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Les clauses abusives ou illégales dans les baux à loyer

  • Session : 2010-2011
  • Année : 2010
  • N° : 164 (2010-2011) 1

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  • Question écrite du 23/12/2010
    • de TROTTA Graziana
    • à NOLLET Jean-Marc, Ministre du Développement durable et de la Fonction publique

    Le logement constitue un bien de première nécessité pour tous. Vu l'évolution du marché de l'immobilier, se loger devient de plus en plus difficile pour une proportion grandissante de citoyens. dans la mesure où, d'une part, le prix des loyers augmente chaque année dans des proportions supérieures au pouvoir d'achat des ménages et, d'autre part, il y a pénurie de logements en Wallonie.

    Au sein du marché immobilier, beaucoup de citoyens louent un logement. A cet égard, la législation relative aux baux à loyer relève de la compétence de l'État fédéral.

    Bien que cette législation ait pour objectif de garantir un équilibre entre les droits du locataire et ceux du propriétaire, il est fréquent que les contrats de location contiennent des clauses abusives, voire illégales, comme, par exemple, une garantie locative en espèces et supérieure à trois mois.

    En tant qu'entité fédérée, la Wallonie est compétente en partie pour la politique de logement, notamment pour ce qui concerne le logement social, la construction ou la rénovation d'habitations, la sécurité et la salubrité du bien, etc.

    La Déclaration de politique régionale prévoit « d'anticiper et d'entamer dès le début de la législature une concertation avec l'ensemble des parties concernées sur le contenu de la régionalisation projetée de la loi sur les baux à loyer ».

    Si la Région ne peut actuellement pas intervenir dans les relations entre le bailleur et le locataire d'un logement privé, l'anticipation à laquelle le Gouvernement s'est engagé doit l'amener à prendre des mesures pour « favoriser un marché locatif privé abordable et décent », comme l'indique également la DPR,

    Dans ce but, que Monsieur le Ministre me permette de lui soumettre une proposition qui a pour but, d'une part, de contribuer à l'assainissement du marché locatif privé et, d'autre part, de contribuer à la protection des locataires en sensibilisant ceux-ci sur ce que peut ou pas contenir un contrat de bail.

    Cette proposition consisterait à créer et à diffuser largement un petit guide à l'usage des candidats locataires, guide inventoriant les clauses abusives ou illégales rencontrées le plus fréquemment dans les contrats de bail et comportant également un exemple de bail-type. Cette démarche de sensibilisation et d'information permettrait aux candidats locataires d'être mieux outillés contre d'éventuels abus.

    Par conséquent,

    - que pense Monsieur le Ministre de cette proposition;
    - quelles mesures prend-il pour favoriser un marché locatif privé abordable et décent;
    - peut-il m'indiquer le plus exhaustivement possible quelles sont les clauses abusives ou illégales fréquemment rencontrées dans les contrats de bail ?
  • Réponse du 18/01/2011
    • de NOLLET Jean-Marc

    Que l'honorable membre me permette tout d'abord de rappeler que, sans attendre la régionalisation de la loi sur les baux à loyer, le Gouvernement wallon travaille, dans l'esprit de la DPR, pour favoriser un marché locatif abordable. 30.000 ménages wallons sont demandeurs d'un logement social. Ils ne pourront pas tous être satisfaits et il y a donc lieu de rendre le secteur privé locatif davantage accessible aux plus fragilisés.

    En sa séance du 23 décembre dernier, le Gouvernement wallon a adopté deux arrêtés visant à favoriser le conventionnement des logements du secteur locatif privé au profit des ménages à revenus modeste ou précaires. Les mesures adoptées visent des aides aux travaux afin de remettre sur le marché locatif privé des logements actuellement inoccupés et des mesures d'aides aux familles nombreuses afin de faciliter la prise en location par ces familles de logements adaptés à leur taille (allocation mensuelle de 100 à 140 euros). Ces mesures sont accessibles pour les propriétaires bailleurs et les familles locataires qui passent par l'intermédiaire d'une Agence immobilière sociale ou d'une Association de promotion du logement.

    Pour en venir à l'objet de la question de l'honorable membre, force est de reconnaître que depuis 1991, la matière du bail de résidence principale est de plus en plus réglementée et laisse de moins en moins place à la liberté contractuelle.

    En effet, un régime de droit impératif auquel ne peuvent déroger les parties détermine:
    - l'état du bien loué;
    - la durée du bail et ses modalités de résiliation;
    - le loyer, son indexation et sa révision;
    - la cession de bail et la sous-location;
    - l'imputation du précompte immobilier;
    - le sort du bail en cas de vente du bien loué;
    - la garantie locative.

