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Economie - Situation de l’industrie textile en Wallonie.

  • Session : 2002-2003
  • Année : 2002
  • N° : 3 (2002-2003) 1

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  • Question écrite du 25/11/2002
    • de BERTOUILLE Chantal
    • à KUBLA Serge, Ministre de l'Economie, des PME, de la Recherche et des Technologies nouvelles

    Nul n'ignore qu'actuellement le secteur textile est à nouveau dans la tourmente dans le nord de la France et que les disparitions d'entreprises y sont particulièrement nombreuses.

    De très nombreuses restructurations sont intervenues, notamment dans le secteur du textile-habillement qui, dans le nord de la France, n'emploie plus que quelque 30.000 personnes, c'est-à-dire 9.000 de moins qu'à la veille de la restructuration de 1999.

    Monsieur le Ministre chargé de l'Economie peut-il me fournir, d'une façon globale, des précisions en ce qui concerne l'industrie textile, plus particulièrement dans les régions de Mouscron et de Verviers, et me préciser les mesures que l'on peut adopter pour que les emplois dans le secteur textile-habillement soient protégés des menaces de la concurrence étrangère ? Quelle est la situation de l'industrie textile en 2002 dans les régions de Mouscron et de Verviers par rapport à la situation il y a 5 ans ?
  • Réponse du 19/12/2002
    • de KUBLA Serge

    Les questions de concurrence entre un secteur industriel et ses homologues étrangers sont toujours délicates à aborder, particulièrement dans le cadre des réglementations européennes que nous connaissons qui interdisent aux Etats membres de toute forme de protectionnisme intra-européen et s'inscrivent, elles-mêmes, dans le cadre d'un marché mondial de plus en plus ouvert et globalisé.

    Face à ces réalités, la seule attitude réaliste à adopter est d'oeuvrer à maintenir une compétitivité constante de nos entreprises sur les marchés respectifs et le secteur textile est sans doute l'un de ceux qui a dû faire face le plus tôt à cette nécessité, tant la concurrence mondiale y est féroce depuis plusieurs décennies, notamment avec les pays d'Asie du Sud-Est. La clef de la survie a dès lors résidé dans la capacité à produire ce que les clients souhaitent vraiment, à s'adapter rapidement au marché grâce à des parcs machines performants et un personnel motivé tout en surveillant les coûts (surtout salariaux) qui comptent parmi les plus élevés du monde dans ce secteur.

    Selon un rapport de la fédération textile Febeltex, l'industrie textile belge a investi près de 270 millions d'euros en 2001, avec une valeur ajoutée de près de 2 milliards d'euros, essentiellement réalisée (40 %) par le sous-secteur des textiles d'intérieur (tapis, tissus d'ameublement, tentures, ...), suivi (24 %) par l'habillement (fabrication des étoffes, à ne pas confondre avec la confection), les textiles techniques (23 %), secteur en pleine croissance intégrant, notamment, bâches, revêtements automobiles et géotextiles, l'ennoblissement (9 %) et, enfin, les filatures (4 %). Notons cependant qu'avec l'évolution des techniques cette nomenclature ne voudra bientôt plus dire grand chose, tous les tissus devenant “techniques” et amenant les filatures elles aussi à se positionner dans des segments de pointe en produisant des fils coupe-feu, anti-UV, ultra résistants, etc. A cet égard, le secteur de l'ennoblissement devient une activité clef puisqu'il ne suffit plus de teindre des fils, tissus ou produits finis, mais qu'il s'agit de plus en plus de les doter de caractéristiques recherchées: infroissabilité, stabilité dimensionnelle, encapsulation, ...

    En ce qui concerne le textile wallon, après la série de faillites qui a secoué le secteur en 2000 (on se souvient de la chute de LDP ayant entraîné dans sa mouvance des répercussions négatives pour une série d'entreprises), Febeltex enregistre des signes encourageants: hausse des exportations, de la productivité, de l'emploi dans certains sous-secteurs, et surtout des investissements qui ont atteint en 2001 le chiffre record de 62.000.000 d'euros (contre 25 millions d'euros en 1993 et 59 millions d'euros en 1998).

    Ces chiffres illustrent bien les efforts réalisés par le secteur textile wallon pour se repositionner sur des créneaux porteurs. A cet égard, le programme Objectif 1 Hainaut a donné une impulsion majeure aux investissements qui se sont poursuivis en 2001 (d'abord sans cofinancement européen, puis dans le cadre du “phasing out” en fin d'année), preuve de la confiance à long terme des entrepreneurs wallons.

    Un autre signe positif est le taux moyen des exportations qui, en 2001, atteignait 75 % du chiffre d'affaires, plaçant le secteur parmi les plus exportateurs.

    Tout n'est pas rose néanmoins dans le textile wallon. Son caractère ouvert vers l'extérieur rend le secteur très sensible aux mouvements conjoncturels des marchés étrangers et, malgré les importants programmes d'investissement, les entreprises wallonnes ont été globalement contraintes de diminuer leur production dès août 2001, et plus encore après le 11 septembre.

