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La présence et l'utilisation du logiciel libre au sein de la fonction publique wallonne

  • Session : 2010-2011
  • Année : 2011
  • N° : 210 (2010-2011) 1

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  • Question écrite du 05/09/2011
    • de CRUCKE Jean-Luc
    • à DEMOTTE Rudy, Ministre-Président du Gouvernement wallon

    L'utilité du recours au logiciel libre n'est plus à démontrer et la déclaration de politique générale du gouvernement prévoit explicitement sa promotion au sein des services publics de Wallonie.

    Quelle est actuellement la situation du l'utilisation du logiciel libre au sein de la fonction publique wallonne ? Quelle description en fait Monsieur le Ministre et son administration ? Quelles sont les applications les plus courantes? Toutes les administrations sont-elles concernées ? Comment est concrétisée la dynamique décrite par la DPR ? Une étude d'opportunité a-t-elle été réalisée ? Quand et quel en est le contenu ?

    Connaissant l'efficacité économiquement parlant du concept du libre qui évite de devoir verser d'énormes sommes aux fournisseurs des logiciels propriétaires, Monsieur le Ministre peut-il chiffrer l'économie budgétaire réalisée par la Wallonie et celle qu'elle pourrait encore réaliser ? Peut-il détailler l'analyse ?
  • Réponse du 29/09/2011
    • de DEMOTTE Rudy

    Les projets informatiques en cours d’implémentation au SPW visent à préparer et à harmoniser notre système informatique pour le rendre plus efficace mais également plus ouvert aux défis qui se profilent dans les mois et années à venir. La philosophie des logiciels libres occupe une place importante dans notre démarche.

    En 2010, le SPW et la Communauté française (via l'organisme ETNIC) ont proposé conjointement une note sur la promotion des standards ouverts et des logiciels libres. Cette note peut se résumer en quelques points :
    * Les Gouvernements de la Région Wallonne et de la Communauté française ont décidé, au travers de leurs déclarations de politique régionale et communautaire respectives, de promouvoir l'utilisation des standards ouverts et des logiciels libres.
    * Les logiciels libres sont utilisés majoritairement dans les domaines dans lesquels ils ont vu le jour, à savoir les solutions techniques transversales essentiellement orientées « infrastructures » et services IT (systèmes d’exploitation, serveurs mails, serveurs applicatifs internet, …). C’est dans ces domaines qu’ils sont les plus mûrs, les plus aboutis et peuvent sans conteste rivaliser avec des produits équivalents d’acteurs commerciaux.
    * La stratégie actuelle vis-à-vis de l’open source peut être qualifiée de pragmatique, globale et prudente :
    - pragmatique. Il est difficile pour le SPW d’assurer de manière proactive une importante veille technologique sur tous les produits open source existants. Lorsqu'un projet, un développement ou une activité informatique nécessitent l'utilisation d'un progiciel, il est important d'étudier systématiquement l'option open source.
    - globale. Dans le cadre de l’examen des solutions open source, il ne faut pas se contenter uniquement de l’aspect souvent gratuit du produit (à l’achat en tout cas) et des standards qu'il doit respecter obligatoirement, mais en analyser toutes les caractéristiques (notamment son niveau de maturité et de complétude), tous les coûts (notamment les coûts de paramétrisation, de support, de formation et d’intégration avec d’autres outils) et toutes les contraintes (notamment qui et à quelles conditions pourra fournir du support en cas de besoin).
    - prudente. Compte tenu de l'outsourcing important des prestations informatiques, du faible nombre de ressources techniques internes et du fait que le développement d’applications par ces ressources internes n’est pas aujourd’hui à l’ordre du jour, l’obligation absolue de continuité des services à offrir aux utilisateurs impose de n’opter pour le libre que lorsque les garanties de services sont suffisantes.

    Aujourd’hui, ces principes sont d’application dans les référentiels d’architecture (catalogue des progiciels, standards d’hébergement et de développement) et intégrés dans les nouveaux cahiers des charges informatiques.

