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Le plein emploi en Wallonie picarde

  • Session : 2010-2011
  • Année : 2011
  • N° : 858 (2010-2011) 1

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  • Question écrite du 29/07/2011
    • de CRUCKE Jean-Luc
    • à ANTOINE André, Ministre du Budget, des Finances, de l'Emploi, de la Formation et des Sports

    Commentant récemment, dans la presse locale , l'étude "Prospective socio-démographique de la Wallonie picarde", rédigée par l'ADRASS, le Forem et le Comité sous régional de l'emploi et de la formation, le directeur du Forem de Tournai, Eric Hellendorf, n'hésite pas à déclarer que "d'ici 2025-2030 on peut envisager le plein-emploi en Wallonie Picarde comme c'est déjà le cas à Courtrai".

    L'intéressé justifie sa réflexion par trois raisons : le développement extraordinaire de la métropole lilloise, la prospérité de la région de Courtrai qui rencontre des pénuries de main d'oeuvre et la convention fiscale franco-belge modifiée à l'initiative du ministre des finances, Didier Reynders

    Quelles sont les statistiques relatives à l'évolution des demandeurs d'emploi en Wallonie picarde (Enghien, Silly et Lessines inclus) sur les dix dernières années ?

    L'analyse de M. Hellendorf repose-t-elle sur un document plus circonstancié ? Lequel ? Quel en est le contenu éventuel ? Monsieur le Ministre a-t-il pu en prendre connaissance et partage-t-il l'optimisme exprimé ?

    Sachant qu'un des axes porteurs semble être le développement de la métropole lilloise, comment le Forem s'inscrit-il dans cette dynamique ? Quels sont les moyens développés ? Quels sont les succès engrangés ? Des indicateurs confirment-ils l'élan ? Quels sont-ils ?

    Concernant les pénuries d'emploi du bassin courtraisien, quelle est l'approche suivie par le Forem et quels sont les résultats ? Une intensification de la politique programmée est-elle envisagée ? Sous quelles formes, de quelle manière et dans quels délais ? Comment le Forem pense-t-il pouvoir réduire les "obstacles de mobilité" qu'il dit avoir identifiés ? Quels sont-ils ?
  • Réponse du 12/10/2011
    • de ANTOINE André

    L'évolution de la demande d'emploi (1) en Wallonie picarde ces 10 dernières années montre clairement une tendance à la réduction (-3,49% en Wallonie picarde, mais -6,70% pour la Direction régionale de Tournai). La tendance baissière observée depuis 2007 s'est donc poursuivi tant en Wallonie picarde qu'en Wallonie, mais plus sensiblement en Wallonie picarde et, singulièrement, de la Direction régionale de Tournai qui affiche les meilleures performances sur ces 10 ans.

    L'analyse de Monsieur Hellendorff repose bien sur une étude, pour laquelle l'intéressé était co-commanditaire avec le CSEF Tournai-Ath-Lessines. II s'agissait de l'étude « Prospective sociodémographique de la Wallonie picarde à l'horizon 2025 - 2050», réalisée par l'ADRASS, en 2007, dans le cadre des travaux préparatoires au « Projet de territoire Wallonie picarde 2025». Cette étude a d'ailleurs été présentée par l'auteur, André Lambert, au Conseil de Développement Wallonie picarde. Elle reste également accessible à toute personne intéressée sur simple demande à l'un ou l'autre des commanditaires.

    C'est donc bien sur la base de cette étude que Monsieur Hellendorff a pu mettre en exergue que, du point de vue sociodémographique, les tendances étaient plutôt favorables à la Wallonie picarde, puisque celle-ci bénéficie, par exemple, de flux migratoires intéressants à l'est (Silly, Enghien, Ath, Lessines) et que le niveau de qualification de sa population continue, par ailleurs, à croître presque mécaniquement (les plus jeunes sont plus « qualifiés» que les aînés). Cette situation devrait ainsi permettre des adaptations plus qualitatives des compétences et assurer une meilleure insertion socioprofessionnelle, le niveau de qualification d'une population étant fortement corrélé avec son taux d'emploi.

    L'étude montre encore que le vieillissement de la population ne réduira pas la population en âge de travailler, ni la population scolaire. Dès lors, il faudra toujours autant d'emplois dans l'enseignement et les services d'accueil et d'éducation, de loisirs, de culture, de sports, ... pour les jeunes, mais il faudra prévoir un développement important de services répondant aux besoins et souhaits des seniors, beaucoup plus nombreux et plus âgés.

    Enfin, la croissance de la population locale et son vieillissement ne sont pas sans conséquence sur les besoins quantitatifs et qualitatifs de logement, sachant que l'habitat de la Wallonie picarde est non seulement insuffisant pour certaines catégories de population, mais qu'il est encore plus vétuste et plus inconfortable que le logement moyen en Wallonie, déjà en situation peu enviable.

    Bien entendu, l'étude ne dit encore rien de l'évolution sodo-économique de la Wallonie picarde, mais en dévoile des paramètres importants. Ainsi, l'est de la Wallonie picarde bénéficie de flux migratoires non seulement en termes de croissance démographique, mais aussi de niveau de qualification, de niveau de revenu et de taux d'emploi, par exemple.

