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La dernière priorité de l'hôpital

  • Session : 2011-2012
  • Année : 2011
  • N° : 55 (2011-2012) 1

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  • Question écrite du 14/11/2011
    • de STOFFELS Edmund
    • à TILLIEUX Eliane, Ministre de la Santé, de l'Action sociale et de l'Egalité des chances

    La dénutrition. Un terme qui recouvre un déficit alimentaire chronique qui met en danger la santé et souvent la survie du patient. On se pose la question d’aider les personnes obèses, et on ne se rend pas compte du fait qu’on a aussi bon nombre de personnes dénutries. « La dénutrition frappe au moins un senior de plus de 75 ans sur dix, mais 80% des patients sont exposés d’une manière ou d’une autre au risque. Plus choquant, le risque est plus élevé à l’hôpital qu’à la maison. A la maison, 15 à 25% des plus de 75 ans sont dénutris ; à l’hôpital, ils sont entre 25 à 45 %. Ils sont pourtant dans un contexte de prise en charge. ».

    Quand je discute du problème avec les infirmières travaillant dans les institutions, elles m’affirment assez souvent que le problème est réel et préoccupant – parce qu'assez souvent lié à un manque de temps dans le chef du personnel. Manque de temps par exemple pour aider les seniors à prendre leur petit déjeuner ou à mâcher correctement (et lentement) ce qu’ils ont mangé. Manque de temps provoqué par la gestion des institutions qui vise à minimiser autant que possible le déficit (souvent à charge du pouvoir organisateur) par une compression maximale de la masse salariale. C’est quand même interpellant ! Quelles sont les observations de Madame la Ministre en cette matière ? Les propos que j’ai pu récolter correspondent-ils avec ses observations ? Dans l’affirmative, comment y remédier ?

    Les autres causes de la dénutrition sont multiples : isolement, précarité, mais aussi estompement de la sensation de faim qui arrive avec l’âge. Il y a des solutions qui passent par une éducation nutritive et la correction de situations à risques. Mais il y a aussi ceux qui, le 20 du mois, doivent choisir entre s’alimenter et payer leur loyer ou le chauffage. Les Belges doivent vivre avec les pensions les plus basses d’Europe. N’est-il pas urgent de sensibiliser les multiples services sociaux sur l’existence de ce problème ? Et notamment les services d’aides ou de soins à domicile ? Là aussi, on est confronté à la thématique de la limitation des déficits, imposant au personnel un rythme de travail tel que trop de signes de dénutrition restent inaperçus. Les services ont-ils fait part à Madame la Ministre de cette problématique ? A-t-elle été approchée pour aider les organisateurs des services à mieux faire face aux objectifs budgétaires ? Lui a-t-on demandé d’aider les services à diagnostiquer la dénutrition ? Quel en serait le coût ?
  • Réponse du 08/12/2011
    • de TILLIEUX Eliane

    Les problèmes nutritionnels des patients admis à l'hôpital sont bien connus, en particulier lorsqu'il s'agit de patients âgés. Les chiffres sur lesquels le PNNSB travaille depuis 2006 sont les suivants : 40% des patients de plus de 75 ans souffrent d'une malnutrition aiguë à l'admission et le chiffre monte au dessus de 50% à la sortie du patient ! Est-ce à dire que les hôpitaux manquent à leur devoir….d'hospitalité ?

    Il existe deux formes de malnutrition :
    1. La perte de poids globale
    2. Les carences spécifiques.
    En général, lorsqu’un patient âgé arrive à l’hôpital, il souffre depuis +/- longtemps des deux formes en proportions variables.

    Un tel constat mérite d'être relativisé : l’hôpital est un lieu de diagnostic, de traitement médical, mais rarement de réhabilitation, or c’est bien de cela qu’il s’agit ici.

    En effet, la perte de poids aiguë est très souvent un problème concomitant ou la conséquence de la maladie qui amène le patient âgé à l'hôpital. Hormis de rares exceptions, la plupart des problèmes de santé qui justifient une admission s'accompagnent d'une perte significative du poids au cours du mois qui précède l'admission ou sont la conséquence d’un état nutritionnel déficient de longue date.

    La journée d'hôpital coûte cher à la collectivité et le service public fédéral met en œuvre un grand nombre de moyens pour raccourcir le plus possible la durée de l'admission hospitalière. Même dans les lits G de gériatrie, la durée moyenne d'hospitalisation se raccourcit d'année en année. Forcément, pendant son bref séjour, le patient passe d'examen en examen, dont certains nécessitent même de rester à jeun.

