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Un emprunt obligatoire européen

  • Session : 2011-2012
  • Année : 2011
  • N° : 145 (2011-2012) 1

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  • Question écrite du 30/11/2011
    • de CRUCKE Jean-Luc
    • à ANTOINE André, Ministre du Budget, des Finances, de l'Emploi, de la Formation et des Sports

    La Commission européenne vient de lancer un plan de 50 milliards d'euros qui devrait permettre de boucher les vides dans les connexions entre réseaux de transport, d'internet et de l'énergie.

    Pour financer le plan, le Président Barroso propose de recourir à un instrument financier innovant, l'emprunt obligataire européen de financement (Project Bond Initiative). Le procédé devrait permettre de rouvrir le marché des capitaux.

    Sachant que les différents parlements européens devront approuver le projet, comment Monsieur le Ministre se positionne-t-il à l'égard de la méthodologie choisie pour financer des grands travaux ? Quels sont, selon lui, les avantages et les inconvénients de la méthode ?

    La Wallonie pourrait-elle elle-même recourir à cette méthode de financement innovant ? Pourquoi ?
  • Réponse du 09/01/2012
    • de ANTOINE André

    L’Europe aura besoin, dans les dix prochaines années, de nombreuses liquidités pour financer les vastes projets d’investissement prévus à l’horizon 2020. A titre d’illustration, selon une publication de l’Eurofi rien que pour les secteurs de l’énergie et du transport, les investissements étaient estimés, en octobre 2010, à 1 600 milliards d’euros.

    Or, comme l'honorable membre le sait, l’ensemble des pays européens subissent de plein fouet une crise sans précédent qui impacte négativement leurs budgets et leurs niveaux d’endettement. Les différents plans de rigueur mis en place vont comprimer les dépenses, et les marges dégagées serviront prioritairement à assainir les finances publiques et à diminuer les niveaux d’endettement des Etats afin de respecter au mieux les critères imposés par l’Europe.

    Dans ce contexte, il sera très difficile pour ces pays d’assumer, dans les prochaines années, le financement de grands projets d’investissement européens en infrastructure. De plus, le renforcement de la régulation des banques, notamment via la mise en place de Bâle 3, va mécaniquement entraîner une réduction des financements à long terme accordés par ces dernières, vu les nouvelles exigences en capital et les futurs ratios de liquidité à respecter.

    Le but de l’emprunt obligataire européen de financement (« Project Bond Initiative ») dont vous parlez, est d’attirer des capitaux privés pour financer ces investissements.
    Avant la crise financière, des assureurs spécialisés (appelés « monolines ») octroyaient, contre le paiement d’une prime, leur garantie aux obligations émises pour financer les projets d’infrastructure, ce qui avait pour conséquence d’améliorer la qualité de crédit de ces obligations et d’augmenter la demande des investisseurs privés pour ces dernières.

    Mais aujourd’hui les assureurs spécialisés ont presque tous été emportés par la crise financière, et de manière plus générale, avec la raréfaction des liquidités et l’assèchement du crédit bancaire, il devient de plus en plus difficile pour les opérateurs de financer leurs projets. Il faut donc saluer cette initiative européenne qui a pour objectif de faciliter l’accès des porteurs de projet en infrastructure au marché des capitaux, afin de financer leurs projets par l’émission d’obligations. Grâce à un système de partage des risques entre la commission européenne et la banque européenne d’investissement, la notation de crédit de ces obligations sera rehaussée vers un rating compris entre A et AA. Le résultat sera une demande accrue de la part des investisseurs institutionnels et une baisse du coût de financement de ces projets.

    Néanmoins, plusieurs aménagements seront nécessaires pour que cette initiative soit un succès. Le mécanisme de partage des risques doit permettre aux opérateurs de rehausser suffisamment la notation de crédit des obligations émises. En outre, il faudra assurer la liquidité de ces obligations sur le marché secondaire via, par exemple, la création d’une agence européenne spécialement dédiée à cet objectif.

    Nous serons très attentifs à l’évolution de cette initiative. Si ce mécanisme se concrétise, il est tout à fait envisageable pour des opérateurs wallons porteurs de projets dans les domaines visés de se financer via ce type d’obligations.