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Les victimes de violences

  • Session : 2010-2011
  • Année : 2010
  • N° : 44 (2010-2011) 1

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  • Question écrite du 25/11/2010
    • de STOFFELS Edmund
    • à TILLIEUX Eliane, Ministre de la Santé, de l'Action sociale et de l'Egalité des chances

    « Ecoute violences conjugales » a reçu 2.600 appels en un an.

    L’élément déclencheur de l’appel sont généralement une grosse dispute, une dénonciation par l’entourage …

    95 % des victimes sont des femmes, majoritairement âgées entre 35 et 60 ans.

    La nature de la violence est psychologique, verbale, physique, économique, sexuelle …

    Les critiques par rapport à la Police (souvent appelée à intervenir en crise aiguë)sont le manque de relais, manque d’écoute, manque d’empathie, manque de conscience du danger …

    La réaction de Madame la Ministre est d'élargir en Région wallonne le nombre de maisons d’accueil pour les victimes (on passerait de 15 à 26 maisons agréées).

    Autant cette réaction peut être appréciée, autant je me pose la question de savoir s’il ne faut pas entamer une discussion entre les services de Madame la Ministre et les services de la Police (les services des Procureurs du Roi) afin de rencontrer la critique souvent avancée par les victimes. Est-ce une piste à suivre ?

    Ensuite, n’est-il pas envisageable de conclure un accord avec son Collègue du Logement dans le sens que la définition du logement de transit sera élargie pour donner aussi une réponse adéquate à ce type de problématique au cas où l’urgence s’impose ? Ou avec les communes (CPAS) qui gèrent les logements d’urgence ?
  • Réponse du 21/12/2010
    • de TILLIEUX Eliane

    Il faut rappeler combien la violence conjugale est difficile à appréhender. Elle demande aux travailleurs sociaux, médicaux, juridiques et policiers une parfaite compréhension des mécanismes qui la caractérisent ainsi qu'une bonne formation et un travail de partenariat.

    C'est en tenant compte de ces éléments que la politique de la région s'est construite pour aboutir en 2009 à un « dispositif intégré de lutte contre la violence conjugale ».

    A côté des services que l'on peut qualifier de « spécialisés » dans l'accueil, l'accompagnement ou l'hébergement des victimes et dans l'accompagnement psychologique des auteurs, il existe de nombreux autres services sociaux, juridiques, sanitaires ou autres qui interviennent ponctuellement dans des situations de violence conjugale. Je veux parler des dispositifs d'urgence sociale, des centres de service social, des maisons médicales, des services de santé mentale ou encore des centres de planning familial.

    Comme l'honorable membre peut le constater, pour une personne qui se trouve dans une situation de violence conjugale, il n'est pas facile de savoir à qui s'adresser.

    Pour rendre plus efficiente cette offre de services, pour offrir à la victime un accueil et une prise en charge optimale, nous avons tenté de structurer les services locaux pour leur faciliter le travail en partenariat qui doit exister entre eux. Les services doivent se connaître, se parler, échanger leurs pratiques, articuler leurs complémentarités.

    Bien sûr, ce travail de coordination des services existe depuis longtemps et depuis une dizaine d'années, ce sont les coordinatrices provinciales qui en sont chargées.

    Ces coordinations provinciales, ce sont des services, organisés au sein de chaque province, gérés et financés en commun par la Région wallonne, la Communauté française et l'Etat fédéral, en partenariat avec les provinces. Elles connaissent parfaitement le terrain, ses associations et ses institutions et elles connaissent parfaitement la problématique de la violence entre partenaires.

    Depuis 2009, la Région wallonne les a chargées d'organiser leur travail de coordination au sein d'une structure précise: la plate-forme d'arrondissement judiciaire. Parce que c'est au sein de chaque arrondissement que l'on retrouve la plupart des services susceptibles d'apporter leur pierre à l'aide aux victimes et aux auteurs de violence entre partenaires.

    On retrouve au sein de ces plates-formes les services que j'ai cités: les services d'aide sociale aux justiciables, les maisons d'hébergement et les services d'accompagnement ambulatoire. C'est le socle de la plate-forme. Ensuite, on souhaite voir autour de la table les autres services qui sont susceptibles d'intervenir dans les situations de violence conjugale, y compris bien sûr, les policiers et les magistrats.

    Ces plates-formes ont pour première mission de permettre à ces services et institutions d'apprendre à se connaître, à se parler, à échanger, ...

