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Le non respect des conditions d'enfouissement des plaques d'amiante-ciment dans le CET du Champ de Beaumont à Monceau-sur-Sambre

  • Session : 2011-2012
  • Année : 2012
  • N° : 884 (2011-2012) 1

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  • Question écrite du 09/07/2012
    • de DESGAIN Xavier
    • à HENRY Philippe, Ministre de l'Environnement, de l'Aménagement du Territoire et de la Mobilité

    Suite à ma question orale du mois de janvier dernier concernant le CET du Champ de Beaumont à Monceau-sur-Sambre et la publication de photos réalisées par les riverains qui attestaient que les conditions d’enfouissement des plaques d’amiante ciment fixées dans le permis d’environnement ne sont pas respectées, je souhaite connaître les démarches qui ont été menées par Monsieur le Ministre lui-même et son administration afin de remédier à la situation et de garantir un environnement sain pour les riverains.

    En effet, ces photos montraient des nuages de poussières au dessus de la zone où est déposée l’amiante. Elles montraient aussi certains grands sacs contenant de l’amiante déchirés ou éventrés, ainsi qu’un bulldozer poussant ces sacs ou roulant sur ces grands sacs en les écrasant. Or, les conditions d’exploiter sont très claires à ce propos puisqu’elles imposent le respect de l’intégrité de ces sacs contenant les plaques d’amiante et la couverture quotidienne de ces sacs par de la terre.

    L’objectif de ces conditions d’exploiter particulières est, d’une part, d’éviter de casser ces plaques d’amiante et de répandre dans l’air des fibres d’amiante libre et, d’autre part, de permettre ensuite de nouvelles couches de dépôts de plaques d’amiante ciment sans dégrader celles se trouvant en dessous. Ce sont des conditions minimales essentielles pour préserver la santé des travailleurs et des riverains. Manifestement, ces conditions n’ont pas été respectées par l’exploitant. De nouvelles photos du mois de mai, toujours réalisées par les riverains, montrent que ces pratiques sont toujours d’actualité, ce qui est particulièrement préoccupant.

    Les riverains ont par ailleurs observé que des dépôts recouverts de terre sont à nouveau manipulés ultérieurement sans raison particulière. Il en résulte aussi un risque de remettre dans l’air des poussières d’amiante. Une telle manipulation ne semble pas permise par les conditions d’exploiter et paraît par ailleurs difficilement justifiable.

    Les autorités communales ainsi que la police de l’environnement ont à l’époque été informées de la situation et ont reçu copie des photos réalisées par les riverains. D’après mes informations, certaines investigations ont été diligentées, mais l’autorité compétente communale n’a pas pris de mesures particulières à l’égard de l’exploitant sur base du décret relatif au permis d’environnement et la mise en CET de plaques d’amiante-ciment continue.

    Monsieur le Ministre peut-il me faire savoir quand les services de la protection de l’environnement ont été interpellés à ce sujet et me confirmer que des démarches ont été menées par l’administration ? Peut-il me préciser ces démarches et m’exposer les résultats de celles-ci ? Confirme-t-il que le non respect des conditions d’exploitation a été constaté ? Si oui, dans quelles conditions ? Quelles seraient les conséquences de ce non respect des conditions du permis ? Des dispositions ont-elles été prises afin de remédier à cette situation et de faire respecter les conditions du permis ? Des recommandations sur des pratiques plus sûres ont-elles été faites ? A ce propos, la Région est-elle, dans ce dossier, l’autorité compétente en première instance pour prendre des dispositions en cas de non respect des conditions du permis ?

    Complémentairement, et comme je le demandais dans ma dernière question orale, des mesures de l’amiante dans le voisinage du CET ont-elles été réalisées et, si oui, a quels endroits et avec quels résultats ?

    Quelle a par ailleurs été la réaction des autorités communales ? Ont-elles réagi dans des délais corrects ? L’autorité compétente n’a-t-elle pas la responsabilité et n’est-elle pas depuis plusieurs mois dans les conditions d’utiliser l’article 72 du décret relatif au permis d’environnement, qui permet de faire suspendre l’exploitation tant que les conditions d’exploiter ne sont pas respectées, et ce, afin de limiter au maximum les risques liés à cette pollution par l’amiante et d’utiliser cette disposition pour faire pression sur l’exploitant afin qu’il respecte les conditions fixées ?

