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Les recommandés électroniques

  • Session : 2009-2010
  • Année : 2010
  • N° : 312 (2009-2010) 1

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  • Question écrite du 17/05/2010
    • de SENESAEL Daniel
    • à FURLAN Paul, Ministre des Pouvoirs locaux et de la Ville

    Le Ministre Van Quickenborne annonce l'arrivée prochaine des recommandés électroniques. Il espère tout du moins que la loi soit adoptée avant cet été. Son objectif est d'arriver à 50 % de recommandés électroniques à l'horizon 2015. Ceux-ci devraient ne coûter que 50 cents pour 5,20 euros en moyenne aujourd'hui.

    Monsieur le Ministre a-t-il vent de ce projet ? Ce procédé ne sera-t-il réservé qu'aux entreprises privées ou sera-t-il également possible pour les administrations communales de les utiliser?
  • Réponse du 04/08/2010
    • de FURLAN Paul


    Contexte

    Depuis plusieurs années, la Région wallonne a mis en place un vaste programme de simplification administrative et d'e-gouvernement, traduit dans sa Déclaration de Politique Régionale et dans le Plan de simplification administrative et d'e-gouvernement.

    L'objectif visé est de permettre aux usagers et aux administrations de gagner du temps et de réduire leurs coûts, en simplifiant et en accélérant les procédures, tout en maintenant celles-ci dans un cadre sécurisant et conforme à la législation.

    La simplification administrative passe par la simplification des textes qui soustendent les procédures administratives. Cette simplification doit se faire à deux niveaux: d'une part, simplifier l'arsenal des textes existants, en procédant à leur révision lorsque c'est nécessaire, d'autre part, veiller à ce que les nouveaux textes adoptés soient rédigés clairement, lisiblement et générateurs de moins de charges pour l'usager.

    A cet égard, l'exigence d'un envoi par lettre recommandée, avec ou sans accusé de réception, est des pll,Js fréquentes et des plus lourdes à satisfaire dans les procédures administratives. On la retrouve à ce point fréquemment dans les textes, en toutes circonstances, qu'on peut se demander si cette formalité n'est pas devenue davantage une habitude qu'une nécessité. C'est dans ce cadre qu'il est recommandé de recourir au maximum à un autre mode d'envoi que l'envoi recommandé.

    Toutefois, une telle démarche nécessite une réflexion sur les garanties et les objectifs du recommandé, les alternatives possibles et la manière de mettre en place ces alternatives à travers les textes.

    Le Commissariat Easi-Wal a dès lors commandé, via un marché public, une étude au CRID (Centre de recherche informatique et droit) sur l'identification d'alternatives à l'envoi recommandé.

    L'envoi recommandé

    L'envoi recommandé est défini en droit belge comme un «service consistant à garantir forfaitairement contre les risques de perte, vol ou détérioration et fournissant à l'expéditeur, le cas échéant à sa demande, une preuve du dépôt ou de l'envoi postal et/ou de sa remise au destinataire » (article 131, 80 de la loi du 21 mars 1991 portant réforme de certaines entreprises publiques économiques).

    Après analyse, il s'avère que le recommandé postal est une institution relativement modeste eu égard aux garanties qu'il apporte. Le dépôt à la Poste d'une lettre recommandée permet tout au plus d'établir la date du dépôt (mais sans certitude que la lettre soit parvenue à destination), et, le cas échéant, sa bonne réception par le destinataire (recommandé avec accusé de réception). Le recommandé n'apporte donc pas toutes les garanties qu'on pourrait croire de prime abord : la preuve de l'identité de l'émetteur, la preuve de l'identité du destinataire, la preuve du contenu du message ou la preuve de la date et de la date certaine. Ces éléments ne reposent que sur des présomptions basées sur la pratique postale habituelle.

    Il arrive fréquemment et dans des matières diverses que la réglementation impose le recours à l'envoi recommandé pour accomplir certaines formalités. Or, à la lecture de différentes réglementations, on constate que les formulations utilisées sont variées, parfois maladroites, parfois incorrectes au vu des réelles garanties du recommandé.

    Les alternatives à l'envoi recommandé

    Lorsque l'envoi recommandé se justifie, il est pertinent d'offrir aux usagers et aux administrations la possibilité de le remplacer par des procédés alternatifs plus légers et plus simples à utiliser.

    L'étude du CRID a permis d'identifier différentes alternatives :

    - le recommandé électronique;
    - la technique des clauses transversales;
    - le dépôt contre récépissé;
    - le dépôt contre récépissé électronique;
    - le développement d'une plate-forme de gestion des procédures.

    Ces alternatives ne varient pas selon le type d'administration.

    Après analyse de ces différentes alternatives, la conclusion est que le recommandé électronique est l'alternative la plus appropriée. Cette solution électronique présente l'avantage direct et immédiat d'être accessible en permanence et de ne nécessiter aucun déplacement.

    Le recommandé électronique est une transposition du recommandé papier à l'univers numérique. Cette alternative rencontre les fonctions, objectifs et garanties du recommandé papier sans ses inconvénients (car il supprime la nécessité de se déplacer et de tenir compte d'horaires d'ouverture). En outre, un service de recommandé électronique permet l'intervention d'un tiers de confiance, indépendant de l'administration et des usagers et qui délivre les documents et les accusés d'envoi et de réception de manière impartiale.

