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Le projet éolien d'Esplechin

  • Session : 2011-2012
  • Année : 2011
  • N° : 266 (2011-2012) 1

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  • Question écrite du 08/12/2011
    • de SENESAEL Daniel
    • à HENRY Philippe, Ministre de l'Environnement, de l'Aménagement du Territoire et de la Mobilité

    La presse rapporte que le permis unique pour l’implantation du parc éolien à Esplechin a été recalé par l'administration de Monsieur le Ministre. Je ne peux m’empêcher de constater qu’en Wallonie picarde plusieurs projets passent à la trappe et que l’accumulation de ce genre de « tracas » y compris dans le reste de la Wallonie retarde significativement le développement éolien dans notre Région.

    Une fois encore, le cadre éolien permettra, j’en suis certain, d’éviter cela. En attendant, j’aimerais, avoir plus de détails sur les raisons qui ont poussé l'administration de Monsieur le Ministre à refuser le permis pour ce projet. Celui-ci est-il définitivement enterré ? Son promoteur lui a-t-il fait part de ses intentions de recours ou non ?
  • Réponse du 02/02/2012
    • de HENRY Philippe

    Les considérations mises en évidence dans l’arrêté du 21 novembre 2011 par les fonctionnaires technique et délégué de Mons pour cette procédure de permis unique visant à la construction et à l’exploitation d’un parc de 6 éoliennes dans un établissement situé au lieu-dit "Quatre-Chins" s/n à 7502 - Esplechin/Tournai mettent en évidence trois points problématiques :

    Le projet achoppe essentiellement sur trois points :

    1° Le site pressenti s’implante à proximité d’un espace frontalier de grand intérêt historique et touristique : celui de la « Bataille de Bouvines » (27 juillet 1214 – acte fondateur de la nation française). Une procédure est en cours, auprès de l’administration française, pour inscrire cet espace au registre des sites classés et historiques. Le périmètre de classement couvre 2 500 ha sur onze communes françaises: Bouvines, Gruson, Baisieux, Sainghin-en-Mélantois, Chéreng, Anstaing, Louvil, Wannehain, Bourghelles, Cysoing et Camphin-en-Pévèle ; les quelque 2.500 ha du site de la bataille sont restés quasiment en l'état, dédiés à l'exploitation agricole ; seuls le TGV et l'autoroute A27, dans un passé très récent, ont perturbé le panorama même s'ils ont été partiellement encaissés ; la plaine de Bouvines est susceptible de devenir un site national, au même titre que le Mont Saint-Michel ou les plages du Débarquement en Normandie. Les conséquences de ce classement sont l’interdiction d'affichage, de publicité ou de camping, de même que tous travaux susceptibles de modifier ou de détruire l'état ou l'aspect du site. En l'occurrence, le classement va fixer la vocation agricole du site. Les autorités françaises (Ministère de l’Ecologie et du Développement durable, Préfecture du Nord, mairies des villages environnants, communautés de communes) consultées dans le cadre des incidences transfrontières du projet (dans le respect de la Convention d’Espoo) se sont massivement opposées au projet qui ruinerait, selon eux, des années d’efforts consacrés à conserver intact ce site historique (enfouissement des lignes électriques aériennes, refus de permis de bâtir dans la zone,…).


    2° Les résultats des mesures d’ambiance sonore permettent d’estimer que le bruit des éoliennes en journée serait inférieur au bruit de fond. Par contre, la nuit, les niveaux de bruit de fond rencontrés dans la zone sont relativement faibles (de l’ordre de 26 dB[A]). Dans ce contexte, l'émergence acoustique du parc éolien dans l'ambiance sonore existante dépend fortement des conditions météorologiques (vitesse et direction du vent). Pendant les périodes les plus calmes de la nuit, le bruit généré par les éoliennes serait perceptible au niveau des habitations les plus proches, particulièrement au niveau des quelques habitations situées sous les vents dominants par rapport au parc. Le passage d’un calme relatif de 26 dB[A] la nuit à 42 ou 43 dB[A] (bruit toléré pour une éolienne sous un vent de 7 à 8 m/s), même si le niveau de bruit à l’immission reste conforme aux normes en vigueur, représente une nuisance très perceptible pour les riverains.


    3° Le dernier point est lié à l’avis du DNF – Direction de Mons qui propose dans ses conditions, en vue de compenser le dérangement de l’avifaune (résidente ou migratrice) ou la destruction de son habitat que « … Les éoliennes font l'objet de mesures pour compenser l'impact négatif qu'elles engendrent sur le maintien dans un état favorable des populations locales d'oiseaux dans une plaine agricole encore occupée par un ensemble d'espèces d'oiseaux considérés comme en déclin à l'échelle wallonne (Busard des roseaux, Bruant proyer, Perdrix grise, Vanneau huppé). Ces mesures consistent à aménager 15 ha de terres agricoles selon les modalités suivantes et dans une proportion à définir avec les services du DNF… ».

    Or, dans ce cas précis, l’auteur d’étude d’incidences (CSD Ingénieurs Conseils sa) a étudié des compensations environnementales pour une surface totale de 7 à 8 ha. Au stade de la première instance, il était donc impossible pour le promoteur de rencontrer les conditions particulières formulées par le DNF. Le fait d’enjoindre le promoteur à « trouver » les hectares déficitaires pour pouvoir y mettre en œuvre lesdites compensations ne peut en aucun cas constituer une condition particulière de l’arrêté d’autorisation car autoriser un parc sous la condition de mise en œuvre future de compensations dont le caractère réalisable est aléatoire va à l'encontre de la jurisprudence du Conseil d'Etat qui « refuse que l'autorité tienne pour acquis des éléments futurs et incertains sur lesquels elle fonderait sa décision, ou qu'elle coulerait en conditions assortissant sa décision ».

    Le DNF et le DPA sont conscients de la problématique soulevée par ces compensations environnementales des projets éoliens et ont organisé le vendredi 16 décembre dernier une réunion de travail afin de définir une procédure à adopter, sur base d’une consultation systématique du DNF par le promoteur postérieurement à la réalisation de l’étude d’incidences environnementales mais préalablement au dépôt du projet et d’une méthodologie d’évaluation des compensations pour les projets éoliens, définies clairement par le DNF et le DEMNA. Cette dernière devrait être rendue publique de manière imminente.

    Ce sont ces différentes raisons qui ont conduit au refus du permis par les Fonctionnaires technique et délégué. Le projet n’en est pas pour autant mort. Il reste au promoteur la possibilité de porter recours à la décision.

    Une telle démarche a d’ailleurs été initiée par le promoteur via l’introduction, le 12 décembre dernier, d’un recours devant le gouvernement contre la décision prise en 1e instance par les Fonctionnaires technique et délégué. Le rapport de synthèse sur recours de l’administration doit me parvenir le 20 février prochain (sauf prorogation éventuelle de 30 jours maximum) au plus tard. Je disposerai moi-même d’un délai de 30 jours à dater de la réception dudit rapport pour me prononcer.