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La pression fiscale en Wallonie et en Flandre

  • Session : 2009-2010
  • Année : 2010
  • N° : 131 (2009-2010) 1

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  • Question écrite du 12/02/2010
    • de STOFFELS Edmund
    • à ANTOINE André, Ministre du Budget, des Finances, de l'Emploi, de la Formation et des Sports

    Quelles sont les différences entre Wallons et Flamands en termes de pression fiscale régionale (et locale) ?

    En période de septembre dernier, les différences peuvent, très rapidement, être décrites comme suit :

    1° Précompte immobilier : il varie d’une commune à l’autre. En 2009, la moyenne des centimes additionnels s’établit à 2.668 en Flandre et 2.720 à Bruxelles. Ce ne sont pas les centimes additionnels à eux seuls qui font la pression fiscale. Ils doivent toujours être analysés sur base de la chose imposable (revenu cadastral moyen indexé). Quelle est la moyenne en termes de montants absolus ?

    2° IPP : la Wallonie affiche le taux moyen le plus élevé : 7,7 %, alors qu’il n’est que de 7,2 % en Flandre et de 6,6 % à Bruxelles. Quels ont les revenus moyens de part et d’autre et que cela donne-t-il comme montant absolu ? Quel est, tout particulièrement, l’effet de cette fiscalité sur les petits revenus ?

    3° Taxe de circulation : le Gouvernement wallon a instauré éco-malus. Son montant varie de 100 à 1.000 euros. Il contrebalance l’éco-bonus, aux montants identiques, qui récompense le citoyen ayant choisi une auto émettant peu de CO2.

    4° Droits de donation : en Wallonie, ils sont de 3 % en ligne directe, 5 % entre frères et sœurs, oncles et neveux et 7 % dans les autres cas. En Flandre et à Bruxelles, c’est respectivement 3 et 7 %. Allons-nous maintenir le taux de 5 % ?

    5° Droits de succession : en Wallonie, une épouse ou un fils qui hérite de 50.000 euros paiera 2.125 euros de droits. Cela grimpera à 26.500 euros pour 250.000 euros. En Flandre, l’héritier paiera 1.500 euros (tranche de 50.000 euros) et 19.500 euros (250.000 euros). À Bruxelles, il s’acquittera de 1.500 euros (héritage de 50.000 euros) et 25.750 euros (250.000 euros).

    6. Droits d’enregistrement : en Flandre, les taux sont plus bas (10 et 5 %) qu’en Wallonie (12,5 et 6 % à la Société wallonne du crédit social ou au Fond des familles nombreuses). À Bruxelles, le taux de 6 % a été supprimé, seul est maintenu celui de 12,5 %. Mais il est de 0% sur une première tranche de 60 ou 75.000 euros, en fonction de la zone où est situé le bien.

    7° Télé-redevance : les Wallons ont le triste privilège d’être les derniers à la payer. 163 euros en 2008 ramenés à 100 euros en 2009. Consolation ?

    8° Transports publics : gratuité ou réductions dans les transports publics : Bruxelles et la Wallonie sont mieux loties que la Flandre, une fois n’est pas coutume. La gratuité y est de mise pour les enfants de moins de 12 ans et les personnes de plus de 65 ans. En Flandre, c’est gratuit pour les moins de 6 ans et les plus des 65 ans. Le prix de l’abonnement scolaire est aussi 50 % moins cher en « francophonie » grâce à une intervention de la Communauté.

    9° Taxe sur les déchets : coût-vérité. Les taux varient d’une commune à l’autre, tant en Wallonie qu’en Flandre.

    En résumé, je constate qu’in fine et à situation égale, le ménage wallon subit une pression fiscale régionale et locale plus forte que le ménage flamand. Les différents secteurs de la fiscalité wallonne ne risquent-ils pas de renforcer plus qu’en Flandre les inégalités qui existent entre ménages à revenus aisés et ménage à petits revenus ?
  • Réponse du 15/03/2010
    • de ANTOINE André

    La question de l'honorable Membre porte sur les différences entre Wallons et Flamands en termes de pression fiscale régionale (et locale). A la suite de l'énumération des impôts et taxes dans le corps de sa question,il tire la conclusion suivante: « à situation égale, le ménage wallon subit une pression fiscale régionale et locale plus forte que le ménage flamand », il ajoute que « cela risque de renforcer plus qu'en Flandre les inégalités qui existent entre ménages à revenus aisés et ménages à petits revenus ».

    Je me permets tout d'abord de nuancer ses propos : les situations sont rarement « égales » entre les citoyens du nord et du sud du pays, toute comme elles ne le sont pas davantage entre citoyens wallons ou bruxellois. Car la pression fiscale est une notion qui revêt des réalités bien diverses, en fonction du lieu de résidence, de la pression immobilière, du taux d'imposition, des exonérations et abattements éventuels, du fait d'être locataire ou propriétaire, du patrimoine privé, de la proximité d'un centre urbain, du niveau de revenus, etc.

