à ANTOINE André, Ministre du Budget, des Finances, de l'Emploi, de la Formation et des Sports
Par rapport au mois de février 2009, le taux de chômage en Wallonie a augmenté de 4,8 % en février 2010, passant de 14,5 à 15,2 %. Mais selon le Forem, le nombre de demandeurs d'emploi a baissé de 2,3 % au mois de février par rapport au mois de janvier de cette année, ce qui représente une mise à l'emploi de 5.325 personnes. Cette baisse atteint même 3,7 % pour les moins de 25 ans.
Dans un premier temps, je souhaiterais savoir si Monsieur le Ministre a entamé une analyse poussée de la baisse du taux de chômage qui a caractérisé le mois de février. S’il dispose déjà de conclusions, peut-il m'en faire part ? Dans le cas contraire, peut-il me les communiquer une fois les raisons de cette diminution connues?
Actuellement, le chômage en Région wallonne est caractérisé par plusieurs constats, dont le fait que ce sont les jeunes et les travailleurs les plus âgés qui sont les plus touchés. Par ailleurs, on observe qu'un diplôme de l'enseignement supérieur ne constitue pas nécessairement un rempart contre le chômage, autrement dit que la garantie d'emploi ne l'accompagne pas automatiquement. Aussi, le chômage n'épargne-t-il plus aucune région de Wallonie.
Face à ces constats, Monsieur le Ministre a annoncé par voie de presse l'élaboration d’un plan de soutien à l'emploi, dénommé « Front pour l'emploi ». Ce plan nécessite à tout le moins la collaboration du Fédéral. Son élaboration a·t-elle déjà été entamée ? S'agirait-il d'un plan national ou régional ? Monsieur le Ministre peut-il me détailler l'ensemble des mesures qu’il souhaite voir inscrire dans ce « Front pour l'emploi » ? Quelle échéance s’est-il fixé? En a-t-il discuté avec les partenaires sociaux et, le cas échéant, qu'en pensent ces derniers ?
Dans la presse, Monsieur le Ministre a notamment évoqué trois mesures : une première pour les indépendants, une deuxième concernant les autorités, et une troisième relative à la prise en charge des demandeurs d'emploi.
Concernant les indépendants, Monsieur le Ministre souhaite favoriser le passage du statut d'indépendant à titre complémentaire à celui d'indépendant à titre principal, par le biais d'une allocation temporaire de compensation de perte de revenu de l'activité salariée. Peut-il en dire davantage sur le mécanisme qu’il propose ? Comment cette mesure serait-elle financée ? Et quelles mesures prend-il pour stimuler l'esprit d'entreprise au sein de la population active, en particulier chez les jeunes?
Deuxièmement, Monsieur le Ministre envisage d'améliorer la concertation et la coordination entre, d'une part, les instances régionales chargées d'accompagner le chômeur dans sa recherche d'un emploi et, d'autre part, les instances fédérales qui évaluent les efforts réalisés afin de trouver du travail. Concrètement, comment va-t-il procéder afin de rendre cette coordination plus bénéfique pour les demandeurs d'emploi ? Va-t-il demander plus de communication ou de mobilité de la part des autorités régionales?
Un troisième exemple de mesure annoncée concerne la prise en charge des demandeurs d'emploi. Monsieur le Ministre souhaite que chaque demandeur soit pris en charge par une seule et même personne tout au long de ses démarches et il a l'intention d'affecter 600 équivalents temps-plein du Forem à cette tâche. Un recrutement est-il prévu à cet effet ou bien des agents du Forem seront-ils spécifiquement réorientés pour l'accompagnement Individualisé? Si aucun recrutement n'est prévu, dans quelles branches du Forem Monsieur le Ministre compte-t-il puiser ces 600 agents?
Enfin, que Monsieur le Ministre prévoit dans le « Front pour l'emploi » pour ce qui concerne la formation mais aussi pour les métiers et fonctions critiques en Région wallonne ?
Réponse du 25/05/2010
de ANTOINE André
La première question est relative à la manière dont on peut expliquer la diminution du nombre de demandeurs d'emploi en février après une période d'augmentation.
La hausse de 4,8% de la demande d'emploi entre février 2009 et 2010 traduit l'impact de la crise économique. En février 2009, les effets de la crise commençaient seulement a être perceptibles sur les chiffres de chômage, d'ailleurs, à cette période, le nombre de demandeurs d'emploi était encore orienté à la baisse. Entre le mois de février 2009 et de février 2010, le chômage est reparti à la hausse et à atteint un premier pic en juin 2009 (écart annuel de 7,1%) et un deuxième en janvier 2010 (7,2%) et s'est stabilisé autour des 5-6% entre ces deux pics.
