/

Le taux de suicide chez les personnes âgées

  • Session : 2009-2010
  • Année : 2010
  • N° : 105 (2009-2010) 1

2 élément(s) trouvé(s).

  • Question écrite du 22/04/2010
    • de CASSART-MAILLEUX Caroline
    • à TILLIEUX Eliane, Ministre de la Santé, de l'Action sociale et de l'Egalité des chances
    Alors que le suicide chez les jeunes est plus régulièrement abordé, le mal-être des personnes âgées est plus méconnu ou ne fait pas l’objet de la même attention. Je le déplore et pour cause, ces chiffres :
    Le taux de suicide des 65-74 ans est de 23,4 pour 100.000 en Belgique ;
    De 39,7 après 75 ans ;
    Pour les femmes, il est respectivement de 13,6 pour 100.000 pour les 65-74 ans et de 15,6 au-delà ;
    Pour les hommes, il est de 35,5 pour les 65-74 et de 86,8 au-delà de cette tranche d’âge ;
    Les provinces de Hainaut et de Liège semblent plus touchées que les autres ;
    Le taux de suicide est deux fois plus important en maison de repos qu’au domicile ;
    Sur les 2146 suicides annuels en Belgique, plus de 350 concernent les hommes de plus de 65 ans et 150 des femmes de plus de 65 ans.

    Je me réfère à des données datant de 1997. Treize ans plus tard, ces résultats méritent d’être mis à jour.

    Madame la Ministre compte-t-elle faire de cette problématique une de ses priorités au cours de cette législature ?
    Si oui, comment compte-t-elle la concrétiser cette année 2010, les prochaines années ensuite ?
    Dispose-t-elle de chiffres plus récents ?

    Lors de la précédente législature, un référentiel qualité devait voir le jour afin d’intégrer un ensemble d’éléments tels que l’administration des soins, les activités socioculturelles, etc. Ce référentiel existe-t-il ? A-t-il bénéficié d’une première évaluation ?

    Estime-t-elle qu’il y a urgence à trouver des mesures spécifiques d’aide à ces personnes en souffrance ?

    Y a-t-il une différenciation du taux de suicide des personnes âgées en fonction de la Province dans laquelle elles résident ?

    Quel est le taux de suicide des personnes âgées vivant seules ou en lieu de placement ? Y a-t-il une différence majeure entre ces deux résultats ? Si oui, quels en sont les facteurs explicatifs ?

    Y a-t-il une réflexion en cours sur le sujet ? Des contacts ont-ils été pris avec le Centre de Prévention Suicide ? Si oui , de quel ordre ? Travaille-t-elle ensemble sur ce problème de société ?

    Des mesures concrètes de détection et de prévention ont-elles été prises tant pour les personnes âgées vivant en institution que pour les personnes seules restées à domicile ? Et avec quel dispositif ?

    Comment sensibiliser l’entourage familial et médical de nos aînés ? Qu’a-t-elle entrepris récemment dans ce sens ?

    Quel budget le Gouvernement wallon a-t-il prévu pour aborder cette problématique ?

    Si on ne peut malheureusement pas empêcher totalement ces actes irrémédiables, on peut toutefois en réduire le taux. Dès lors, quelle échéance s'est-elle fixée pour noter les effets positifs de ses mesures ?

    Nous sommes face à un réel problème sociétal. Il intervient à une période de la vie où pour ces personnes âgées, la mort se profile comme étant dans l’ordre naturel des choses, contrairement aux jeunes qui ont encore de nombreuses années de vie devant eux. Ce n’est pas une raison pour ne pas accorder une attention particulière à ces personnes qui ont droit à une aide et un soutien aussi appuyés que nos jeunes.
  • Réponse du 19/05/2010
    • de TILLIEUX Eliane

    La question du suicide des personnes âgées est encore un sujet tabou et est trop souvent sous-estimée.

    Proportionnellement, le suicide serait aussi fréquent chez les personnes âgées que chez les adultes plus jeunes et il serait même plus fréquent chez les hommes âgés.

    Concernant des chiffres relativement récents, le « Tableau de bord de la santé en Région wallonne » précise qu'une tentative de suicide sur quatre chez la personne âgée mène au décès, alors que la proportion est d'une sur douze chez les jeunes.

    Pour la Wallonie précisément, les données qui viennent de paraître dans l'enquête nationale de santé, rapportent que « l'âge ne joue pas un rôle significatif dans la distribution des taux de pensées suicidaires (14% à 16% dans les groupes d'âge de 15 à 74 ans), si ce n'est qu'elles sont moins souvent rapportées chez les personnes âgées de 75 ans et plus (8%). Les femmes déclarent plus souvent avoir eu ces pensées que les hommes (17% contre 12%).

