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La mixité sociale et le lotissement (permis d'urbanisation)

  • Session : 2010-2011
  • Année : 2010
  • N° : 174 (2010-2011) 1

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  • Question écrite du 28/10/2010
    • de STOFFELS Edmund
    • à HENRY Philippe, Ministre de l'Environnement, de l'Aménagement du Territoire et de la Mobilité

    L’idée a été avancée par Inter-Environnement Wallonie du fait que, dans le cadre de réflexions sur le permis de lotir (devenu entre-temps permis d’urbanisation), IEW fasse le lien entre la notion de mixité sociale et de gestion de l’espace.

    S’il est vrai qu’un lotissement est souvent caractérisé par une homogénéité sociale (en termes de tranche d’âge, de revenu disponible, de composition familiale, …), il est vrai aussi que ceci engendre des avantages et des inconvénients. En effet, en vieillissant, les quartiers composés de jeunes ménages se transforment progressivement en quartiers de mamys et de papys.

    IEW pose donc la question de savoir s’il n’est pas opportun de veiller à une certaine mixité sociale en privilégiant des lotissements, notamment s’ils sont d’une certaine taille ou s’ils sont voisins d’autres lotissements du même type, qui proposent des logements

    - de tailles différentes (studios, appartements, maisons unifamiliales, petits logements, …);
    - à des prix différents (logement social ou moyen);
    - et de formes différentes (logement pour PMR, pour personnes âgées, …)

    Creusant l’idée, je trouve qu’elle mérite d’être approfondie – au plus tard dans le cadre de l’évaluation du CWATUPE.

    Le concept de lotissements à mixité sociale est-il compatible avec la législation actuelle ? Quels sont les freins qui empêchent actuellement les projets de ce type d’être réalisés à plus grand nombre ? Que faire pour « convaincre » les lotisseurs, notamment les lotisseurs publics ? Est-il envisageable de réserver une partie des lots issus d’un lotissement public aux SLSP ?
  • Réponse du 31/01/2011
    • de HENRY Philippe

    Notre société évoluera de manière plus équilibrée si notre aménagement du territoire veille à circonscrire les ghettos de toutes sortes qu'ils soient liés à l'âge de ses occupants, leur statut social, leur niveau d'aisance, leur état de santé ou le type d'activité professionnelle qu'ils exercent.

    La mixité sociale est un objectif qu'il est donc indispensable de garder à l'esprit lors de toute urbanisation. Ce problème n'est pas nouveau, le regroupement des classes et la ségrégation sociale se retrouvent dans l'agencement de nos villes fussent-elles petites. Mais les récents développements de notre territoire ont accentué le processus en scindant les fonctions et les activités pour constituer des zones de plus en plus spécialisées, une classe moyenne aisée trouvant refuge dans une suburbanisation désordonnée. Prétendre que c'est le résultat d'une planification volontaire traduite dans la loi organique de l'aménagement du territoire d'abord, dans le CWATUPe ensuite, serait exagéré. Il s'agit avant tout d'un phénomène culturel hérité de l'après dernière guerre et alimenté par le mode de vie américain.

    La CPDT a examiné cet aspect dans son étude sur les écoquartiers. Dans le rapport, on peut y lire:
    « La diversité sociale est un principe majeur d'un projet d'écoquartier. Elle apparaît dans la plupart des projets analysés. Toutefois, sa mise en application s'est effectuée avec plus ou moins de succès. ».

    Ainsi la diversité sociale vise pour certains la mixité de statut social et culturelle, pour d'autres une mixité entre personnes valides et non valides ou encore la mixité générationnelle.

    Comment mettre en œuvre cette diversité ?

    Clairement en proposant différentes tailles et/ou types de logements: locatif ou acquisitif, studios, appartements de tailles variées, maisons uni-familiales, logements pour personnes à mobilité réduite (aménagements spécifiques au rez-de-chaussée), logements pour personnes âgées organisés sous forme d'une résidence service ....

    Toutefois, pour assurer l'intégration du projet dans son contexte et maximiser les opportunités d'interactions sociales, une étude préalable du marché immobilier à l'échelle communale devrait être menées. Le projet d'écoquartier est l'occasion de répondre aux besoins du contexte et de diversifier l'offre en fonction des besoins de la commune.

    Ajoutons que quel que soit le dispositif employé, la diversité proposée ne doit pas forcément être figée. Au contraire, il est intéressant de développer des logements qui sont adaptables à l'évolution des modes de vie pour permettre un meilleur ancrage de la population et construire un lien social durable dans le quartier.

    Enfin, pour favoriser cette diversité sociale, il est nécessaire de travailler tant au niveau du bâti que des espaces non-bâtis privés et publics. La cohabitation, la rencontre, etc. sont favorisées par des espaces communs et publics de qualité. Les projets bénéficiant d'espace(s) collectif(s) (salle communautaire, espaces verts collectifs, potagers, etc.) assurent certainement le développement d'un lien social dans et aux alentours du quartier.

    Au niveau légistique, il n'y aucun frein pour ce type de projet ni dans le CWATUPe ni ailleurs.

    Il est vrai qu'au fil du temps, se sont développés des lotissements mono-fonctionnels et favorisant la villa uni-familiale. Le permis d'urbanisation et plus particulièrement la circulaire ministérielle adoptée le 3 juin 2010 rappelle l'enjeu de la densité et de la mixité et précise que cet enjeu doit être évalué dans tout projet d'urbanisation d'un nouveau quartier. Ainsi, la prise en compte de la mixité sociale doit être évoquée dans la définition des options d'aménagement puis traduite, le cas échéant, dans l'option architecturale d'ensemble voire dans les prescriptions.

    Par conséquent, le permis d'urbanisation constitue un nouvel outil permettant de répondre à cette préoccupation.

    Comme tout outil, le permis d'urbanisation n'est pas un objectif en soi.

    Ce n'est que dans la mesure où tous les acteurs (le citoyen, l'auteur de projet, l'administration et l'autorité publique) auront la volonté d'inscrire la mixité sociale dans leur projet de vie, dans la perspective d'un renouveau culturel, qu'un réel changement de notre cadre de vie pourra être initié notamment par la concrétisation de cette mixité sociale.

    Dans le prolongement des autres outils que sont le SDER, le schéma de structure, le plan de secteur, le plan communal d'aménagement et le rapport urbanistique et environnemental, le permis d'urbanisation peut mettre en place à partir d'une réflexion globale une conception urbanistique créative et porteuse des enjeux de premier ordre que sont la mixité sociale, la maîtrise de la densité et l'agencement des fonctions.
    Amener progressivement un changement de comportement culturel pourrait être certainement facilité par des incitations, issues de diverses politiques opérationnelles, visant à mettre à disposition des terrains bien localisés.