    La partie protégée par ces dispositions peut invoquer la nullité des clauses contraires à la loi.

    Par ailleurs, l'information des parties en général et du locataire en particulier a été accentuée par la loi du 25 avril 2007 :
    - l'arrêté royal du 4 mai 2007, pris en exécution de l'article 11bis de la loi sur les loyers, a établi pour chaque région une annexe qui doit obligatoirement être jointe à tout contrat de bail conclu à partir du 18 mai 2007. L'annexe reprend l'ensemble des éléments suivants: les dispositions adoptées par la région concernée en matière de normes de salubrité, de sécurité et d'habitabilité; une explication sur la nature d'une règle impérative; les dispositions relatives au bail écrit, à son enregistrement et à la gratuité de l'enregistrement; la durée du bail; les possibilités de révision du loyer, l'indexation, les charges; les règles établies en matière de réparations locatives; les possibilités de mettre fin au bail et les dispositions y afférentes; les dispositions liées au changement de propriétaire; les possibilités pour les parties de pouvoir être assistées en cas de litige;
    - en outre, à chaque contrat doit être jointe une copie de l'arrêté royal du 8 juillet 1997 déterminant les conditions minimales à remplir pour qu'un logement donné en location à titre de résidence principale soit conforme aux exigences élémentaires de sécurité, de salubrité et d'habitabilité.

    Enfin, la loi du 25 avril 2007, en prévoyant que le bailleur est obligatoirement tenu de toutes les réparations autres que les locatives, interdit désormais de déroger aux obligations usuelles des parties dans le cadre de l'entretien du bien loué.

    Malgré les efforts qui ont été entrepris, il n'en reste pas moins qu'il faut aussi tenir compte, non seulement de la méconnaissance ou de l'ignorance des dispositions protectrices, mais aussi des difficultés réelles rencontrées par des locataires démunis contraints, par nécessité, de prendre en location des habitations de qualité médiocre ou de conclure des contrats de locations qui ne respectent pas toujours la réglementation du bail. Comme le soulignait le Ministre de la Justice de l'époque, "la réalité économique démontre que le bailleur et le preneur ne peuvent pas toujours négocier comme des partenaires équivalents et qu'un bail est dans certains cas un contrat d'adhésion"(1).

    Dans certains cas, ce n'est donc pas librement mais en état de contrainte économique que certains locataires indigents acquiescent à l'état du bien ou à la conclusion du contrat de bail.

    Dans ce cadre, il est à souligner que l'administration wallonne du logement a mis en place depuis 1989 un réseau de permanences Info-Conseils Logements, auprès desquelles les citoyens peuvent recevoir des informations de base sur leurs droits et leurs devoirs en tant que locataires ou propriétaires. En outre, la Région wallonne subventionne des associations de promotion du logement, qui sont des organismes à finalité sociale. Ainsi, en Brabant wallon l'ASBL Droits quotidiens agit pour l'intégration sociale dans le logement et active une assistance juridique relative au logement, notamment sur la matière du bail.

    Par ailleurs, courant 2010, le Conseil supérieur du logement a finalisé la préparation d'une brochure intitulée "Bien habiter son logement en Wallonie". Cette brochure, qui est en cours de publication, aborde les éléments ci-après:
    - conseils pour garantir des bonnes relations entre propriétaires et locataires aux différentes étapes de l'occupation d'un logement: état des lieux, signature du contrat de bail, assurances, entretien du logement, relations de voisinage, fin du bail, résolution des conflits, ...
    - recommandations au niveau de la qualité du logement (sécurité, lutte contre l'humidité, la ventilation, les énergies, l'eau, .. );
    - informations sur les aides financières;
    - quelques adresses utiles.

    Eu égard à ce qui précède, il serait sans doute judicieux de compléter la brochure initiée par le Conseil supérieur du logement par un document de référence afin d'éviter certains abus. Les expériences pilotes en matière de commissions paritaires locatives ont amené la mise en place d'ateliers qui ont réfléchi à la mise en place d'un bail-type qui satisfait les attentes de l'ensemble des parties et de respect de la liberté contractuelle. L'utilité générale de l'établissement d'un bail-type est la diminution du nombre de litiges par la meilleure diffusion de l'information sur les droits et obligations de chacun. En effet, certains baux contiennent des clauses illégales et informent par ailleurs très peu des règles impératives existantes (2). Une réflexion en la matière devrait être prochainement menée au sein du Conseil supérieur du logement.



    (1) Doc. ParI., Chambre, 96/97, 717/7, p.14.
    (2) N. BERNARD, T. DAWANCE et L. GOOSSENS, Les commissions paritaires locatives: chroniques et enseignements d'une expérience-pilote fondatrice, Bruylant, 2010.