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La proximité par rapport à une zone Natura 2000

  • Session : 2009-2010
  • Année : 2010
  • N° : 853 (2009-2010) 1

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  • Question écrite du 20/09/2010
    • de STOFFELS Edmund
    • à HENRY Philippe, Ministre de l'Environnement, de l'Aménagement du Territoire et de la Mobilité

    Lorsqu’un projet est situé à proximité d’un site Natura 2000, la demande de permis d’urbanisme doit être effectuée selon un dispositif particulier (cfr. CWATUPe).

    Dans son arrêt n°200.803 du 12 février 2010, le Conseil d’Etat se prononce sur un dossier concret évoquant ce qu’il y a lieu d’entendre par « proximité par rapport à un site Natura 2000 ».

    On peut y lire :
    « le terrain est-il situé à proximité d'un périmètre de protection visé par la loi du 12 juillet 1973 sur la conservation de la nature, modifiée notamment par le décret du 6 décembre 2001 relatif aux réserves naturelles ou forestières, sites Natura 2000? »

    Et il conclut que :

    Considérant que la demande de permis se rapporte à un bien situé non loin du site
    Natura 2000 dit de la « Vallée …» (il y a d’autres considérants également), le permis accordé doit être annulé.

    Dans sa justification, il précise que le projet en question est situé pour partie à une distance inférieure à 250 m du site Natura 2000 en question.

    Dans le concret, est-ce que cela signifie que tout projet situé à une distance inférieure à 250 m par rapport à un tel site doit présenter au moment de la demande de permis une évaluation (sommaire ou explicite ?) des impacts que le projet peut avoir sur le site Natura 2000 ?
  • Réponse du 08/11/2010
    • de HENRY Philippe

    Le décret du 6 décembre 2001 relatif à la conservation des sites Natura 2000 et de la faune et de la flore sauvages, prévoit que:
    « Tout plan ou projet soumis à permis, qui, au regard des prescriptions à valeur réglementaire de l'arrêté de désignation d'un site Natura 2000, est non directement lié ou nécessaire à la gestion du site mais est susceptible d'affecter ce site de manière significative, individuellement ou en conjugaison avec d'autres plans et projets, est soumis à l'évaluation des incidences prévue par la législation organisant l'évaluation des incidences sur l'environnement dans la Région wallonne, eu égard aux objectifs de conservation du site et selon les modalités fixées par le Gouvernement.
    (...)
    L'autorité compétente ne marque son accord sur le plan ou le projet qu'après s'être assurée qu'il ne porte pas atteinte à l'intégrité du site concerné.
    Si, en dépit de conclusions négatives de l'évaluation des incidences et en absence de solutions alternatives, le plan ou le projet doit néanmoins être autorisé pour des raisons impératives d'intérêt public majeur, y compris de nature sociale ou économique, l'autorité compétente prend toute mesure compensatoire nécessaire pour assurer que la cohérence globale du réseau Natura 2000 est protégée et informe la Commission des Communautés européennes des mesures compensatoires adoptées.
    Lorsque le site concerné abrite un type d'habitat naturel prioritaire et/ou une espèce prioritaire, seules peuvent être invoquées des considérations liées à la santé de l'homme et à la sécurité publique ou à des conséquences bénéfiques primordiales pour l'environnement ou, après avis de la Commission des Communautés européennes, à d'autres raisons impératives d'intérêt public majeur. »


    On perçoit, à la lecture de ces dispositions, que l'obligation de réaliser une évaluation appropriée des incidences est centrale dans le dispositif de protection mis en place par le régime Natura 2000. C'est en effet sur base des conclusions découlant de celle-ci qu'un projet susceptible d'affecter un site de manière significative pourra ou non être autorisé, le cas échéant, à certaines conditions et moyennant certaines garanties compensatoires d'accompagnement. Notons qu'il n'est pas nécessaire de prendre en compte l'ensemble des impacts environnementaux du projet puisque celui-ci doit uniquement faire l'objet d'une évaluation appropriée de ses incidences sur le site au regard de ses propres objectifs de conservations (l). De tels objectifs sont spécifiques à chaque site dans la mesure où ils dépendent des espèces ou habitats concernés, de la surface et de la qualité de ces habitats et population d'espèces ainsi que des menaces de destruction ou de dégradation qui pèsent sur le site.