    Appelé à commenter l'évolution de la situation en Wallonie picarde depuis la parution de l'étude (2007), Monsieur Hellendorff a surtout évoqué l'émergence de l'Eurométropole Lille Kortrijk Tournai qui avait besoin d'intégrer la partie belge de ce bassin de 2.100.000 habitants pour espérer et amorcer le développement sodo-économique, scientifique, culturel, artistique, ... que l'on observe dans d'autres situations de « métropolisation » en Europe et dans le monde. A cet égard, il mettait en évidence la nécessité de décloisonner le marché du travail, comme bien d'autres domaines, pour fluidifier et booster les échanges et interactions positives.

    Ce que le directeur du Forem a expliqué au journaliste, c'est que les Wallons devaient co­construire l'Eurométropole pour bénéfider de son formidable potentiel socio­économique et que la révision de la convention fiscale franco-belge ouvrait de nouvelles perspectives aux Wallons en réduisant, sans l'annuler, l'avantage des flux franco-belges et le désavantage des flux belgo-français. Les Wallons pourront plus facilement travailler en France et trouveront plus facilement un emploi en Wallonie et aussi en Flandre du fait d'une concurrence « plus loyale» avec les frontaliers français. Du reste, le Forem n'est pas opposé à la mobilité transfrontalière, mais défend l'optique européenne qu'elle doit être possible dans les deux sens, pas à sens unique.

    Enfin Monsieur Hellendorff a commenté, pour sa Direction régionale de Tournai, l'évolution de la demande d'emploi en prenant un repère avant la crise (février 2007, année réputée « bonne pour l'emploi ») et après la crise (février 2011) et constatant qu'elle n'avait pas augmenté (ce que beaucoup de commentateurs semblaient suggérer), mais bien diminué et de 15%, ce qui représente un écart significatif.

    C'est, in fine, sur la base de tous ces éléments, qu'il a pu évoquer la possibilité pour la Wallonie picarde, à l'horizon 2025-2030, de renouer avec le « plein-emploi », du moins, a-t­il ajouté, pour tous les nouveaux-venus sur le marché du travail...

    En ce qui concerne maintenant le développement de la métropole lilloise, soulignons que le Forem est un des partenaires les plus actifs, tant dans le cadre de la dynamique du projet de territoire portée par le Conseil de développement de Wallonie picarde que dans celle de 1'« Eurométropole Lille-Kortrijk-Tournai ». L'Office est d'ailleurs un des partenaires fondateurs d'Eureschannel (Forem, VDAB, Pôle Emploi, Conseil Syndical Interrégional et Organisations patronales du Hainaut, de Flandre Occidentale et du Nord-Pas-de-Calais) qui, depuis 15 ans, sous l'égide du programme européen EURES, identifie et cherche à réduire les obstacles à la mobilité notamment transfrontalière. C'est, dans ce cadre, que le Forem a proposé à ses partenaires qui l'ont accepté de travailler par territoire transfrontalier de projet et non par territoire administratif.

    Dès lors, la zone Eureschannel a été scindée en 3 territoires de coopération transfrontalière :
    - la zone littorale (GECT franco-flamand);
    - l'eurométropole Lille-Kortrijk-Tournai ;
    - la Région Sambre-Avesnois-Cœur de Hainaut-Charleroi.

    Différents groupes de travail ont été lancés, qui visent à faciliter la mobilité des travailleurs, à mieux connaître et comprendre les dynamiques socio-économiques de ces territoires transfrontaliers et à fournir aux partenaires une aide à la décision et des outils pour la coopération.

    En 2005, le Forem a déjà accepté de coopérer avec le Conseil de Développement de Lille Métropole pour créer un événement transfrontalier en matière d'emploi avec Eureschannel, ANPE, VDAB et UNIZO. En 2006, un volet transfrontalier a été ajouté à la Semaine de l'Emploi de l'ANPE. En 2007, le Forum de l'Emploi de l'Eurométropole Lille Kortrijk Tournai et Kortrijk Expo accueillait également sa première édition, Tournai prenant le relais en 2008. Dès 2011, Pôle-Emploi, FOREM, VDAB et UNIZO décidait aussi de collaborer plus étroitement et de jeter les bases d'une coopération plus structurelle en expérimentant cette volonté sur le territoire Lille Kortrijk Tournai et sur la zone Eureschannel. Le programme Interreg a d'ailleurs encouragé et finance encore ce projet jusque fin 2013.

    Les partenaires participent donc aux groupes de travail thématiques de l'Eurométropole et collaborent très régulièrement avec l'Agence Lille Kortrijk Tournai, récemment mise en place. Ainsi, ils ont décidé d'organiser ensemble, le 15 septembre, leurs conférences de presse respectives pour le Forum de l'Emploi et pour les activités de l'Agence.

    Notons, en outre, que le directeur du Forem Tournai fait partie du Forum de l'Eurométropole, Conseil de Développement rassemblant la société civile de ce bassin de 2.100.000 habitants ainsi que du groupe de travail « Insertion de la Wallonie picarde dans l'Eurométropole Lille Kortrijk Tournai ».

    Enfin, je terminerai par ces quelques données fourbies par l'ONSS sur le plan de la mobilité interrégionale, 1 travailleur mouscronnois sur 5 et 1 travailleur tournaisien sur 10 travaillent en Flandre.



    (1) Ces statistique concernent tous les demandeurs d'emploi inoccupés (DEI).