    La deuxième mission des plates-formes, c'est d'aller au-delà de cette prise de connaissance et d'amener les acteurs à s'engager dans un véritable de travail de coopération, de manière à garantir à la victime un service qui tient compte de l'ensemble de ses besoins. Certaines plates-formes se sont déjà dotées d'outils de travail gérés conjointement. Je pense à la Maison plurielle à Charleroi et à l'Eglantier à Braine l'Alleud, fruits d'un étroit travail de partenariat entre les participants des plates-formes. D'autres plates-formes sont sur le point d'aboutir, parfois dans des formes originales, à un service commun.

    Leur troisième mission, c'est insuffler au sein de l'arrondissement, et à tous les niveaux, une véritable prise de conscience du problème et la mise en place d'une stratégie concertée pour tenter de diminuer le nombre de victimes et améliorer la prise en charge de celles-ci. On peut parler de mise en place de plans locaux de lutte contre la violence conjugale.

    Quatrième mission, travailler sur l'amélioration permanente des pratiques professionnelles pour répondre toujours mieux aux besoins des victimes.

    Enfin, il faut que des liens se nouent au sein de chaque arrondissement entre les intervenants sociaux, les forces de police et la magistrature. Nous observons souvent une très grande méconnaissance des uns et des autres. La sécurité et la réinsertion des victimes passent nécessairement par une action concertée à tous les niveaux. Cette concertation avec les forces de l'ordre et le Conseil d'arrondissement, c'est là aussi une des missions de ces plates-formes.

    Ces liens, que je voudrais structurels, sont indispensables pour envisager une formation systématique des policiers et des magistrats ainsi qu'un partenariat avec les services sociaux et sanitaires. Il s'agit, avant tout, d'assurer la sécurité des victimes et leur réinsertion sociale.

    Pour en venir spécifiquement à l'intervention des policiers auprès des victimes, une avancée considérable à vu le jour en 2009 par la conclusion d'un protocole d'accord de coopération entre l'Etat fédéral, la Communauté française et la Région wallonne en matière d'assistance aux victimes. Ce protocole d'accord vise une coopération structurelle en matière d'assistance aux victimes entre les services compétents de l'Etat fédéral, de la Communauté française et les services d'aide aux justiciables agréés par la Région wallonne. Il prévoit un point de contact au niveau des trois parties (Etat fédéral, Communauté française et Région wallonne) afin d'encourager de manière structurelle un dialogue permanent et une collaboration entre elles.

    La Région wallonne octroie une subvention forfaitaire à 67 communes pour le financement d'un travailleur social chargé, dans le ressort territorial de la zone de police, d'accompagner les services de police locale et d'améliorer l'accueil de première ligne des victimes.

    L'assistance policière aux victimes est définie par la circulaire fédérale GPI 58 du 4 mai 2007 : le service procuré aux victimes par la police, au sein de laquelle la première prise en charge et l'accueil de la victime ainsi qu'une bonne information de base de la victime occupent une place centrale.

    Au niveau régional, le plan opérationnel de la Direction générale Opérationnelle des Pouvoirs locaux, de l'Action sociale et de la Santé, prévoit de créer un réseau d'échange entre services d'aide sociale aux justiciables et agents des services d'assistance aux victimes des zones de police.

    Des rencontres sont prévues en janvier entre mes services et ceux des Procureurs du Roi pour aborder concrètement des modalités de collaboration. Les intervenants sociaux et policiers ainsi que les coordinations provinciales seront bien entendu associés à cette démarche.

    La question du logement me préoccupe également. Si des places supplémentaires ont été créées dans les maisons d'hébergement pour adultes en difficulté, ce type de logement ne répond qu'à certaines demandes précises. D'autres possibilités doivent être envisagées, notamment dans l'optique d'une insertion sociale à moyen et à long terme. C'est une réflexion qui doit se tenir, tout en sachant que la question du logement pour les personnes en situation précaire ne se limite pas aux victimes de violence conjugale mais aussi, malheureusement, aux personnes sans abri.

    L'augmentation des logements de transit, au sein des sociétés de logement social, des agences immobilières sociales ou encore des associations d'insertion par le logement est une piste intéressante souvent évoquée par les travailleurs sociaux. Je ne manquerai pas d'y être attentive dans le cadre des discussions en cours relatives à la réforme du Code du logement.

    J'ai estimé nécessaire de répondre à l'honorable membre de manière circonstanciée pour bien montrer que ma préoccupation rencontre entièrement la sienne et que tout est mis en œuvre pour mobiliser avec le maximum de bon sens, l'ensemble des intervenants concernés par la prise en charge des victimes de violence au sein du couple.