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La qualité de l'air en Wallonie et le Plan particules sur le bassin liégeois

  • Session : 2011-2012
  • Année : 2012
  • N° : 402 (2011-2012) 1

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  • Question écrite du 23/01/2012
    • de CREMASCO Veronica
    • à HENRY Philippe, Ministre de l'Environnement, de l'Aménagement du Territoire et de la Mobilité

    Le début de l’année est encore une fois l’occasion des bilans, en termes de qualité de l’air notamment. Pour rappel, la directive européenne 2008/50 impose qu'en tout point où la concentration en PM10 est évaluée, celle-ci ne dépasse pas :
    a) 40 µg/m3 en moyenne annuelle et
    b) 50 µg/m3 en moyenne journalière plus de 35 fois (jours) par an.

    J’avais eu l’occasion d'interpeller Monsieur le Ministre l’année passée sur les résultats du bassin liégeois, qui est le plus sensible de Wallonie et dont une de ses stations, celle de Herstal, détenait pour l’année 2010, le triste record du plus grand nombre de dépassements belges. On peut lire dans la presse (LLB 16 janvier 2012), que cette station d’Herstal aurait aujourd’hui un bilan légèrement meilleur. Elle n’enregistre « que » 67 dépassements pour l’année 2011.

    D’autre part, la moyenne journalière fixée à 50 µg/m3, est une donnée importante. La barre de cette moyenne journalière ne serait quand à elle pas dépassée, en bassin liégeois en tout cas.

    Monsieur le Ministre eut-il confirmer ces résultats (dépassements et moyennes), les commenter, et/ou les préciser ?

    Peut-il également étendre ce bilan de la qualité de l’air à l’ensemble de la Wallonie ?

    Je voudrais également poser deux questions plus particulières sur de nouveaux moyens d’action pour améliorer la qualité de l’air dans notre Région.

    La campagne mobile de mesures de l’ISSeP sur le bassin liégeois livre-t-elle des conclusions qui permettent de préciser des problèmes et pistes d’actions spécifiques ?

    Un « Plan particules » sur la zone était programmé, est-il toujours d’actualités ?

    Y a-t-il des avancées en la matière ?

    D’autre part, on sait que certaines particules sont encore plus nocives pour la santé que les PM10. En effet, d'un point de vue toxicologique, ce sont les particules de moins de 2,5 microgrammes, les PM 2,5 issus des processus de combustion qui se sont révélés les plus toxiques. Elles sont, entre autres, impliquées dans des affections respiratoires et cardiovasculaires. Ces particules consistent en des suies (black carbon), des composés organiques divers et des métaux en trace. Dans ce domaine, les mesures en Région wallonne ont-elles pu être affinées ? Et des pistes d’action particulières se dégagent-elles ?
  • Réponse du 15/03/2012 | Annexe [PDF]
    • de HENRY Philippe

    Les concentrations des différents polluants dans l’air ambiant en Région wallonne sont suivies par les réseaux de surveillance de la qualité de l’air. Les objectifs de ces réseaux sont le suivi des niveaux de pollution et le suivi du respect des normes, la compréhension des phénomènes de pollution atmosphérique, et l’information du citoyen.

    Selon le rapport 2009 des réseaux de surveillance de la qualité de l’air en Wallonie, les émissions de particules primaires (directement émise par la source concernée) s’effectuent à 47% sous la fraction PM10 et 32% pour la fraction fine PM2,5 (68% des PM10).

    Les principaux secteurs responsables de ces particules fines sont l’industrie, le transport, le chauffage urbain et l’agriculture.

    En 2011 (1) , comparativement aux années 2008, 2009 et 2010, la valeur limite en PM10 a été dépassée en de nombreux endroits. Les principales raisons de ces augmentations de 2011 sont à imputer aux conditions météorologiques peu propices à la dispersion des polluants : une longue période sèche avec des vents relativement faibles au printemps et des inversions de température en octobre/novembre. Si nous analysons le tableau 1 en annexe, comprenant les statistiques de la station de Marchienne-au-Pont de 2011, il apparaît que 95% des dépassements de la valeur limite ont été constatés durant les cinq premiers mois de l’année.
    Même en zone rurale à Vielsam (tableau 2 en annexe), qui est une station de fond où les secteurs principaux d’émissions de particules sont absents ou ont une très faible influence, on a enregistré des dépassements de la valeur limite en début d’année (janvier et mars).

