à TILLIEUX Eliane, Ministre de la Santé, de l'Action sociale et de l'Egalité des chances
La sensibilisation importante qui accompagne la journée du « ruban blanc », autrement dit la journée internationale de lutte contre la violence à l'égard des femmes, montre bien à quel point ce sujet, délicat et complexe, est heureusement moins tabou aujourd'hui qu'hier.
Au niveau politique, le Plan d'action national de lutte contre la violence entre partenaires et d'autres formes de violences intrafamiliales et la campagne de sensibilisation menée conjointement par la Wallonie, la Fédération Wallonie-Bruxelles et la CoCoF sur le thème de la violence psychologique, démontrent qu'on prend le problème à bras-le-corps.
Cette sensibilisation explique sans doute les nombreux appels à la ligne téléphonique « Écoute violences conjugales », opérationnelle depuis novembre 2009. Alors que le rapport 2010 de l'ASBL Cap Sciences Humaines mentionnait le chiffre de 3495 appels, la barre des 3300 appels avait déjà été dépassée à la mi-novembre.
Ce service fait partie intégrante du dispositif intégré de lutte contre les violences conjugales, mis en place en Wallonie en 2009. Aujourd'hui, deux ans après le lancement de cette ligne à travers laquelle les victimes de violences conjugales trouvent écoute, informations et orientation vers des services spécialisés, Madame la Ministre peut-elle nous faire part de la dernière évaluation du travail accompli dans le cadre de ce service ? Sa pérennité est-elle assurée ?
Il me revient que l'élargissement de la plage horaire du service, actuellement disponible entre 9h et 20h, était à l'étude il y a quelques mois. Qu'en est-il aujourd'hui ? Peut-on envisager également que la ligne soit accessible en d'autres langues que le français ?
Je sais que les écoutantes de la ligne ont des contacts réguliers avec des acteurs locaux et que ce travail de proximité a permis de réaliser un répertoire de l'ensemble des services disponibles pour les victimes. Sachant qu'une mise en réseau des différents services est importante dans le déploiement du dispositif de lutte contre ces violences, je souhaiterais savoir si le répertoire a été mis à la disposition de l'ensemble du secteur.
Aussi, en partenariat avec la Fédération Wallonie-Bruxelles et la CoCoF, Madame la Ministre a entrepris de réaliser un cadastre complet des offres de formation en matière de violences entre partenaires, tant dans l'enseignement de plein exercice que dans les diverses filières de formation continuée. Où en est ce travail ?
Pour terminer, que Madame la Ministre me permette d'aborder un élément dont on parle peu, mais tout aussi essentiel que la violence entre partenaires elle-même. Je veux parler des enfants exposés à cette violence.
Je comprends que ce soit les principaux protagonistes qui retiennent l'attention. Mais derrière eux, il y a parfois des enfants qui peuvent être atteints psychologiquement par le climat de violence qu'ils subissent directement dans certains cas. Par conséquent, je souhaiterais savoir quelle place, dans le dispositif intégré, est réservée à l'enfant qui se retrouve, bien malgré lui, au centre de violences conjugales ?
Réponse du 20/12/2011
de TILLIEUX Eliane
La journée Ruban blanc du 25 novembre est l’occasion de rappeler que le fléau des violences conjugales touche encore trop de personnes. Même si ces moments de sensibilisation sont importants, il faut aussi en parallèle et de manière structurelle construire une action publique de lutte contre les violences entre partenaires.
Inaugurée le 25 novembre 2009 à l’occasion de la journée internationale de lutte contre la violence faite aux femmes, la ligne d’écoute « Violences conjugales » 0800/30 030 est implantée au sein de l’ASBL Cap Sciences Humaines à Louvain-la-Neuve et fonctionne depuis lors sans interruption.
Le budget réservé à ce dispositif s’élève en 2011 à 165 000 €eurosauxquels viennent s’ajouter l’équivalent de 5,5 emplois APE dans le cadre du Plan Marshall. Mon intention est de poursuivre le soutien de cette ligne en tant qu’outil essentiel de notre dispositif intégré de lutte contre les violences conjugales. En guise d’évaluation, je souhaite vous livrer les quelques chiffres suivants. La ligne téléphonique "violences conjugales" mise en place en Fédération Wallonie-Bruxelles a recueilli plus de 7.000 appels depuis son lancement, il y a deux ans. Elle a manifestement gagné en notoriété puisque cette année, le nombre de ces appels avait déjà augmenté de 50 pc par rapport à 2010. Cette année, 3.305 appels ont été recensés dont près de 2.000 étaient la suite de violences conjugales. Dans 69,9 pc des cas, les victimes elles-mêmes ont téléphoné et dans 16,7 pc leur entourage direct. Dans 87,5 pc des cas, ces appelants sont des femmes. Ces appelantes sont en couple dans près de trois quarts des situations et résident encore au domicile conjugal dans 62,4 pc des cas. 68,8 pc des appels font référence à des violences psychologiques.
