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Le projet de réforme de l'espace francophone de la recherche et notamment sur le projet Waltech et de création de plates-formes d'innovation

  • Session : 2010-2011
  • Année : 2011
  • N° : 716 (2010-2011) 1

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  • Question écrite du 15/07/2011
    • de BORSUS Willy
    • à NOLLET Jean-Marc, Ministre du Développement durable et de la Fonction publique

    La recherche reste un enjeu majeur de nos sociétés développées, tant au niveau de la compétitivité de nos entreprises que de notre développement économique et social actuel et futur. L’Union européenne ne s’y est pas trompée en établissant l’objectif de Lisbonne à 3 % du PIB pour les investissements tant publics que privés dans le domaine de la recherche. Si certains pays se rapprochent aujourd’hui de cet objectif, de nombreux Etats membres sont encore loin de l’atteindre. La Belgique et singulièrement la Wallonie ont encore un sérieux handicap dans ce domaine, malgré la progression des budgets consacrés à la recherche. En effet, les budgets consacrés par la Région wallonne et la Communauté française à la recherche représentaient encore il y a peu, moins de 25 % de l’effort belge.

    L’effort budgétaire à consentir encore aujourd’hui pour accroître l’effort de recherche des pouvoirs publics de l’espace francophone et pour approcher l’objectif de Lisbonne reste très significatif. La crise économique connue ces dernières années n’est pas pour faciliter la tâche. Et pourtant, il est d’autant plus essentiel aujourd’hui, notamment au regard de la crise, d’investir dans ces politiques porteuses d’avenir et d’un important potentiel de valeur ajoutée que sont les politiques de soutien à la recherche, en particulier à la recherche appliquée, sans oublier ni sous-estimer bien entendu le nécessaire soutien à la recherche fondamentale.

    Mais au-delà de l’effort budgétaire à consentir, l’autre priorité majeure reste la simplification indispensable à la fois du paysage institutionnel francophone de la recherche et des procédures et formalités administratives auxquelles sont soumis les acteurs du monde de la recherche. Force est en effet de constater la perte incontestable d’efficience que représentent la multiplicité des institutions et organismes publics intervenant dans la politique de recherche et la lourdeur des procédures et charges administratives qui détournent trop souvent une partie significative du temps des chercheurs et des gestionnaires de programmes de recherche.

    Nous savons que le soutien à la recherche et à la valorisation de ses résultats fait partie des objectifs affichés du Plan Marshall et du Plan Marshall 2.Vert, dont la mise en œuvre n’est pas sans incidence sur le paysage institutionnel auquel est confronté le monde de la Recherche.

    Le Gouvernement a récemment abordé certains aspects du Plan Marshall 2.Vert, parmi lesquels les stratégies des pôles de compétitivité et des réseaux d’entreprises. Il a notamment évoqué le projet Waltech, la création de plates-formes d’innovation et proposé divers mécanismes et articulations.

    Ce projet n’est pas sans poser de nombreuses questions et suscite des réactions diverses des acteurs concernés, semble-t-il.

    Je souhaite dès lors pouvoir interroger Monsieur le Ministre à ce sujet et notamment pouvoir lui poser les questions suivantes.

    Monsieur le Ministre peut-il détailler en quoi consiste le projet Waltech et la création de plates-formes d’innovation ? Quels sont les objectifs poursuivis et quelles en sont les modalités ? Ce projet a-t-il fait l’objet d’une discussion et d’une concertation avec tous les acteurs concernés ? Quels sont les acteurs concernés et comment ces acteurs appréhendent-ils le projet de créer de telles plates-formes ? Quels seront les missions exactes de ces plates-formes et les acteurs qui y seront associés ? Quelle forme prendront ces plates-formes et comment seront-elles gérées ?

    Comment ce projet s’inscrit-il dans le paysage institutionnel existant dans l’espace francophone dans le domaine de la recherche ? S’agit-il de nouvelles structures qui viendront s’ajouter à la multiplicité des structures existantes ? Cette structure Waltech et ces plates-formes sont-elles destinées à remplacer certaines structures existantes ? Quelle sera l’articulation de ce projet avec les structures existantes, tels les centres de recherche agréés, les clusters et des structures comme Innvatech ?