    L'une des questions particulières suscitées par ces mécanismes tient naturellement dans la détermination de leur champ d'application territorial: l'obligation de réaliser une évaluation appropriée des incidences s'applique-t-elle uniquement pour les projets situés à l'intérieur d'un site Natura 2000 ou également aux projets localisés en-dehors de ces sites dès lors qu'ils peuvent avoir des incidences sur celui-ci?

    Les services conjoints de la DGO3 et de la DGO4. ont préparé une note cosignée par leurs directeurs généraux respectifs, tendant à ce que pour tout projet situé dans un périmètre Natura 2000 ou à moins de 100 mètres d'un de ces sites l'avis de la Direction des Services extérieurs du Département de la Nature et des Forêts (DNF) sur le territoire duquel est localisé le projet soit sollicité. Cette note a été envoyée, dès 2005, aux agents de ces deux directions générales en charge de l'instruction des permis ainsi qu'à chaque commune concernée par la problématique. L'attention de ces destinataires avait, au demeurant, été attirée sur la nécessité de vérifier la complétude de la notice d'incidences sur l'environnement quant aux aspects Natura 2000 avant de déclarer le dossier complet et recevable au regard des critères propres à la problématique, le cas échéant, en requérant l'avis du D.N.F., seule instance à même, à ce jour, de garantir une certaine uniformité dans l'évaluation du caractère significatif des incidences potentielles d'un projet sur un site Natura 2000.

    Cette distance forfaitaire permet d'éviter la plupart des difficultés (2) étant entendu que, comme le montrent les développements qui précèdent, l'important est qu'aucun projet non directement lié ou nécessaire à la gestion du site mais susceptible d'affecter ce site de manière significative, individuellement ou en conjugaison avec d'autres plans ou projets ne puisse être considéré comme ayant été autorisé en connaissance de cause tant qu'il n'a pas fait l'objet d'une évaluation appropriée des incidences propres à Natura 2000. Elle n'exclut donc pas, qu'en fonction de caractéristiques propres à l'habitat ou à l'espèce protégée et/ou en fonction des propriétés particulières de l'activité en projet, ce critère de proximité soit appréhendé plus largement ou, au contraire, de manière plus restrictive: l'implantation d'une antenne GSM sur un pylône existant situé en bordure de site protégé n'a évidemment pas le même impact qu'un projet de remblaiement partiel d'un cours d'eau en amont d'un site protégé pour sa population de martin-pêcheur.

    Dans ce contexte l'arrêt qu'évoque l'honorable Membre sanctionne la légèreté avec laquelle certaines notices sont remplies. En omettant de préciser la situation d'un bien par rapport aux deux sites Natura 2000 situés dans son voisinage, le dossier de demande n'a pas permis, en l'espèce, à l'autorité de procéder à l'évaluation concrète de l'éventuelle susceptibilité du projet à affecter le site Natura 2000 de manière significative. A fortiori, cette situation de départ a empêché l'autorité de satisfaire à l'obligation qui lui incombe de motiver particulièrement les permis d'urbanisme au regard de la mise en œuvre du processus d'évaluation des incidences des projets sur l'environnement.

    Enfin, il convient de relever que l'article 136, alinéa 2, du CWATUPe complète désormais l'arsenal législatif applicable aux permis délivrés dans le cadre de la police administrative de l'aménagement du territoire et de l'urbanisme. En effet, depuis l'entrée en vigueur du décret du 8 mai 2008, cette disposition prévoit que les actes et travaux pour lesquels un permis est demandé portent sur des biens immobiliers situés à proximité d'un site Natura 2000, l'autorité compétente pour délivrer le permis est tenue de solliciter, le cas échéant, l'avis de la DGO3 lorsque les actes et travaux sont susceptibles de porter atteinte à l'intégrité du site concerné soit individuellement, soit en conjugaison avec d'autres plans ou projets. Dans ce cas, l'exécution des actes et travaux peut être soit interdite, soit subordonnée à des conditions particulières de protection des personnes, des biens ou de l'environnement.



    (1) N. de SADELEER, « La conservation des habitats naturels en droit communautaire », Natura 2000 et le droit -aspects juridiques de la sélection et de la conservation des sites Natura 2000 en Belgique et en France, Bruxelles, Bruylant, 2004, p. 49.
    (2) À titre de comparaison, une distance de 250 mètres aurait pour conséquence de couvrir 40 % du territoire de la Wallonie ... ce qui s'avérerait difficilement gérable en pratique.