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La politique wallonne en matière d'agro-carburants

  • Session : 2011-2012
  • Année : 2012
  • N° : 356 (2011-2012) 1

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  • Question écrite du 10/02/2012
    • de TROTTA Graziana
    • à NOLLET Jean-Marc, Ministre du Développement durable et de la Fonction publique

    La Déclaration de politique régionale prévoit que le gouvernement « investigue sur les critères de durabilité des agro-carburants », « contribue au développement des biocarburants de deuxième génération tout en imposant dès à présent pour les nouvelles unités de production les critères de durabilité prévus par la directive européenne sur les énergies renouvelables », et investisse « dans la Recherche & Développement des biocarburants de deuxième et troisième génération ».

    La Directive européenne 2009/28/CE du 23 avril 2009 relative à la promotion de l'utilisation de l'énergie produite à partir de sources renouvelables vise à atteindre, d'ici 2020, une part de 20% d'énergie renouvelable dans la consommation finale d'énergie de l'UE et une part de 10% de ce type d'énergie dans la consommation de chaque État membre dans le secteur des transports.

    Beaucoup ont considéré au début les agro-carburants comme étant une opportunité importante de diminuer la dépendance au pétrole, de réduire les émissions de CO2 et représentant un débouché pour l'agriculture. Mais aujourd'hui, de nombreuses voix s'élèvent pour critiquer, non sans arguments et études, ce type de carburant.

    Une étude réalisée en 2010 par le CETRI et commandée par la DG Environnement du SPF "Santé, Sécurité de la chaîne alimentaire et Environnement" indique qu' « à ce jour, l'expansion des agrocarburants a eu des impacts essentiellement négatifs ». Elle pointe les effets directs et indirects suivants : accaparement des terres au détriment des cultures vivrières (surtout dans les pays en développement), conflits fonciers, volatilité des prix agricoles, déforestation, perte de biodiversité, épuisement de nappes phréatiques, pollution des sols, des eaux et de l'atmosphère, violations graves des droits humains élémentaires, développement et exploitation d'une main d’œuvre sous-payée en substitution de la petite paysannerie indépendante. Aussi, de plus de plus d'indications remettent en cause le bilan carbone supposé neutre des agro-carburants.

    Considérant l'ensemble de ces inconvénients, plusieurs acteurs en Belgique (Inter-Environnement Wallonie, Bond Beter Leefmilieu, CNCD-11.11.11, Oxfam en Belgique, FIAN Belgique, Pesticides Action Network Belgium, CRIOC) appellent à « envisager clairement la remise en cause du soutien public aux biocarburants ».

    Par conséquent, Monsieur le Ministre peut-il m'apporter une réponse aux questions suivantes.

    Quelle est la production wallonne d'agro-carburants ? Combien d'hectares de terres y sont consacrés ? Quelle est la consommation d'agro-carburants en Wallonie ? Quelle est la part importée ?

    Comment les autorités wallonnes soutiennent-elles précisément le développement des agro-carburants ? Quelle est la politique en la matière ? Envisagent-elles de revoir cette politique et ce soutien ?

    Que fait le Gouvernement wallon pour remplir les engagements pris au travers de la Déclaration de politique régionale et mentionnés au début de ma question, en matière d'investigation sur les critères de durabilité des agro-carburants et de R&D des agro-carburants de deuxième et troisième génération ?
  • Réponse du 02/03/2012
    • de NOLLET Jean-Marc

    En préalable, je rappelle que le soutien aux biocarburants relève principalement de la compétence fédérale, notamment le pourcentage d’incorporation de biocarburants dans les pompes à essence et le régime de défiscalisation.

    L’objectif européen vise bien à atteindre une part de 10% de renouvelable dans la consommation totale liée au transport. Cet objectif sera sans doute majoritairement atteint par le biodiesel et le bioéthanol, toutefois d’autres moyens peuvent également être mobilisés comme le biogaz carburant ou les véhicules électriques. Cet objectif doit être réalisé d’ici à 2020 par tous les États membres. La manière dont l’apport des carburants à base de renouvelables sera considéré dans les objectifs des différentes entités fédérale et régionales doit encore faire l’objet de négociations dans le cadre du partage de l’effort du paquet énergie-climat.

    Je suis avec attention les études récentes abordant les problématiques environnementale et éthique des biocarburants. Certaines études réalisées peuvent interpeller, et j’attends à ce sujet que l’Europe réagisse de manière appropriée, notamment dans le cadre des évaluations prévues par la Directive 2009/28/CE relative aux énergies renouvelables.

    Concernant la situation des biocarburants aux niveaux belge et wallon, sept producteurs ont été sélectionnés par l’autorité fédérale en vue de bénéficier de la défiscalisation, à hauteur de quotas de 380 000 m³ de biodiesel et de 250 000 m³ de bioéthanol.

    Deux producteurs sont situés en Wallonie: Biowanze et Neochim, dont les capacités maximales de production s’élèvent à respectivement 300 millions de litres par an de bioéthanol et 200 000 tonnes de biodiesel. Relevons toutefois que Neochim fait face actuellement à de grandes difficultés financières. La superficie consacrée à la production de biocarburants en Wallonie s’élevait à 11 271 ha en 2010. Cela comprend les terres utilisées pour les grandes cultures telles que colza, betteraves, et froment, celles de taillis à courtes rotation (saules) et de miscanthus.

    Sous l’effet de la loi fédérale relative à l'obligation d'incorporation de biocarburant dans les carburants fossiles mis à la consommation datant du 22 juillet 2009, la consommation de biocarburants en Belgique a fortement progressé en 2009 et en 2010 pour dépasser 4% d’incorporation dans le volume total de carburants. En effet, en 2010, 388 millions de litres de biodiesel et 104 millions de litres de bioéthanol ont été incorporés aux carburants, représentant respectivement 4,54% et 5,98% des volumes de diesel et d’essence consommés en Belgique.

    A travers l’aide à la recherche, la Wallonie peut jouer un rôle dans le développement des biocarburants de deuxième et troisième génération. Lors des programmes mobilisateurs passés (FUTURENERGY en 2006), le projet LIGNOFUEL a été financé et vise au développement d’une filière intégrée pour la production de biocarburants de 2ème génération à partir de lignocelluloses. Ce projet arrive à son terme dans les prochains mois et aura permis de déterminer une filière complète optimisée pour la génération de bioéthanol de 2de génération. Un autre projet de recherche (BIOETHA – financé depuis 2007) vise à optimiser le procédé pour la production décentralisée de bioéthanol à partir de ressources agricoles, et ce de façon décentralisée, dans le but de produire simultanément bioéthanol, biogaz, électricité et chaleur à partir de leurs productions végétales, avec des bilans énergétiques et économiques favorables.