    Il existe aujourd’hui des centres de recherche agréés qui sont définis comme suit : « Les centres collectifs de recherche agréés, de par les infrastructures et l’équipement dont ils disposent, de par leurs activités de recherche et de veille technologique, et de par leur intégration dans les réseaux internationaux, constituent des pôles de compétence dans leurs domaines technologiques respectifs. Ils sont de ce fait un outil essentiel de redéploiement économique et industriel wallon dans la mesure où ils contribuent à la diffusion et à l’intégration des technologies émergentes dans le tissu industriel. De plus, ils sont les interlocuteurs privilégiés des entreprises désireuses d’améliorer leur processus ou de développer un nouveau produit. » Je ne fais ici que reprendre la définition donnée par le site internet de la Wallonie (Portail de la recherche et des technologies en Wallonie). Il existe aujourd’hui des centres de recherches agrées dans toute une série de secteurs comme l’industrie technologique, la recherche métallurgique, la construction, l’Industrie du Bois, la biotechnologie, les télécommunications, etc. Se pose dès lors la question suivante : en quoi les plates-formes d’innovation en projet diffèrent-elles de ces centres ?

    Quelles seront les incidences de ce projet pour les centres de recherche agréés ?  

    Quels seront les moyens budgétaires consacrés à ce projet et comment seront-ils financés ? S’agira-t-il de moyens nouveaux ou d’une réaffectation des moyens existants ? Lesquels ?

    Monsieur le Ministre peut-il également indiquer quel est l’état de la réflexion du gouvernement sur la simplification du paysage institutionnel francophone de la recherche, sur la simplification des procédures et des charges administratives pesant sur les chercheurs ? Quels sont les projets actuellement à l’étude et quel est l’échéancier ?

    Quelles sont enfin la situation et les perspectives de la Wallonie et de l’espace Wallonie-Bruxelles plus globalement au regard de l’objectif de Lisbonne de 3 % du PIB ?
  • Réponse du 28/07/2011
    • de NOLLET Jean-Marc

    Je répondrai tout d'abord à l'inquiétude de l'honorable Membre quant au « sérieux handicap » qu'accuserait la Wallonie dans l'intensité des investissements en faveur de la recherche, qui, avec la Fédération Wallonie-Bruxelles, ne participeraient à l'effort belge qu'à hauteur de 25%. Qu'il me permette de lui rappeler que la part relative de chaque type de politique publique dans le budget de chaque entité n'est pas à confondre avec l'intensité en R&D, qui permet de se faire une idée plus fine de l'investissement global d'une société dans la recherche (secteurs public et privé confondus) et qui constitue l'outil européen pour évaluer la capacité à atteindre le niveau de 3% fixé par l'agenda UE 2020. Cette intensité en R&D se calcule sur la base de plusieurs indicateurs définis par EUROSTAT et repris chez nous par le Bureau fédéral du plan. Celui-ci a évalué en 2010 l'intensité en R&D de la Wallonie à 2,1% du PIB, ce qui est certes légèrement inférieur à la Flandre mais en tout cas supérieur à la moyenne européenne.

    Que l'honorable Membre soit assuré que les gouvernements concernés ont la volonté de tendre vers l'objectif européen de consacrer 3% du PIB au soutien à la recherche. Le financement de la recherche scientifique constitue une priorité politique affirmée dans les Déclarations de politique régionale et communautaire. La recherche, il le souligne, est également une priorité majeure du Plan Marshall 2. Vert qui y consacre des budgets importants. L'engagement de tendre vers les 3% du PIB consacrés à la recherche constitue par ailleurs un des axes stratégique de la note-cadre" Vers une politique intégrée de la Recherche», approuvée en seconde lecture par les Gouvernements Wallon et de la Communauté française le 31 mars dernier.

    Tous ces éléments témoignent de l'importance de ce secteur pour les gouvernements concernés et démontrent la claire volonté de s'aligner sur les standards les plus élevés en matière de soutien de la recherche.

    L'honorable Membre le souligne, et je le rejoins tout à fait sur ce point, une politique scientifique efficiente passe également par une simplification des procédures et charges administratives. C'est dans cet esprit que le Gouvernement wallon a approuvé le 26 mai dernier, sur ma proposition, la mise en place d'un système centralisé de gestion et de traçabilité des projets de recherche à la DG06-Recherche. Cette base de donnée intelligente, dotée d'un véritable back-office, permettra de suivre un dossier depuis son introduction à l'administration jusqu'à la mise en paiement. Elle sera installée en cohérence avec d'autres dynamiques en cours, à savoir une amélioration des formulaires et différentes mesures de simplification administrative. Cette harmonisation et cette gestion centralisée représenteront une amélioration considérable et une modernisation indispensable par rapport à la situation actuelle, et dont tous les utilisateurs, notamment les porteurs de projets tels que les entreprises, universités et centres de recherches, bénéficieront.

