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Greenpeace et la biomasse forestière

  • Session : 2011-2012
  • Année : 2012
  • N° : 583 (2011-2012) 1

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  • Question écrite du 05/06/2012
    • de STOFFELS Edmund
    • à NOLLET Jean-Marc, Ministre du Développement durable et de la Fonction publique

    « Canada - La biomasse forestière polluerait plus que le charbon, selon Greenpeace » (Source novembre 2011 - La Libre Belgique)

    Greenpeace va jusqu’à dire que la valorisation énergétique du bois de forêt serait « plus polluante et nuisible pour l'environnement que l'utilisation d'essence ou de charbon ».

    En fait, les centrales électriques nord-américaines fonctionnant à la biomasse « émettent jusqu'à 150% de plus de CO2. 400% de plus de monoxyde de carbone irritant pour les poumons et 200% de plus de particules fines qui causent l'asthme", affirme l'ONG.

    Si c’est vrai, il faut absolument en tenir compte dans le cadre de notre politique énergétique, notamment en ce qui concerne la cogénération. « Greenpeace demande un moratoire sur les nouveaux projets bioénergétiques et la révision des projets existants ». (La Libre)

    Puis-je demander à Monsieur le Ministre de nous faire connaître son analyse sur cette question ? Partage-t-il les propos de Greenpeace ? Les unités de cogénération wallonnes émettent -elles de la même façon que leurs homologues nord-américaines ? Quels sont les enseignements que Monsieur le Ministre en tire ? Faut-il réajuster notre politique énergétique (notamment celle liée à la cogénération) ? Faut-il être plus exigeant en ce qui concerne l’emploi des technologies visant à prévenir ou à réduire les émissions ? Faut-il suivre le moratoire proposé par Greenpeace ?
  • Réponse du 25/06/2012
    • de NOLLET Jean-Marc

    J’ai déjà pu donner des éléments de réponse à l’honorable membre à l’occasion de la question n°308 portant sur le même sujet. A l’instar de l’honorable membre, j’ai pris connaissance avec intérêt de l’étude de Greenpeace. Celle-ci traite de l’exploitation grandissante des forêts canadiennes à des fins de production de biomasse-énergie, notamment dans le cadre de projets en Europe.

    L’analyse menée par Greenpeace Canada est assez interpellante et mérite que l’on y consacre toute l’attention requise. Le rapport s’adresse en priorité aux autorités canadiennes qui sont les premiers responsables de la politique et des balises liées à l’exploitation de la biomasse forestière. Toutefois, en tant qu’utilisateurs actuels ou potentiels de cette ressource, les pays européens tels que la Belgique doivent être vigilants.

    Certains constats qui apparaissent dans le rapport de Greenpeace Canada, notamment concernant le bilan CO2 de l’exploitation forestière qui y est menée, sont étonnants. Ceux-ci ne semblent pas en phase avec le rapport spécifique du GIEC sur les énergies renouvelables. La CWaPE utilise également une méthodologie précise pour le calcul des coefficients d’émission de CO2 des filières de production d’électricité verte à partir de biomasse. D’après cette méthode, on n’aboutit pas aux chiffres élevés cités dans le rapport de Greenpeace Canada.

    La situation énergétique au Canada n’est par ailleurs pas comparable à celle de l’Europe et de la Wallonie en particulier. Au Canada, beaucoup de centrales à biomasse sont d’anciennes centrales à charbon reconverties. Celles-ci ont des rendements de l’ordre de 25% électrique, la chaleur produite étant perdue ainsi que les fumées et cendres. Ces centrales n’exploitent pas en cogénération la chaleur coproduite, comme c’est le cas dans la plupart des installations en Wallonie.

    En outre, l’exploitation forestière en Europe est fort différente de celle menée en Amérique, puisque la majorité de nos forêts sont certifiées PEFC ou FSC.

    Pour prévenir tout impact néfaste sur l’environnement de l’utilisation de biomasse à des fins énergétiques en Europe, deux systèmes sont mis en place en parallèle de façon globale : les filtres des fumées en sortie de cheminées de centrales électrique à combustion, et la mise en place de critères de durabilité pour la biomasse solide et gazeuse. Le premier système a pour but de nettoyer les fumées en sortie de centrale afin de limiter les nuisances environnementales, le second d’éviter d’importer de la biomasse non durable d’autres pays, afin qu’on puisse réellement parler d’énergies renouvelables.

    En synthèse, il n’est pas nécessaire de revoir notre politique énergétique, en particulier celle qui est liée à la cogénération, vu les garde-fous déjà en place en Wallonie sur l’utilisation durable de la biomasse. Concernant l’octroi de certificats verts pour des installations de biomasse importée, la CWaPE utilise une méthodologie stricte basée notamment sur des rapports d’auditeurs indépendants qui effectuent des missions dans les pays où la ressource est puisée, comme au Canada. Cette méthodologie est portée en exemple notamment au niveau de l’action concertée européenne. Des améliorations étant toujours possibles, la CWaPE est attentive à toute évolution émanant de documents officiels (notamment ceux du GIEC) sur la prise en compte de la neutralité carbone de la combustion de biomasse.

    Avec mes collègues Philippe Henry et Carlo Di Antonio, et en tant que Ministre du Développement durable, je suis très attaché à ce que les politiques menées en matière de soutien aux sources d’énergie renouvelable puissent se faire en parfaite cohérence avec les objectifs en matière de gaz à effet de serre, de qualité de l’air et de biodiversité. Les travaux de la cellule biomasse ont d’ailleurs débuté en mai afin de rédiger un rapport sur les différents aspects de l’utilisation énergétique de la biomasse, et ce en vue d’aboutir  à une stratégie ‘biomasse durable’. Un groupe de travail se penche en particulier sur la question des critères de durabilité, et je serai attentif aux résultats qui pourront en ressortir.