/

Les demandeurs d'emploi passifs

  • Session : 2011-2012
  • Année : 2012
  • N° : 254 (2011-2012) 1

2 élément(s) trouvé(s).

  • Question écrite du 03/02/2012
    • de KAPOMPOLE Joelle
    • à ANTOINE André, Ministre du Budget, des Finances, de l'Emploi, de la Formation et des Sports

    Monsieur le Ministre a certainement pris connaissance de l'article paru dans le quotidien Le Soir en date du 6 janvier 2012 dans lequel nous pouvions lire que la Belgique serait le pays de l'Union européenne qui affiche le plus faible taux de personnes sans emploi « passives », c'est-à-dire celles qui sont théoriquement disponibles pour occuper un emploi, mais qui, dans les faits, ne cherchent pas de travail.

    Que lui inspirent les résultats de cette enquête quant à un éventuel succès du système d'accompagnement des demandeurs d'emploi ?

    Dès lors que l'accord institutionnel prévoit que les Régions vont désormais recevoir la pleine compétence de décision et d'exécution en matière de contrôle de la disponibilité active et passive et d'imposition de sanctions des chômeurs y relatives, Monsieur le Ministre a-t-il été sollicité par le Fédéral pour établir cette enquête ? Que pense-t-il des résultats exposés ? Partage-t-il ces chiffres ?

    Que lui inspirent-ils dans le cadre de l'implémentation future de cette politique au niveau wallon ?
  • Réponse du 10/05/2012
    • de ANTOINE André

    L’article de journal que l'honorable membre cite dans sa question fait référence à une publication d’Eurostat, présentant 3 nouveaux indicateurs relatifs au marché du travail. Eurostat précise que ces trois indicateurs enrichissent la vision du marché du travail, mais ne remettent pas en question les traditionnels indicateurs (1) relatifs aux taux d’activité, d’emploi et de chômage.

    Ma première remarque sera d’ordre méthodologique. En effet, Eurostat a diffusé les résultats de l’enquête européenne auprès de populations en âge de travailler, âgées de 15 à 74 ans, pour des raisons de comparabilité entre États membres de l’Union. Or, habituellement, les segments de population de référence couvrent les personnes âgées de 15 à 64 ans.

    Ensuite, parmi les populations considérées ci-dessus, l’auteur indique qu’au sein de la population active occupée, se trouvent des personnes qui ont un contrat de travail mais avec un taux d’occupation peu élevé (Underemployed part-time workers), plus précisément des travailleurs à temps partiels désireux de travailler davantage. En Belgique, cette catégorie représente 0,8 % de la population active, ce qui est très peu élevé par rapport aux autres pays européens.

    Parmi la population inactive (et donc non prise en considération dans le calcul du taux de chômage), deux groupes de personnes sont également identifiés :
    * les personnes qui recherchent un emploi, mais qui ne sont pas immédiatement disponibles sur le marché du travail (Persons seeking a job but not immediately available for work). Cette catégorie en Belgique qui représente 1,9 % de la population active (contre 1,0 % pour les EU27) reprend principalement des personnes qui ne rentrent pas dans les critères pour être considérées comme des actifs inoccupés selon la définition du BIT (2) (faible disponibilité pour un emploi).
    * les personnes qui désirent travailler et sont disponibles pour le faire, mais qui ne sont pas enregistrées comme demandeurs d’emploi parce qu’elles ne recherchent pas activement un emploi (persons available to work but not seeking ). Cela inclut, entre autres, des inactifs découragés et les personnes dispensées de recherche d’emploi pour circonstances familiales ou personnelles. Cette catégorie représente 0,7 % de la population active en Belgique, une part très faible alors que par exemple, en Italie, ce taux est de 11,1 %.

    C’est sans doute à cette dernière catégorie que l'honorable membre fait référence lorsqu'elle parle de « demandeurs d’emploi passifs ». Plutôt que parler de demandeurs d’emploi passifs, il me paraîtrait plus correct de les désigner comme étant des personnes inactives susceptibles de travailler. Les personnes, considérées ici comme étant des « demandeurs d’emploi passifs », ne sont pas comptées dans la population active et donc pas reprises également dans la définition du chômage. Elles sont, dès lors, en dehors du périmètre de l’accompagnement individualisé qui ne concerne que les demandeurs d’emploi.

    Traditionnellement, la population nationale est structurée en population active (occupée et inoccupée) et inactive. Néanmoins, d’autres outils de mesure (3) sont développés pour permettre de piloter certaines actions ou d’évaluer d’autres besoins. Souvent, ces outils proposent d’adjoindre aux demandeurs d’emploi inoccupés de nouvelles catégories de personnes. Or, il apparaît que ces publics (ajoutés à la demande habituelle d’emploi) ne font pas partie du cœur de cible du Forem.

    Les chiffres publiés par Eurostat illustrent bien cette tendance, les demandeurs d’emploi « passifs » seraient donc davantage à prendre en compte en termes de pilotage de la main-d’œuvre disponible que comme public à cibler pour les services publics de l’emploi.

    Aujourd’hui, l’inscription comme demandeur d’emploi est ouverte à tous. Ajouter arbitrairement des catégories supplémentaires à la demande d’emploi pourrait avoir un double effet négatif : celui de gonfler artificiellement le taux de demande d’emploi et celui d’augmenter la charge de travail des conseillers en accompagnement individualisé alors que ces publics ont besoin d’autres services avant de pouvoir s’insérer sur le marché du travail.



    (1) Pour rappel, on entend par
    Taux d’activité : le rapport entre la population active (occupée et inoccupée) et la population en âge de travailler. Ce taux traduit l’importance des personnes qui se présentent effectivement sur le marché de l’emploi.
    Taux d’emploi : le rapport entre le nombre de personnes qui ont un travail salarié ou indépendant (population occupée) et la population en âge de travailler. Ce taux indique la participation effective d’une population au travail.
    Taux de chômage : le rapport entre le nombre de personnes qui sont sans emploi (et à la recherche d’un emploi) et la population active totale. Il représente le degré de déséquilibre entre la demande et l’offre de travail.
    (2) Le BIT définit les « chômeurs » comme les personnes de 15 ans et plus, sans travail, disponibles pour travailler et à la recherche d’un emploi.
    (3) Exemples :
    Le modèle HERMREG qui intègre notamment les travailleurs prépensionnés
    L’IWEPS qui souhaite que la réserve de main-d’œuvre en Wallonie intègre, entre autres, les actifs occupés à temps partiel
    D’aucuns aimeraient aussi prendre en compte l’ensemble des demandeurs d’allocations (allocataires sociaux, chômeurs complets indemnisés, invalides, INAMI, etc)