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La santé et l'environnement

  • Session : 2009-2010
  • Année : 2010
  • N° : 176 (2009-2010) 1

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  • Question écrite du 20/09/2010
    • de STOFFELS Edmund
    • à TILLIEUX Eliane, Ministre de la Santé, de l'Action sociale et de l'Egalité des chances

    Dans le tableau de bord de la santé en Wallonie, j’ai pu découvrir d’une part que l’ISSEP, travaillant pour le compte de la DGO3, gère des stations de mesures fournissant en temps réel et continu les informations sur les concentrations dans l’air de l’ozone, des NO², du CO, du SO² et des particules en suspension.

    D’autre part, les équipes de Madame la Ministre ont pu établir un parallélisme entre les données ainsi récoltées et l’apparition de maladies touchant les voies respiratoires (bronchiolites, asthme). Et je tiens à remercier les équipes pour la qualité de leur travail.

    Evidemment, plusieurs facteurs influencent l’état de santé et en particulier des voies respiratoires : tabagisme, qualité de l’air intérieur des logements et des lieux de travail …

    Ce qui me frappe pourtant, c’est que les jeunes enfants (et particulièrement les bébés de moins d’un an) soient tellement touchés par le problème. Les données datant, suivant les sources mentionnées, de 2005 et illustrent la problématique entre 2002 et 2005.

    Sur 1.000 garçons de moins d’un an, 67,9 ont dû être hospitalisés pour des motifs liés à la bronchiolite. Pour les filles, le rapport est de 50,9 sur 1.000. Pour l’asthme, les rapports sont de 0,98 sur 1.000 (garçons) et de 0,8 sur1.000 (filles).

    Dans les deux cas, il apparaît que les garçons sont nettement plus exposés au problème que les filles. Y a-t-il une raison qui explique cela ? Est-ce que les garçons réagissent de façon encore plus sensible que les filles aux pollutions atmosphériques ?

    Ce qui frappe aussi, c’est le nombre d’enfants souffrant d’asthme ou de bronchites à répétition. Ce sont probablement les enfants ayant déjà une disposition physique caractérisée par le risque plus élevé d’être hospitalisé pour des raisons d’asthme ou de bronchite, qui réagissent de façon plus sensible aux pollutions de l’air – ce qui meut mener à des bronchites chroniques voire à des crises d’asthme de plus en plus poussées. Madame la Ministre peut-elle nous donner plus d’informations sur cet aspect de la question (la chronicité des maladies) ?

    Dans la même publication, on découvre des cartes renseignant sur le taux d’hospitalisation pour asthme. Les cartes sont basées sur l’échelle arrondissement. A une telle échelle, les statistiques disponibles ont tendance à cacher autant qu’elles ne dévoilent les informations précises. Le fait que pour la période de référence on n’ait pas détecté de problèmes dans certains cantons alors que pour d’autres on constate une concentration de problèmes donne à l’échelle arrondissement un résultat trop peu précis. Est-il donc envisageable de publier une cartographie plus détaillée (p.ex. canton par canton) – ce qui permettrait de formuler plus aisément des hypothèses quant aux liens de cause à effet entre les pollutions et les effets sur la santé ?
  • Réponse du 13/10/2010 | Annexe [PDF]
    • de TILLIEUX Eliane

    Je remercie l'honorable Membre pour l'attention et la reconnaissance qu'il accorde au travail de l'Observatoire Wallon de la Santé par l'intermédiaire de son tableau de bord de la Santé.

    Il importe de bien rappeler, comme le fait d'ailleurs le chapitre VI du Tableau de bord concernant les hospitalisations pour asthme et bronchiolite, que les chiffres ne permettent pas d'établir un lien avec la pollution atmosphérique.

    Si un nombre important de maladies touchant les voies respiratoires chez les jeunes enfants peut être relevé, il convient, de tenir compte, dans la lecture des données, de plusieurs éléments, notamment :
    - la difficulté de poser un diagnostic de certitude avant l'âge de 5 ans. De nombreux virus (1) provoquent des symptômes similaires à ceux de l'asthme dans l'enfance, surtout la première année de vie où les nourrissons commencent à acquérir leur propre immunité (diminution des anticorps protecteurs de leur mère). C'est le cas notamment de la bronchiolite ou des bronchites aiguës (inflammation aiguë des bronches à prédominance auto­hivernale), qui sont en majorité d'origine virale;
    - d'autre part, aussi détaillée soit la cartographie, elle ne permettra pas de formuler des hypothèses quant à un lien plausible avec la pollution atmosphérique, puisque les hospitalisations reflètent soit une mauvaise prise en charge de l'asthme (ou de la bronchiolite) à domicile, soit une prise en charge de l'angoisse bien compréhensible des parents. Par contre, le tableau de bord de la santé préconise, à l'analyse, de recourir aux données d'enregistrement des causes de recours aux soins d'urgence pour avoir une idée plus précise de la fréquence des formes moins graves des crises d'asthme.