    Pour la même raison, on a beau multiplier le nombre de diététiciens, développer le dépistage et la prise en charge de la dénutrition à l'hôpital, toute action alimentaire ou nutritionnelle se heurte à la brièveté du séjour et a peu de chance de porter ses fruits, d'autant que le message de revalidation nutritionnelle entre l'hôpital et la structure de soins (à domicile ou à la MR) peut très bien ne pas être suivi d'effets

    Pour lutter efficacement contre contre ce problème, il s’agit de se munir à l’hôpital de bons outils de diagnostic et de suivi et d’en assurer le relais vers les services ambulatoires, de faire de l’état nutritionnel un objectif de base de l’ensemble des soins et services aux personnes âgées.

    Depuis 2007, le SPF a pris l'initiative de soutenir différents projets alimentaires et nutritionnels dans les hôpitaux, précisément pour lutter contre certains types de dénutrition.

    Mais la brièveté des séjours hospitaliers, même pour les personnes âgées, fait de sorte qu'un plan de revalidation nutritionnelle peut très rarement donner de bons résultats durant le séjour.

    La réhabilitation nutritionnelle n’est pas une vocation hospitalière : le problème est souvent trop développé lorsque l’hospitalisation survient, sa résolution durera tout autant et trouve sa base dans des mesures de vie quotidienne plutôt que dans un traitement médical, sauf dans des cas extrêmes.

    Ceci ne dispense toutefois pas l’hôpital de faire le diagnostic (un événement critique est souvent l’occasion de faire un bilan de l’état de santé), ni de mettre les choses en place pour initier une prise en charge du problème. Cela nécessite une concertation, qu’il est difficile d’établir systématiquement entre les services hospitaliers et le réseau qui entoure le patient à son retour à la maison.

    Je m’attache à développer des solutions en maisons de repos et maisons de repos et de soins par la mise en œuvre d’un Plan Nutrition Santé dans ces institutions. Ce plan, élaboré au cours de l’année 2011, doit être mis en œuvre début 2012. Il s’agira progressivement de sensibiliser un nombre croissant de maisons de repos et de maisons de repos et de soins à l’importance de la prise en compte de l’importance à donner à la nutrition.

    Le prochain secteur d'offre de soins auquel le GW entend s'impliquer pour étendre le PWNS-be-A sera en toute hypothèse celui de l’aide et des soins à domicile. La durée de prise en charge est davantage compatible avec la prévention et le traitement de la dénutrition. Je partage votre avis, il s'agit de concevoir dès à présent la prévention, le dépistage et le traitement de la dénutrition des personnes âgées à domicile afin de leur permettre de bénéficier, le plus longtemps possible, de leur autonomie.

    Par l'entremise des aides-familiales, il existe déjà dans quantités de communes wallonnes des formes de service à la résidence en alternative à la résidence-service. Deux tiers des prestations de 6 000 aides-familiales concernent des personnes de plus de 65 ans. La pesée des aînés, certaines formes de dépistage, l'aide au repas à domicile pourraient être inscrites dans leur curriculum de formation continue.

    Plus que dans la formation individuelle des différents intervenants au domicile et bien qu’une sensibilisation soit indubitablement nécessaire, il semble que la recherche de solutions nutritionnelles adaptées à la personne passe par une intégration de cette préoccupation dans la coordination des soins et services et par l’amélioration des liens entre l’hôpital et l’ambulatoire. Il existe déjà des initiatives en ce sens, comme celle du SILOS autour de Malmedy, qui implique la Clinique Reine Astrid, les cercles de généralistes de Waimes, Malmedy et Stavelot et les maisons de repos.

    La réhabilitation nutritionnelle doit être globale. Elle a des composantes alimentaires (fractionnement, enrichissement calorique par exemple, hydratation correcte, éviter les périodes de jeûne (jamais plus de 12 h !) même la nuit ; il y a une série de principes de base à cet ordre qu’on peut assez facilement identifier). Elle a une composante médicale (supprimer les médicaments qui interfèrent avec l’absorption des nutriments par exemple suivre l’évolution du problème et elle a, comme vous le mentionnez une composante bucco-dentaire : pouvoir mâcher correctement est en effet un déterminant majeur de l’état nutritionnel et partant de l’autonomie. Dans l’enquête nationale de santé, peu de personnes institutionnalisées ont vu un dentiste dans l’année qui précède.