/

Le déficit en soins bucco-dentaires des Wallons

  • Session : 2009-2010
  • Année : 2010
  • N° : 100 (2009-2010) 1

2 élément(s) trouvé(s).

  • Question écrite du 13/04/2010
    • de BERTOUILLE Chantal
    • à TILLIEUX Eliane, Ministre de la Santé, de l'Action sociale et de l'Egalité des chances


    Selon des données dévoilées par l’INAMI, les Wallons ne sembleraient pas accorder autant d’attention à leurs dents que les Flamands. Il s’agirait essentiellement d’une moindre consommation de soins préventifs, notamment moins de visites de contrôle, moins de détartrage chez le dentiste, etc.

    Madame la Ministre peut-elle, dans un premier temps, me dire si ces chiffres ont été confirmés par les constatations effectuées par l’Observatoire wallon de la santé ? Ces données concordent-elles également avec celles qui ont été recueillies par l’Observatoire de la Santé en Province de Hainaut ?

    Il semblerait également que les problèmes bucco-dentaires restent préoccupants au sein des populations en situation de précarité. Selon la Ministre Laanan, que j’avais interrogée à ce sujet, ces populations en situation de précarité sont celles pour lesquelles la prévention reste difficile d’accès, non pas dans ses moyens mais dans son concept même.

    Ne conviendrait-il pas selon Madame la Ministre, en concertation avec éventuellement la Communauté française, de mener des campagnes, peut-être plus ciblées pour les populations précarisées, sur la problématique et sur toute l’importance des soins préventifs en matière bucco-dentaire ?
  • Réponse du 06/05/2010
    • de TILLIEUX Eliane

    Les données INAMI sur la consommation de soins bucco-dentaires apportent des informations plus nuancées qu'une simple comparaison Wallons/Flamands. On note des différences très significatives entre les Régions en termes de recours aux soins curatifs, aux soins préventifs, mais aussi aux soins pour les enfants. Des différences plus marquées encore existent entre provinces et/ou arrondissements : certains arrondissements de Wallonie ont une consommation de soins bien supérieure à certains arrondissements de Flandre.

    Effectivement, globalement parlant, l'Observatoire wallon de la Santé (OWS) a constaté un déficit de recours aux soins bucco-dentaires. Le tableau de bord de la santé 2009 reprend quelques chiffres issus de l'enquête nationale de santé par interview qui confirment les chiffres rapportés dans la presse : en Wallonie, seules 4 personnes sur 10 avaient eu en 2004 un contact avec leur dentiste dans l'année qui précède alors qu'ils étaient un peu plus de 5 sur 10 en Flandre.

    En 2008 toutefois, les nouveaux chiffres de l'Enquête Nationale de Santé par interview montrent une amélioration significative dans la déclaration du recours aux soins : moins de personnes totalement édentées, moins de personnes portant une prothèse dentaire, moins de personnes ayant des difficultés à mâcher des aliments durs. Par contre, la proportion de personnes qui déclarent se brosser les dents deux fois par jour au moins en 2008 est la même qu'en 2004. Pour maintenir une bonne santé bucco-dentaire, on distingue deux types de comportements clés :
    - d'une part l'hygiène bucco-dentaire : brossage régulier des dents, consommation d'aliments et de boissons qui n'abîment pas les dents (pas de boissons acides ou sucrées, surtout pas en consommation « sirotante » continue et prolongée);
    - d'autre part, le recours régulier (2 fois par an) aux soins bucco-dentaires.

    Ces déterminants permettent aisément de comprendre que si on observe depuis quelques années d'énormes améliorations de la santé bucco-dentaire de manière globale, on assiste par ailleurs à une dualisation du tableau épidémiologique avec une amélioration bien moindre, voire une dégradation dans certains groupes de population.

    Les groupes défavorisés au niveau socio-économique ont clairement plus de difficultés à maintenir une bonne santé bucco-dentaire et certains groupes particulièrement fragilisés, comme les personnes handicapées ou les personnes âgées vivant en institution, n'ont pas les moyens d'avoir une hygiène dentaire adéquate ni un recours optimal aux soins. Il en va probablement de même pour les personnes ayant des difficultés à se déplacer de manière globale.

