/

La préparation des négociations internationales sur le climat de Cancun

  • Session : 2010-2011
  • Année : 2010
  • N° : 296 (2010-2011) 1

2 élément(s) trouvé(s).

  • Question écrite du 06/12/2010
    • de DESGAIN Xavier
    • à HENRY Philippe, Ministre de l'Environnement, de l'Aménagement du Territoire et de la Mobilité


    Du 29 novembre au 10 décembre se tiendra la 16ème COP (Conference of parties), l’organe officiel décisionnel de la Convention cadre des Nations unies sur le changement climatique (1992) et son Protocole de Kyoto (1997).

    La première « période d’engagement » du protocole de Kyoto se terminant en 2012, l’objectif principal de la conférence sur le climat de Cancun devrait être de trouver un accord entre tous les pays sur ce que sera l’après-2012 : quels objectifs de réduction d’émissions de gaz à effet de serre (GES), sous quelle forme et pour quels pays ? Quels mécanismes pour atteindre ces objectifs ? Comment favoriser la mise en place de mesures d’adaptation aux changements climatiques dans les pays en développement ? Devrait, car tout porte à croire que si des avancées devaient avoir lieu, nous ne serions pas encore proches d’un nouveau traité international en matière de lutte contre le réchauffement climatique.

    Rappelons que l’enjeu est crucial puisque les émissions mondiales de GES doivent commencer à décliner le plus rapidement possible (et en tout cas pour 2015 au plus tard) afin d’éviter que les conséquences des changements climatiques soient dramatiques et irréversibles.

    Les négociations de l’année dernière n’ont malheureusement pas apporté les résultats tant attendus par la Communauté internationale. L’espoir de Copenhague était de trouver un successeur plus ambitieux au Protocole de Kyoto, c’est-à-dire un traité comportant des objectifs de réduction d’émissions de GES (pic d’émission avant 2015, réduction d’au moins 50% en 2050), le financement des mesures d’atténuation et d’adaptation pour les pays les plus pauvres et vulnérables, un caractère contraignant et, enfin, un calendrier. Nous le savons, il n’en a rien été.

    Au-delà d’une Conférence mondiale sur la lutte contre le réchauffement climatique – contre lequel tous les pays ont réitéré leur volonté de lutter et l’accord de Copenhague(1) le rappelle –, la conférence était aussi celle de la redéfinition du leadership mondial, quelque peu délaissé par les Etats-Unis dans ce domaine au profit ( ?) de l’Union européenne. Force est de constater que la conclusion du sommet laisse augurer d’une gouvernance mondiale redéfinie : ce sont les Etats-Unis et la Chine qui ont défini les grandes lignes de l’accord avec le Brésil, l’Afrique du Sud et l’Inde. L’UE ne faisait pas partie de ce cercle (cinq pays, comme les cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU) et a été contrainte d’y adhérer, sans s’être vraiment concertée.

    L’absence d’un accord suffisamment concret à Copenhague, et l’insuffisance du total des engagements annoncés par les pays participants pour répondre aux recommandations du GIEC, rendent extrêmement difficile le scénario de voir entrer en vigueur un nouvel accord avant la fin de la première période d’engagement de Kyoto, ce qui provoquera une rupture mettant en péril la possibilité de préserver le climat.

    Dans ce contexte, les négociations de Cancun sont tout aussi importantes et doivent contribuer à mieux définir les termes d’un accord futur, et ce d’autant que les négociations sur certains aspects déjà bien débattus à Copenhague pourraient aboutir.

    Je souhaite donc demander à Monsieur le Ministre-Président s’il partage cette analyse de l’état des lieux des négociations internationales sur le climat, comment il voit l’évolution de ces négociations, sur le rôle que l’Union européenne et notre pays peuvent jouer dans ce cadre. En effet, une bonne analyse de la situation globale de ces négociations et un bon positionnement peuvent avoir une influence sur les relations que la Région peut avoir avec certains pays avec lesquels elle estime devoir entretenir des liens privilégiés.

    A ce propos, Monsieur le Ministre-Président peut-il me faire le point sur les programmes de coopération menés par la Région wallonne avec les pays en voie de développement sous cet angle ? Certains de ces programmes intègrent-ils des préoccupations environnementales, et plus particulièrement en matière d’aide à la lutte contre le réchauffement du climat et en matière d’adaptation au changement climatique, qui pourraient être stratégiques pour certains pays avec lesquels notre Région entretient des liens privilégiés ? Si oui, lesquels ?

    Monsieur le Ministre-Président peut il également me détailler les actions menées dans cette matière dans le cadre de la présidence belge du Conseil des Ministres de l’Union européenne ?

