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La réflexion sur la responsabilité des mandataires

  • Session : 2010-2011
  • Année : 2011
  • N° : 485 (2010-2011) 1

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  • Question écrite du 18/05/2011
    • de BERTOUILLE Chantal
    • à FURLAN Paul, Ministre des Pouvoirs locaux et de la Ville

    Etre mandataire public implique aujourd’hui d’assumer de lourdes responsabilités. Ces responsabilités ne sont cependant pas uniquement sur le plan politique. Gérer une commune peut en effet avoir des conséquences sur le plan civil mais également sur le plan pénal. Il n’est plus rare de voir des bourgmestres ou encore des échevins être condamnés par la justice pour, par exemple, le mauvais entretien des voiries.

    C’est pourquoi le prédécesseur de Monsieur le Ministre avait chargé trois éminents juristes de se pencher sur la question de la responsabilité des mandataires et de dégager des pistes qui permettraient de trouver une solution en faveur des mandataires locaux.

    Hélas, il ressortait des rapports établis que la solution ne pouvait être trouvée uniquement au niveau de la Région wallonne mais que celle-ci dépendait en grande partie d’initiatives qui devraient être prises au niveau fédéral.

    C’est ainsi que la Région wallonne avait décidé de tout faire pour mettre en œuvre l’assurance responsabilité pour les mandataires publics. La réflexion s’était arrêtée là et diverses initiatives avaient été prises au niveau fédéral.

    Malheureusement, ces diverses initiatives n’ont jamais pu aboutir et toute la question reste donc en suspens.

    Quelle est, aujourd’hui, la position de Monsieur le Ministre concernant la problématique de la responsabilité pénale et de la responsabilité civile des mandataires ? Une suite a-t-elle été donnée aux trois rapports qui avaient été rédigés à l’époque ? Des contacts ont-ils été pris avec le fédéral concernant la réactivation de ce dossier ? Des contacts ont-ils été pris avec les autres entités fédérées qui auraient éventuellement pris des initiatives diverses en la matière ? Quelle est la position actuellement soutenue par, par exemple, l’Union des villes et communes de Wallonie en la matière ?
  • Réponse du 29/06/2011
    • de FURLAN Paul

    La question de la responsabilité civile et pénale des mandataires locaux a fait l'objet de nombreuses études juridiques très fouillées. Je rappellerai simplement ici les données du problème et j'évoquerai la situation actuelle du dossier.

    * Responsabilité civile
    En matière civile, c'est la théorie de l'organe qui prévaut. Les bourgmestres et les échevins sont les organes de la commune et leur faute engage la responsabilité de la commune de manière directe, conformément à l'article 1382 du Code civil.

    Suites aux résultats des Assises de la démocratie de 1998, l'article L1241-3 du CDLD porte que: "La commune est tenue de contracter une assurance visant à couvrir la responsabilité civile, en ce compris l'assistance en justice, qui incombe personnellement au bourgmestre et à l'échevin ou aux échevins dans l'exercice normal de leurs fonctions". J'observe que toutes les communes wallonnes sont en règle avec cette obligation. Le but de l'article est également de favoriser les vocations de mandataires locaux en les assurant.


    * Responsabilité pénale
    Le mandataire local, et plus spécialement le bourgmestre, peut voir sa responsabilité pénale engagée dans de nombreux cas prévus par le Code pénal : soit à la suite d'une infraction intentionnelle telle que la corruption, la destruction de titres, le faux en écritures publiques, soit à la suite d'une infraction non intentionnelle.

    Dans ce dernier cas, un bourgmestre pourrait être poursuivi pour coups et blessures involontaires, voire homicide involontaire lorsqu'il a, par exemple, manqué à son devoir de sécurité imposé par l'article 135, §2, de la nouvelle loi communale et que ce manquement a causé des coups et/ou blessures ou mort d'homme. Cependant, les articles L1241-1 et L1241-2 du CDLD protègent, dans une certaine mesure, les mandataires.

    Suite à l'arrêté du Gouvernement wallon du 15 mai 2008, il est prévu que l'assurance souscrite sur base de l'article L1241-3 du CDLD par la commune, en faveur du bourgmestre et des membres du collège communal, auprès d'une compagnie d'assurances agréée, doit comprendre une assistance judiciaire - défense civile et pénale. Des seuils minima de couverture sont prévus, tant pour l'assistance en justice (25 000 euros), que pour les dommages corporels et matériels confondus (500 000 euros) et les dommages immatériels (500 000 euros).

    II n'est évidemment pas question de couvrir tout comportement fautif du bourgmestre ou d'un autre membre du Collège communal, mais uniquement de couvrir la responsabilité civile qui lui incombe personnellement dans l'exercice normal de ses fonctions.

    En Flandre, l'arrêté du Gouvernement du 19 janvier 2007 portant statut du mandataire prévoit notamment que:
    - l'assurance souscrite par la commune ou la province en garantie de la responsabilité civile doit comprendre un volet de type assistance en justice - défense civile et pénale;
    - le coût des primes afférentes à l'assurance en garantie de la responsabilité civile est supporté par un crédit obligatoire inscrit, selon le cas, au budget communal ou provincial.

    Pour le reste, comme l'honorable membre l'indique, la compétence dans le domaine de la responsabilité, qu'elle soit civile ou pénale, demeure essentiellement de la compétence de l'autorité fédérale. Puisqu'il évoque l'Union des Villes et Communes de Wallonie qui s'est particulièrement engagée sur ce dossier, j'ai observé avec intérêt le débat qui a été mené le 4 juin 2008 lorsque celle-ci était auditionnée par la Commission de la Justice de la Chambre sur deux propositions de loi relatives à la responsabilité pénale des mandataires locaux.

    II était notamment question du problème de l'unité des fautes civiles et pénales. Selon cette théorie, la faute pénale des articles 418-420 du Code pénal (coups et blessures par imprudence) est identique à la faute civile de l'article 1382 du Code civil. Cela a pour conséquence qu'une victime ne peut être dédommagée que si la personne reconnue responsable au civil - notamment un mandataire - est également condamnée au pénal, même lorsqu'elle n'a rien de culpeux à se reprocher.

    L'une des deux propositions de loi faisait écho à la réforme pour laquelle milite l'Union, celle de la désolidarisation des fautes pénale et civile. L'autre proposition prônait le principe de la responsabilité pénale des communes elles-mêmes en modifiant le champ d'application de la loi du 4 mai 1999 relative à la responsabilité pénale des personnes morales. Ces propositions sont cependant devenues caduques depuis la dissolution des chambres fédérales en 2010. Il me semble toutefois que les travaux qui ont été menés pourront servir de base pour une prochaine proposition.

    D'autres pistes ont été évoquées suite aux travaux menés par le groupe constitué par mon prédécesseur, comme:
    - intégrer les responsables locaux dans le champ d'application de la loi du la février 2003 relative à la responsabilité des et pour les membres du personnel au service des personnes publiques, ce qui permettrait de les exonérer de la faute légère à tout le moins pour leurs missions déconcentrées. Mais il s'agit là aussi d'une compétence fédérale ;
    - décharger le bourgmestre de ses compétences en matière de police administrative générale comme c'est déjà le cas pour la police des spectacles qui, en vertu de l'article 130 NLC, incombe au collège communal.