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Le cadre de référence éolien et la prévention santé

  • Session : 2011-2012
  • Année : 2012
  • N° : 895 (2011-2012) 1

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  • Question écrite du 09/07/2012
    • de BARZIN Anne
    • à HENRY Philippe, Ministre de l'Environnement, de l'Aménagement du Territoire et de la Mobilité


    Le cadre de référence pour l’implantation d’éoliennes en Région wallonne date de 2002. Il comprend plusieurs orientations stratégiques pour les demandes de permis. Dans sa note de politique régionale, le Gouvernement wallon s’est engagé à actualiser ce cadre. Un nouveau projet a été présenté le 22 décembre 2011 au gouvernement.

    Le gouvernement souhaite encourager l’installation de 80 éoliennes par an. Le but est d’atteindre, en 2020, un parc total de 900 à 1000 éoliennes (contre 226 actuellement).

    Face à ces nouveaux objectifs, la question de l’impact sur la santé des riverains d’une présence croissante d’éoliennes devient d’autant plus essentielle.

    Aujourd’hui, on ignore encore quelles sont les conséquences sanitaires réelles.

    Certains ont évoqué le développement d’un « syndrome éolien » qui se manifesterait par des troubles du sommeil, des migraines, des acouphènes,...
     
    Le cadre de référence qui sera prochainement en application contient certaines options en matière de confort acoustique et de distance à l’habitat.

    Cependant, le choix des normes de bruit ne fait par exemple nullement référence à une étude médicale sur le sujet. Or, pour des raisons de santé, plusieurs scientifiques et institutions politiques ou sanitaires de pays étrangers préconisent un éloignement de plus de 500 mètres entre les éoliennes et les habitations.

    Le projet de cadre de référence ne prévoit pas une telle distance même si dans la pratique, l’étude d’incidences prévoit généralement le respect de ces 500 mètres.

    Par ailleurs, face cette volonté de multiplication d’éoliennes, dans un de ces récents avis, le CA de l’Union des villes et communes proposait de mettre en place un suivi médical des populations exposées par une autorité sanitaire et, sur base des résultats de l’étude, de prendre les mesures de protection qui s’imposent.

    Le cadre de référence ne constitue bien sûr qu’un guide et il appartient à l’étude d’incidences d’évaluer toutes les implications et de dégager les mesures pouvant réduire ou remédier aux effets négatifs qui découleraient du projet.

    Néanmoins, quelques questions méritent réflexion.

    Comment et sur base de quelles études, les options choisies en termes d’impact sur la santé (bruit et distances) ont-elles été définies dans le nouveau cadre de référence?

    Pourquoi le nouveau cadre de référence éolien ne retient-il pas une distance de 500 mètres entre les éoliennes et les habitations comme cela est recommandé par plusieurs organismes et appliqué dans la pratique?

    Au vu des objectifs d’agrandissement du parc éolien wallon, Monsieur le Ministre n’estime-t-il pas qu’il serait plus prudent de prévoir une distance plus importante entre les habitations et les éoliennes ?

    Que pense Monsieur le Ministre de la proposition de l’UVCW ?

    Monsieur le Ministre a-t-il connaissance de nouvelles études qui auraient permis d’en savoir davantage sur le « syndrome éolien » ?
  • Réponse du 14/08/2012
    • de HENRY Philippe

    Syndrome éolien

    Tout d’abord il faut savoir que le « syndrome éolien » n'est pas reconnu comme un terme scientifique ou médical car il n'est basé que sur des observations, et non pas sur des expériences scientifiques.

    Ce terme est apparu pour la première fois dans le rapport du Docteur Nina Pierpont (Canada) de 2009. Son étude portait sur des personnes symptomatiques vivant près de grandes éoliennes. Elle y a identifié un groupe de symptômes tels que troubles du sommeil, maux de tête, vertiges, nausées, etc.

    Cette étude fut dénigrée par de nombreux scientifiques qui lui reprochèrent sa méthodologie. En effet le docteur Pierpont a utilisé une série de cas en tant que protocole de recherche, c’est-à-dire qu’elle a fait un compte-rendu descriptif d’un série d’individus présentant le même problème médical, sans utiliser de groupe de témoins pour comparaison. Son étude ne fut d’ailleurs pas publiée dans une revue scientifique renommée, gage d’un travail reconnu.

