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Les salles de consommation de drogues

  • Session : 2009-2010
  • Année : 2010
  • N° : 175 (2009-2010) 1

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  • Question écrite du 16/09/2010
    • de SENESAEL Daniel
    • à TILLIEUX Eliane, Ministre de la Santé, de l'Action sociale et de l'Egalité des chances

    Ouvrir des salles de consommation encadrées pour usagers de drogue ? Le débat enfle chez nos voisins français et transcende les clivages politiques traditionnels entre experts, associations et élus, sur un dispositif qui fait ses preuves à l’étranger.

    La première salle de consommation implantée en Europe date du milieu des années 80. En 2003, six pays ont adopté cette mesure : la Suisse, les Pays-Bas, l’Allemagne, l’Espagne, le Canada et l’Australie. En Europe, en cette même année, on comptait 72 salles de consommation dans 39 villes européennes. Depuis 2009, des salles de ce type existent dans 6 pays européens (le Luxembourg et la Norvège se sont joints aux pays pionniers).

    Encadrées par des professionnels, les salles de consommation sont des espaces qui offrent aux usagers de drogues un cadre d’usage sécurisé, en dehors des lieux publics, où ils peuvent consommer dans des conditions d’hygiène acceptables.

    Leur fonctionnement est souvent réglementé : l’accès est restreint et limité aux porteurs d’une carte d’admission. En outre, les consommateurs doivent respecter un certain nombre de mesures d’hygiène et de sécurité et le personnel n’est pas tenu d’aider à l’administration des substances. Il observe les pratiques des usagers et intervient en cas de nécessité. Le personnel compte des travailleurs sociaux, infirmiers… formé pour répondre à des situations d’urgence sanitaires chez les usagers de drogues.

    Ces salles sont nées pour répondre aux problèmes rencontrés par les usagers de drogues en situation de grande précarité et à fort risque de contamination ou de transmission de maladies infectieuses.
    Cette mesure s’attache à prévenir les dommages liés aux drogues pour l’individu lui-même mais également pour la société (usages de drogues dans les lieux publics…).

    Des études démontrent que ces salles permettent d’établir un contact avec un groupe hautement problématique de consommateurs de drogue et à promouvoir l’accès de ceux-ci à des soins de santé primaires dont ils ont grandement besoin ainsi qu’aux services sociaux et de traitement.

    quelles sont les réactions de Madame la Ministre ?

    Peut-on envisager de lancer un débat sur l’ouverture de tels lieux en Région wallonne ?

    Madame la Ministre a-t-elle déjà reçu des demandes de professionnels dans ce sens ?





  • Réponse du 12/10/2010
    • de TILLIEUX Eliane

    L'honorable Membre me questionne à propos des salles de consommation de drogue.

    D'emblée, je tiens à souligner que pareille initiative est inexistante sur le territoire belge. En effet, la législation actuelle ne le permet pas.

    L'ouverture de salles de consommation encadrées pour usagers de drogues fait effectivement débat en Europe mais aussi en Belgique et l'idée d'un consensus en la matière n'est pas aboutie aujourd'hui.

    Par ailleurs, il convient d'aborder le projet liégeois porté par la « Fondation privée Tadam » en réflexion depuis plusieurs années, tant les accords et les conditions qu'il nécessite et doit remplir sont considérables, eu égard à la spécificité de ce projet pilote.

    Précisément, il s'agit d'un projet de traitement assisté par diacétylmorphine. Cette expérimentation médicale est réalisée sous le protocole et l'évaluation scientifique de l'Université de Liège.

    L'objectif de celui-ci consiste à vérifier si ce type de traitement est plus efficace que les traitements existants à base de méthadone pour le groupe cible concerné, à savoir les patients sévèrement dépendants aux opiacés et dit « résistants » (patients qui n'entrent pas dans les traitements disponibles ou qui les suivent de façon chaotique ou qui vivent des échecs répétés).

    Nous parlons donc d'une étude contrôle qui concernent 200 sujets aléatoirement répartis en deux groupes parallèles de patients sévèrement dépendants à l'héroïne, recevant sous contrôle médical, soit de la diacétylmorphine (groupe expérimental), soit de la méthadone (groupe contrôle).

    Il en est actuellement à sa phase de préparation et l'inclusion des patients ne saurait tarder.

    La Ville de Liège et la Fondation se sont d'ailleurs engagées à entamer les traitements dans les dix jours à dater de la réception des produits. L'autorisation annuelle d'acquisition et de détention des produits a été donnée en date du 24 septembre 2010.

    Bien évidemment, ce projet de salle d'injection a fait, et fait encore, débat. Il est l'objet de nombreuses opinions controversées en matière de réduction des risques.

    A ce titre, il est important de savoir que la « Fondation privée Tadam » a pour but de favoriser, de développer et de promouvoir en Belgique le traitement médical des troubles liés aux substances psycho-actives, en ce compris l'expérimentation et le soutien de la recherche scientifique sur le traitement assisté par diacétylmorphine. Elle veut également participer activement aux expérimentations autorisées dans ce domaine par la création, l'exploitation et la gestion de services spécialisés dans la prescription, la délivrance sous contrôle médical de produits de substitution, en ce compris la diacétylmorphine, et s'associer au suivi socio-sanitaire des patients toxicomanes. Les patients des deux groupes bénéficieront, entre outre, d'un suivi psycho-social.

    Ce projet fait l'objet d'un co-financement fédéral (Fonds de lutte contre les assuétudes) et régional; la Ville de Liège intervient également. Il s'agit là d'une thématique transversale mais aussi complexe qui suscite l'intérêt de différents ministères au sein de l'Etat fédéral et des entités fédérées.

    La Belgique dispose d'ailleurs d'une instance qui a pour objet de réunir ces différentes autorités, afin d'aboutir à des mesures concertées et coordonnées en matière de drogues : la Cellule Générale de Politique Drogues (CGPD) qui émane de la Conférence Interministérielles Drogues où la Wallonie est évidemment représentée.

    Ce projet liégeois constitue, rappelons le, un projet pilote et seule une évaluation à mesure et rigoureuse permettra de se prononcer sur la pertinence et l'opportunité de poursuivre et/ou de déployer pareille initiative.