    Pour rappel, cet article précise que : « Afin d'éviter, de réduire les dangers, nuisances ou inconvénients visés à l'article 2 ou d'y remédier, lorsqu'une infraction au présent décret ou à ses arrêtés d'exécution a été constatée, l'autorité compétente en première instance pour délivrer le permis d'environnement peut suspendre ou retirer celui-ci, notamment si :
    1° les conditions générales, sectorielles ou particulières applicables à son établissement ne sont pas respectées;
    2° les obligations énumérées à l'article 58, § 2, ne sont pas rencontrées. ».

    La ville a-t-elle par ailleurs formellement sollicité l’aide et l’expertise de l’administration régionale ?

    Des mesures de contraintes sur base de l’article D.149 du Livre Ier du Code de l’environnement  ne peuvent-elles être prises par les autorité locales ? En effet, cet article permet au bourgmestre sur rapport de l’agent constatateur de prendre toute mesure utile pour faire cesser un danger pour l'environnement, en ce compris la santé humaine.

    Complémentairement, Monsieur le Ministre peut-il me faire savoir quels ont été les contrôles effectués sur ce site lors des 5 dernières années ? Des anomalies ont-elles été relevées lors de ces contrôles ? Si oui, quelles ont été les mesures prises pour y remédier ?

    Monsieur le Ministre peut-il également me faire connaître les quantités de plaques d’amiante ciment annuellement déversées dans ce CET durant les cinq dernières années ?
  • Réponse du 10/09/2012
    • de HENRY Philippe

    Mon cabinet et mes services sont particulièrement attentifs à ce dossier pour lequel ils ont eu la plus grande attention ces derniers mois. L'honorable membre sait également que ce dossier fait l’objet depuis janvier d’une instruction du parquet du procureur du Roi de Charleroi.

    Mes dernières initiatives dans ce dossier ont été multiples :
    - d’une part répondre à une interpellation de la Ville de Charleroi à ce sujet en leur rappelant qu’en vertu de l’article 72 du décret sur le permis d’environnement, le collège peut intervenir d’initiative et prendre des mesures pouvant aller jusqu’à la suspension ou le retrait de permis. La ville n’a pas répondu à ce courrier à ce moment  et à ma connaissance, n’a jamais précédemment sollicité l’aide et l’expertise de l’administration régionale pour l’aider à prendre des mesures additionnelles à celles qui relèvent des responsabilités de la région ;
    - d’autre part j’ai interpellé mon collègue Marcourt aux fins de le sensibiliser au fait que notre région via la SRIW Environnement est actionnaire du CETB de Monceau-sur-Sambre et qu’il est à ce titre, important de veiller à ce que l’exploitation se fasse dans le strict respect de la législation environnementale ;
    - J’ai enfin sollicité le parquet du Procureur du Roi de Charleroi afin de disposer d’informations sur l’avancement de la procédure. Les conclusions que m’a communiqué le procureur en suite d’une enquête menée tant avec le soutien de la police fédérale que des services de l’URP et sur base de leurs moyens propres dont une visite sur place le 18 juillet dernier sont les suivantes :
    * En ce qui concerne les émissions de poussières rapportée par les riverains et qui sont réelles, les analyses n’ont pas établi qu’il s’agissait d’amiante.
    * En ce qui concerne la manipulation des big bags contenant les plaques d’amiante des manquements ont effectivement été établis, en suite de quoi depuis début juillet des ordres stricts et du matériel neuf doivent permettre d’obvier aux manquements observés.

    L’enquête ne conclut donc pas à un risque pour l’environnement et des régularisations ont été effectuées par l’exploitant.

    Aux fins d'apporter une réponse complète, j'apporte les précisions de mes services sur le respect de chacune des diverses conditions prévues dans la législation auxquelles est soumis le CETB de Monceau.

