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Le scénario énergétique

  • Session : 2011-2012
  • Année : 2011
  • N° : 248 (2011-2012) 1

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  • Question écrite du 15/12/2011
    • de STOFFELS Edmund
    • à NOLLET Jean-Marc, Ministre du Développement durable et de la Fonction publique

    Monsieur le Ministre me permettra de baser ma question sur un texte paru dans le Journal des Ingénieurs n°133 - Septembre-octobre 2011.

    La « décarbonisation » figure parmi les priorités les plus urgentes en matière de production d’énergie. Si nous investissons les moyens de renforcer de manière significative notre capacité de production d'électricité à partir des énergies renouvelables, des pays comme l'Allemagne seront en mesure, dès 2020, de satisfaire la totalité de leur demande d'électricité pendant certaines périodes favorables — les jours de fort ensoleillement ou très ventés par exemple — à partir de leurs centrales éoliennes, solaires, hydroélectriques ou exploitant la biomasse. Ce propos traduit à la fois l’opportunité à saisir et la lacune à combler.

    Les unités de production d’énergie renouvelable (éolienne et solaire) offrent une énergie par nature fluctuante ou intermittente. Il faudra donc que cette offre soit complétée par une autre offre – également renouvelable – qui fournit l’énergie de façon permanente et surtout qui comble les phases creuses de l’éolien et du photovoltaïque. Le scénario énergétique renouvelable doit donc être un scénario souple tout en étant – au maximum – décarbonisé.

    En cas de changement à court terme des conditions météos, nous devront disposer d'environ 20 à 50 GW d'énergie produite par d'autres sources afin de compenser très rapidement cette perte, à savoir dans un délai de quelques minutes à quelques heures. Cela pose d’une part le problème du stockage à grande échelle p.ex. de type centrales hydroélectriques dans un avenir prévisible. A ce que je sache, le Gouvernement wallon ne prévoit pas de nouveaux lacs ou barrage, ni d’ailleurs de renforcer les outils existants. Nous serions, de toute façon, assez limités quant au stockage de l’électricité sous forme de centrales hydroélectriques.

    Actuellement, la réactivité du système d’approvisionnement énergétique ne peut être garantie que très imparfaitement par notre actuel parc de centrales nucléaires. Leur temps de démarrage est bien trop long pour que ces technologies, indépendamment de ce que l’on pense sur le plan environnemental, peuvent servir comme réponse au caractère fluctuant de l’énergie renouvelable. La réponse actuelle, ce sont les TGV, sauf qu’avec cette technologie, on est loin d’être « décarbonisé ».

    Les ingénieurs se sont penchés sur la question. Dans leur journal, ils publient un article qui informe qu’ils ont « élaboré un concept général qui répond, de manière efficace, aux exigences les plus pointues en matière de versatilité, sans pour autant compromettre l'efficacité énergétique et la sobriété de la technologie utilisée ».

    Ecoutons-les : « Cette solution s'appuie sur un système à une ligne d'arbres extrêmement efficace que nos ingénieurs ont élaboré, au début des années 90, et qui a ensuite été intégré avec grand succès dans la classe F avec la centrale SCC5-4000F I S dont on compte actuellement environ 100 unités en exploitation commerciale. Le principe de cette technologie qui rassemble la turbine à gaz, le générateur, le système d'accouplement et la turbine à vapeur sur un arbre unique reste, à ce jour, inchangé car il continue à garantir à nos clients un niveau d'économie optimal, en même temps qu'une flexibilité opérationnelle et financière irréprochable. Au concept d'origine, nous avons intégré, en outre, tous les grands éléments susceptibles d'améliorer la versatilité du système : optimisation du jeu hydraulique, la chaudière Benson, un dispositif de démarrage rapide et d'autres fonctions destinées à améliorer la flexibilité. En outre, nous avons aussi veillé à respecter certaines contraintes spécifiques du réseau et concernant l'îlotage. ».

    L'un des facteurs essentiels pour la flexibilité de la centrale électrique mise sur pied et testée une première fois en janvier dans les conditions de marché, est le délai de « démarrage à chaud » qui survient généralement après 6 à 8 heures de découplage, tôt le matin, au moment où la demande du réseau recommence à décoller. Il est très facile de relancer la centrale toute entière, à pleine puissance, avec une grande fiabilité en moins de 30 minutes. Selon les résultats, la centrale a démontré ses capacités à répondre aux exigences les plus fortes du réseau — mais aussi à optimiser les temps de démarrage et la baisse de charge — et à vérifier son rendement et son efficacité.

    « Tout aussi important est l'impératif inverse, à savoir la nécessité de réduire la puissance de la centrale, parfois très rapidement en cas de perturbation soudaine à l'intérieur du réseau ou de pic de puissance des générateurs éoliens ou solaires. Là encore, nous sommes en mesure de prouver que l'activité de notre centrale pourra être ralentie jusqu'à une charge minimum voire jusqu'à zéro en moins de 30 minutes. » (citation du Journal des ingénieurs) .

    Et pour démontrer l'extrême efficacité du système à charge basse, intermédiaire et de pointe, à répondre rapidement aux aléas de la demande exigeant des variations de puissance plus ou moins grandes, les ingénieurs ont testé des systèmes de variation en puissance, et les résultats obtenus indiquent que là encore, la centrale est capable d'atteindre des taux de variation de crêtes jusqu'à 35 MW/min avec une stabilité remarquable.

    Par ailleurs, la technologie peut être utilisée dans de petits réseaux comme dans des plus grands, l’important étant que les réseaux soient suffisamment bien interconnectés les uns par rapport aux autres.

