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La raison pour laquelle les industries européennes de l'éolien réduisent leurs voilures

  • Session : 2010-2011
  • Année : 2010
  • N° : 68 (2010-2011) 1

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  • Question écrite du 03/11/2010
    • de BORSUS Willy
    • à NOLLET Jean-Marc, Ministre du Développement durable et de la Fonction publique

    Selon le quotidien Financial Times du 27 octobre 2010, le premier producteur mondial dans le secteur de l’éolien « Vestas », a décidé de supprimer 3.000 emplois en Europe.

    Ces suppressions font suite à la fermeture au Royaume-Uni d’une unité de production de Vestas comprenant 600 travailleurs.

    Par ailleurs, toujours selon le Financial Times, l’entreprise Vestas ne ferait qu’emboiter le pas à d’autres acteurs d’éolien : General Electric, Siemens ainsi que l’espagnol Gamesa.

    Ces réductions feraient suite à une compression de la demande européenne pour les turbines éoliennes.

    Le pic de la demande aurait été atteint en 2009. Le Ministre peut-il confirmer l’essoufflement du marché de l’éolien ? Au niveau des quotas requis par la réglementation européenne, la filière éolienne aurait-elle atteint son pic en 2009 ?

    Toujours selon la presse, ces réductions d’activités en Europe des entreprises du secteur éolien auraient aussi pour cause la hausse de la demande en Asie ainsi que les coûts de production élevés en Europe en comparaison avec la Chine et le Brésil.

    Des délocalisations seraient à prévoir par ailleurs vers le continent asiatique.

    En tant que Ministre en charge de l’Alliance Emploi-Environnement, Monsieur le Ministre ne craint-il pas que les emplois dits « verts » ne souffrent des mêmes difficultés liées à la mobilité internationale des industries que les emplois issus des secteurs manufacturiers « conventionnels » ?

    De plus, l’entreprise Vestas est active en Région wallonne. Quelle est sa part de marché en Wallonie ? Quel est l’impact du repli européen de Vestas et d’entreprises semblables sur les calendriers de livraisons pour les chantiers éoliens en Wallonie ?
  • Réponse du 30/11/2010 | Annexe [PDF]
    • de NOLLET Jean-Marc

    Les statistiques européennes (2009) de l'éolien (source EWEA) font état d'un secteur en pleine croissance :

    - plus de 10 GW de capacité en éoliennes ont été installés en 2009, ce qui représente une croissance de 23% par rapport à 2008;
    - en 2009, pour la deuxième année consécutive, les installations de turbines éoliennes en Europe ont été plus importantes que toute autre technologie de production d'électricité, représentant 39% de toutes les nouvelles installations.

    Cette tendance haussière s'est poursuivie au cours du 1e semestre 2010, puisque :
    - en Espagne, plus de 727 MW de nouvelles capacités éoliennes ont été installés, ce qui représente une hausse de 7,6% en base annuelle;
    - 118 turbines offshore ont été connectées au réseau, soit une nouvelle capacité de 333 MW, représentant une croissance de 15,4% par rapport à la même période de 2009. En outre, 151 éoliennes offshore ont été installées au cours du premier semestre 2010 (440 MW) mais ne sont pas encore connectées, ce qui démontre la forte croissance que connaît le secteur malgré la crise financière.

    Par ailleurs, la commission européenne évalue les objectifs européens de capacité éolienne à atteindre pour 2020 à 220 GW. A fin 2009, 74,8 GW étaient installées (E-27), ce qui représente 32,5% de l'objectif à atteindre. Or, ce sont les objectifs européens et nationaux qui tirent la demande, dans la mesure où ils sécurisent le cadre institutionnel et économique autour de l'investissement. En Wallonie, le projet de plan d'action national énergies renouvelables chiffre le potentiel de capacité éolienne à 4.320 MW, alors que la capacité installée en 2010 était d'un peu moins de 750 MW.

    L'ensemble de ces éléments nous pousse à croire que l'éolien est loin d'avoir atteint un pic de demande.

    Néanmoins, force est de constater que même si la demande d'installation d'éolienne est bien présente, certains grands constructeurs tels que Vestas font face à des difficultés. Celles-ci s'expliquent d'une part par des carnets de commande retardés, voire abandonnés, à la suite de problèmes dans le bouclage du financement de certains gros projets (problèmes liés à la crise de crédit et aux exigences bancaires plus strictes), ainsi qu'à l'allongement de la durée moyenne d'octroi de permis dans certains pays. D'autre part, l'augmentation de la concurrence entre constructeurs éoliens, la perte de grands marchés étrangers ainsi que la montée en puissance de gros promoteurs capables de mieux négocier les prix et faire valoir la concurrence sont autant de facteurs qui ont mis à mal de grands constructeurs éoliens comme Vestas.

    Ce constructeur fait en effet partie de ceux qui ont le plus souffert de ce changement de rapport de force entre constructeurs et promoteurs. Comme le montre le graphique en annexe, la part de marché de Vestas dans l'éolien wallon s'élève à 13%. A l'opposé, la société Enercon, leader du marché wallon avec plus de 50% de part de marché, n'a pas été -semble-t-il - fort affectée par la crise, dans la mesure où Enercon travaille essentiellement en flux tendu : elle ne produit que sur commande et n'a pas dû gérer des stocks d'invendus.

    Quant à l'impact de la baisse de régime des activités de Vestas sur l'emploi, il faut dire que celui-ci est quasi nul, dans la mesure où Vestas n'a pas d'usine d'assemblage ni d'unité fonctionnelle ou administrative en Wallonie (ni même en Belgique). Parmi les constructeurs d'éoliennes, seul Enercon dispose d'un centre de coordination et de maintenance de taille en Wallonie (à Gosselies). Or, on l'a vu, Enercon n'a pas été affecté par la crise et ses perspectives d'emploi sont plutôt à la hausse (emploi Enercon : +- 15 personnes/an). Quant à l'impact sur les calendriers de livraison, d'après les informations tirées auprès du facilitateur éolien, Vestas garantit le respect des délais de livraison pour les projets en chantier ou en cours de maintenance.

    Dans un projet éolien belge, l'emploi est essentiellement généré par les activités liées à la mise en place de parcs éoliens, telles que des activités de développement de projet, d'études et d'obtention de permis, de financement et d'assurance, de préparation de site, de travaux routiers, de génie civil, de transport, d'assemblage, de raccordement, de maintenance. Ces activités ne sont en soi pas délocalisables et représentent environ 25 % du total de l'investissement, le reste étant dévolu à l'achat de la turbine.

    A noter que de nombreuses entreprises wallonnes dont certaines comme CFR (production de couronnes d'acier pour éoliennes) ou 3B Fibreglass (fibres pour pales) sont leaders mondiaux et sont aussi actives dans la chaîne de valeur (de production) de l'éolienne. Une demande pour la réalisation d'une cartographie des compétences wallonnes actives dans le domaine a d'ailleurs été introduite l'année passée auprès du Ministre Marcourt.