    Les logiciels libres occupaient déjà depuis plusieurs années une place privilégiée dans notre système d’information ; en effet, une proportion importante de notre infrastructure applicative est équipée d’outils open-source : serveurs en Linux, sites web hébergés sur des composants libres (Apache, Jahia, Alfresco, Drupal) ou développements informatiques réalisés à partir de modules supportés par la communauté libre (JBoss, Java, Spring, PHP). Désormais, ces recommandations sont formalisées dans des documents (ces référentiels d’architecture) mis à disposition de nos prestataires et à examiner de manière systématique comme une alternative aux solutions « propriétaires ».

    Concernant l’« économie budgétaire », quand il s’agit de mesurer l’efficacité économique d’une solution informatique, le coût d’acquisition des licences logicielles n’est pas le seul facteur à étudier pour réaliser ce calcul ; il est important d’analyser le coût total de possession (ou TCO, Total Cost of Ownership) de ces solutions.

    Ce TCO inclut, outre le coût d’achat de la solution :
    - les coûts d’installation et de déploiement ;
    - les coûts de gestion : helpdesk aux utilisateurs, mise-à-jour des logiciels, gestion de la sécurité, … ;
    - les coûts de développement et de migration : dépendances entre logiciels, customisation des solutions, … ;
    - les contrats de support et de maintenance de la solution logicielle ;
    - les coûts de formation ;
    - la durée de vie de la solution.

    Dans une grande entreprise telle que le SPW, l’ensemble des logiciels, libres ou propriétaires, intègrent systématiquement les contraintes précitées (et donc coût associés). Les logiciels libres présentent en effet un coût d’acquisition généralement nul mais dans de nombreux cas des versions « entreprise » de ces logiciels, à l’attention des grandes organisations, sont payantes car elles intègrent des extensions destinées à une intégration efficace et sécurisée dans le système d’information de l’entreprise.

    Pratiquement au SPW, le coût des licences logicielles occupe certes une portion non-négligeable du TCO des solutions informatiques mais ne représente pas la dépense principale. Ainsi, le coût total de possession d’un parc de postes de travail tel que le nôtre est souvent réparti comme suit :
    - investissement (matériel et logiciel) : 20% ;
    - support : 20% ;
    - formation : 35% ;
    - gestion (installation, déploiement, migration) : 25%.

    On constate donc que l’achat des logiciels (en simple estimation la moitié des investissements, donc 10% du total) ne représente qu’une petite fraction du coût total d’un poste de travail. D’autres remarques s’imposent :
    - le coût de gestion, d’installation ou de déploiement d’un logiciel est identique qu’il soit libre ou non, et encore à condition que la documentation et les ressources nécessaires à ces activités soient disponibles et fiables.
    - le coût de maintenance d’un logiciel est de l’ordre de 15 à 20%. Dans de nombreux cas, ce coût est également valable pour les solutions libres afin de disposer d’un niveau de support professionnel.
    - le coût de formation et de prise en main du logiciel représente la part la plus importante du TCO.
    - le coût d’intégration d’un nouveau logiciel ou de remplacement d’un logiciel par un autre représente souvent un investissement énorme, d’autant plus dans un système d’information hétérogène, car il implique d’implémenter toutes les étapes de gestion (installation, migration, formation, …)

    Cette analyse est pertinente dans le cas de logiciels manipulés par les utilisateurs finaux (suite bureautique par exemple) mais est sensiblement différente pour des outils « transparents » aux utilisateurs tels que les logiciels qui forment les couches basses de notre système d’information (serveurs web, bases de données, composants centralisés, …) Pour ces derniers logiciels, le coût total de possession est distribué autrement car ils ne nécessitent pas une maintenance, une gestion et une formation aussi lourde. C’est pour ce type de progiciels qu’une économie substantielle peut être facilement réalisée sur les coûts de licence et basée sur l’utilisation de logiciels libres.

    C’est la raison pour laquelle le SPW a favorisé l’utilisation des solutions libres dans cette couche de son système d’information, là où toutes les garanties étaient réunies pour diminuer le TCO.

    Cet effort de « libération » du système d’information des contraintes financières du logiciel propriétaire continue grâce à des initiatives de standardisation, de rationalisation du parc (diminution du nombre de logiciels) et de modernisation (comme le recours grandissant aux solutions web).