    L'honorable Membre mentionne encore la création de plates-formes d'innovation. En effet, sur base des recommandations du jury international des pôles, la création de plates-formes d'innovation dans le cadre des pôles de compétitivité a été proposée dans une note qui a été approuvée par le Gouvernement wallon ce 26 mai. Ces plates-formes ont pour objectif d'accélérer la mise sur le marché de nouveaux produits, procédés ou services innovants au bénéfice des entreprises, grâce à la mise en réseau des acteurs. Ainsi, un premier pas vers le partenariat entre acteurs de la recherche avait été franchi avec la mise en place des pôles de compétitivité, les plates-formes thématiques d'innovation renforcent ce lien entre recherche industrielle, innovation et marché et cela rejoint par exemple les besoins exprimés par le secteur de mettre en place des pôles virtuels d'innovation dans certaines technologies de pointe en Wallonie (Ex/pôle virtuel d'innovation dans les technologies industrielles de l'environnement demandé par Agoria). Je serai pour ma part très attentif à la participation et à la place des PME dans ces plates-formes.

    La mise en œuvre de ces plates-formes d'innovation, recommandées par le Jury international des pôles, sera assurée par mon collègue ministre de l'économie, dans le cadre de la politique de coordination des pôles de compétitivité et par moi-même dans le cadre de mes compétences recherche. Avant d'être labellisée, toute plate-forme devra démontrer « l'absence de redondance et de concurrence avec les moyens et structures existants, notamment grâce à une mise en réseau avec ces moyens et structures ».

    En ce qui concerne d'éventuelles modifications dans l'organisation du paysage de la recherche scientifique, je consulte pour l'instant le secteur et les différents acteurs du monde de la recherche en Wallonie et en fédération Wallonie-Bruxelles. Le projet WALTECH est une des pistes présentées au secteur et concerne en premier lieu un projet ambitieux pour les centres de recherche agréés de Wallonie, en vue d'une simplification et d'une structuration du paysage. Cette réflexion n'en est qu'à ses débuts mais ce que je peux déjà vous en dire c'est que des plates-formes thématiques d'innovation et des plates-formes thématiques de recherche s'articuleraient autour de WAlTECH, de manière à renforcer le lien entre les centres de recherche agrées actuels, les entreprises d'une part et les universités d'autre part. Les premières réactions d'ACCORD-Wallonie sur le projet WALTECH me sont parvenues au cours du mois de juin, et je poursuis actuellement la réflexion et le dialogue avec les centres de recherche et les autres acteurs concernés.

    J'insisterai malgré tout sur le fait que, pour de nombreuses structures actives dans le secteur de la recherche, telles qu'lnnovatech que l'honorable Membre cite, l'année 2013 correspond à la fin des tranches actuelles de financements complémentaires européens (FEDER et FSE) grâce auxquels certains de ces organismes ont été créés. L'enjeu est crucial et proche et si nous n'anticipons pas l'échéance 2013, la viabilité et la pérennité des missions menées par les organismes concernés ne pourront être assurées. Il est donc capital de nous préparer à cette échéance en menant, en collaboration avec les acteurs concernés, une réflexion stratégique sur la structuration du paysage.

    Les Centres de recherche agréés wallons, dont la situation préoccupe l'honorable Membre plus particulièrement, font partie de ces acteurs-clé qui dépendent fortement, à l'heure actuelle, des fonds européens, et dont la mise en difficulté post-2013 serait extrêmement dommageable pour notre Région et son dynamisme affiché en matière d'innovation. En effet, les Centres de recherche agréés occupent une place particulière et fondamentale dans le paysage de la recherche en Wallonie. En tant que sources d'innovations technologiques et d'appui pour le développement des entreprises wallonnes, ils jouent un rôle de « ferment technologique » crucial, offrent un accompagnement de qualité et une expertise reconnue aux entreprises qui s'adressent à eux. Ils sont notamment les interlocuteurs privilégiés des PME souhaitant se développer grâce à la recherche et à l'innovation. les Centres de recherche collective occupent donc une position stratégique dans le développement économique de la Wallonie. Il est fondamental d'encourager et de renforcer cette position, de leur permettre de maintenir leur expertise, d'accroître leur visibilité au niveau régional et international, et de leur permettre de répondre au défi post-2013, par une meilleure structuration.

    L'honorable Membre l'aura compris, je partage sa préoccupation d'assurer un financement public ambitieux aux acteurs de la recherche et de veiller à une simplification du contexte dans lequel ils évoluent, dans un souci d'efficience, d'excellence et de durabilité. Je m'y emploie en tant que ministre de la recherche en Wallonie et en Fédération Wallonie-Bruxelles, et je puis l'assurer que je continuerai à y être particulièrement attentif.