    Le chiffre d'affaires est pourtant resté relativement stable, ce qui s'explique le mieux par des prix de vente plus élevés (et donc de meilleures marges) consécutifs à une hausse de la demande de produits de meilleure qualité. Cette explication est par ailleurs confirmée par l'examen de la valeur ajoutée moyenne, qui croît d'environ 5 % par an et, selon les derniers chiffres disponibles, avoisinait les 230 millions d'euros en 2001, soit près de 30 % du chiffre d'affaires pour l'ensemble des entreprises tous secteurs textiles confondus (filatures, extrusion, textiles techniques, ...).

    La productivité reste quant à elle exemplaire: avec 44.500 euros de valeur ajoutée annuelle par tête, le travailleur textile wallon est en tête du peloton européen. A cet égard, le renouveau du secteur demande des travailleurs qualifiés, qui ont pu faire défaut ces dernières années (2000 a même connu une véritable pénurie d'emploi, avant que celui-ci ne repasse au dessus de la barre des 5.000 unités), c'est pourquoi les entreprises wallonnes insistent sur la nécessité d'actions de formation et de sensibilisation aux métiers du textile. Dans ce but, Febeltex participe à diverses manifestations (salon “objectif emploi” à Tournai, “Université de l'Europôle textile”, etc.) et les industriels ont décidé de faire du soutien aux formations en alternance une priorité du secteur.

    Les considérations ci-avant illustrent bien que, face à la concurrence mondiale, le salut de l'industrie textile wallonne réside dans un repositionnement vers la production de produits de niches générateurs d'une importante valeur ajoutée et/ou supposant une expertise technologique certaine. Les programmes d'investissement entamés par le secteur, et soutenus






    par mon administration (1), vont pour la plupart dans ce sens.

    Les échos qui me reviennent d'entreprises dans lesquelles la Région wallonne détient des participations confirment cette analyse.

    Ainsi, pour prendre quelques exemples “Tissages Alfred Flamme” à Mouscron, dont l'activité de tissage et de confection de linge de maison et d'hôtel se place résolument dans un créneau “haut de gamme”, semble y avoir trouvé sa place et continue de jouir du soutien de son actionnariat qui prépare une prochaine augmentation de capital.

    “Idéal fibres” (ex “Lystex”) à Comines, filiale du groupe Beaulieu qui occupe 167 travailleurs à la production de textiles techniques (bandes polypropylènes) a, quant à elle, connu une expansion continue et sa société faîtière a récemment fait offre de reprise de la participation publique prise en 1987 par la SNSN dans le cadre du “plan textile” (290.000.000 d'anciens francs belges) et arrivant à échéance.

    Quant à la “Société mouscronnoise de filature”, elle a été en mesure de rembourser anticipativement en 2001 un ancien emprunt obligataire passé à la Région wallonne en 1994.

    Par répercussion, la nécessité d'un repositionnement touche aussi le secteur connexe des machines textiles. Un exemple récent de restructuration est celui du H.D.B. (Houget Duesberg Bosson) à Verviers, société de production de machines textiles au profit de laquelle le Gouvernement wallon a décidé, sur ma proposition, d'intervenir en capital et prêt pour un montant total de 2.480.000 euros afin de la soutenir, aux côtés de son actionnaire privé, dans ses efforts de reconversion vers le secteur du “non tissé” dont la croissance est estimée à 30 % pour les années à venir.

    Des exemples contraires existent malheureusement de sociétés qui n'ont pu faire face à temps aux défis de la reconversion technologique comme, par exemple, la SA “Ateliers Henri Paulus” (machines textiles) à Dison, dont la liquidation a été prononcée tout récemment.

    De manière générale, faute de pouvoir compter sur une valeur ajoutée générant des marges appréciables que seul un positionnement de niche permis d'assurer, l'importance des coûts (surtout salariaux) en Belgique ne permet généralement pas de faire face à la concurrence mondiale (ou même européenne) sur les produits de base.

    La Région wallonne, par mon entremise, encourage donc les entreprises à miser au maximum sur l'innovation technologique, par le biais d'aides directes à la recherche (avances récupérables), mais aussi en subventionnant des centres de recherche comme Centexbel (Verviers) dont les activités de recherche collective et de guidance technologique profitent au secteur dans son ensemble.

    Le secteur textile wallon est en train d'opérer une mutation vers des technologies de pointe qui, à terme, devront assurer sa survie face à une concurrence qui ne doit pas composer avec des charges aussi élevées. J'entends soutenir cette démarche réaliste et volontaire tant par le biais des mécanismes de primes à l'investissement et d'aides à la recherche qu'en examinant avec toute l'attention requise les projets de restructuration solides et sérieux pour lesquels une intervention régionale serait sollicitée.

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    (1) Sur la période 1999-2002, quarante-huit dossiers de primes à l'investissement concernant des PME du secteur (code Nace 17, textile) ont été admis, pour un total de primes distribuées de 3.541.773,31 euros dont 1.465.253,97 euros dans l'arrondissement de Mouscron et 790.675,12 euros dans celui de Verviers. En ce qui concerne les grandes entreprises, on les retrouve essentiellement dans la région mouscronnoise où, de 1998 à ce jour, seize dossiers d'investissement ont été acceptés dans le cadre de l'Objectif 1 (+ phasing out) pour un montant de primes de 29.161.754 euros financées conjointement par la Région wallonne et par le Feder.