L'amélioration de la gestion durable de l'azote en agriculture
Session : 2011-2012
Année : 2012
N° : 638 (2011-2012) 1
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Question écrite du 26/03/2012
de TROTTA Graziana
à HENRY Philippe, Ministre de l'Environnement, de l'Aménagement du Territoire et de la Mobilité
L'azote, en tant qu'engrais chimique, a apporté beaucoup à l'agriculture. Mais son excessive utilisation n'est pas sans poser d'importants problèmes de pollution. Son coût pour l'environnement et la santé représente d'ailleurs plus du double des bénéfices pour l'agriculture européenne, selon la première évaluation européenne de l'azote.
Il est donc urgent d'agir. Y compris en Wallonie, où les quantités d'azote épandues restent largement supérieures (environ 40%) à la moyenne européenne et où les teneurs en nitrates sont en progression depuis plusieurs décennies dans les eaux de surfaces et souterraines des bassins versants où les activités agricoles sont fortement développées. Ce constat préoccupant, qui ne date pas d'hier, a été récemment rappelé dans un rapport de la Cour des comptes de septembre 2011.
En 2002, la Région wallonne a lancé le premier programme de gestion durable de l'azote en agriculture (le PGDA 1), suivi d'un second en 2007, afin de respecter la directive européenne du 12 décembre 1991 relative à la lutte contre la pollution des eaux par les nitrates d'origine agricole.
Mais cela demeure insuffisant et il convient de revoir la législation actuelle afin que celle-ci ait un impact réellement significatif en faveur de la qualité des eaux. Selon la Cour des comptes, « l'administration n'utilise pas tous les moyens à sa disposition pour favoriser un changement de comportement des agriculteurs dans la gestion de l'azote. En d'autres termes, pour certaines mesures, les possibilités de contrôle ne sont pas exploitées de manière efficiente et pour d'autres, les contrôles réalisés ne sont pas réellement efficaces, car tous les cas d'infraction ne sont pas sanctionnés ». Et d'expliquer par exemple qu'en matière de contrôle du taux de liaison au sol en matière d'épandage, « seulement la moitié des exploitations en infraction sont réellement sanctionnées par une réduction des aides octroyées et les agriculteurs ne demandant pas d'aides échappent actuellement à toute sanction, (...) ces dernières exploitations jouissent aujourd'hui d'une totale impunité, alors que les quantités d'azote qu'elles produisent sont importantes ».
Eu égard à ce qui précède, mes questions sont les suivantes.
Dans le cadre de la révision du PGDA, quelles sont les propositions de Monsieur le Ministre pour améliorer la gestion durable de l'azote en agriculture, concernant à la fois la prévention, l'utilisation, les contrôles et l'accompagnement des agriculteurs ? Quelles réponses compte-t-il apporter, en collaboration avec son collègue en charge de l'agriculture, aux remarques de la Cour des comptes ?
Quelles sont, en la matière, les recommandations de la Commission européenne, avec laquelle Monsieur le Ministre négocie dans le cadre de cette révision ?
En France, une récente étude du Commissariat général au développement durable a pointé du doigt le coût exorbitant (au moins 54 milliards d'euros pas an) du traitement de l'eau pour éliminer les excédents de rejets polluants agricoles (engrais azotés et pesticides), ce qui a une répercussion importante sur la facture des ménages. Monsieur le Ministre a-t-il une estimation de ce coût pour la Wallonie ? Quel serait ce coût si la pollution de l'azote était réduite de moitié ?
Réponse du 19/07/2012
de HENRY Philippe
Le rapport de la Cour des comptes relatif à la gestion de l’azote en agriculture a retenu toute mon attention. Il synthétise avec précision les faiblesses des programmes d’action en la matière, notamment pour ce qui concerne leur application et par conséquent leur efficacité.
A ce stade, en collaboration avec le ministre ayant en charge l’agriculture et en concertation avec les secteurs concernés par la mise en œuvre de la directive 91/676/CE, les actions suivantes sont menées : - La révision des zones vulnérables qui s’appuie sur les données issues des réseaux de surveillance de la qualité des masses d’eau de surface, des masses d’eau souterraine et qui visent prioritairement à conserver ou à restaurer qualitativement les eaux destinées à la consommation humaine, notamment dans le respect du paramètre « nitrate ». C’est dans ce contexte que l’ensemble du Pays de Herve, du Condroz et du Sud-Namurois font l’objet d’un projet de désignation en zone vulnérable et qui sera, dans les prochaines semaines, soumis à enquête publique. - Le nouveau programme d’action est en cours d’élaboration sur base de négociation avec la Commission européenne et les secteurs. Il devra être intégré par arrêté ministériel au Code de l’eau après études d’incidence et enquête publique. - Le développement d’un système de contrôle des transferts d’effluents d’élevage est aussi à l’ordre du jour sur base d’une étude comparative des systèmes en service dans les Etats et Régions voisins. - Le renforcement des contrôles effectifs du PGDA est en cours d’évaluation au sein des services de la DGO3 dont la tutelle est partagée par les Ministres Di Antonio et Henry.
Pour ce qui concerne les coûts précis pour le secteur de la distribution-production d’eau potable de la dépollution des ressources affectées par les pollutions diffuses liées aux nitrates et aux pesticides, je me permettrai de revenir, d’ici quelques mois, dans le cadre du schéma régional d’exploitation des ressources en eau en cours d’études sous l’égide de la SWDE et en collaboration avec tous les producteurs distributeurs. Ce schéma directeur abordera, au travers du diagnostic en cours et des solutions à dégager pour assurer la sécurisation quantitative et qualitative de l’approvisionnement en eau de la région et d’autres régions, les coûts liés à ce type de gestion.
A titre d’information, la valorisation des ressources en eau souterraine de la nappe de Hesbaye est confrontée à ce type de pollution et les solutions actuellement en cours d’implémentation concernent à la fois la construction d’une unité de dénitrification des eaux destinées à la consommation humaine et la construction d’une unité de dilution entre les eaux provenant de la Hesbaye et les eaux de surface provenant des barrages de la Gileppe et de la Vesdre. Ces investissements sont de l’ordre de 30 millions d’euros.