Il est vrai qu'ensuite, en février 2010, le nombre de demandeurs d'emploi a baissé de 2,3% au mois de février par rapport au mois de janvier de cette année. Mais il faut préciser qu'une diminution de 5.324 personnes ne signifie pas que toute ces personnes ont été mises à l'emploi, il y a également des départs pour d'autres motifs (formation, maladie, motif inconnu, etc.). Par ailleurs, cette diminution traduit à la fois une évolution cyclique habituelle entre le mois de janvier et de février et un signal positif car la diminution observée en février (2,3% en moins de DE demandeurs d'allocation et de jeunes en stage d'attente par rapport au mois de janvier) est plus forte que ce qui est habituellement observé (de l'ordre des 1,5% entre janvier et février des années précédentes). En d'autres termes, elle traduit également le fait que les jeunes à la sortie des études inscrits depuis septembre ou janvier entrent progressivement sur le marché du travail et que les entreprises embauchent plus en ce début d'année.
Il faut savoir également que cet écart mensuel s'observe tant auprès des DE demandeurs d'allocations (-2,2%) qu'auprès des jeunes en stage d'attente (- 3,1%) et que les reculs les plus importants en % concernent : - les moins de 25 ans (- 3,7%); - les plus qualifiés : - 4,9% pour le supérieur et - 2,4% pour le secondaire du 3ème degré; - les inoccupations de moins de 6 mois : - 6,3%.
Bref, ce sont donc principalement les plus jeunes, qualifiés et inoccupés depuis peu qui ont diminué, ceci est en cohérence avec ce qui s'observe chaque année. Mais il faut garder à l'esprit que ces publics connaissent par ailleurs de fortes hausses à un an d'écart (+ 6,7% pour les moins de 25 ans, + 12,6% pour le supérieur et + 6,9% pour le secondaire du 3ème degré et 3,1% pour les inoccupations de moins de 6 mois).
Au regard de ces éléments, il serait prématuré (par manque de recul) d'en déduire une tendance à la reprise marquée sur le marché de l'emploi, d'autant plus que l'écart annuel reste stable depuis plusieurs mois ( +- 5%); ce qui en soi est déjà un signe encourageant.
L'honorable Membre m'interroge également sur les 3 aspects principaux du plan « Front pour l'emploi » sur lequel je me suis exprimé en début d'année.
Pour ce qui concerne les indépendants, j'ai décidé de mettre en œuvre différentes mesures afin de favoriser le passage des indépendants complémentaires vers le statut d'indépendant à titre principal.
Pour cela, il faut lever les obstacles et encourager les candidats notamment en termes de formation et de soutien à la création d'entreprise. Ces mesures sont nécessaires dans un contexte de reprise économique, d'encouragement de la création d'activités et du développement des compétences.
Lever les obstacles, c'est développer des outils incitatifs afin de convaincre les candidats d'abandonner le statut plus sécurisant de salarié, ce que vise le Projet d'Airbag. Ce projet est en cours d'élaboration et fait présentement l'objet d'une vérification liée à la concurrence, au niveau européen.
Le stimulant financier utilisé ne consistera pas en points APE, contrairement à la première mouture du projet. Je m'oriente à présent vers une prime mensualisée et dégressive dont les hypothèses de trajectoire sont en élaboration.
Cette prime, outre l'airbag sécuritaire d'un minimum vital, servira surtout à garantir le financement des lois sociales de l'indépendant. Enfin, ce plan prévoit l'accompagnement du candidat, pendant max 2 ans, par une structure reconnue (type SAACE, Ifapme, autre intervenant .... ) afin d'amplifier ses chances de succès.
Encourager, c'est donner un accès a à tous les indépendants complémentaires aux aides, formations et conseils existants en Région wallonne. C'est la raison pour laquelle j'ai prévu l'extension du système chèques formation et les chèques formation à la création d'entreprise, au bénéfice de ces indépendants partiels.
Pour ce qui concerne la coordination entre les services régionaux chargés d'accompagner le demandeur d'emploi et le service fédéral chargé d'évaluer ses efforts, deux modifications majeures sont prévues dans le texte présenté par Mme Milquet au Gouvernement fédéral. Mais les négociations relatives à ce document viennent d'être interrompues.
Deux aspects seront maintenant mieux coordonnés entre les régions et le fédéral.
