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La gestion de l'azote en agriculture

  • Session : 2010-2011
  • Année : 2011
  • N° : 1069 (2010-2011) 1

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  • Question écrite du 03/08/2011
    • de TROTTA Graziana
    • à HENRY Philippe, Ministre de l'Environnement, de l'Aménagement du Territoire et de la Mobilité

    Le 31 mai dernier, j'interrogeais Monsieur le Ministre sur la gestion durable de l'azote. Je m'inquiétais notamment de la contradiction entre, d'une part, une absence d'amélioration significative des niveaux de pollution par les nitrates des sols, cours d'eau et nappes souterraines et, d'autre part, les contrôles réalisés sur les exploitations agricoles dont 90% sont, selon le tableau de bord de l'environnement 2010, conformes aux normes en vigueur.

    Cette situation est anormale car la pollution constante - et en augmentation ! - ne peut souffrir d'un manque d'attention et d'actions de la part du gouvernement. Je tiens à rappeler que les quantités d'azote épandues en Wallonie sont supérieures d'environ 40% à la moyenne européenne. Les teneurs en nitrates sont en hausse depuis plusieurs décennies dans les eaux de surface et souterraines des bassins versants où les activités agricoles sont très développées. Et le surplus moyen d'azote dans les sols agricoles dans notre Région représente près de la moitié des apports totaux d'engrais !

    L'eau est sans doute la ressource la plus précieuse qui soit. En Wallonie, nous n'en manquons pas mais le gouvernement consacre trop peu de moyens à l'amélioration de sa qualité et aujourd'hui encore, sa pollution coûte très cher à la collectivité.

    Les décrets adoptés pour gérer l'azote, tel celui du 11 mars 1999 relatif au permis d'environnement ou les arrêtés du 10 octobre 2007 concernant la gestion durable de l'azote en agriculture, ne sont pas suffisamment mis en pratique. Les diverses mesures qui devraient protéger la qualité de l'eau contre la pollution par les nitrates, surtout dans les zones vulnérables, ne sont pas correctement respectées et les contrevenants peu susceptibles d'être sanctionnés. Les obligations réglementaires restent par conséquent lettre morte.

    Le PGDA impose que les effluents d'élevage ne soient stockés aux champs que durant 8 mois dans les zones vulnérables. Mais quelles sont les modalités de contrôle de ces durées de stockage? Quelles sont les règles en vigueur à ce sujet ? Et comment sont effectués les contrôles et à quelle fréquence? Des réglementations existent et pourtant nous sommes confrontés à un manque important d'application effective.

    Monsieur le Ministre m'a indiqué le 31 mai dernier que dès l'automne prochain, 5% (au lieu de 3% actuellement) des exploitations agricoles en zone vulnérable seront contrôlées chaque année par des mesures de l'azote potentiellement lessivable. Sachant qu'il y a plus de 10.000 exploitations agricoles, si 5% des exploitations sont contrôlées, cela signifie un contrôle tous les 20 ans, au lieu d'un contrôle tous les 30 ans actuellement ! Ce déficit très important de contrôles n'est pas acceptable et il est impératif de consacrer plus de moyens pour assurer ceux-ci avec beaucoup plus d'efficacité et dans des délais beaucoup moins importants. De manière précise, que compte faire Monsieur le Ministre dans cet objectif ?

    J'ai indiqué que selon le TBE 2010, sur base de l'évaluation du taux de liaison au sol, neuf exploitations sur dix sont conformes aux normes en vigueur. Le taux de Iiaison au sol est le rapport entre la quantité d'azote organique à épandre et la capacité d'épandage (autremont dit l'azote qui peut être valorisé par les cultures). En procédant de la sorte pour ce calcul, la DGO3 fait injustement abstraction du fait que les exploitntions utilisent aussi des engrais non organiques (plus aisés à utiliser). Autrement dit ces calculs qui donnent des résultats rassurants (neuf exploitations sur dix conformes aux normes en vigueur) n'ont pas le moindre intérêt quant à la réalilé de la pollution par l'azote excédentaire. Car si l'on raisonne sur cette base, on pourrait alors penser qu'on peut doubler le nombre d'animaux d'élevage en Wallonie sans problème d'azote, ce qui est évidemment totalement erroné. Qu'en pense Monsieur le Ministre? Compte-t-il revoir la base de calcul afin que la pollution par l'azote soit mesurée de façon à correspondre à la réalité ?
  • Réponse du 30/09/2011
    • de HENRY Philippe

    L’eau est une ressource naturelle importante en Wallonie par son abondance et sa qualité. Cependant, sa protection contre les pollutions ponctuelles et diffuses est un enjeu majeur.

    La problématique de la gestion des nitrates d’origine agricole, dans un environnement où l’agriculture est aussi intensive qu’en Wallonie s’appuient sur des outils législatifs, le Code de l’eau et plus particulièrement les articles relatifs au programme de gestion durable de l’azote agricole dont la mise en œuvre est essentielle.

    Il est vrai que certaines mesures imposées par le PGDA nécessitent des inspections sur le terrain comme par exemple le respect des conditions d’épandage ou de stockage des effluents d’élevage. D’autres mesures sont comme les périodes d’épandage feront l’objet de contrôles plus importants sous peu. Le taux de liaison au sol est, quant à lui, contrôlé systématiquement pour chaque agriculteur en Région wallonne.

    Une optimisation des moyens et des ressources humaines dévolus à ces contrôles est en cours d’évaluation par mon administration ceci en lien avec la révision du programme d’actions et en complément avec les missions de sensibilisation et d’encadrement du monde agricole.

    En ce qui concerne le contrôle par les mesures de l’azote potentiellement lessivable, celui-ci a été porté de 3 à 5 % des exploitations situées en zones vulnérables dès cet automne 2011.

    La DGO3 et la Directive nitrates (91/676/CE) elle-même (dont le PGDA est la transposition) ne contrôlent que l’azote organique. Ceci ne signifie pas que la pollution par les engrais minéraux ne soit pas prise en compte.

    En effet, ceci est dû à 2 raisons majeures.
    1. L’azote provenant des engrais minéraux coûte cher (et même de plus en plus cher car il se calque sur les cours du pétrole) et l’utilisation quantitative s’est réduite. L’agriculteur en fait de plus en plus un usage raisonné puisque toute utilisation en excès se traduit directement par une réduction de ses bénéfices. Par contre, l’azote organique est un sous-produit d’élevage dont la valorisation est parfois problématique au niveau de l’exploitation. C’est sur ce type d’azote que la majorité des excès sont constatés.
    2. L’utilisation d’azote minéral est beaucoup plus difficile à contrôler dans les faits. Si dans le principe, on peut demander aux négociants de répertorier les quantités achetées par chaque exploitant agricole (et une proposition de réglementation sur le sujet est à l’étude au sein de mon cabinet), on se heurte à divers obstacles pratiques : Certains exploitants achètent leurs fertilisants à l’étranger, d’autres stockent au delà d’une année ou stockent pour leurs voisins…

    Dès lors compte tenu de ces diverses contraintes, le taux de liaison au sol est basé sur l’engrais organique présent au sein d’une exploitation. Ainsi diverses mesures de protection prévues comme les zones tampon le long des cours d’eau et diverses mesures existantes comme les mesures agri-environnementales s’inscrivent pleinement dans la gestion de toutes les formes de l’azote qu’elles soient agricoles ou minérales.