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Les frais d'équarrissage

  • Session : 2010-2011
  • Année : 2011
  • N° : 1114 (2010-2011) 1

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  • Question écrite du 08/09/2011
    • de PECRIAUX Sophie
    • à HENRY Philippe, Ministre de l'Environnement, de l'Aménagement du Territoire et de la Mobilité

    Pendant plusieurs années, la Région wallonne a pris en charge les frais d'équarrissage des éleveurs qui perdaient des animaux. Une décision récente de la Commission européenne change la donne puisque dorénavant, tous les agriculteurs qui ont bénéficié de cet appui régional pour enlever et transformer leur bétail mort depuis le 1er juillet 2008 devront reverser une partie de cette aide indirectement perçue.

    En effet, ladite décision européenne n'autorise plus la Région wallonne à prendre à son compte la transformation du bétail mort.

    Ainsi, la collecte reste gratuite mais 25 % des frais liés à la gestion des cadavres seront perçus directement chez les agriculteurs.

    La colère gronde chez les éleveurs. La cause de cette dernière est le fait que la Région réclame maintenant des intérêts pour l'argent "avancé” et non remboursé. Certes, la Région ne réclame l'argent que pour les trois dernières années, alors que dans les faits les fermiers auraient dû payer ces 25 % depuis 2004 mais ce qui est déploré à la Fédération wallonne de l'Agriculture, c’est que les éleveurs doivent payer des intérêts "dont on aurait pu se passer si les élus s'étaient montrés plus réactifs”.

    En effet, selon la presse, c’est en raison de la lenteur de la Région wallonne à appliquer des directives européennes, qu’elle réclame aujourd'hui aux éleveurs une partie des frais d'équarrissage qu'elle offrait, plus les intérêts.

    Est-il exact que les frais d’équarrissage réclamés aux agriculteurs le soient en raison de la lenteur de la Région à réagir ? Dans l’affirmative, une solution ne pourrait-elle pas être négociée avec les personnes concernées afin que ce ne soient pas ces dernières qui doivent payer les pots cassés ?
  • Réponse du 04/10/2011
    • de HENRY Philippe

    Le Gouvernement wallon avait décidé en 1991 de prendre à sa charge la totalité du financement du coût de la gestion des cadavres animaux générés au sein des exploitations agricoles.

    En application de cette décision a été lancée une procédure de passation d'un marché public de services ayant pour objet l’organisation de la collecte des cadavres d'animaux au sein des exploitations agricoles sises en Région wallonne et leur transformation ultérieure en farines et graisses animales au sein d’un clos d'équarrissage.

    En juin 2001, le Gouvernement wallon a confirmé, pour les motifs de protection de l’environnement et de la santé publique, de maintenir le principe d’un financement intégral de la gestion des animaux trouvés morts.

    Depuis 1991, ce sont donc près de 97 millions d'euros qui ont été consacrés à cette politique. Il convient de préciser que le champ d’application des deux marchés publics de services attribués respectivement en octobre 1991 et en janvier 2002 ne concerne pas exclusivement les animaux trouvés morts au sein des exploitations agricoles ; il s’adresse également par exemple aux cadavres d’animaux d’élevage trouvés morts chez les hobbyistes et chez les particuliers.

    En suite de la décision du Conseil Agriculture du 4 décembre 2000, la Commission européenne a procédé en 2001 à une analyse fouillée de la manière dont les Pouvoirs publics intervenaient dans le financement des coûts liés :
    - à la gestion des sous-produits animaux non destinés à la consommation humaine générés au sein des établissements de la filière viande ;
    - à la gestion des animaux trouvés morts au sein des exploitations agricoles ;
    - aux tests de dépistage rapide des ESB.


    La commission a constaté une énorme disparité en la matière au sein de l’Union européenne. Pour y remédier, la commission a élaboré des lignes directrices relatives aux aides d’Etat qui ont été adoptées en novembre 2002 et sont entrées en application le 1er janvier 2004.