Le premier a trait au plan d'action. En effet, il est prévu que l'accompagnement pris en charge par le Service régional débutera dès l'inscription au minimum par une information sur les droits et devoirs du demandeur d'emploi. Ensuite, au plus tard avant le 6ème ou le 12ème mois (délai à raccourcir), un contrat ou plan d'action sera convenu entre le chômeur et le FOREM dont les éléments seront transmis à l'Onem ainsi que la description de la manière dont ils ont été mis en œuvre. En d'autres termes, il n'y a plus qu'un seul contrat qui fait foi : celui entre le FOREM et le chômeur et ce contrat est reconnu par l'ONEM. Ceci répond à la question relative au partage des tâches entre l'ONEM et le FOREM pour éviter les problèmes de cohérence entre les deux organismes.
Un deuxième aspect sera mieux coordonné, celui relatif aux publics éloignés de l'emploi. En effet, des modalités spécifiques sont prévues pour les publics éloignés dont les personnes ayant des problèmes psychologiques ou médicaux et celles ayant des problèmes importants de socialisation. Pour ces personnes, un accompagnement adapté sera mis en place au niveau régional, le suivi Onem sera postposé jusqu'à maximum 18 mois et les transferts d'information électroniques ne donneront pas tout de suite lieu à un litige. Par ailleurs, le CFD fera des propositions à moyen terme pour définir comment repérer et transférer vers d'autres mécanismes les personnes « définitivement ou temporairement » non orientable et des publics handicapés.
Pour ce qui concerne la manière dont j'atteindrai mon objectif consistant à atteindre 600 conseillers d'ici juin 2011, je tiens à préciser que je procéderai essentiellement par une logique de réallocation interne au sein du FOREM, sans préjudice des moyens complémentaires dont nous pourrions bénéficier de la part du fédéral dans le cadre de la renégociation du plan d'accompagnement.
Pour cette réallocation interne, trois processus sont déjà en place au sein du FOREM : - différentes fonctions auparavant distinctes ont été fusionnées en une seule fonction de conseiller référent. Ainsi on est déjà passé de 257 ETP à 324 ETP sachant que le processus de formation de ces conseillers est toujours en cours; - une gestion du turnover du personnel est organisée de manière à prioriser le recrutement de conseillers tout en veillant à ne pas pénaliser les autres fonctions critiques de l'Office, notamment les fonctions de formateur. L'objectif est d'atteindre une centaine de postes additionnels; - un appel à candidature interne a été lancé pour permettre à des membres du personnel, notamment du personnel de support, de se repositionner dans une fonction de conseiller avec un appui en termes de formation et de coaching sur le lieu de travail. Le nombre de personnes intéressées n'est pas encore connu. Ensuite, il faudra encore identifier l'écart éventuel de compétences afin de conclure à un nombre possible de personnes pouvant devenir conseillers moyennant une formation et un coaching sur le lieu de travail.
Les 600 ETP devraient ainsi être atteints entre janvier et juin 2011. Ce travail de réallocation repose en outre sur un travail rigoureux. J'ai donc déposé un avant-projet d'arrêté modifiant les arrêtés du Gouvernement wallon du 18 décembre 2003 portant statut des agents de l'office et relatifs aux conditions d'engagement et à la situation administrative et pécuniaire des membres du personnel contractuel de l'Office. Cet avant-projet qui a été adopté en première lecture vise à : - simplifier les profils de recrutement et d'engagement des conseillers pour n'avoir qu'un seul type de profil (les spécialisations éventuelles se faisant ensuite lors de l'affectation à des services ou postes de travail); - élargir les critères d'accès à cette fonction de conseiller; - accélérer les processus de recrutement/engagement; - mettre en place l'encadrement nécessaire par des processus de validation des compétences et des épreuves d'accession au niveau supérieur.
Enfin, pour de qui concerne la formation et les métiers critiques, les axes principaux de ma politique sont les suivants : - mettre en place la réforme de l'alternance et expérimenter des formes d'alternance pour demandeurs d'emploi; - renforcer l'offre de formation pour les demandeurs d'emploi dans les métiers critiques dont les métiers verts via le FOREM et ses partenaires, tout en poursuivant la formation des élèves et professeurs dans les centres de compétences et les dispositions prises pour la formation pour les personnes en chômage économique; - poursuivre les efforts menés en matière de formation linguistique à destination des demandeurs d'emploi et des rhétoriciens ou de dernière année de l'enseignement qualifiant; - poursuivre les politiques de stimulation de la formation des travailleurs par le PFI, le Crédit adaptation et le chèque formation; - renforcer la sensibilisation aux métiers techniques et scientifiques par un renforcement de la concertation entre acteurs; - renforcer l'offre d'orientation, tout spécialement en installant des essais métiers permettant au demandeur d'emploi d'avoir une vision concrète de celui-ci; - permettre aux personnes de voir leurs compétences reconnues à l'issue d'une formation ou suite à des expériences de vie et de travail.