    Selon les données de 2004 (l'analyse par province n'étant pas encore disponible pour 2008), dans toutes les provinces wallonnes, à l'exception du Luxembourg, la proportion de femmes de 65 ans et plus déclarant avoir eu des idées suicidaires est supérieure à la proportion féminine nationale. Pour les hommes, seule la province du Hainaut présente un taux supérieur au taux belge.

    Pour la Belgique, le pourcentage des personnes ayant eu des pensées suicidaires au cours de leur existence est stable dans le temps. La différence, - 0,5% entre 2004 et 2008, n'est pas significative après standardisation pour l'âge et le sexe.

    Les données sur les pensées suicidaires donnent une information partielle. En effet, les suicides « aboutis » entrent plus en ligne de compte. Or on sait que chez les personnes âgées, les tentatives sont plus souvent abouties.

    L'analyse des causes de décès pourrait confirmer que le suicide reste une cause importante de décès chez les personnes âgées et surtout chez les hommes.

    Le principal groupe à risque est constitué par les hommes âgés de 85 ans et plus, 55 pour 100000, selon une étude flamande.

    Notons aussi qu'il est probable que ces chiffres de prévalence constituent encore une sous-estimation du problème, dans la mesure où les décès dus à des formes moins manifestes (exemple: refus de nourriture et/ou de médications) ne sont pas repris dans ces statistiques.

    Bien plus, il semblerait que les personnes âgées institutionnalisées expriment davantage d'idées morbides et d'idées suicidaires que les personnes vivant encore chez elles. La littérature internationale rapporte que cela concerne 4% des sujets âgés institutionnalisés.

    On ne dispose pas de données de prévalence belges concernant ces personnes.

    L'ensemble de ces chiffres est à prendre avec précaution.

    En effet, la science ne s'est pleinement intéressée à ce thème que depuis la dernière décennie. Les études sont encore relativement limitées même si nous observons un phénomène de rattrapage qui permet d'offrir des pistes qui amènent le politique à considérer le phénomène et la clinique à enrichir ses pratiques.

    A cet égard, la Région wallonne souligne qu'elle dispose de services de santé mentale dont trois ont développé des initiatives spécifiques qui s'adressent particulièrement aux personnes âgées (Louvain-la-Neuve, Malmédy et Namur). Ces initiatives exercent leurs activités très largement, sur les territoires visés et soutiennent non seulement un travail clinique mais aussi un important travail de soutien aux professionnels du réseau, en particulier institutionnel.

    Par ailleurs, la Région soutient également depuis 2009, dans le cadre d'une convention, l'asbl « Un pass dans l'impasse », en sa qualité de spécialiste en matière de suicide.

    Cette association, implantée à Namur, dispose de diverses antennes, et offre un lieu d'écoute aux personnes directement ou indirectement confrontées à la problématique du suicide.

    De plus, elle occupe une position de relais et d'appui, dès lors qu'elle collabore avec un large réseau, en ce compris les professionnels concernés par l'accompagnement ou la prise en charge des seniors.

    La Région wallonne intègre aussi dans son dispositif cinq centres de Télé Accueil agréés organisant une écoute téléphonique anonyme et accessible 24 heures sur 24. Ces centres s'adressent aux personnes en demande de soutien psychologique ou en état de crise. Ils ont aussi pour mission d'orienter la personne vers un service adapté. Les rapports d'activités des centres de télé-accueil montrent que, si les personnes âgées ne s'adressent pas aux services de santé mentale en situation de crise, de solitude ou d'isolement, elles recourent plus aisément à cette écoute téléphonique. La question du suicide représente 2% des appels adressés à ces centres.

    Quant au référentiel « qualité » qu'évoque l'honorable Membre, il est à l'étude. Il constitue un objectif et pourrait contenir un point relatif à une forme de collaboration avec des services spécialisés en matière de suicide. Quant à la charte qualité qu'elle évoque, celle-ci est décrite dans le décret du 30 avril 2009 relatif au secteur d'accueil et d'hébergement des personnes âgées. Sa mise en pratique est actuellement à l'examen pour atteindre les objectifs opérationnels prévus.

    En termes de perspectives, le décret relatif aux services de santé mentale entré en vigueur au premier janvier 2010 prévoit la reconnaissance de centres de référence spécifiques.

    Ma volonté, compte tenu de l'ampleur du phénomène et des besoins révélés, est d'en consacrer un à la problématique du suicide.