    Toutes les fonctions probatoires du recommandé traditionnel peuvent être remplies par le recommandé électronique, avec une fiabilité identique voire supérieure. Il permet de démontrer aisément l'existence d'un envoi, sa réception par le destinataire et l'heure et la date de ces opérations. En plus de ces garanties de base, le recommandé électronique apporte un « plus» appréciable en permettant d'attester que le contenu adressé au destinataire coïncide effectivement avec le contenu allégué par l'expéditeur, voire que le courrier a été effectivement lu (ou en tout cas ouvert). Enfin, les moyens techniques utilisés dans le cadre du recommandé électronique permettent de renforcer la qualité de la preuve apportée par rapport au recommandé papier. Les garanties probatoires sortent donc renforcées du passage à l'électronique. Mieux qu'un équivalent, le recommandé électronique constitue une avancée en terme de sécurité juridique par rapport au recommandé papier.

    Selon les chiffres mis récemment en avant par le Ministre Van Quickenborne, en charge de la simplification administrative, l'utilisation du recommandé électronique entraînerait une économie d'environ 80 millions d'euros par an pour l'ensemble des expéditeurs mais aussi un gain de 4,2 millions d'heures par an (ou 531.000 jours) si l'on considère qu'il faut en moyenne 15 minutes pour récupérer un recommandé à La Poste.

    Mise en œuvre du recommandé électronique en Région wallonne

    La mise en œuvre du recommandé électronique en Région wallonne nécessite des adaptations légales au niveau européen et au niveau belge.

    A ce jour, le recommandé électronique bénéficie d'une reconnaissance légale tant au niveau européen (directive 97/67/CE concernant des règles communes pour le développement du marché intérieur des services postaux de la Communauté et l'amélioration de la qualité du service) qu'au niveau belge (article 144octies de loi du 21 mars 1991 portant réforme de certaines entreprises publiques).

    A la lecture parallèle de ces deux textes, une contradiction apparaît : pour le droit européen, le recommandé électronique ne peut être accompagné d'un monopole au profit de la Poste, tandis que le droit belge maintient un monopole au profit de la Poste. De plus, la loi ne précise nullement à quelles conditions un recommandé électronique peut être assimilé à un recommandé papier et à quelles conditions un recommandé électronique remplit valablement une exigence légale.

    La Région wallonne n'est donc pas compétente pour établir une législation générale sur le recommandé électronique. Différents niveaux d'intervention sont nécessaires:

    1° Au niveau européen : prévoir l'harmonisation des services de confiance dans une directive, à l'instar de ce qui existe pour la signature électronique, en vue d'établir la confiance nécessaire entre les Etats membres pour que les principes du pays d'origine et de reconnaissance mutuelle puissent s'appliquer pleinement.

    Pour parvenir à cette harmonisation, deux opportunités sont envisageables: soit la notification d'un projet de loi à la Commission européenne, ce qui la forcerait à prendre position; soit la présidence belge de l'Union au second semestre 2010 qui permettrait de placer la question des services de confiance en bonne place dans l'agenda communautaire

    2° Au niveau fédéral :

    a) Modifier la loi du 9 juillet 2001 sur la signature électronique et les services de certification pour y intégrer des dispositions relatives au recommandé électronique. Cela favoriserait la cohérence entre les réglementations des différents services de confiance.

    Cette intégration présente toutefois quelques difficultés : confusion des services de confiance, spécificités de la loi du 9 juillet 2001, mélange de dispositions harmonisées (la signature électronique est une transposition d'une directive) et non-harmonisées.

    b) Adopter une nouvelle loi sur les prestataires de services de confiance : cette nouvelle loi soit compléterait la loi du 15 mai 2007 qui fixe un cadre juridique pour certains prestataires de services de confiance, soit l'abrogerait et établirait un cadre juridique complet pour les services de confiance.

    Calendrier de mise en œuvre

    Comme l'honorable Membre a pu le constater, la mise en œuvre du recommandé électronique en Région wallonne nécessite différentes interventions à différents niveaux de pouvoir.

    Bien conscient que le recommandé électronique est une mesure de simplification administrative, le Gouvernement wallon a, dans le cadre de la mise en œuvre du nouveau plan de simplification administrative 2010-2014, inscrit comme mesure prioritaire la mise en œuvre effective du recommandé électronique à l'horizon 2012 et a chargé le Commissariat Easi-Wal de mener les actions nécessaires à la bonne réalisation de cet objectif.

    L'objectif est d'intervenir de manière à faire évoluer le champ normatif fédéral et européen de manière à créer un cadre réceptif à la mise en place d'un envoi recommandé dématérialisé (électronique) et implémenter effectivement cette alternative pour les procédures wallonnes. Une campagne de sensibilisation à différents échelons est indispensable.

    Pour y parvenir, différentes actions concrètes sont déjà envisagées:

    - dans le cadre du comité de concertation simplification administrative, ce projet sera inscrit dans le plan d'action 2010 mené conjointement par l'Agence de simplification administrative et les entités fédérées;

    - des contacts ont d'ores et déjà été pris avec le cabinet du Ministre Van Quickenborne en charge de la simplification administrative au niveau fédéral. En effet, des projets de loi sur le sujet sont en réflexion. Cependant, le projet de loi que l'honorable Membre mentionne dans sa question a été examiné par le Commissariat Easi-wal mais n'a pu être déposé au Parlement à la suite de la chute du Gouvernement fédéral. L'utilisation des recommandés concernaient les entreprises mais aussi les pouvoirs publics et les citoyens. Le Commissariat Easi-wal et moi-même ne manquerons pas de solliciter le nouveau Ministre fédéral en charge de la simplification administrative sur ce projet de loi;

    - des contacts vont également être pris dans le cadre de la Présidence belge de l'Union européenne au second semestre 2010. Le Commissariat EasiWal compte organiser une réunion à ce sujet;

    - dans le cadre des recommandations émises par le Commissariat EasiWal sur les projets de textes en terme de simplification administrative et de lisibilité, celui-ci préconise d'insérer une formulation type permettant dans le futur de reconnaître le recommandé électronique.