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La Côte d'Ivoire

  • Session : 2010-2011
  • Année : 2011
  • N° : 80 (2010-2011) 1

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  • Question écrite du 11/01/2011
    • de STOFFELS Edmund
    • à DEMOTTE Rudy, Ministre-Président du Gouvernement wallon

    Nous suivons tous les actualités qui concernent la Côte d’Ivoire. Le risque que le conflit entre le président sortant et le nouvel élu éclate en guerre civile est réel.

    Avons-nous des contrats avec la Côte d’Ivoire ? Contrats commerciaux ? Contacts politiques bilatéraux ? Contacts avec les ressortissants de la communauté des gens de la Côte d’Ivoire habitant en Belgique ?

    Quelle est l’analyse du Ministre-Président par rapport aux actualités ? Devons-nous réagir ? Pouvons-nous aider à éviter le conflit ? Et comment ?

    Les pays africains peinent à trouver une solution qui évite le conflit armé.

    Sans vouloir s’immiscer outre mesure, n’est-il pas utile que la Région wallonne prenne contact avec les organisations africaines qui tentent de réconcilier les différentes parties dans ce pays ?

    C’est peut-être utile d’agir dans ce sens avant que l’ONU ne soit encore une fois obligée d’envoyer des casques bleus.
  • Réponse du 02/02/2011
    • de DEMOTTE Rudy

    Le Gouvernement wallon, à l'instar de celui de la Communauté française et, beaucoup plus largement, à l'instar de la Communauté internationale, souhaite sans ambiguïté voir respecter le résultat des urnes en Côte d'Ivoire; un résultat qui traduit une volonté de changement politique de la population ivoirienne et qui a été validé tant par la commission électorale indépendante que par l'ONU.

    La réaction de la communauté internationale a été à la fois immédiate et unanime. L'Union africaine, l'ONU, l'Union européenne et les Etats-Unis ont tous reconnu la victoire de Monsieur Alassane Ouattara.

    Il est maintenant essentiel que le fondement de la démocratie que constitue le vote populaire soit respecté en Côte d'Ivoire. C'est la raison pour laquelle, lors d'un contact direct organisé à Paris avec Monsieur Clément Duhaime, nous avons réitéré notre demande de voir organisée rapidement une session extraordinaire du Conseil permanent de l'OIF.

    Celle-ci a été convoquée en urgence le 12 janvier 2011. Elle a permis au Secrétaire général de la Francophonie, le Président Abdou Diouf, de rendre compte des multiples consultations qu'il a engagées à ce sujet depuis fin novembre 2010. Elle a permis, également, aux Etats et gouvernements membres de la Francophonie d'arrêter une position commune quant à la forme que revêtirait la suspension éventuelle des représentants de la Côte d'Ivoire au sein des instances de l'Organisation. Il convenait bien, à cet égard, d'en évoquer « la forme » dès lors que la situation est juridiquement inédite.

    En effet, pour rappel, la Constitution ivoirienne dispose clairement, en son article 94, que seul le Conseil constitutionnel est habilité à proclamer les résultats définitifs d'une élection présidentielle. Il n'y a donc aucune équivoque quant à cette prérogative et son exercice. Parallèlement, le Code électoral dispose tout aussi clairement, en son article 64, que le Conseil constitutionnel a le pouvoir, soit de valider les résultats provisoires qui lui sont transmis par la commission électorale indépendante soit de les invalider au regard d'irrégularités qu'il constaterait. Si le conseil constitutionnel invalide les résultats, l'article 64 de la loi dispose qu'il annule le scrutin et charge la commission électorale indépendante de proposer une nouvelle date de convocation des électeurs dans les 45 jours suivant la décision d'annulation.

    En conséquence, à ce jour, suivant la loi ivoirienne, il n'y a pas, en Côte d'Ivoire, de chef de l'Etat définitivement élu. Il y a, cependant, conformément à la loi, un candidat déclaré provisoirement vainqueur du scrutin du 28 novembre 2010 en la personne de Monsieur Alassane Ouattara. Cette proclamation provisoire est, à ce jour, seule valable au regard de la loi dès lors que le conseil constitutionnel a, en quelque sorte, oublié d'annuler le scrutin et, de surcroît, s'est arrogé une prérogative de désignation d'un vainqueur que ne lui confère nullement la loi.