    Si l'on observe ces résultats, maintenant acquis, dans une logique de respect de l'environnement, il apparaît clairement que l'introduction de cette technologie dans des marchés comptant de gros émetteurs de CO2 (centrales à charbon) ou de gros pollueurs sur le plan radioactif (centrales nucléaires) permettra de réduire de manière significative l'empreinte environnementale.

    Jusqu’à présent, je n’ai entendu nulle part dans les discours politiques qu’un scénario énergétique renouvelable se prépare de façon à faire face au caractère intermittent de certaines sources d’énergie (soleil et vent). Et pourtant, la demande fait appel à l’énergie en fonction d’un cycle qui ne correspond pas nécessairement aux cycles naturels du vent et de la lumière. Il faudra donc s’intéresser davantage à cet aspect de la question et voir ce que les ingénieurs ont mis sur pied comme technologie, voir les stimuler – par une politique de R&D adéquate – à être imaginatif pour résoudre les questions qui découlent de cette problématique.

    Puis-je donc – une nouvelle fois – demander à Monsieur le Ministre qu’une actualisation du PMDE (2003/2009) soit mise en route, focalisant un chapitre sur la question qui fait l’objet de ma question. Il ne suffit pas de parler d’éolien, de photovoltaïque, d’hydraulique ou de géothermie, il faudra parler d’un ensemble cohérent, d’un mixte énergétique capable de fournir, sur base du renouvelable, l’énergie en qualité et quantité suffisante à tout moment, et ce, à des prix abordables tant pour le professionnel que pour le résidentiel. Quand Monsieur le Ministre va-t-il donc lancer la troisième actualisation du PMDE ?
  • Réponse du 06/01/2012
    • de NOLLET Jean-Marc

    L'honorable membre n'est pas sans savoir que la matière liée à la sécurité d’approvisionnement est de compétence fédérale. Cela étant dit, l’action wallonne n’est pas négligeable dans les domaines visés par votre question : gestion de la demande, étude et définition d’un mixte énergétique durable et décarbonisé aux horizons 2020 et 2050, développement des capacités et recherche en solution de stockage, organisation du marché de la distribution d’énergie et gestion intelligente du réseau. L’ensemble de ces éléments a déjà été abordé lors de questions précédentes, je ne m’y attarderai donc pas en dépit de leur importance incontestable.

    Le Plan pour la Maitrise Durable de l’Energie adopté par le Gouvernement wallon en 2003 à l’initiative de mon prédécesseur, José Daras, avait pour objet de présenter un état des lieux, souligner les enjeux et proposer un ensemble d´actions, en vue de servir de base au débat et d’initier une dynamique en donnant un cadre global et cohérent qui permet à tous les acteurs de situer leur propre rôle dans l´ensemble et son importance. Cet objectif est maintenant atteint. L’état des lieux est actualisé chaque année à travers les bilans énergie disponibles sur le site portail de l’énergie du Service Public de Wallonie (http://energie.wallonie.be) ainsi que via le travail spécifique d’affinage des chiffres de potentiel des énergies renouvelables réalisé par le consortium ayant actualisé le PMDE en 2009 et dans le cadre du travail de rapportage à la Commission européenne des actions du Plan d’action en matière d’efficacité énergétique. Les enjeux en matière d’énergie ont été clairement posés dans la Déclaration de Politique Régionale et affinés à mesure de sa concrétisation. Enfin, les actions envisagées ont depuis été pour une majeure partie réalisées et de nouvelles actions ont été identifiées dans le cadre du Plan pluriannuel de l’Alliance Emploi-Environnement, du deuxième Plan d’Action en matière d’Efficacité Energétique et du Plan d’action en matière d’Energie Renouvelable.

    Il est néanmoins vrai qu’en cette première partie de législature, l’accent et les efforts ont été mis sur la réalisation des actions et le développement des politiques sectorielles. Sont ici visés les secteurs de la politique énergétique, à savoir :
    - le développement des mesures d’efficacité énergétique dont la performance énergétique des bâtiments et les accords de branche de première et seconde génération,
    - le développement des énergies renouvelables et de la cogénération de qualité,
    - les mesures relatives à l’accès à l’énergie, à savoir la politique sociale de l’énergie, la gestion des réseaux et l’organisation du marché,
    - la recherche en énergie, en particulier dans le domaine que vous soulevez dans votre question, à savoir la gestion intelligente des réseaux, les énergies renouvelable, et le stockage en matière d’énergie.

    Ce choix a été guidé autant par la maturité des dossiers initiés par José Daras en 2003 que par des impératifs temporels en matière de transposition de Directives européennes (Directive Service, Directive Service Energétiques, Directives PEB et PEB Recast, Directives relatives à l’organisation des marchés de l’électricité et du gaz, Directive relative aux énergies renouvelables).

    L’ensemble de ces dossiers étant bien avancé, je m’appliquerai à développer dans les prochains mois trois documents en vue de leur présentation au gouvernement : une feuille de route énergie à l’horizon 2020, une stratégie globale énergie, que l’ont peut sans doute rapprocher d’une actualisation du Plan pour la Maitrise Globale de l’Energie, et le chapitre énergie du plan air-climat-énergie, en collaboration avec mon collègue Philippe Henry, Ministre en charge de la politique climatique. Ces documents se veulent être une synthèse en trois parties de la politique impulsée sous cette législature et une réponse à votre demande exprimée à travers la résolution 391/1 adoptée en Commission du Parlement wallon le 13 décembre dernier.