    L'asthme et les maladies respiratoires constituent une source de préoccupation pour la santé publique à l'échelon mondial, et une problématique complexe dont tous les ressorts ne sont pas encore clairs. Des différences liées au sexe sont relevées notamment dans le rapport international « Global Initiative for Asthma (GINA)» (2), les tendances observées avant 14 ans - une prévalence de l'asthme plus grande chez le garçon que chez la fille - s'inversant à l'âge adulte. Un facteur explicatif avancé consisterait dans la taille du poumon, plus petite chez les garçons que chez les filles à la naissance, et plus grande à l'âge adulte.


    Distinguons selon les problèmes respiratoires.

    L'asthme d'abord.

    Le rapport de l'Institut scientifique de santé publique (ISP) sur l'asthme et la pollution de l'air (3), publié en 2003, comporte quelques conclusions intéressantes au regard de notre préoccupation. Ainsi, il précise que « La modification des habitudes tabagiques est un des aspects les plus importants dans la réduction du risque de développement de l'asthme et de déclenchement des crises ». S'agissant d'autres facteurs environnementaux, il considère comme « peu probable que les polluants, vu leur faible concentration dans l'air, jouent un rôle majeur dans l'apparition de l'asthme. La pollution de l'air (intérieur et extérieur) n'est pas encore clairement liée à l'apparition de l'asthme ». Par contre, l'ISP rapporte que « Des épidémies d'exacerbation d'asthme (chez des asthmatiques connus) ont été mises en évidence lors de l'élévation du niveau de la pollution de l'air par certains polluants ( ... ) » .

    Il faut donc distinguer les causes d'apparition de l'asthme, des causes d'exacerbation, ou de rémission, de celui-ci. La littérature scientifique indique que même non traité, l'asthme ne s'aggrave pas avec le temps de façon linéaire (4) et que le rythme des rémissions et des exacerbations fluctue notamment en fonction de l'exposition aux facteurs déclenchants. De plus, une amélioration naturelle de la situation intervient chez une proportion importante des patients : rémission spontanée chez environ 20% des patients pour lesquels le diagnostic d'asthme a été porté à l'âge adulte; et crises moins fréquentes et sévères chez environ 40% des patients. Certains avancent comme hypothèse que l'exposition à des infections dans la prime enfance influence le développement du système immunitaire « non allergique » permettant de réduire le risque d'apparition de l'asthme (et d'autres maladies allergiques).



    La bronchiolite.

    L'infection est le plus souvent causée par le virus respiratoire syncytial (VRS) qui frappe la quasi-totalité des enfants avant l'âge de 4 ans, une partie seulement d'entre eux développant la maladie.

    Selon le rapport précité GINA, de nombreuses études prospectives montrent qu'environ 40% des enfants hospitalisés avec présence prouvée d'un virus VRS continueront à avoir des sifflements respiratoires ou un asthme dans leur grande enfance. D'un autre côté, il semble que certaines infections respiratoires dans la petite enfance (comme la rougeole) puissent protéger contre le développement de l'asthme. Les données actuelles ne permettent pas de dresser des conclusions.



    La bronchopneumopathie chronique obstructive enfin (BPCO) (5).

    Il s'agit d'une affection pulmonaire caractérisée par un blocage persistant de l'écoulement des gaz inspirés au niveau des poumons. C'est une maladie pulmonaire sous-diagnostiquée dont la principale cause est la fumée du tabac, due au tabagisme actif ou passif. Ce que reflète le chapitre VI du tableau de bord de la Santé : « A l'intérieur des maisons, la fumée de tabac est le principal polluant qui affecte la santé. (...) Au cours des trois premières années de l'existence des enfants, le tabagisme passif peut augmenter de plus de 50% le risque de maladies respiratoires basses et accroître de 30 à 40% le risque d'un certain nombre de symptômes respiratoires chez les enfants d'âge scolaire. L'exposition à la fumée de tabac aggrave l'asthme chez les enfants ».

    En termes de priorité de santé publique, c'est donc en s'attaquant au tabagisme (actif et passif) que l'on a le plus de chance de voir diminuer l'apparition ou l'aggravation des maladies touchant les voies respiratoires chez les enfants et l'apparition ou l'aggravation d'une BPCO chez les adultes. Dans cette optique, j'ai lancé cette année le 4ème Plan wallon « sans tabac » qui vise le développement d'une approche « positive » du fumeur dans sa démarche de sevrage tabagique, en sachant que les rechutes sont nombreuses.




    (1) un virus est une particule de dimension très faible susceptible d'affecter l'homme sans toutefois entraîner d'office l'apparition de symptômes

    (2) http://www.ginasthma.com/Guidelineitem.asp??ll=2&l2=1&intld=1561 (rédigée sous l'égide notamment de l'Organisation Mondiale de la Santé)

    (3) L'Asthme et la Pollution de l'air. Etat des connaissances et données disponibles pour le développement d'une politique de santé en Belgique. http://www.iph.fgov.be/epidemio/epifr/crospfr/asthme fr.pdf

    (4) La revue prescrire, juillet 2007/tome 27 n° 285 « Traitement de l'asthme au long cours, deuxième partie »

    (5) http://www.who.int/mediacentre/factsheets/fs315/fr/index.html (Organisation Mondiale de la Santé)