais il me semble intéressant de nous arrêter quelques instants sur ces réflexions.

    Voilà pourquoi j'aimerais interroger Monsieur le Ministre sur l'aspect d'impact sur l'économie wallonne que pourraient avoir les recommandations de la FEB et des experts de Mc. Kinsey. Quelle est son analyse à ce sujet ?
  • Réponse du 23/02/2010
    • de MARCOURT Jean-Claude

    L'énergie revêt aujourd'hui, par sa raréfaction et la volatilité de son prix, un caractère majeur pour l'ensemble des composantes du système économique. Elle est aujourd'hui, dans un monde qui connaît la fin du pétrole bon marché, un élément du prix de revient des produits qui va devenir central. Aujourd'hui, les problématiques énergétiques et économiques sont très étroitement liées.

    Les pistes évoquées par l'étude Mc Kinsey, qui a été présentée au forum organisé par la FEB « Less Energy, more efficiency » en avril 2009, ont été évaluées. Il est évident que les variations à la hausse du prix de l'énergie auront inéluctablement un effet sur la compétitivité de nos entreprises. Les grandes entreprises belges semblent l'avoir compris comme en témoigne leur présence importante aux conférences de la FES, mais il faut s'assurer que l'idée percole également au sein des PME et PMI qui forment la plus grande partie de notre tissu économique wallon et qui sont, elles, plus fragiles encore sur ce thème.

    La gestion de l'énergie va constituer une composante essentielle de la compétitivité des entreprises wallonnes pour ne pas dire de leur survie. Ainsi, depuis 2004 déjà, tout investissement en utilisation rationnelle de l'énergie et des ressources est encouragé par des taux de financement complémentaires.

    Cette thématique est aujourd'hui centrale dans le soutien et l'accompagnement des PME/PMI et la mise en place d'une politique volontariste. Ainsi, l'élaboration et la réalisation du Plan Marshall avec entre autres ses pôles de compétitivité, ses clusters et les mesures relatives à l'économie verte dont le but principal est d'encourager le tissu économique à saisir les opportunités générées par ces thématiques, en sont la preuve.

    La révolution industrielle a été le point de départ d'une évolution de concert du PIB et de la consommation d'énergie. A présent que le pic de production du pétrole semble se rapprocher, si les 2 indices continuaient à évoluer ensemble l'économie risque de prendre le chemin de la décroissance, ce qui est une perspective peu réjouissante.

    Il est évident que la mutation entamée amène de très nombreux gisements en matière de nouveaux métiers et de nouveaux emplois liés aux technologies de l'énergie, aux éco-technologies ou encore à l'éco-conception. Tous ces thèmes porteurs d'emplois doivent également être relayés au niveau des démarches d'innovation où il est nécessaire d'être ambitieux.

    Un seul exemple pour illustrer le potentiel important qui ressort d'une analyse très simple : l'amélioration du mode de fonctionnement des pompes et compresseurs dans l'industrie est estimée à 3,3 TWh. Le potentiel est énorme en termes d'économies d'énergie lorsqu'on le compare à la consommation globale en électricité de la Belgique, tous secteurs confondus, et qui se chiffre à 82,7 TWh.

    Pour ce qui est de la thématique de l'amélioration des bâtiments et de l'exemplarité publique, il existe, au niveau fédéral, Fedesco, créé en 2007 et qui réalise la rénovation énergétique de 1.800 bâtiments. Au niveau de la Région wallonne, l'axe 5 du Plan Marshall 2.vert prévoit, avec l'alliance Emploi-Environnement, la rénovation du bâti et la création de nouveaux emplois en la matière en lien étroit avec le secteur. Il incombe au Ministre de l'Énergie et du Logement de répondre sur ce point précis. Les accords de branche 2ème génération et l'ambition que l'on se fixera en la matière dépendent également du Ministre de l'Énergie.

    Comme cela a été évoqué, le rôle des pouvoirs publics n'est pas de se substituer aux entreprises dans ce domaine, mais il lui appartient de les sensibiliser et de les emmener sur la voie de la compétitivité durable avec l'ambition nécessaire.