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L’effet des nitrates

  • Session : 2011-2012
  • Année : 2012
  • N° : 903 (2011-2012) 1

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  • Question écrite du 11/07/2012
    • de DODRIMONT Philippe
    • à HENRY Philippe, Ministre de l'Environnement, de l'Aménagement du Territoire et de la Mobilité

    De manière croissante, des voix s’élèvent pour nuancer le dogme de la toxicité des nitrates sur l’environnement. En effet, le nitrate serait considéré par une partie de scientifiques comme ayant des effets bénéfiques pour l’homme et son environnement.

    Que pense Monsieur le Ministre de ces affirmations ?
  • Réponse du 18/09/2012
    • de HENRY Philippe

    En effet, la presse agricole spécialisée s’est faite l'écho des thèses de Mr Buson, Président de l'Institut Scientifique et Technique de l'Environnement en France. Ces thèses sont relayées par un certain nombre "d'azotosceptiques" qui remettent en cause les effets néfastes du nitrate sur la santé humaine et l’environnement.

    La norme des 50 mg NO3-/l actuellement en vigueur s'inspire de la valeur guide recommandée par l’Organisation Mondiale de la Santé en 1970. Depuis lors, cette valeur a été réévaluée par l'OMS et elle a été à nouveau confirmée en 2007 (1), sur une base consensuelle et en tenant compte des résultats des analyses de risque pour la santé humaine les plus récentes. Je tiens aussi à souligner que cette norme est plus sévère aux USA et au Canada qu'en Europe, les autorités de ces deux pays ayant jugé opportun de la fixer à 45 mg NO3-/l.

    Par ailleurs, les arguments avancés par les détracteurs de la directive "nitrate" ont déjà suscité de multiples réactions de fond, ainsi que le développement de nombreux contre-arguments de la part du monde scientifique et technique, tant en France qu'en Belgique. Je ne peux qu'inviter l'honorable membre à prendre connaissance des réactions que les responsables scientifiques du Centre agri-environnemental de Michamps ont fait paraître dans le Sillon Belge du 17 février dernier.

    Au niveau environnemental, je partage également l'avis des responsables du Centre de Michamps qui soulignent à juste titre le caractère beaucoup trop compartimenté de l'analyse de Mr Buson.

    A propos des effets du nitrate sur la santé humaine, on peut préciser que « si le rôle du nitrate comme élément essentiel du métabolisme humain n'est plus à démontrer, il y a malgré tout de plus en plus de preuves scientifiques qui mènent à la conclusion que le développement croissant du cancer du colon constitue l’un des plus important impact chronique sur la santé lié à la présence de nitrate dans les eaux de boisson à des concentrations supérieures à 25 mg/l ».

    A mon sens, la controverse actuelle qui gravite autour de cette norme ne doit pas devenir l’arbre qui cache la forêt, et moins encore un élément déclencheur qui, faute de garde-fou ou de signal d'alarme approprié, ouvre la porte à des pratiques et à des comportements irraisonnés, voire irresponsables, vis à vis de la qualité et de la durabilité de nos ressources naturelles. La présence de concentrations excessives et croissantes d'azote (quelle que soit sa forme) dans l'eau, l'air, les sols ou les écosystèmes wallons constitue sans nul doute un signal fort, qui doit tous nous faire réagir.

    Je terminerai en signalant que le coût total annuel des pollutions azotées en Europe (UE-27) varie actuellement entre 70 et 320 milliards d’euros, ce qui représente entre 150 et 750 euros/habitant, dont environ 75 % sont liés à des problèmes de santé et de pollution de l’air. Il faut savoir également que les diminutions des émissions d’azote dans l’air, dans l’eau ou dans les sols permettent non seulement une réduction des coûts environnementaux, mais peuvent aussi engendrer des économies substantielles pour différents secteurs d’activités et ce, à un niveau de production équivalent, voire supérieur. Les analyses coût/bénéfice (ACB) réalisées au niveau européen l’ont notamment démontré pour le secteur agricole.



    (1) La formulation exacte de la recommandation est la suivante : la somme de la concentration en nitrate (divisée par 50) et de la concentration en nitrite (divisée par 3) ne peut pas excéder 1.