    Toutes les personnes vivant près d’éoliennes ne développent évidemment pas ces symptômes et, par ailleurs, des personnes habitant dans des zones totalement libres de toute éolienne peuvent présenter lesdits symptômes.

    Par ailleurs, le dérangement occasionné par un bruit dépend de différents facteurs: le niveau d’intensité ; la fréquence ; le niveau de bruit de l’environnement ; la configuration du terrain entre l’émetteur et le récepteur ; la nature du récepteur, etc.

    Du fait de la variabilité dans la tolérance au bruit d’une personne à l’autre, il est très compliqué de quantifier les effets du bruit ainsi que de le corréler à des réactions d’agacement et d’insatisfaction.

    Actuellement, aucune étude n'a permis de démontrer que les éoliennes étaient responsables de l'apparition de ces symptômes.



    Les normes en matière de bruit et de distance

    Le projet de cadre de référence éolien prévoit que « la distance à l’habitat s’élève à minimum 3 fois la hauteur totale des éoliennes. De plus, la norme de bruit à l’immission est de 45 dBA à l’extérieur des habitations ». Il y a donc à la fois des normes de bruit et des normes de distance à respecter. Les deux notions sont évidemment liées.

    Etant donné la multiplicité des facteurs ayant un impact sur la dispersion du bruit (force et direction du vent, composition du sol, topographie, bruit ambiant, effet cumulatif, etc.), l’application linéaire d’une distance-type en fonction de ces critères est difficile à mettre en œuvre.

    Le SPW a confié au bureau agréé ICA une étude destinée à finaliser une norme acoustique complète pour les éoliennes. L’étude est en voie de finalisation. Des orientations ont cependant déjà été dégagées, par exemple le choix d’une norme de nuit de 45 dBA. C’est la norme qui a été choisie pour le projet de cadre.

    L’éloignement par rapport à l’habitat se justifie non seulement en respect de la norme de bruit, mais également au regard de l’impact de l’éolienne dans le champ de vue des habitants. L’importance visuelle - la prégnance - des éoliennes est fonction de la taille des éoliennes et de la distance, mais elle n’est pas proportionnelle à la distance : elle décroît très vite et est liée à l’angle de vue.

    La règle qui impose la distance minimale doit donc la fixer au regard de la hauteur de l’éolienne, et non pas de manière fixe et intangible, comme cela fut le cas par le passé (ou comme le préconise les scientifiques et autorités sanitaires dont mention dans la question).

    Cette distance est donc appelée à être nuancée à la hausse en fonction des résultats de l’étude d’incidences et dans certains cas, la distance de 500 mètres sera donc atteinte et parfois même dépassée; c'est l'analyse au cas par cas qui résultera de l'instruction de la demande de permis qui en décidera.



    L’UVCW

    Je remercie l’Union des Villes et Communes de Wallonie pour son avis et ses propositions, dont celle de mettre en place un suivi médical des populations exposées aux éoliennes.

    Une première difficulté de réaliser un tel suivi médical pour les éoliennes réside dans le fait qu’il faudrait alors certainement le prévoir pour d’autres infrastructures, comme les routes, les voies ferrées, etc. ? En effet, pourquoi devrait-on réaliser une étude médicale pour les éoliennes et pas pour les autres infrastructures qui génèrent, elles aussi, du bruit? Aucune donnée objective ne justifie le besoin d’une étude pour les éoliennes plutôt qu’un autre type d’infrastructure. De plus, dans le contexte budgétaire actuel, il est impossible de mener de telles études pour toutes les infrastructures générant du bruit.

    Par ailleurs, ainsi que je l’ai précisé plus haut dans ma réponse, aucune étude ne démontre que les éoliennes emportent des risques sanitaires pour les riverains quand on respecte les normes que nous avons fixées.

    Enfin, les études d’incidence sur l’environnement sont là pour pallier aux potentielles insuffisances de ces normes.