    Malgré cette réserve préliminaire, faisons l'analyse de la situation actuelle, impôt par impôt :

    1) Précompte immobilier

    Entre 2000 et 2009, l'évolution du nombre moyen de centimes additionnels au précompte immobilier dans les différentes Régions est la suivante :

    année de référence RW RF RBC
    2000 2.299 2.151 2.513
    2009 2.501 2.665 2.721
    (source : publication « Public Finance » de DEXIA)

    Les chiffres montrent que la pression fiscale est inférieure en Région wallonne en comparaison des deux autres Régions du pays.

    En outre, une différence importante existe entre la Wallonie et la Région flamande en ce qui concerne les réductions accordées pour personne à charge, et ce depuis que ces réductions ont été forfaitisées aux montants de 125 et 250 euros, en lieu et place des réductions proportionnelles de 10 et 20%.

    Enfin, en Région wallonne, ces réductions forfaitaires sont accordées dès le 1er enfant à charge dans le ménage, pour autant que la famille compte au moins 2 enfants à charge. Ce qui n'est pas le cas en Région flamande où au moins 2 enfants doivent être domiciliés dans le ménage.



    2) Impôt des personnes physiques

    Entre 2000 et 2009, l'évolution du taux moyen de la taxe additionnelle à l'impôt des personnes physiques dans les différentes Régions est la suivante :

    année de référence RW RF RBC
    2000 7,16% 6,59% 6,71%
    2009 7,67% 7,17% 6,63%
    (source : publication « Public Finance » de DEXIA)


    Toutefois, ces données sont à mettre en comparaison avec une autre, tout aussi essentielle : le revenu moyen des habitants.

    Revenu moyen par habitant RW RF RBC
    ex 2006 – revenus de l'année 2005 12.807 euros 14.483 euros 11.550 euros

    Et si l'on observe, à l'intérieur de ce revenu, la part des déclarations fiscales de revenu total net imposable, on constate que :
    - 77,2% des revenus wallons sont inférieurs ou égaux à 30.000 euros par an,
    - 72,5 % des revenus flamands sont inférieurs ou égaux à 30.000 euros par an,
    - 79,1% des revenus bruxellois sont inférieurs ou égaux à 30.000 euros par an.

    Dès lors, les tranches de revenus étant plus élevées pour une part plus importante de citoyens du nord du pays, la contribution fiscale moyenne est logiquement plus importante au nord du pays, et dès lors sur les additionnels à l'impôt des personnes physiques.



    3) Taxe de circulation

    Les taxes de circulation et de mise en circulation sont identiques pour tous les citoyens du pays. Certaines politiques régionales viennent en complément d'autres politiques gérées au niveau fédéral, dont le bonus éco-fiscal.

    En 2008, sur un nombre total des immatriculations de 351.652, 128.264 éco-bonus ont été attribués, pour un montant à payer de 43.837.600 euros; parallèlement, 10.141 éco-malus ont été identifiés, pour un montant à récupérer de 2.936.300 euros.

    Au vu de ces chiffres, on peut affirmer que ce dispositif a été nettement favorable aux résidents wallons.



    4) Droits de donation

    Le taux intermédiaire de 5% ne fait l'objet d'aucune critique actuellement, d'autant qu'il s'agit clairement d'un taux plus favorable afin de rencontrer des liens familiaux non visés dans les deux autres Régions. Il ne me paraît dès lors pas utile d'envisager sa suppression, d'autant plus qu'il contribuerait à augmenter la pression fiscale que l'honorable Membre semble condamner par ailleurs.



    5) Droits de succession

    L'exemple qu'utilise l'honorable Membre ne procède pas d'un calcul correct de l'imposition. En effet, il convient, préalablement à l'établissement de l'impôt, de considérer les abattements existants dans la législation wallonne, pour les montants jusqu'à 25.000 euros. Il faut souligner que ces abattements ont été supprimés dans la règlementation flamande, contribuant à exercer une pression fiscale plus importante sur les bas revenus.

    Un exemple concret :
    Considérons la part héritée de l'immeuble familial : 300.000 euros, soit un immeuble de 600.000 euros. La succession concerne le conjoint survivant (81 ans, soit un usufruit de 8%) et deux enfants :

    conjoint enfant 1 enfant 2 total

    RW 24.000 euros 138.000 euros 138.000 euros 300.000 euros
    valeur imposable exempté car 5.025 euros 5.025 euros 10.050 euros
    droits dus abattement


    RF 24.000 euros 138.000 euros 138.000 euros 300.000 euros
    valeur imposable exempté car 9.420 euros 9.420 euros 18.840 euros
    droits dus taux zéro


    La taxation pour les ménages avec revenus faibles et modérés est plus favorable en Région wallonne.