    Aux termes de ces lignes directrices, le marché public de services passé par la Wallonie pour des motifs liés à la protection de l’environnement et de la santé publique devenait un régime d’aides d’Etat dans le domaine agricole, les exploitants agricoles en étant les bénéficiaires réels, bien qu’indirects.

    La région était dès lors tenue de respecter les impositions fixées par ces lignes directrices et par les réglementations européennes qui ont été adoptées le 15 décembre 2006.

    En matière d’animaux trouvés morts, la région pouvait continuer à financer en totalité les coûts liés à l’enlèvement mais ne pouvait plus intervenir qu’à concurrence de 75% dans le financement des opérations de transformation des animaux trouvés morts en farines et graisses animales et de destruction de ces farines et graisses animales.

    La région aurait donc dû faire en sorte qu’à partir du 1er janvier 2004, les exploitants agricoles contribuent à concurrence d’au moins 25% aux coûts de transformation et de destruction des animaux trouvés morts.

    Une plainte a été déposée auprès de la Commission européenne en mars 2007. Il y était fait mention de ce que la Région wallonne contrevenait à la législation européenne en vigueur en matière d’aides d’Etat dès lors qu’elle continuait à financer en intégralité la gestion des animaux trouvés morts.

    Aux termes de longues discussions menées essentiellement par mon administration, la région a pu obtenir de la commission de pouvoir cumuler au régime d’aides d’Etat mis en place –soit le marché public de services- une aide de minimis agricole. La région a ainsi pu régulariser la situation de la quasi-totalité des exploitations agricoles et leur faire ainsi bénéficier d’une gratuité intégrale sur la période allant du 1er janvier 2004 au 30 juin 2008.

    A compter du 1er juillet 2008, il n’est plus possible de cumuler pour un même objet une aide de minimis agricole avec une aide agricole octroyée à titre individuel ou au titre d’un régime d’aides d’Etat (tel que le marché public de services mis en place en Région wallonne) dès lors que cela conduirait au dépassement de l’intensité maximale de l’aide pouvant être octroyée en application de législations spécifiques portant sur les aides d'Etat dans le domaine agricole.

    La région a espéré que la commission accepterait malgré tout de maintenir la ligne de conduite adoptée pour la période allant du 1er janvier 2004 au 30 juin 2008 dans la mesure où il est fait explicitement mention dans les lignes directrices de la Communauté concernant les aides d’Etat dans le secteur agricole et forestier de ce que :
    « les risques de distorsion de la concurrence générés par les aides d'État octroyées pour l'enlèvement d'animaux trouvés morts sont considérés comme relativement faibles ».

    Cela n’a pas pu être le cas, essentiellement en raison de la suite devant être réservée par la Commission à la plainte introduite en 2007. Une procédure formelle a été entamée en janvier 2010.

    Elle a débouché sur une décision prise par la commission le 17 novembre 2010, qui est directement exécutoire et contraignante pour la région. Il n’y a donc d’autre choix que de devoir procéder à la récupération des aides illégales et partiellement incompatibles octroyées par le biais d’avenants au marché public de 2002 et ce à partir du 1er juillet 2008.

    En application des législations en vigueur en matière d’aides d’Etat, rappelées par la commission dans sa décision du 17 novembre 2010, la région est tenue de majorer le montant, calculé hors TVA, à récupérer d’un intérêt de retard, le taux devant être pris en compte étant le taux de référence fixé au niveau européen.

    Dès mon entrée en fonction, j’ai considéré ce dossier comme prioritaire et j’ai proposé au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour faire cesser le régime d’aides illégales, tout en continuant à financer le coût de la gestion des cadavres animaux générés au sein des exploitations agricoles, dans les limites réglementaires autorisées. Un nouveau système se met actuellement en place suite à diverses décisions du gouvernement dont la dernière remonte à fin juillet 2011. Je me réjouis d’avoir pu apporter des solutions à cet épineux dossier, en concertation avec les organisations agricoles.