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"le photovoltaïque en Wallonie est-il une gabegie ?"

  • Session : 2010-2011
  • Année : 2010
  • N° : 77 (2010-2011) 1

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  • Question écrite du 10/11/2010
    • de EERDEKENS Claude
    • à NOLLET Jean-Marc, Ministre du Développement durable et de la Fonction publique

    « Le photovoltaïque en Wallonie : une gabegie ? » tel était le titre accrocheur du quotidien « L'Echo » en page 8 de son édition du jeudi 14 octobre 2010.

    Cet article signé par le journaliste « Gérard Guillaume » s'efforçait de façon nuancée de cibler les avantages et les inconvénients des panneaux photovoltaïques sur les toitures des maisons d'habitation privées.

    Ces articles font référence aux critiques exprimées par M. Laurent Minguet, Président de Tweed, qui dénonce l'opération de soutien à l'investissement photovoltaïque en Wallonie, chiffres en mains.

    Tweed est un cluster fort bien en cours auprès du Gouvernement wallon pour avoir été retenu comme l'un des interlocuteurs privilégiés dans le cadre du Plan Marshall 2.Vert.

    Les réflexions de M. le Président Minguet sont-elles ou non justifiées ?

    En clair, le soutien public aux panneaux photovoltaïques est-il ou non une gabegie en Wallonie et de la façon dont on l'a fait ?
  • Réponse du 06/12/2010 | Annexe [PDF]
    • de NOLLET Jean-Marc

    J'ai pris connaissance avec attention de l'article publié dans l'Echo le 14 octobre dernier.

    J'ai pu faire analyser les chiffres évoqués par l'industriel M. Minguet, et la plupart de ceux-ci reflètent correctement la situation des coûts et des soutiens relatifs au secteur photovoltaïque en Wallonie. Toutefois, il faut, par endroits, nuancer ou agrémenter le raisonnement développé par Monsieur Minguet de quelques éléments complémentaires.

    Il est vrai que le soutien accordé à la filière photovoltaïque est nettement plus élevé par MWh produit que le soutien aux autres filières tel que l'éolien. Mais ce soutien est nécessaire à partir du moment où l'on souhaite se voir développer une filière quasi inexistante en escomptant une forte diminution des coûts de la technologie dans les années à venir. Ce raisonnement ne vaut pas spécifiquement pour la technologie photovoltaïque, mais pour la plupart des filières émergentes. Cette logique est également partagée par l'ensemble des pays européens qui ont soutenu le photovoltaïque de manière forte au début du développement de la filière, pour ensuite progressivement diminuer le niveau de soutien à mesure que les coûts de la technologie diminuaient.

    La politique de soutien menée en Wallonie a été couronnée de succès. Au 22 Septembre 2010, le parc photovoltaïque résidentiel wallon était composé de 18.534 installations de moins de 10 kW - en général, moins de 80 m2 de panneaux solaires et de 19 installations certifiées de plus de 10 kW. La puissance totale développée est de 71,58 MWc et 0,947 MWc respectivement.

    Entre le 1er janvier 2010 et le 22 septembre 2010, un peu plus de 5.880 installations ont été enregistrées à la Commission wallonne pour l'Energie (CWaPE) contre 5.500 sur la même période en 2009. Comme l'honorable membre peut le constater, le phasing out de la prime photovoltaïque n'a en rien provoqué un coup d'arrêt à la filière, contrairement à ce que d'aucuns avaient prédit fin 2009.

    L'analyse que j'ai pu lire de M. Minguet fait fi des bénéfices indirects liés au développement de la filière en Wallonie. Outre les recettes pour l'Etat fédéral générées par l'impôt des sociétés, l'impôt des personnes physiques et la TVA, plusieurs bénéfices relatifs au système énergétique doivent être épinglés, comme le démontrent diverses études européennes sur le sujet. Je pense notamment aux pertes en ligne évitées par la décentralisation des unités de production photovoltaïques, ainsi qu'à la diminution de la contribution des énergies fossiles dans la production d'électricité, or l'honorable membre sait combien ces prix peuvent être volatils.
    L'analyse relative à l'emploi me semble également incomplète. Selon l'idée sous-jacente développée, il n'y aurait aucun intérêt à créer de l'emploi dans de nouvelles filières vu qu'une partie de ces emplois provient toujours d'un secteur existant. Or cette hypothèse n'est en pratique vérifiable que dans une région de plein emploi, ce qui est loin d'être le cas de la Wallonie, malheureusement.

    Le nombre d'emplois évoqués par l'article ne tient pas compte non plus des producteurs de composants de panneaux photovoltaïques tels que AGC Flatglass dont le centre européen de recherche est situé à Jumet, des deux usines de production de verre solaire situées à Le Roux et Mousitier, ou encore d'entreprises telles que DowCorning ou Issol.

    Même si les installateurs constituent le gros de la filière, ils ne sont clairement plus les seuls à contribuer à l'emploi. On notera également que certains installateurs commencent à diversifier leurs activités en réalisant chez des agriculteurs ou dans des PME des installations de plus en plus grandes.

    Enfin, le reproche selon lequel le système des certificats verts condamne les « pauvres citoyens» à payer pendant 15 ans les «riches» producteurs photovoltaïques doit également être nuancé. Il est vrai que le régime des certificats verts repose sur une mutualisation des coûts de développement de l'ensemble des filières renouvelables et de cogénération de qualité. Si le soutien au photovoltaïque est aussi élevé, c'est parce que le Gouvernement, suite notamment à un avis de la CWaPE, a estimé qu'il était nécessaire pour générer une rentabilité suffisante aux investissements. Si les ménages les plus fortunés étaient effectivement majoritaires au début du lancement de la filière, l'accessibilité à ce type d'investissement s'est fort démocratisé depuis 2 ans suite à la forte baisse de l'investissement initial, mais aussi à plusieurs initiatives telles que le mécanisme d'avance de certificats verts que j'ai proposé ainsi que le prêt vert mis en place au niveau fédéral.

    Je conclurai en soulignant que la filière photovoltaïque est actuellement dans une phase de transition; elle est encore jeune et la technologie reste encore relativement coûteuse en comparaison à d'autres sources de production d'énergies renouvelables. Cependant, durant les deux dernières années, la filière photovoltaïque wallonne a mûri et a amélioré sa structure de coût. Pour accompagner l'évolution des filières renouvelables en Wallonie à l'horizon 2020, plusieurs études ont été finalisées en vue de définir au mieux, d'une part le potentiel des différentes sources d'énergies renouvelables et d'autre part des objectifs par filière. Il s'agit d'un exercice délicat nécessitant une réflexion de fond, afin que le développement des filières renouvelables, reposant sur une mutualisation des coûts, soit pérenne et source de développement économique et social pour notre Région.