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Le devenir de certaines parties de la Cathédrale de Tournai après la fin du chantier de restauration

  • Session : 2009-2010
  • Année : 2010
  • N° : 200 (2009-2010) 1

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  • Question écrite du 11/02/2010
    • de SENESAEL Daniel
    • à LUTGEN Benoît, Ministre des Travaux publics, de l'Agriculture, de la Ruralité, de la Nature, de la Forêt et du Patrimoine

    Comme annoncé lors de la dernière séance du Parlement en 2009, je souhaite revenir aujourd'hui sur le dossier de la restauration de la Cathédrale de Tournai et un de ses corollaires, la mise en valeur des fouilles qui y ont été menées d'autant plus que des éléments nouveaux sont venus s'ajouter au dossier depuis lors.

    Ce dossier me tient à cœur, non seulement parce que la Cathédrale se situe dans ma région mais aussi pour le caractère exceptionnel et unique qu'elle revêt dans notre Patrimoine. Elle fait l'objet d'un classement dès 1936, à l'aube de la prise de conscience de l'intérêt des monuments historiques.

    En 1993, elle est reprise sur la liste du patrimoine exceptionnel de Wallonie, dès sa première élaboration et, en 2000, l'UNESCO lui reconnaît le titre de Patrimoine mondial de l'Humanité. Son importance dépasse donc largement le territoire de la Wallonie et elle constitue un des édifices majeurs du paysage belge. De plus, la richesse de son architecture, de ses décors et des œuvres d'art qu'elle abrite ne peut laisser personne indifférent.

    C'est véritablement la tempête d'août 1999 qui mettra en évidence les nombreuses pathologies dont souffre l'édifice romano-gothique. De graves problèmes de stabilité apparaissent qui nécessitent des interventions rapides afin d'assurer la pérennité de l'église.

    On le sait aujourd'hui, d'importants financements ont pu être dégagés en vue de restaurer entièrement l'édifice. Ainsi, 21 millions d'euros seront au final octroyés par la Région wallonne pour ces travaux en application de l'accord-cadre qui court de 2008 à 2014.

    Ces importants travaux ont donc été l'occasion pour les archéologues de procéder à de vastes fouilles archéologiques des sous-sols de l'édifice. Ces fouilles étaient même par ailleurs indispensables à l'élaboration du projet de restauration en ce qu'elles ont permis de mettre à jour les fondements des cathédrales romane et gothique. Elles ont donc permis d'établir un diagnostic préalable aux mesures de stabilisation de la cathédrale.

    Toutefois, l'ampleur des découvertes réalisées dans le cadre de ces fouilles nous a également éclairés sur le passé de la cathédrale. Les archéologues ont ainsi mis au jour les vestiges de nombreux monuments anciens ensevelis sous l'édifice romano-gothique et personne n'osera contester la haute valeur scientifique des découvertes de même que leur potentiel touristique.

    L'ensemble des décisions relatives au devenir de l'édifice et aux directions à donner au chantier de restauration sont prises collégialement. C'est sans doute également cette parfaite entente des différents acteurs du dossier et cette concertation dans les choix qui ont permis de décrocher des subventions européennes et régionales. C'est donc un comité de pilotage, composé de la Province de Hainaut, propriétaire de l'édifice faut-il le rappeler, de la ville de Tournai et de l'intercommunale IDETA, ainsi que des représentants des différents ministres concernés, qui a été constitué pour assurer le suivi du dossier et émettre des avis concertés sur les options à prendre dans la conduite de ce chantier colossal.

    Malgré le petit flottement intervenu fin décembre dans la prise des décisions relatives à l'avenir du dossier, je me réjouis que Monsieur le Ministre s'intéresse de près à ce projet. Depuis le début de ce mois donc, la décision de mettre en valeur les fouilles réalisées sous la cathédrale est désormais validée par l'ensemble des acteurs de ce dossier.

    Dans ce cadre, pourrrait-il donc tout d'abord nous exposer quelles sont les raisons techniques et historiques, sans doute mises en avant par les experts, qui l'ont poussé à opter pour ce choix?

    Par ailleurs, je comprends bien que l'enveloppe de 500.000 euros initialement prévue pour réaliser la dalle de recouvrement des sous-sols fouillés sera réaffectée à la mise en valeur desdites fouilles. Toutefois, ce montant me semble un peu court si nous considérons l'ensemble des travaux qui sont nécessaires à une ouverture au public.