    Pour des situations équivalentes que sont les mois de janvier-février-mars et décembre durant lesquels le chauffage domestique contribue aux émissions de particules, aucun dépassement n’a pourtant été constaté en décembre, qui fut particulièrement pluvieux.

    Les deux autres grands secteurs que sont le transport et l’industrie ne varient pas leurs émissions au cours de l’année, ce qui signifie que durant les cinq premiers mois un autre paramètre a influencé la qualité de l’air : la météo.

    Signalons aussi qu’à plusieurs reprises au début de l’année 2011, des courants de nord-est nous ont amené des masses d’air fortement polluées en provenance de pays situés à l’est de la Belgique.

    De façon extrêmement claire, la situation du début d’année 2011 est imputable à la météo, particulièrement défavorable à la dispersion des polluants.

    Concernant les PM2,5, la directive fixe une obligation en matière de concentration moyenne annuelle de 25 µg/m³ qui devra être respectée à partir de 2015.
    Depuis 2008 et jusqu’en fin 2011, toutes les concentrations moyennes annuelles wallonnes ont été inférieures au seuil de 25 µg/m³.



    Campagne mobile dans le bassin liégeois

    A la station de mesures télémétrique située boulevard Zénobe Gramme à Herstal, la valeur limite annuelle est respectée ; par contre, la moyenne journalière des concentrations en poussières fines (PM10) ne rencontre pas les obligations de la Directive : 61 jours de dépassement en 2009 et 69 en 2010. Pour 2011, les 35 jours de dépassement ont été enregistrés très tôt dans l’année (on enregistre 50 jours de dépassement dès la fin mars) pour atteindre un total de 61 jours.

    Ces dépassements sont non seulement plus élevés que le nombre maximum autorisé par la Directive mais aussi plus élevés que ceux constatés dans les autres stations de mesures de la région liégeoise. Suite à ce constat, l’AWAC (Agence Wallonne de l’Air et du Climat) a chargé l’ISSeP (Institut scientifique de Service public) de mener une campagne de mesures pour déterminer les causes de ces nombreux dépassements.

    La campagne mobile s’est déroulée du 15 avril au 2 octobre 2011. Lors de cette étude, six stations de mesures ont été installées aux alentours de Herstal et de l’Ile Monsin. Ces stations étaient équipées pour mesurer les concentrations en particules en suspension (PM10 et PM2,5), en monoxyde de carbone (CO), en monoxyde d’azote (NO) et en dioxyde d’azote (NO2). En complément, des préleveurs d’échantillons de poussières en suspension (fraction PM10) ont été installés sur les mêmes sites en vue de l’analyse de leur contenu en métaux lourds et de l’identification des particules par microscopie électronique. Un appareil de prélèvement et de mesure des poussières sédimentables a également été installé dans le sud de l’Ile Monsin.

    Outre les données enregistrées en temps réel par les appareils de mesures, c’est-à-dire les concentrations en poussières fines, le monoxyde de carbone et les oxydes d’azote, les échantillons de poussières jugés les plus pertinents ont été soumis à l’analyse chimique (XRF, ICP) et à la micro-analyse particulaire (par microscopie électronique à balayage couplée à un spectromètre à dispersion d'énergie (MEB/EDX) et par diffraction des rayons X (DRX)) afin de disposer de signatures minéralogiques et de composition des particules.

    Les données ont été croisées avec les données météorologiques (vitesse et direction des vents, température, humidité) mesurées à la station permanente de Herstal afin de déterminer la provenance des différents polluants.



    Résumé des résultats

    Je convie à consulter le rapport complet de campagne mobile à Liège-Herstal sur le site de l’AWAC (http://airquality.issep.be) à la rubrique rapports du réseau mobile », campagne Liège-Herstal 2011.

    Voici un résumé de ces résultats.

    Métaux lourds :

    Des concentrations élevées mais sporadiques en différents métaux lourds sont enregistrées sur l’Ile Monsin et à proximité de celle-ci. Les roses de pollution tracées montrent des apports principaux en ces métaux lourds en provenance du sud de l’Ile Monsin. Ces apports sont également faiblement mesurés à la station permanente de Coronmeuse. Des analyses complémentaires sont en cours afin d’évaluer leur impact au-delà de la zone proche de l’Ile Monsin.