    ________________________
    (1) On emploiera ici le mot « accord » avec toutes les réserves nécessaires
  • Réponse du 07/01/2011
    • de HENRY Philippe

    Tout d'abord, il semble important de rappeler les éléments marquants de la Conférence de Copenhague avant d'analyser les évolutions récentes de Cancun.

    A Copenhague, l'ambition générale était immense afin de résoudre le défi majeur des changements climatiques. Mais hélas, cet élan d'ambition initiale aurait du être géré d'une manière plus positive et consensuelle afin de potentialiser les forces en présence vers la réalisation d'un nouvel accord climatique mondial. Dans les faits, le problème principal de Copenhague a été l'absence d'un processus réellement transparent qui, a d'abord créé un climat de méfiance pour finir par une défiance globale du système. In extremis, certain chefs d'Etats ont proposé un accord minimum hors du cadre des Nations Unies. Chaque partie pouvant librement adhérer à cet accord par la suite. Il y avait bien entendu certaines avancées comme la politique de financement et l'introduction de nouveaux objectifs de réduction mais dans un cadre totalement désorganisé et dans une certaine frustration de ne pas avoir été plus loin.

    Le chemin de Copenhague à Cancun visait donc à la fois un retour vers une certaine confiance mutuelle entre les parties, à l'intégration de certains concepts de l'accord de Copenhague dans un format des Nations Unies et à la finalisation de certaines décisions techniques. Sur l'ensemble de ces points, Cancun fut un succès qui de plus remet en selle le processus multilatéral.

    Il eut été souhaitable d'obtenir dès Cancun un accord global sur certaines pièces maitresses encore manquantes comme l'architecture du futur accord ou les nouveaux engagements de réduction des gaz à effet de serre. Néanmoins, les observateurs avertis savaient bien avant Cancun que c'était une mission impossible en raison de l'évolution de ces éléments dans les négociations intermédiaires. De plus, les leçons de Copenhague font qu'il était souhaitable d'avancer pas à pas avec le but d'obtenir de réels accords, même si ils ne sont que partiels. C'était un préalable majeur au maintien du processus multilatéral actuel.

    Cancun a permis d'avoir des avancées notables et peut être plus importantes que prévues dans une série de points techniques majeurs comme par exemple le développement et le transfert des technologies, l'adaptation, le stockage géologique du carbone, ... et de réintégrer le dossier du financement dans le cadre des Nations Unies avec un début d'opérationnalisation.

    L'accord de Cancun clarifie aussi le fait que la Communauté internationale doit faire tout ce qui est possible pour limiter l'augmentation globale de température en dessous des 2° C par rapport à l'ère pré-industrielle. Ce dernier élément n'était pas mentionné dans l'accord de Copenhague. De ce fait, il s'agit donc bel et bien d'un élément historique. De plus il prévoit un processus de révision et d'analyse d'un objectif inférieur, soit 1,5° C et il met en évidence les trajectoires des émissions à moyen et long terme.

    Bien entendu beaucoup reste à faire et surtout du côté des Pays développés pour réaliser les importantes réductions d'émissions correspondant à cet objectif. Néanmoins la confiance est enfin restaurée grâce à une excellente présidence mexicaine. La conférence de Durban devra donc confirmer ce nouvel élan en finalisation de processus de l'ère post Kyoto.

    Sur le plan du processus, l'Union européenne, grâce à la présidence belge, a su reprendre sa place centrale sur la scène internationale en se plaçant entre les autres pays développés et les pays en voie de développement. Elle a donc été au cœur des négociations comme le souhaitait d'ailleurs la présidence mexicaine. L'Union européenne a aussi intensifié ses contacts bilatéraux afin de recréer un climat de confiance et d'écoute mutuelle. On peut donc se féliciter de cela surtout quand on sait que cette même Union européenne a été mise hors jeu lors de la Conférence de Copenhague.

    En ce qui concerne les projets de coopération, la Wallonie participe à hauteur de 2 millions d'euros en 2010 dans le financement «rapide» (« fast-start » en anglais) qui est l'un des résultats de Copenhague.

    Au Sénégal, la Région wallonne soutient le programme TACC (Territorial Approach to Climate Change) du PNUD qui vise à renforcer les capacités des Régions du Ferlo et du Sine-Saloum à intégrer les changements climatiques dans les plans de développement locaux.

    En Equateur, nous soutenons une initiative du gouvernement visant à s'abstenir indéfiniment de l'exploitation des ressources pétrolières situées en-dessous d'une réserve biologique importante.

    A Cancun, sous les auspices de l'IEPF, la Wallonie a initié un appel à projet vers le Bénin, le Sénégal, le Burkina-Faso, le Burundi, le Rwanda et la République Démocratique du Congo afin de concrétiser ses engagements en matière de financement rapide vis-à-vis de ces pays.