    Je n'en citerai que quelques-uns ici tels la stabilisation des vestiges, la création d'éléments destinés à la déambulation, la mise en lumière et la réalisation d'éléments pédagogiques et didactiques (utilisant si besoin les nouvelles technologies de la communication). Ces derniers nous semblent en effet bien nécessaires pour permettre aux enfants (puisque tel semble être le public principal que vous visez) de comprendre ce qui les entoure. Rappelons que la lecture d'éléments archéologiques est déjà loin d'être évidente pour les adultes non-initiés!

    Monsieur le Ministre dispose-t-il à ce jour des premiers éléments qui lui permettent d'évaluer le coût final de cette mise en valeur des vestiges?

    Enfin, avant de se lancer dans un projet qui pourrait se révéler titanesque, dispose-t-il d'éléments probants qui permettent d'affirmer que ces vestiges susciteront un véritable intérêt de la part du public? Ne serait-il pas nécessaire de réaliser, par exemple, une première évaluation de l'Archéoforum de Liège, premier outil régional du genre, afin d'évaluer la pertinence d'un tel projet mais également son coût de fonctionnement?
  • Réponse du 18/02/2010
    • de LUTGEN Benoît

    La décision de conserver le sous-sol de la Cathédrale est cohérente dans la mesure où il s'agit là des origines, très bien conservées, des édifices antérieurs. De par les vestiges qui ont été découverts, Tournai peut aujourd’hui être considéré sur le même pied que Genève, Barcelone, Aoste ou Paris, pour ne citer que les cryptes archéologiques les plus connues sous des cathédrales.

    Plusieurs experts accompagnent le projet archéologique depuis de nombreuses années : le professeur Raymond Brulet de l’UCL et les membres du projet APPEAR (Accessibility Projects. Sustainable Preservation and Enhancement of urban subsoil Archaeological Remains), dont le professeur Charles Bonnet qui a été l’artisan de la mise en valeur des fouilles de la Cathédrale Saint-pierre de Genève. APPEAR est un vaste projet européen qui se concentre sur la mise en valeur et la présentation au public des sites archéologiques exceptionnels. Le projet APPEAR est financé par l’Union européenne dans le cadre du programme « Énergie, Environnement et Développement durable, Ville de demain et Patrimoine culturel ».

    Un budget de 500.000 euros a en effet été prévu pour le recouvrement des fouilles.

    Recouvrement ne veut pas dire ensevelissement. Il a donc été demandé à l’auteur de projet de chiffrer, d’une part, le coût d’un ensevelissement et d’un recouvrement, et d’autre part, le coût d’un recouvrement sans ensevelissement et par conséquent avec mesures de protection des vestiges.

    Comme pour la Collégiale Sainte Waudru de Mons ou le Trésor de la Cathédrale de Liège, un complément de valorisation touristique sera nécessaire.

    Ainsi, en ce qui concerne la mise en ordre intérieur de la Cathédrale, le comité de pilotage a décidé qu’une demande de financement en équipement touristique pourrait être introduite auprès du Ministre en charge du Tourisme à hauteur de 620.000 euros pour les techniques spéciales et une partie du mobilier nécessaire.

    Envisager la valorisation de la Cathédrale de Tournai est inconcevable sans en envisager la valorisation de son histoire, une histoire palpable dont nous conservons des traces inestimables.

    Tournai est une des plus anciennes villes de Belgique avec Arlon et Tongres. Elle a joué un rôle historique, économique, religieux et culturel fondamental durant le Moyen Âge. Elle était même cité royale sous le règne de Childéric et de Clovis et donc, première capitale du Royaume franc.

    Grâce à la valorisation des vestiges de cette époque, Tournai dispose d’une corde supplémentaire à son arc afin de s’affirmer, d’un point de vue touristique mais aussi pour faire vivre notre identité, comme un des berceaux de notre civilisation européenne.

    Enfin, il convient de souligner que ce projet s’inscrit pleinement dans le schéma de développement touristique de Wallonie picarde porté par l’Intercommunale IDETA. Il s’agit donc d’un maillon qui vient renforcer l’attractivité du territoire et compléter des investissements d’une ampleur plus importante : beffroi, grand place, office du tourisme, quartier cathédrale, parcours découverte de la ville de Tournai, etc.