/

L'emploi temporaire

  • Session : 2010-2011
  • Année : 2011
  • N° : 806 (2010-2011) 1

2 élément(s) trouvé(s).

  • Question écrite du 30/06/2011
    • de STOFFELS Edmund
    • à ANTOINE André, Ministre du Budget, des Finances, de l'Emploi, de la Formation et des Sports

    Le contrat de travail classique et à durée indéterminé, qui donnait une certaine garantie au travailleur, est en régression.
     
    Le contrat de travail à durée déterminée – que ce soit le contrat intérim, les chèques services, les stages, les contrats à durée limitée, le travail occasionnel – est par contre en progression, plongeant les travailleurs dans l’insécurité d’existence la plus totale.
     
    C’est un phénomène qui frappe davantage des jeunes : 40 % des travailleurs jusque 24 ans ont des contrats temporaires contre 10 % pour l’ensemble des travailleurs.
     
    Certes, on peut considérer l’emploi temporaire comme tremplin vers l’emploi permanent.
     
    Mais ne risque-t-on pas que le phénomène de l’emploi temporaire prenne de l’ampleur ? 
     
    Une fois que les patrons auront découvert l’avantage de l’emploi temporaire, ne vont-ils pas recourir de plus en plus à cette forme d’emploi – pour des fonctions qui ne nécessitent pas que le travailleur soit autant fidélisé par rapport à « son entreprise » ?
  • Réponse du 29/08/2011
    • de ANTOINE André

    Le marché de l'emploi a connu d'importantes évolutions au cours de ces dernières années, et ce tant au niveau de l'emploi au sein des secteurs d'activités que de la nature des emplois proposés: aux temps pleins, s'ajoutent de plus en plus d'emplois à temps partiel ou de travail intérimaire. Il s'agit donc moins ici de poser la question en termes de « contrat de travail classique et à durée indéterminée» par opposition à « l'emploi temporaire », mais plutôt de l'envisager sous l'angle d'une évolution plus générale d'un marché de l'emploi qui devient plus« flexible».

    En effet, la tendance observée tant en Belgique qu'en Wallonie est bien à la hausse des temps partiels ou temporaires. Au niveau belge, selon les estimations rapides de l'ONSS, le nombre de travailleurs à temps partiel a connu, entre le 3ème trimestre 2003 et le 3ème trimestre 2010, une augmentation de 37,5 %, soit près de 170 000 personnes supplémentaires.

    Dans le même temps, le travail saisonnier et intérimaire connaissait une évolution similaire (+ 36,4 %, + 24 000 personnes). En ce qui concerne les temps partiels, la crise ne paraît pas avoir eu une forte incidence sur ce type de prestation qui globalement ne cesse de progresser. Enfin, les temps pleins, bien qu'ayant présenté un léger creux en 2009, sont relativement stables dans le temps.

    En Wallonie(1), ce sont les secteurs tertiaire et quaternaire(2) qui pourvoient le plus d'emplois à temps partiel (35 %). Ce sont également les secteurs dont la croissance fut la plus importante lors des dernières années. Ils représentent les trois quarts de l'emploi wallon. De manière plus précise, trois secteurs présentent une part supérieure à 50 % de temps partiels, il s'agit de l'hébergement et la restauration (61 % de temps partiels), de la santé humaine et l'action sociale (59 %) et des activités de ménages (54 %).

    Ainsi, la nature des contrats dépend surtout de l'évolution du marché et des secteurs en croissance. Si certains secteurs ne sont plus guère pourvoyeurs d'emplois, d'autres sont, en revanche, de véritables locomotives pour la Wallonie. C'est le cas des secteurs précités.

    Ceci dit, une analyse des données relatives au temps partiel en fonction des catégories d'âge(3) montre que le temps partiel chez les hommes se concentre principalement au commencement de l'activité professionnelle et en fin d'activité professionnelle. Chez les femmes, le temps partiel se retrouve fortement représenté dans toutes les classes d'âges. Contrairement aux idées reçues, le temps partiel chez les femmes n'est pas plus important à l'âge où l'on commence à fonder une famille. On retrouve, en effet, une présence plus importante du temps partiel dans la tranche d'âge des 40-44 ans et des plus de 50 ans.

    Selon les mêmes sources, il apparaît que près de la moitié des jeunes (47,7 %) déclarent travailler à temps partiel. 14,8 % de ces jeunes travaillent à temps partiel pour des raisons d'ordre personnel. La combinaison emploi-formation est également une des raisons qui revient le plus fréquemment (11,4 %).

    Faut-il craindre que ces nouvelles formes d'emploi prennent de l'ampleur ? A cet égard, j'aimerais rappeler que, sur dix ans, l'emploi total (salarié et indépendant) a augmenté de 8 % en Belgique selon les données de l'Institut des comptes nationaux (données régionales sur l'emploi intérieur). Cette hausse qui concerne les trois Régions est même un peu plus accentuée en Wallonie : + 8,8 % contre + 8,6 % en Flandre et + 5,1 % à Bruxelles. Même si, comme explicité plus haut, les secteurs les plus en croissance en Wallonie sont ceux qui pourvoient le plus d'emplois à temps partiel, il n'en reste pas moins ces types de contrats restent des vecteurs en termes d'insertion sur le marché de l'emploi. Et je souhaite, à nouveau, insister sur le fait que les temps pleins restent, par ailleurs, relativement stables dans le temps.

    Une autre tendance observée au cours de ces dernières années est la hausse importante de l'activité indépendante exercée à titre complémentaire, c'est-à-dire en complément d'un emploi salarié. Si un deuxième emploi exercé en tant qu'indépendant complémentaire est un moyen de s'assurer un apport financier, d'autres facteurs peuvent intervenir dans ce choix comme, par exemple, le plaisir de partager une passion ou de faire quelque chose de « différent ». Ainsi, nécessité financière et/ou inspiration à changer de vie, le fait est que la formule fait de plus en plus d'adeptes. En Wallonie, un indépendant sur quatre (hors aidants conjoints) exerce en tant qu'activité complémentaire, soit près de 60 000 personnes. \1 s'agit de l'activité qui a le plus progressé ces dernières années (+ 28 % par rapport à 2003) alors que le travail comme activité principale enregistre une hausse de 4,3 %. C'est parmi les femmes que l'activité complémentaire progresse le plus (+ 64 % contre 16 % parmi les hommes). A l'exception de la pêche, tous les secteurs sont concernés par cette tendance: professions libérales (+ 53 %), services (+ 25 %), industrie et artisanat (+ 21 %), commerce (+ 14 %) et enfin l'agriculture (+13%)·

    Nous assistons donc à une véritable évolution du marché du travail qui ne nous permet plus d'opposer contrat à durée indéterminée à travail temporaire, temps plein à temps partiel, travail salarié à travail indépendant. Mais c'est bien cette dynamique générale qui, liée à la flexibilité des types de contrats, permet non seulement à l'économie de se développer, mais aussi à tous ces travailleurs de profiter également des fruits de cette croissance.


    __________________
    (1) ONSS, emploi résident au deuxième trimestre 2009.
    (2) Les administrations et assimilé.
    (3) IWEPS, La situation des jeunes en Belgique francophone. Photographie statistique, Namur, 2010, pp. 47-48.