    Enfin, conformément au protocole ad hoc établi entre l'Etat ivoirien et les Nations unies, ces dernières disposaient d'un pouvoir de certification de la régularité de ces opérations électorales, qui leur a permis de valider la proclamation provisoire de la Commission électorale indépendante désignant M. Ouattara.

    En conséquence, suspendre la République de la Côte d'Ivoire aurait préjudicié à cette légitimité reconnue à M. Ouattara par la quasi-totalité de la Communauté internationale mais encore loin de se concrétiser à l'intérieur de l'Etat ivoirien. C'est précisément pour cette raison que ni l'Union africaine ni l'Organisation des Nations unies n'ont suspendu de leurs instances la République de Côte d'Ivoire mais ont décidé que seuls les représentants désignés par M. Ouattara pourraient désormais y représenter valablement l'Etat ivoirien. En cohérence, contrairement à ce qui fut le cas ces dernières années avec la Guinée-Conakry, Madagascar et la Mauritanie, c'est donc cette forme de réaction que le Secrétaire général de la Francophonie a proposée, recueillant l'assentiment unanime de toutes les délégations présentes, dont celle de la Communauté française bien entendu. C'est ainsi que le représentant de la République de Côte d'Ivoire invité à s'exprimer en fin de séance fut le Ministre d'Etat, Secrétaire général à la Présidence de la République, M. Amadou Gon Coulibaly, dûment mandaté à cet effet par M. Alassane Ouattara.

    En conclusion et plus largement, au regard des spécificités de la crise actuelle, pour prévenir tout risque d'effritement de la quasi-unanimité internationale actuelle (seul l'Angola, la Gambie et la Russie s'en démarquent pour des raisons diverses), il est primordial de continuer à privilégier les initiatives multilatérales d'Organisations auxquelles ressortit la République de Côte d'Ivoire mais tout en respectant scrupuleusement les prérogatives et les normes de ces différentes Organisations. Ainsi, très concrètement, si elle devait se mettre en œuvre, toute intervention militaire ne pourrait que résulter, de manière raisonnée, d'une initiative de la Communauté des Etats d'Afrique de l'Ouest (CEDEAO).

    De manière plus globale, il importe de rappeler que si la crise de régime que traverse ce pays est très préoccupante et appelle une réaction rapide, les problèmes de cet Etat africain sont bien plus anciens. En effet, depuis 11 ans, maintenant, la Côte d'Ivoire fait face à une instabilité endémique et connaît une réelle fracture entre le Nord et le Sud.

    C'est ce qui explique que, depuis de nombreuses années, notre coopération bilatérale avec ce pays est inexistante. La Wallonie n'a pas signé le moindre accord de coopération avec la Côte d'Ivoire et aucun budget ne lui est alloué.

    En matière d'exportation d'armes, la situation est également extrêmement claire. Le pays fait actuellement l'objet d'un embargo décrété lors de la reprise des hostilités en 2004, tant par l'Union européenne que par l'ONU. Initialement prévu pour une période de 13 mois, cet embargo a été systématiquement prolongé depuis. Aucune livraison d'armes ou de matériel militaire n'est donc simplement envisageable depuis plus de 6 ans.

    En ce qui concerne les aspects économiques et commerciaux, la situation est bien différente. La Côte d'Ivoire est très certainement le pays d'Afrique de l'Ouest le plus développé. Ses infrastructures sont les plus modernes et le port d'Abidjan s'impose comme la porte d'entrée de l'Afrique de l'Ouest. Le pays dispose, en outre, de ressources importantes comme le pétrole, l'or, le cacao et le coton, pour ne pas citer le diamant qui fait l'objet d'un embargo international.

    Pour assurer l'avenir économique du pays, de grands projets sont en cours, visant la modernisation du port de Yamoussoukro et le développement de capacités de transformation des matières premières.

    Ces projets pourraient offrir, à terme, des opportunités à nos entreprises. C'est pourquoi l'AWEx continue d'assurer une veille économique et d'encadrer les entreprises wallonnes actives dans ce pays.

    Il va de soi que la situation politique actuelle risque de compromettre ce développement économique. Si elle devait perdurer, elle pourrait, en effet, inciter les entreprises étrangères à se réorienter vers d'autres Etats, plus stables, de la région. Voilà pourquoi il est évidemment essentiel pour l'avenir de la Côte d'Ivoire et de sa population que la stabilité soit rapidement assurée et que la démocratie retrouve pleinement ses droits.