    Les dispositions générales relatives aux déchets contenant de l’amiante sont les suivantes :
    a) les déchets de construction contenant de l'amiante, les déchets d'amiante et les déchets d'amiante appropriés peuvent être admis sans essai dans les CET de classe 2.1.a. ou 2.1.b., 5.2.1.a ou 5.2.1.b. ;
    * le CET de Monceau/Sambre comprend 10 secteurs ; les cellules des secteurs 1 à 4 sont des cellules du type 2.2 ; la cellule du secteur 5 est vide ; les cellules des secteurs 6 à 10, où les déchets contenant de l’amiante sont enfouis, sont des cellules du type 2.1.a.

    b) seuls sont admis les déchets contenant de l'amiante liée qui ne présentent d'autre caractère de danger que celui lié à la présence d'amiante ;
    * mes services n’ont pas connaissance de la mise en décharge de déchets contenant de l’amiante friable.

    c) afin d'éviter la dispersion des fibres, la zone de stockage est recouverte chaque jour et avant chaque opération de compactage par des matériaux appropriés et, si les déchets ne sont pas emballés, elle est régulièrement arrosée ;
    * c’est le cas à Monceau/Sambre, où les déchets contenant de l’amiante admis à l’enfouissement sont systématiquement emballés. En cas d’ouverture, de déchirure ou de rupture d’un sac, celui-ci est immédiatement recouvert.

    d) le CET ou la cellule est recouverte d'une couche finale afin d'éviter la dispersion des fibres ;
    * le déversement de déchets ne peut être considéré terminé sur aucun des secteurs du CET. L’exploitant pratique le recouvrement des zones du CET qui ne sont pas exploitées pendant un certain temps au moyen d’une couche de matériaux pouvant atteindre 1 mètre ; les secteurs 1 et 2, qui sont en inactivité depuis le plus longtemps, ont, de plus, été ensemencés.

    e) les cellules accueillant les déchets contenant de l'amiante sont suffisamment confinées ;
    * le confinement des cellules est inhérent à la conception du CET de Monceau/Sambre.

    f) le CET ou la cellule ne fait l'objet d'aucune opération susceptible d'entraîner une libération des fibres (par exemple par le perçage des trous ou l'écrasement des déchets éliminés) ;
    * l’exploitant ne procède à aucune action mécanique volontaire susceptible de provoquer l’émission de fibres ou/et de poussières amiante bien que des éléments d’observation plaident en faveur du déchirement de sacs au cours du passage des engins de chantier ou/et du déplacement de masses de déchets.

    g) après la fermeture du CET ou de la cellule, un plan indiquant les lieux d'enfouissement des déchets contenant de l'amiante est transmis par l'exploitant à l'autorité compétente ;
    * aucune cellule n’est, actuellement, définitivement fermée.


    Des exigences particulières ont été apportées dans le permis spécifique du CETB de Monceau :

    h) Les déchets sont entreposés dans des casiers distincts situés dans une cellule de CET de type B ;
    * les déchets sont effectivement entreposés dans des cellules de type B. Chaque cellule du CET comprend plusieurs « casiers » qui ne sont pas confinés l’un par rapport à l’autre. Il s’agit d’espaces correspondant à des zones d’exploitation successives.