    6) Droits d'enregistrement

    Des taux de 5 et 10% existent également en Région wallonne, et ce depuis plus d'un an, pour les emprunts hypothécaires souscrits auprès de et accordés par la SWCS et le Fonds du Logement des Familles Nombreuses, sous certaines conditions.

    Cette constatation est renforcée par un autre élément tout aussi important en fiscalité immobilière : le prix moyen d'une habitation, d'un appartement ou d'un terrain à bâtir.
    En 2009, le prix moyen d'une maison d'habitation ordinaire par Région est de :

    année de référence 2009 RW RF RBC
    habitation ordinaire 131.154 euros 180.923 euros 300.618 euros
    appartement, flat 141.174 euros 179.750 euros 183.889 euros
    terrain à bâtir 44,5 euros/m2 145,9 euros/m2 283,6 euros/m2
    (source : publication « Public Finance » de DEXIA)

    Dès lors, la taxation porte sur des montants inférieurs en comparaison de la Région flamande et, surtout, de la Région de Bruxelles-capitale.

    (A fortiori si c'est un taux de 10% qui est appliqué en RW)
    Force est donc de constater qu'il vaut mieux être candidat acquéreur en Région wallonne plutôt qu'en Flandre ou à Bruxelles.



    7) TV redevance

    L'honorable Membre connaît l'historique de ce dossier et la volonté affichée du Gouvernement précédent et décidée par le Parlement de diminuer progressivement cette redevance en vue de la supprimer à terme. Le contexte budgétaire nous a obligés à faire des choix difficiles, dont celui de maintenir la redevance TV au-delà de 2013. Il faut toutefois souligner qu'il a été décidé de supprimer la radio redevance et de porter le montant de la TV redevance qui aurait été sans modification de 163,38 euros en 2009 à 100,00 euros.



    8) Transports publics

    L'honorable Membre constate lui-mêmes les efforts fournis en Région wallonne pour favoriser l'usage des transports en commun, dont certaines mesures phares que j'ai portées dans le précédent Gouvernement : la gratuité des transports en commun pour les enfants jusqu'à 12 ans, 50% du prix de l'abonnement pour les enfants jusqu'à 24 ans et la gratuité pour les plus de 65 ans.



    9) Déchets

    Là encore, les dispositions varient considérablement d'une commune à l'autre. Il s'agit des politiques environnementales fortes voulues par le législateur, afin de responsabiliser le consommateur à la dimension environnementale de la gestion des déchets. Cette logique de responsabilisation va de pair avec un dispositif de type « coût vérité ».




    Conclusion :

    Après avoir parcouru l'ensemble des impôts et taxes en Région wallonne, il m'est permis d'affirmer, chiffres à l'appui, que le contribuable wallon ne subit pas une pression fiscale plus importante que ses voisins de Flandre ou de Bruxelles.


    C'est ce que confirme l'étude DEXIA, montrant que la contribution fiscale totale par habitant et par région, en 2008, est de :

    contribution fiscale/habitant RW RF RBC
    2008 543 euros 617 euros 844 euros
    (source : publication « Public Finance » de DEXIA)


    A mon initiative, des mesures visant à alléger la fiscalité en Région wallonne viennent par ailleurs d'être prises, au travers du décret d'équité fiscale du 10 décembre 2009 visant à :
    - assouplir, au 1er janvier 2010, les conditions donnant accès à l'octroi d'un taux 0% des droits de donation et de succession en cas de transmission d'entreprise;
    - encourager la rénovation de maisons passives par une réduction du précompte immobilier pour les maisons passives isolées,
    - en matière d'accès au logement, limiter les allègements fiscaux à l'habitation unique du contribuable.


    Enfin, plus récemment, le décret-programme portant diverses mesures en matière de bonne gouvernance, de simplification administrative, d'énergie, de logement, de fiscalité, d'emploi, de politique aéroportuaire, d'économie, d'environnement, d'aménagement du territoire, d'agriculture et de ruralité, adopté en seconde lecture lors de la séance du Gouvernement wallon du 29 janvier 2010, prévoyant de remettre sur pied d'égalité la donation de biens meubles avec la donation du bénéficiaire du capital décès d'une assurance-vie pour l'octroi de taux réduits à 3%-5%-7%. :
    - en cas de donation d'une attribution de la qualité de bénéficiaire du capital décès dune assurance-vie, même si cela constitue une condition suspensive;
    - en cas de donation d'instruments financiers sous réserve d'usufruit, lorsque la donation prévoit une continuation éventuelle de l'usufruit par le conjoint/compagnon/compagne survivant du donateur, même si cela constitue une condition suspensive;
    - aux autres conditions suspensives non liées au décès du donateur, comme en Flandre et à Bruxelles.