La promotion de la ligne 0800/30 030 est assurée par la Fédération Wallonie-Bruxelles, en collaboration avec la Wallonie et la Cocof. La campagne de cette année, qui met l’accent sur les violences psychologiques, a déjà remporté un vif succès. Cette année la campagne comprend deux volets : * des spots TV et radio et un court métrage ; * des affiches et des folders.
21 210 affiches et 216 000 folders présentant la ligne d’écoute ont été envoyés à l’ensemble des services publics, organismes et associations relevant de l’autorité des trois entités (au total 9 068 contacts répartis dans 54 catégories professionnelles). Les spots de 30 sec TV et radio incitent le grand public à visionner le court métrage Fred et Marie. Le film a été présenté lors d’une conférence de presse à Bruxelles le 18 novembre au cinéma Vendôme et à Namur au cinéma Caméo le 24 novembre. Le court métrage est aussi visible en ligne sur fredetmarie.be. Lors de ces séances publiques, beaucoup d’acteurs de terrain ont marqué leur enthousiasme par rapport au film. Depuis, tous constatent déjà une augmentation du nombre d’appels.
Concernant les heures d’ouverture de la ligne, nous avons préféré ne pas les étendre pour l’instant. En effet, après analyse, il s’avère que les appels « de nuit » ne seraient pas si nombreux et relèveraient plutôt de la prise en charge d’urgence. Or, divers services, dont les maisons d’accueil prennent en charge ces appels d’urgence en dehors des heures d’ouverture de la ligne.
Concernant, les appels en langues étrangères, si l’idée me paraît séduisante, il convient d’étudier l’opportunité d’une telle mesure. L’estimation du nombre d’appels, des langues les plus concernées, du coût, mais également de la qualité de la réponse fournie dans cette langue doivent être estimés, avant d’envisager cette mesure. Par ailleurs, n’oublions que la ligne a aussi pour mission de réorienter vers d’autres services financés par la Wallonie et qu’en grande partie ces services sont uniquement accessibles en français.
A propos du répertoire, celui-ci est intitulé « Guide pour la lutte contre les violences entre partenaires en Wallonie » et a été présenté lors d’une conférence de presse au Cap Nord le 25 novembre dernier. Il est disponible pour l’ensemble des services disponibles pour les victimes, et, dans un premier temps sera présenté aux plate-formes d’arrondissement violences conjugales. Ce guide est un très bel outil et sa mise en page contemporaine et pratique permet une mise à jour annuelle. Nous travaillerons avec Cap Sciences Humaines ASBL à la possibilité de travailler à une version électronique du guide uniquement accessible à certains professionnels, vu que certaines adresses doivent restées cachées (celles des refuges).
Concernant les enfants exposés aux violences des parents, je partage assurément votre opinion. Il convient de leur accorder une attention particulière, de les traiter comme des personnes à part entière et non pas comme des accompagnants des parents et d’aborder leurs difficultés au vu de leurs spécificités. C’est pourquoi je soutiens des initiatives en la matière, je pense notamment à un projet de l’AMA (Association des Maisons d’Accueil) relatif à la réalisation d’une recherche action sur l’accueil et l’accompagnement des enfants en maison d’accueil, subventionné à hauteur de 600 euros par mon Département. Je pense également aux formations dispensées aux professionnels par les pôles de ressource, également financées par la Wallonie. Cette formation a pour objectif de mieux outiller les professionnels face aux impacts de la violence entre les parents sur les enfants.
Enfin, concernant le cadastre, un marché est effectivement en cours. Il s’agit d’un projet financé par la Fédération Wallonie-Bruxelles. En raison de la collaboration active des trois entités fédérées en cette matière, mes services sont également associés à la réalisation de ce cadastre. Je peux déjà vous annoncer que malgré les démarches insistantes et l’utilisation de différents canaux de recherche des données, les chercheuses qui travaillent sur ce cadastre n’obtiennent que très peu de réponses de la part des organismes de formation, des Universités et Hautes écoles.
Une première photographie de l’offre de formations en violences entre partenaires sera disponible pour le premier trimestre 2012.