    i) Les déchets sont confinés dans des sacs à double paroi ; la paroi intérieure étant en polyéthylène transparent et la paroi extérieure en polypropylène tressé ; cette dernière est pourvue d’un système de fermeture intégré. L’intégrité de ces sacs doit être totale à tout moment de l’exploitation. Au besoin, ils sont recouverts régulièrement par des matériaux fins, mais non pulvérulents afin de conjurer tout risque de détérioration en cours d’exploitation ;
    * les déchets arrivent confinés dans les sacs à double paroi en question, portant l’étiquetage conforme à l'annexe de l'arrêté royal du 23 octobre 2001 limitant la mise sur le marché et l'emploi de certaines substances et préparations dangereuses (amiante).
    L’intégrité des sacs n’est cependant pas toujours totale à tout moment de l’exploitation.
    L’exploitant a dès lors pris l’initiative de tenir, depuis le 12 janvier 2012, une comptabilité de l’intégrité des sacs de déchets. Cela a permis de constater à la fois des défauts d’intégrité des sacs dès leur arrivée et des déchirures qui apparaissaient lors du déchargement du véhicule qui les transportait sur la zone de travail. Une corrélation est apparue entre la fréquence des surcharges et celle des déchirures survenant lors du déchargement des sacs des véhicules qui les transportent sur la zone de travail. Il faut savoir que l’exploitant a imposé aux collecteurs/transporteurs et, par là même, aux producteurs des déchets, deux limites de poids en fonction de la capacité des sacs : les petits sacs sont limités à 1 250 kg, les grands à 10 000 kg. Sur la période précitée, l’exploitant a refusé à deux reprises l’accès au CET à des chargements qu’il estimait trop lourds. Lorsqu’une déchirure est constatée, le sac est immédiatement recouvert de matériaux par des matériaux non pulvérulents visant à conjurer tout risque de détérioration en cours d’exploitation. Il s’agit, depuis 2010, dans l’ordre croissant d’utilisation, de sable de verre provenant de MINERALE, de « minéraux » provenant de COMET TRAITEMENTS et de boues provenant de SEDISOL. Ces matériaux sont des déchets non biodégradables compatibles avec les déchets contenant de l’amiante. Ils ne peuvent s’envoler sous l’effet du vent ni porter atteinte à l’intégrité des sacs. Jusqu’en 2009, les déchets contenant de l’amiante ont été recouverts par d’autres déchets non biodégradables, essentiellement terreux.

    j) Les casiers ne doivent faire l’objet d’aucune opération susceptible d’entraîner une libération des fibres – par exemple par le perçage de trous – ;
    * à notre connaissance, l’exploitant ne procède à aucune action mécanique volontaire susceptible de provoquer l’émission de fibres ou/et de poussières d’amiante ;

    k) Après la fermeture d’un casier, l’emplacement précis des déchets d’amiante ciment est repris sur le plan d’exploitation ;
    * aucune cellule n’est, actuellement, définitivement fermée ;

    l) Le positionnement de ces casiers doit être tel que les déchets qu’ils contiennent soient, au terme de la remise en état, enfouis sous une épaisseur d’au moins deux mètres d’autres déchets ».
    * l’établissement n’est pas au terme de sa remise en état.


    En ce qui concerne les mesures relatives à la dispersion des fibres l’exploitant a communiqué à mes services les résultats de trois campagnes de prélèvements d’air et de lixiviat réalisées en 2012, ayant pour but de détecter la présence de fibres d’amiante et qui se sont avérées négatives.

    L’ensemble de ces éléments ont pu être établis en suite de 6 visites de mes services depuis le début de l’année ainsi que des visites de la police judiciaire dans le cadre de l’action du procureur. Ces visites ont conduit à des PV dressés tant par mes services que ceux de la police judiciaire.

    En résumé et suite à toutes les démarches menées tant par mes services que ceux du procureur, on peut conclure que l’exploitant et son sous-traitant ont pris des mesures visant à réduire la fréquence des incidents, comme la fixation de limites de poids, la mise en œuvre de la « pelle à tarte », la réduction de la hauteur de chute. En particulier, le sous-traitant s’est engagé à augmenter l’épaisseur des couches de matériaux intermédiaires sur lesquelles crapahutent les engins et à ne pas modifier la configuration des lieux une fois les déchets enfouis.
    Les sacs déchirés sont immédiatement recouverts, alors que rien ne l’impose.

    Il y a donc lieu de se montrer rassurant sur ce dossier quant aux risques pour la santé et l’environnement. Il n’en demeure pas moins que mes services resteront attentifs au respect des conditions auxquelles l’exploitant s’est engagé et qu’ils poursuivront leurs missions de surveillance et de contrôle, qui auront pour but de s’assurer que les transporteurs apportant les sacs d’amiante sont agréés, que l’exploitant vérifie la conformité des déchets et prend les mesures visant à réduire autant que faire se peut le risque de déchirure des sacs. En cas de non-respect de ces mesures de manière volontaire par les sous-traitants, l’exploitant peut refuser les sacs mal emballés ou trop chargés. Si la situation perdure, la commune peut imposer cette mesure de manière réglementaire.

    En ce qui concerne les poussières bien qu’elles ne soient pas chargées en amiante je souhaite cependant que l’exploitant soit attentif à ce que celles-ci ne soient pas une source de nuisance pour les riverains.