    Poussières fines (PM10) :

    La période couverte par la campagne de mesures présente un faible nombre de jours de dépassements de la limite journalière en poussières fines à l’échelle de la Région wallonne. A la station permanente de Herstal-Coronmeuse, on a enregistré seulement 7 jours de dépassements de la valeur de 50 μg/m³ durant l’étude. Les roses de pollution tracées pour les stations les plus proches de la station permanente de Coronmeuse semblent montrer, en plus des apports nord/nord-ouest présents aux autres stations de Liège (pollution urbaine de fond), des apports particuliers en provenance du nord de l’Ile Monsin et dans une moindre mesure du sud de l’Ile Monsin.

    La conjugaison de la micro-analyse particulaire sur filtres et de la DRX sur macro-échantillons dégage deux signatures minéralogiques différentes : l’une, caractérisée par du charbon, est identifiée sur les échantillons soumis à des vents qui ont balayé la zone nord de l’Île Monsin ; l’autre, riche en graphite et autres phases minérales (entre autres des oxydesmétalliques), est constatée sur les échantillons soumis aux vents en provenance de la zone sud de l’île. Des analyses minéralogiques supplémentaires sont en cours de réalisation pour apprécier l’influence éventuelle de l’Ile Monsin à mesure que l’on s’écarte de celle-ci. Monoxyde de carbone (CO), monoxyde d’azote (NO) et dioxyde d’azote (NO2) :

    Les concentrations de ces polluants sont du même ordre de grandeur pour l’ensemble des stations de l’étude et sont comparables aux autres stations de la ville de Liège. Les roses de pollution pour ceux-ci ne montrent pas de direction d’apport préférentiel.



    Plan particules

    L’un des grands axes du plan particule du 31/03/2011 est la diminution des émissions de particules primaires et des précurseurs des particules secondaires qui fait lui –même appel à 5 actions distinctes :
    * La caractérisation fine des PM10 pour en déduire leur origine sectorielle
    * L’analyse des expériences des pays les plus avancés pour en tirer les meilleures stratégies
    * L’identification des causes locales
    * La sécurisation du dispositif dans un texte légal et ses arrêtés d’exécution
    * L’action concrète et continuellement sur le terrain

    A ce stade, l’AWAC a engagé 3 experts en particules. Ils commencent le 2 janvier et le 1er février 2012, ils seront attachés aux problématiques du secteur industriel, du transport et du chauffage.
    Par ailleurs, un rapport d’étude du bureau TAUW a été finalisé en août 2011 portant sur l’ « Assistance pour l’élaboration d’un nouveau plan de réduction des PM10 et PM2.5 ». C’est une excellente source d’informations et base de travail avec notamment des comparaisons avec plusieurs pays (Allemagne, Pays-Bas, France, …).



    Black carbon
    Ce qu’on dénomme le « black carbon », ce sont en réalité des particules de suies. Ces suies étaient très présentent dans l’atmosphère pendant les années 50-60-70 en raison de l’usage fréquent de charbon. Elles ont ensuite été moins nombreuses dans l’atmosphère en raison de la désaffection vis-à-vis de ce combustible. C’est pour cette raison que la Commission européenne, lorsqu’elle a modernisé la réglementation de 1996, ne les a plus reprises dans la liste des polluants à mesurer.

    Conscients de l’impact pour la santé de ce type de polluants, mes services ont néanmoins veillé à ce que les suies continuent à être mesurées en quelques endroits du territoire. Dans le cadre des travaux réalisés pour lutter contre les particules PM10 et PM2,5 (dont les suies font partie), mes services ont également acquis 3 appareils permettant de quantifier les black carbon. Ces appareils fonctionnent depuis quelques mois.

    La raison de ces acquisitions est qu’actuellement, il y a un grand intérêt pour le black carbon car ce polluant est un excellent traceur des émissions dues aux véhicules diesel. C’est un indicateur fiable de l’impact de la situation routière et présente une corrélation très fine avec les oxydes d’azote.



    (1) Dépassements en 2011 sur base de données non encore validées. Résultats définitifs disponibles au cours du début d’année 2012