    On sait par ailleurs que la question de l'alimentation est cruciale chez les personnes très âgées, le maintien d'une fonction masticatoire correcte est fondamentale pour leur état nutritionnel et, au-delà, pour leur autonomie. Cette dernière s'altère très vite en cas de dénutrition, très fréquente chez la personne âgée comme plusieurs études l'ont démontré.

    Les soins dentaires sont, sans doute avec les soins de la vue, ceux qui sont le plus susceptibles d'être affectés par les inégalités sociales de santé. Dès lors, la santé bucco-dentaire est un domaine où la collaboration entre les différents niveaux de pouvoir en matière de santé est nécessaire pour plus d'efficacité.

    On observe depuis plusieurs années, à l'échelon national, un investissement massif en matière de prévention et d'amélioration de l'accessibilité financière aux soins :
    - l'expérience du DENTIPASS financée par l'INAMI qui a permis d'aboutir à la décision de gratuité des soins dentaires jusqu'à 12 ans depuis septembre 2005, jusqu'à 15 ans depuis juillet 2008 et jusqu'à 18 ans depuis mai 2009;
    - les campagnes de « Sourire pour tous » dans les écoles et auprès de la petite enfance. En 2007, une analyse du recours aux soins dentaires a montré que ce dernier était bien plus élevé qu'en Flandre chez les moins de 12 ans alors qu'il restait bien plus bas chez les adultes. Cette constatation avait d'ailleurs fait l'objet d'une question parlementaire de la part d'un parlementaire flamand. Voir annexe;
    - l'enquête réalisée par l'Observatoire de la Santé du Hainaut et la Fondation pour la Santé Dentaire en 2005-2006 qui a contribué à une mobilisation importante du secteur de la promotion de la santé à l'école et bien mis en évidence d'une part l'amélioration de la santé dentaire, mais aussi la dualité sociale de la réalité;
    - la mobilisation de deux provinces en lien avec la campagne « Sourire pour tous » : le Luxembourg et le Hainaut;
    - la communauté française a inscrit la santé bucco-dentaire parmi ses 10 priorités et finance, entre autres, des projets pour augmenter la consommation d'eau potable à l'école;
    - une grande enquête épidémiologique sur la santé bucco-dentaire a été mise en œuvre en octobre 2009 par l'INAMI en collaboration avec les universités et l'Institut Scientifique de Santé Publique. Elle constituera la source principale d'informations sur la santé bucco-dentaire de la population belge et donnera une image claire des besoins en soins dentaires et en personnel pour le futur.


    Il n'entre pas dans les compétences de la Région wallonne de mener des campagnes de prévention. Par contre, il convient de prendre en charge certaines dimensions de la problématique en complémentarité avec les actions menées aux autres niveaux de pouvoir.

    Ainsi, dans le cadre de la politique que j'entends développer en faveur des aînés, un de mes objectifs est de promouvoir des initiatives spécifiques qui visent à améliorer les facteurs de santé qui influencent la qualité de vie et le niveau d'autonomie des aînés. Un de ces facteurs est la détérioration de la santé bucco-dentaire des aînés et je compte encourager des initiatives tant au niveau du maintien à domicile qu'à celui de l'accueil et de l'hébergement.

    De plus, dans le cadre de la lutte contre les inégalités sociales en matière de santé, une collaboration vient de démarrer entre l'Observatoire Wallon de la Santé et la Fondation Roi Baudouin qui vise à :
    - stimuler les décideurs locaux à prendre des initiatives favorables à la réduction des inégalités sociales de santé, en expliquant les enjeux et en suggérant des possibilités d'action;
    - accompagner les acteurs locaux dans l'élaboration, le suivi et l'évaluation de leur projet, en collaboration avec les autres institutions et organisations concernées;
    - mener une réflexion sur les bonnes pratiques dans ce domaine.