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La taxe carbone en Région wallonne

  • Session : 2009-2010
  • Année : 2010
  • N° : 96 (2009-2010) 1

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  • Question écrite du 28/01/2010
    • de EERDEKENS Claude
    • à ANTOINE André, Ministre du Budget, des Finances, de l'Emploi, de la Formation et des Sports

    Lors de la campagne présidentielle française de 2007, Nicolas Hulot a obtenu l'adhésion de tous les candidats à la présidence de la République à la taxe carbone de façon à réduire l'empreinte du CO2 dans la République française et pour mieux lutter contre le réchauffement climatique.

    Nicolas Hulot, homme d'affaires futé, grand animateur et agitateur des médias a ainsi réussi un véritable tour de force que l'on doit d'apprécier à sa juste valeur.

    La France a donc décidé, à l'initiative du Ministre de l'Environnement, M. Bourloo, de s'engager dans la taxe carbone que suggérait d'ailleurs l'ancien Premier Ministre Michel Rocard.

    Or, le Conseil constitutionnel de la République française a censuré ce dispositif français jugé inéquitable et inefficace.

    La Région wallonne a-t-elle prévu l'application d'une taxe carbone?

    Dans la négative, pour quelles raisons la Région wallonne ne va-t-elle pas dans cette voie?
  • Réponse du 05/03/2010
    • de ANTOINE André

    En effet, la France s'est engagée dans la voie d'une taxe carbone et malgré le rejet du texte, le 29 décembre 2009, par le conseil constitutionnel, il est plus que probable qu'un nouveau texte soit déposé au Parlement français au printemps 2010, intégrant les critiques du conseil constitutionnel. Si le texte initial a été rejeté par ce dernier, c'est parce que la taxe pesait essentiellement sur les particuliers alors que ces derniers représentent moins de 7% des émissions polluantes, contre 93% pour les entreprises.

    - Pour les particuliers, il consiste à frapper certains produits fossiles (gaz, charbon, diesel) d'une taxe de 17 euros la tonne de CO2 dégagée en vertu du produit consommé, en contrepartie d'un crédit d'impôt forfaitaire ou d'un chèque en cas de non paiement de l'impôt. Cette opération, à peu près neutre au final, a donc pour objet de modifier le comportement des ménages dans leur consommation de l'énergie, soit de la diminuer, soit de porter leur choix vers des produits plus respectueux de l'environnement.

    - Pour les entreprises, le mécanisme est similaire en ce qu'il apporte une contrepartie fiscale sur les investissements destinés à diminuer la consommation de ces produits fossiles, mais d'autant plus complexe qu'il est lié avec la législation sur les quotas CO2, qui intègre 1.018 sites industriels français. Il comprend également un régime d'exonération pour certaines fonctions dites sensibles sur base de critères tels que la concurrence internationale, les métiers agricoles, les métiers liés au transport, etc. C'est sur ce plan d'ailleurs que le conseil constitutionnel a été le plus critique dans la première version du texte présenté au Parlement.



    Notons que ce texte vise la consommation nationale des produits, en ne l'intégrant pas dans un contexte d'engagements climatiques sur le plan international, ce que prônait le Président français à défaut d'un accord global ambitieux à la conférence climat de Copenhague. Il s'agissait plutôt de taxer, aux frontières de l'Union européenne, les produits importés de pays qui ne s'engagent à aucun effort en matière de réduction des gaz à effet de serre, tels que la Chine ou les Etats-Unis.

    Enfin, pour en revenir à la Région wallonne, une taxe carbone « à la française» ne ressort pas de la compétence fiscale régionale, telle que définie par l'article 170, § 2, de la Constitution, pour la bonne et simple raison qu'elle est rattachée principalement à la fiscalité sur les accises, pour lesquelles l'Etat fédéral est exclusivement compétent («  non bis in idem » en matière de fiscalité régionale, tel que prévu à l'article 11 de la loi spéciale de financement des Communautés et des régions, du 16 janvier 1989). Ensuite, il est difficilement envisageable de créer une taxe carbone qui ne toucherait pas aux accises, taxe permettant d'augmenter le prix d'achat de produits énergétiques fossiles à la base des émissions de gaz à effet de serre.

    Cela dit, ressortissant de sa compétence propre, la Région wallonne a d'ores et déjà mis sur pied, en 2008, un mécanisme d'incitation fiscale à l'utilisation de produits moins énergivores en CO2 : il s'agit de l'Eco bonus et l'Eco malus. D'autres projets sont à l'étude, comme celui de remplacer progressivement la taxe de circulation par une taxe à l'usage des infrastructures routières, tel que prôné par la déclaration de politique régionale.

    En l'état, c'est donc au niveau fédéral que ce débat sur la taxe carbone doit être porté. Il pourrait consister, dans un premier temps, à réorienter la fiscalité des accises sur les produits énergétiques fossiles vers une fiscalité environnementale qui incite le consommateur à modifier ses comportements de consommation.