/

Les compteurs photovoltaïques à l'arrêt ?

  • Session : 2009-2010
  • Année : 2010
  • N° : 211 (2009-2010) 1

2 élément(s) trouvé(s).

  • Question écrite du 08/02/2010
    • de STOFFELS Edmund
    • à NOLLET Jean-Marc, Ministre du Développement durable et de la Fonction publique
    Le retour sur investissement d’une installation photovoltaïque dépend de plusieurs facteurs : parmi eux, le compteur électrique qui tourne à l’envers ou le nombre de certificats verts octroyés en fonction de la qualité d’électricité produite.

    Dans ma région, je suis maintenant de plus en plus confronté à des inquiétudes que m’expriment les investisseurs ou les installateurs : le réseau électrique disposant de capacités limitées ne serait pas capable de capter l’électricité (photovoltaïque ou éolienne) produite à tout moment. De ce fait, on devrait s’attendre à ce qu’à l’avenir, les compteurs photovoltaïques soient mis à l’arrêt ou soient déconnectés temporairement par rapport au réseau.

    Tout d’abord, je souhaite interroger Monsieur le Ministre et savoir s’il est au courant de ceci ou s’il s’agit d’une rumeur sans fondement – auquel cas il va falloir mettre les choses au clair par une communication bien ciblée.

    Dans l’hypothèse que le scénario décrit se confirme, je dois avouer que cela me révolte sur deux plans :

    - ce serait donner la priorité à l’électricité nucléaire (alors que, d’une part, les unités de production ont pu être amorties depuis longtemps, et ce, avec des interventions publiques massives et, d’autre part, Electrabel fait un bénéfice quotidien net de 3.6 millions d’euros ce que je qualifie de scandaleux comparé au service qu’ils rendent au client). Selon ma vision, l’électricité verte doit être prioritaire avant toute autre forme d’électricité et s’il faut – pour des raisons techniques liées à la capacité du réseau – réduire l’injection d’énergie dans le réseau, c’est d’abord du côté du nucléaire qu’il faudra le faire ;

    - ce serait ensuite tromper la confiance de l’investisseur qui a fait son calcul de rentabilité sur base des paramètres définis par l’autorité politique. Si maintenant, on vient modifier ces paramètres (dans le sens défavorable à l’investisseur), c’est remettre en question tout calcul de rentabilité et donc provoquer la méfiance de ceux qui ont investi. C’est tout aussi inacceptable à mes yeux.

    Dans l’hypothèse donc où le scénario se confirme, je demande à Monsieur le Ministre de prendre d’urgence les dispositifs nécessaires afin de protéger les investissements déjà réalisés et afin d’éviter que le lobby nucléaire ne vienne couper le souffle aux producteurs d’électricité verte.
  • Réponse du 08/03/2010
    • de NOLLET Jean-Marc

    La question de l'honorable Membre a retenu toute mon attention; je partage entièrement sa vision selon laquelle l'électricité verte doit être prioritaire avant tout autre forme d'électricité.

    Toutefois, la question de l'équilibrage sur les réseaux de distribution est une matière technique qui nécessite une explication préalable. Tout d'abord, il est important de comprendre que le fait que le compteur cesse de tourner à l'envers est effectivement un problème de capacité d'accueil de la production décentralisée, essentiellement ressenti par le PV, mais qui peut se produire pour toute sorte de production décentralisée. Il est lié à un arrêt temporaire de la production parce que les paramètres du réseau ne la permettent plus; le fait que le compteur ne « décompte plus » n'est donc pas Ia cause du problème mais simplement une conséquence de l'arrêt de l'injection pour des raisons de sécurité.

    D'après les informations dont je dispose, il semble toutefois que ce type de déconnexion ne se produit que de manière marginale dans des cas extrêmes, et est rapidement résolu par une intervention rapide du gestionnaire de réseau de distribution (GRD). Les arrêts sont donc de très courte durée et peu significatifs pour les citoyens qui ont investi dans des installations de production d'électricité verte de petite puissance.

    Mais il faut prévoir dès à présent des cas plus problématiques qui pourraient se présenter à l'avenir. Je pense par exemple à des quartiers à forte implantation d'installations photovoltaïques, où tous les systèmes injecteraient en été, au maximum pendant les heures les plus ensoleillées, situation pouvant éventuellement se cumuler avec un faible niveau de consommation et au fait que plusieurs habitations soient situées en bout de ligne de réseau. Cette situation réunirait potentiellement les conditions propices à une surtension majeure pouvant conduire à un risque de dommage avec des conséquences souvent irréversibles, à tous les appareillages connectés qu'ils soient ou non en fonctionnement, tant du producteur concerné que des autres utilisateurs.
    Pour encadrer cette problématique, il existe 2 dispositifs légaux :

    - l'article 235.01.d) du RGIE (Règlement Général sur les installations électriques) : en cours de modification car les prescriptions de cet article jugé inadapté aux regards des technologies actuelles;
    - les prescriptions du règlement technique distribution ont rendu obligatoire une prescription de Synergrid (la C10/11) qui a été rénovée en mai 2009.

    La qualité de tension qui est imposée aux gestionnaires de réseau est celle définie par la NBN EN 50160.


    Concrètement pour les installations photovoltaïques, des systèmes de sécurité sont intégrés dans les onduleurs et provoquent la mise à l'arrêt de l'installation de production sous certaines conditions.
    Il est également important de rappeler que :
    - la mise en service d'une nouvelle unité de production est toujours soumise à l'acceptation du GRD concerné;
    - le GRD ne peut interdire la production que durant le temps nécessaire à l'adaptation de son réseau, mission qui est prioritaire au regard du Décret. Tout producteur qui se sentirait lésé peut donc interpeller son GRD afin que celui-ci procède rapidement aux adaptations nécessaires;
    - le GRD peut intervenir sur les heures de basculement des compteurs bi-horaires et exclusifs nuit pour favoriser une consommation aux moments opportuns.


    Si la part d'électricité renouvelable doit augmenter significativement dans les années à venir, le réseau électrique devra donc évoluer parallèlement et développer de nouvelles fonctionnalités, comme, par exemple, le stockage de l'électricité ou encore des outils de prévision de la production renouvelable. Des adaptations devront en conséquence être apportées au réseau par les gestionnaires, et la législation devra également évoluer pour intégrer de nouvelles fonctionnalités. Dans ce cadre, les consommateurs et petits producteurs auront un nouveau rôle à jouer dans la gestion du réseau, tout comme cela a été le cas par le passé avec l'introduction des tarifs exclusifs nuit et bi-horaires.

    A ce titre, la Commission wallonne pour l'énergie, consciente des futurs défis à relever, a organisé le 22 octobre dernier, une journée d'étude sur l'évolution des réseaux et plus particulièrement l'introduction de compteurs dits intelligents. Assurant son rôle de régulateur, elle veillera également avec l'administration à ce que les consommateurs et les futurs petits producteurs ne soient lésés dans le processus d'évolution du réseau électrique.